La proposition de loi Avia démagnétisée au Sénat
Amendements haineux
Le 12 décembre 2019 à 07h00
7 min
Droit
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La proposition de loi Avia a été, comme prévu, revue et corrigée par la commission des lois au Sénat. Christophe-André Frassa, rapporteur, a totalement fait refondre le texte pour tenir compte notamment des critiques incendiaires adressées par la Commission européenne. L’examen en séance est prévu le 17 décembre.
Adieu l’obligation de retrait en 24 heures voulue par la députée LREM. Adieu l’obligation de filtrage généralisée. Adieu les notifications (ou signalements) vagues qui auraient placé les plateformes dans une situation intenable. Le texte en sortie de commission des lois, présidée par Philippe Bas, n’a plus grand-chose à voir avec la proposition adoptée sans difficulté par la majorité LREM à l’Assemblée nationale.
Quelles sont les principales mesures adoptées ?
Dans la proposition de loi Avia, les hébergeurs ne retirant pas certains contenus haineux en moins de 24 heures risquaient jusqu’à 1,25 million d’euros (pour les personnes morales).
Christophe-André Frassa a fait disparaître cette infraction. Il a préféré toucher au socle de la loi sur la confiance dans l’économie numérique pour ajouter les injures publiques à caractère discriminatoire et le négationnisme au sein des « contenus devant faire l’objet d’un dispositif technique de notification spécifique mis en place par les hébergeurs ».
Lorsqu'un tel contenu sera supprimé, les hébergeurs comme YouTube, Twitter ou Facebook devront lui substituer « un message indiquant qu’il a été retiré ». Enfin, le texte prévoit que les contenus retirés pourront être conservés pendant une durée maximale d’un an « pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, à la seule fin de mettre ces informations à la disposition de l’autorité judiciaire. »
Retour du formalisme, suite aux critiques européennes
Laetitia Avia avait voulu également alléger considérablement le formalisme des « notifications », soit les mentions obligatoires lorsqu’un internaute signale un contenu manifestement illicite à un hébergeur. Comme elle nous l’indiquait, la députée LREM avait voulu « simplifier l’expérience utilisateur », « simplifier le « process ».
Elle avait ainsi fait sauter l’obligation de préciser la localisation exacte du contenu litigieux, laissant donc Twitter et les autres réseaux sociaux, se débrouiller pour le retrouver, le tout dans un délai de 24 heures. Le point avait été vertement épinglé par la Commission européenne.
Christophe-André Frassa a rétabli ce formalisme suite à l’adoption de cet amendement. Petite nuance importante : le sénateur oblige à nouveau les internautes à contacter d’abord l’éditeur pour ensuite se retourner devant les hébergeurs, sauf s’agissant des propos qualifiés de haineux.
Suppression du filtrage généralisé
L’article 2 prévoyait que les opérateurs de plateforme en ligne devaient supprimer la rediffusion des contenus déjà retirés, sauf à être lourdement sanctionnés. Techniquement, la mesure imposait la mise en place d’un filtrage généralisé de l’ensemble des flux passant entre leurs mains, sans limites de temps et à leurs frais.
Elle a été mise à l’index par la Commission européenne, et l’article, supprimé en commission des lois.
Des obligations extensibles à l'ensemble des opérateurs
Le texte amendé revoit également les relations entre CSA et plateformes en réécrivant les diverses obligations auxquelles ces dernières pourront être soumises.
Remarquons que les moteurs de recherche ont été évacués du spectre. Inversement, Christophe-André Frassa veut rendre possible l’extension de ces obligations à un acteur de taille plus modeste, inférieure à un seuil défini par décret, mais qui jouerait « un rôle significatif pour l’accès du public à certains biens, services ou informations en raison de l’importance de son activité et de la nature technique du service proposé. »
Parmi ces obligations, les plateformes, même de petite taille donc, devront mettre en place « un dispositif de notification uniforme directement accessible et facile d'utilisation permettant à toute personne de signaler un contenu illicite dans la langue d’utilisation du service ».
Elles devront encore mettre en œuvre « les procédures et les moyens humains et, le cas échéant, technologiques proportionnés permettant de garantir le traitement dans les meilleurs délais des notifications reçues et l’examen approprié des contenus notifiés, ainsi que de prévenir les risques de retrait injustifié ».
Un point non négligeable a été confirmé : les infractions à la LCEN passent de 75 000 à 250 000 euros comme dans la PPL Avia adoptée par les députés. Ce niveau concerne les personnes physiques, pour les personnes morales, le droit pénal prévoit que le montant est multiplié par cinq, soit 1,25 million d’euros. Un niveau rehaussé concernant aussi bien les hébergeurs que les FAI.
À l’article 4, la commission de la Culture a fait modifier plusieurs lignes, comme déjà exposé dans nos colonnes, s’agissant notamment des questions procédurales.
