Le Directeur du numérique pour l’éducation autorisé à partir chez Amazon, sous conditions
Le cas décolle
Le 07 mai 2018 à 09h58
3 min
Droit
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La commission de déontologie de la fonction publique a donné son feu vert au recrutement par Amazon du Directeur du numérique pour l’éducation, Mathieu Jeandron, qui occupera un poste d’architecte solutions cloud pour le géant américain. Il devra néanmoins s’abstenir de certains contacts en lien avec ses précédentes fonctions.
L’information était remontée jusqu’au Parlement, non sans provoquer quelques remous. « Ce débauchage nourrit l’inquiétude », avait ainsi lancé la sénatrice Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, lors des questions au gouvernement du 10 avril dernier. « Nous sommes nombreux au Sénat à nous préoccuper de la perméabilité de l’éducation nationale à l’influence des géants américains du numérique. »
Le ministre de l’Éducation nationale avait alors confirmé le départ de Mathieu Jeandron, en poste depuis 2015. Jean-Michel Blanquer s’était toutefois refusé à tout commentaire dans l’attente de l’examen du dossier de l’intéressé par la commission de déontologie de la fonction publique.
Hasard du calendrier : l’avis de l’institution a été remis le lendemain au Directeur du numérique pour l’éducation.
Les « réserves » de la commission de déontologie
La commission de déontologie nous a indiqué avoir rendu un « avis de compatibilité » assorti de plusieurs « réserves ». Mathieu Jeandron est ainsi autorisé à exercer chez Amazon, mais à condition « qu’il s’abstienne, au titre de son activité privée, de toute relation professionnelle » :
- Avec le service des technologies et des systèmes d’information du ministère de l’Éducation nationale jusqu’au 8 septembre 2018 inclus.
- Avec la direction du numérique au ministère de l’Éducation nationale jusqu’au 23 avril 2021 inclus.
- Avec « les personnes physiques ou morales dont il a eu à connaître les dossiers dans le cadre de ses fonctions administratives ».
Il a par ailleurs interdiction de « faire état des informations non-publiques dont il a pu avoir connaissance dans le cadre de ses fonctions administratives ».
Un poste « éloigné du monde de l’éducation » chez Amazon Web Services
« Suite à l’avis de la commission de déontologie, je me suis engagé à me conformer aux réserves exprimées, c’est-à-dire à m’abstenir pendant trois ans de relations professionnelles avec mes anciens collaborateurs et personnes physiques et morales dont j’ai eu à connaître les dossiers », confirme Mathieu Jeandron, sollicité par nos soins.
L’ancien DNE, dont le gouvernement avait acté le départ lors du Conseil des ministres du 27 avril, a pris ses nouvelles fonctions aujourd’hui même. Il exerce désormais en tant qu’architecte solution chez Amazon Web Services, à Clichy.
C’est un « poste technique », « éloigné du monde de l’éducation », assure Mathieu Jeandron. « Mon rôle sera, pour des clients du cloud d’AWS, de rechercher les meilleures combinaisons des services de cloud pour répondre précisément à leurs besoins de performance, sécurité, montée en charge,... »
Quant à son successeur à la Direction du numérique pour l’éducation, Jean-Marc Merriaux, il prend lui aussi ses nouvelles fonctions aujourd’hui, conformément au décret du 27 avril dernier.
Le Directeur du numérique pour l’éducation autorisé à partir chez Amazon, sous conditions
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Les « réserves » de la commission de déontologie
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Un poste « éloigné du monde de l’éducation » chez Amazon Web Services
Commentaires (32)
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Abonnez-vousLe 07/05/2018 à 11h40
Le 07/05/2018 à 11h43
Vu que ce Monsieur a pleinement participé au pacte ÉN/Microsoft, signé sans appel d’offre, au détriment des logiciels libres, et surtout en trahison complète des principes républicains et de l’indépendance de l’école, vous me pardonnerez de ne pas pleurer son départ.
Quant à parler de moralité au sommet de la pyramide, en élisant des banquiers et des traîtres dans les instances dirigeantes, vous me pardonnerez de dire que vous n’avez que ce que vous méritez.
De mon côté, j’observe que les vrais opposants politiques, et autres personnes intègres parfois intéressantes, n’ont même plus droit d’accéder aux grands médias dans ce pays - et on l’a encore vu ce 1er mai, avec 3500 manifestants UPR dans les rues de Paris, et 0 couverture médiatique. Tout est dit.
Comment osez-vous seulement aborder les questions de déontologie politique, quand tous les grands médias sont aux mains d’une poignée d’oligarque, et ne font plus leur boulot ?
Le 07/05/2018 à 11h44
Ah oui il faut se faire embaucher en sortant de l’école et garder le même employeur à vie , surtout ne jamais quitter sa boite pour aller dans une autre.
C’est bizarre qu’on veuille embaucher des gens, et les payer plus chers qu’ils ne le sont actuellement !
Et c’est bizarre de penser que si on nous offre plus c’est qu’on n’est pas payé assez cher pour ce qu’on vaut !
Le comble c’est de partir travailler en face pour plus cher !
J’ai du suivre des instincts bassement matériels dans ma vie professionelle!
Ptain de mercenaire que j’étais
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Le 07/05/2018 à 11h48
« éloigné du monde de l’éducation », […] « Mon rôle sera, pour des clients du cloud d’AWS, de rechercher les meilleures combinaisons des services de cloud pour répondre précisément à leurs besoins de performance, sécurité, montée en charge,… »
Je suis le seul à avoir extrapolé l’inverse : que dans l’éducation nationale on recherche les pires combinaisons possibles afin d’imposer nos besoins, promouvoir l’insécurité et faire crouler le système ?
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Le 07/05/2018 à 12h00
Le 07/05/2018 à 12h02
Oui j’ai bien compris : mais pourquoi un privé se ferrait embaucher au niveau de l’état s’il sait qu’après sa vie pro est terminé ?
Le 07/05/2018 à 12h05
à partir du moment où ces anciens élèves de grandes écoles publiques respectent leur engagement de servir l’État pendant 10 ans au moins, où est le problème d’aller travailler dans le secteur privé ensuite ?
Le 07/05/2018 à 12h06
Je disais cela car en lisant ton message “si en plus [l’Etat] ne peut plus recruter dans le privé…”, j’ai eu l’impression que tu disais qu’il venait du privé pour être embauché par l’Etat. Désolé si j’ai mal compris le message.
Le 07/05/2018 à 12h07
Le 07/05/2018 à 12h11
Oui en fait après avoir soumis mon commentaire, je me suis rendu compte que ça pouvait être interprété de la sorte " /> mais trop tard, l’expiration de l’édition m’a rappelé qu’il vaut mieux finir ses phrases avant de soumettre " />
Le 07/05/2018 à 12h11
Le 07/05/2018 à 12h15
Ok, je suis relativement d’accord avec ton point de vue mais :
Bref, oui il faut faire attention, mais faut pas exagérer non plus…
Le 07/05/2018 à 12h17
Le 07/05/2018 à 12h20
Ben le problème surtout en l’espèce c’est le mélange des genres et les conséquences désastreuses que ces pantouflages amènent. Mais je suis tout à fait d’accord avec le fait que l’on devrait supprimer l’ENA et Polytechnique qui ne remplissent plus leur rôle et nous coûtent fort cher.
Le 07/05/2018 à 12h21
Tout à fait !
Il aurait été recruté dans une autre entreprise qu’une qui cherche à vendre des tablettes au marché juteux qu’est l’Éducation nationale, ça aurait été moins gênant.
Le 07/05/2018 à 13h59
A mon avis, il est utile de favoriser la fluidité entre privé et public afin que le public puisse plus facilement piocher dans les compétences du privé (sans pour autant que les gens entrant dans le public soient condamnés à y rester pour toujours). Les personnes en situation d’avoir des conflits d’intérêt ne sont pas très nombreuses, et il doit être possible d’assez bien s’en protéger via un examen de leur décisions vs leur nouvel employeur.
A mon avis, le risque que quelques-uns passent entre les mailles du filet est bien moins grand que celui d’avoir une caste de technocrates fonctionnaires aux commandes, qui soient totalement ignorants du fonctionnement du monde réel - raison pour laquelle je te rejoins sur l’ENA et polytechnique (mais seulement pour les corps de fonctionnaires pour cette dernière, 3⁄4 des étudiants de cette école sont des ingénieurs ‘comme les autres’).
Dans le cas de ce monsieur, je ne sais pas quelle décision en faveur d’Amazon le fait soupçonner de conflit d’intérêt. En particulier, je ne comprends pas en quoi la note sur l’usage des GAFA en serait.
Pour l’avoir lue, je ne vois pas où est l’incitation (au contraire, il y a un certain nombre de réserves et conditions préalables qui y sont rappelées). Je la comprends comme une réponse à des questions de nature juridique lui ayant été posées sur la légalité et les conditions de cet usage.
Après, on peut militer pour que la loi protège mieux les données de nos élèves, mais on ne peut pas lui en vouloir à lui de répondre en fonction de la loi existante. S’il avait publié une note mentant sur la loi pour dissuader les gens de les utiliser, je pense que c’aurait été une faute.
Le 07/05/2018 à 10h43
émouvant toutes ces précautions… et pour son domicile fiscal quelqu’un lui a suggéré l’Irlande ?
Le 07/05/2018 à 11h01
La promiscuité entre les hauts fonctionnaires ou postes assimilés dans le public et le secteur privé n’est pas nouvelle, mais on a là l’illustration de l’hypocrisie des partisans de la transparence et de la softlaw:
. si vous demandez l’avis à la commission ad hoc vous pouvez passer outre le conflit d’intérêt manifeste,
. la garantie est que la commission vous demande de ne pas entrer en contact avec votre ancienne administration (et liens de l’époque).
Ca pourrait sembler une bonne chose, en réalité, l’interdiction fixée par la commission est particulièrement ridicule; pénalement si ce Monsieur dans ces nouvelles fonctions avait l’idée de rentrer en contact avec son ancienne administration les qualifications pénales susceptibles de s’appliquer sont nombreuses, ceci indifféremment de l’avis de la commission ad hoc.
En revanche, au nom de la transparence, on donne un semblant de normalité à une situation qui est particulièrement préoccupante… et non seulement ces pratiques ne sont pas remises en cause mais elles sont tout simplement légitimées !
Le 07/05/2018 à 11h33
Comment les électeurs nous reproche la corruption? On va donc la légalisé " />
Le 07/05/2018 à 11h34
C’est scandaleux.
Le 07/05/2018 à 11h36
Tiens les garants vertueux de la morale républicaine sont de sortie.
J’espère juste pour eux que jamais ils ne diront que nous vivons dans une pseudo dictature, eux qui s’arrogent le droit de définir où leurs concitoyens peuvent travailler (ou pas).
Car bien entendu, eux seuls sont des saints et tout autre personne est par définition un vendu à la solde ….. des multinationales / des terroristes / des lobbys / des chinois du FBI (barrer la mention inutile)
Le 07/05/2018 à 11h40
Des hauts fonctionnaires dont, de surcroit, la formation a été entièrement payée (et à fort coût) par les citoyens et au cours de laquelle ils ont même été rémunérés.
Ces gens-là n’ont plus aucune notion de ce qu’est “servir l’État”.
Le 07/05/2018 à 15h14
Ce qu’on peut lui reprocher c’est de n’avoir, tout simplement, pas exigé de Microsoft qu’il respecte ses engagements : la charte sur les données des élèves, on l’attend toujours… c’est pas rien.
Ensuite, la fluidité entre privé et public est plus que gênante quand ça conduit, ce qui est le cas à l’évidence aujourd’hui, à ce que les pantouflards qui passent leur temps à naviguer entre public et privé privilégient d’abord les grandes entreprises et se préoccupent peu du bien public. Il n’est pas prouvé, loin de là, que les services publics privatisés coûtent moins cher à la collectivité et sont de meilleure qualité. En fait, avec ces gens, on a un système parfait pour les grandes entreprises “mutualisation des pertes et privatisation des bénéfices” au détriment y compris des petites entreprises.
Enfin cette fluidité est d’autant plus néfaste que ça amène les gouvernements à ne pas comprendre qu’on ne gouverne pas un État comme on dirige une entreprise.
Le 07/05/2018 à 16h05
Le 07/05/2018 à 16h13
Le 07/05/2018 à 16h20
Dans le secteur privé, un cadre peut avoir, dans son contrat de travail, une clause de non-concurrence qui prévoit certaines interdictions dans le cas où celui-ci quitte son emploi pour occuper éventuellement un poste qui pourrait nuire aux intérêts de l’entreprise. Mais, là, on ne parle pas de conflit d’intérêts, mais plutôt de « protection des intérêts légitimes de l’entreprise ».
Le 07/05/2018 à 17h02
Procès d’intention.
Le 07/05/2018 à 20h09
@Patch
Non, c’est un exemple parmi d’autres. J’aurais aussi pu citer Barroso, ex-président de la CE, employé chez Goldman Sachs, qui s’est fait prendre la main dans le sac en train de faire du lobbying chez ses potes commissaires de Bruxelles, alors qu’il est partit avec un généreux parachute doré, et la promesse de se tenir à l’écart de ces pratiques.
Maintenant si vous préférez les os à ronger des petits pions qu’on vous jette à la figure, c’est votre choix. Tous ceux qui ont mis les pieds à Bruxelles savent parfaitement à quel point l’institution est gangrenée par la corruption de ses fonctionnaires.
Je rajouterais qu’avec ses boîtes aux lettres de type holding, le luxembourg détient le record absolu de la fraude légalisée par l’UE. Ce n’est pas un hasard si l’actuel président de la CE est un banquier luxembourgeois qui veille d’abord à ses intérêts.
Bref, si vous en êtes encore au stade foetal de cibler le petit qui part chez un GAFAM, vous vous trompez complètement de cible. Un peu comme ces braves syndicalistes qui visent Matignon, mais oublient de dire à leur base que la privatisation de la SNCF est dans les cartons de l’UE depuis des années.
La corruption arrive toujours quand les médias ne sont plus libres d’informer correctement les gens, ce qui a démarré dès 1992, s’est largement aggravé en 2007, et nous a mené à l’état totalitaire dans lequel nous sommes arrivés, où tous les grands médias sont contrôlés par une bande d’enfoirés.
Le 07/05/2018 à 21h13
Le 08/05/2018 à 09h52
@Patch
Le jour où vous aurez appris à argumenter, prévenez-nous. Ça nous changera de vos convictions.
Le 08/05/2018 à 10h05
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Le 08/05/2018 à 11h15