Empêcher la viralité des contenus haineux
Remarquons l’ajout de cet amendement avec lequel le CSA pourra encourager les opérateurs « à mettre en œuvre des dispositifs techniques proportionnés facilitant, dans l’attente du traitement de la notification d’un contenu illicite, la désactivation ou la limitation temporaire des fonctionnalités qui permettent de multiplier ou d'accélérer l’exposition du public à ce contenu, et notamment les possibilités de partage, d’interaction, ou d’envoi de messages liés à ce dernier. »
L’idée ? Casser la viralité des contenus haineux. L’amendement de Christophe-André Frassa propose par exemple que cette limitation soit notamment réservée aux « signaleurs de confiance », sans que cette qualité soit définie clairement.
Adoption de l'amendement interopérabilité
Celui sur l’interopérabilité a également été adopté. Le CSA pourra encourager les opérateurs « à mettre en œuvre des standards techniques communs d’interopérabilité entre services de communication au public en ligne, conformes à l’état de l’art, documentés et stables, afin de favoriser le libre choix des utilisateurs entre différentes plateformes. »
« Face à des grandes plateformes dont le modèle, fondé sur "l'économie de l'attention", explique le rapporteur, l’interopérabilité permettrait aux victimes de haine de se "réfugier" sur d’autres plateformes avec des politiques de modération différentes, tout en pouvant continuer à échanger avec les contacts qu’elles avaient noués jusqu’ici ».
Des mesures ont été taillées pour les annonceurs publicitaires. Le vendeur d'espaces devra leur communiquer « un compte rendu de la liste des domaines et des sous-domaines sur lesquels l’annonceur publicitaire a diffusé des publicités ». Une manière d’informer ces derniers des sites sur lesquels sont diffusés leurs publicités.
La PPL supprime également la compétence du juge unique et crée également un observatoire de la haine en ligne auprès du CSA. Enfin, la date d’entrée en vigueur de la loi, si elle est votée, est fixée au 1er juillet 2020. Laetitia Avia, qui n’a eu de cesse de souligner l’urgence de son texte, préférait la date du 1er janvier 2020.
Relevons pour finir que les amendements ambitieux du sénateur Grand ont été déclarés irrecevables. Il voulait en particulier interdire la captation de sons ou l’enregistrement d’images, transmises sans consentement, « de fonctionnaires de la police nationale, de militaires ou d'agents des douanes se trouvant dans l'espace public ».
La proposition de loi Avia démagnétisée au Sénat
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Quelles sont les principales mesures adoptées ?
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Retour du formalisme, suite aux critiques européennes
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Suppression du filtrage généralisé
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Des obligations extensibles à l'ensemble des opérateurs
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Empêcher la viralité des contenus haineux
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Adoption de l'amendement interopérabilité
Commentaires (24)
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Abonnez-vousLe 12/12/2019 à 11h48
Le 12/12/2019 à 13h11
rassures-toi….moi non plus ????
(informatique, ou bien, dans le sens ‘spirituel’) " />
Le 12/12/2019 à 16h27
Elle avait ainsi fait sauter l’obligation de préciser la localisation
exacte du contenu litigieux, laissant donc Twitter et les autres réseaux
sociaux, se débrouiller pour le retrouver, le tout dans un délai de 24
heures. Le point avait été vertement épinglé par la Commission
européenne.
“Cher Twitter, j’ai lu ch’ais plus où sur votre site un tweet pas très gentil, merci de le supprimer promptement, bisous” " />
J’imagine le même genre de signalement vaseux dans un poste de police… L’amateurisme de certains élus est à pleurer…
Le 12/12/2019 à 18h05
On a des nouvelles sur la question la plus importante ?
Le porno, ça en est où ? " />
Le 14/12/2019 à 09h02
Tu viens de déchaîner les bots avec ta question " />
Le 14/12/2019 à 09h42
enchanté ! " />
Le 15/12/2019 à 08h26
Y a carrément un élevage ! " />
Zut, cela s’était calmé il me semble. Auraient-ils trouvé une parade pour recréer des comptes ? " />
Le 15/12/2019 à 13h54
apparemment…..c’est ça !" />
Le 12/12/2019 à 07h39
Anéfé rejeté
Le 12/12/2019 à 08h28
Encore une régression des libertés d’expression. Il est plus facile de censurer les gens que de les éduquer c’est certain. Mais cela ne fera pas diminuer pour autant le niveau de violence dans la société. Une violence nourrie par les injustices, la corruption, les difficultés pour vivre de son travail, l’échec du vivre ensemble, le poids de la ponction du public et le laxisme de la justice. Difficile de demander à des français qui aiment de moins en moins leur pays de s’aimer les uns les autres !
Le 12/12/2019 à 09h14
Et de retour à l’assemblée, tout sera rétabli ?
Le 12/12/2019 à 09h16
Ils auraient du coller un lien rickrollé à la fin du nouveau texte " />
https://gph.is/2eaUOHC
Mais bon, elle va s’empresser de reprendre son texte débile et liberticide devant l’Assemblée.
Le 12/12/2019 à 09h32
Le 12/12/2019 à 09h35
Le 12/12/2019 à 09h49
Le 12/12/2019 à 10h07
Le 12/12/2019 à 10h12
Le 12/12/2019 à 10h20
Le 12/12/2019 à 10h27
La proposition de loi Avia démagnétisée c’avia’rdée au Sénat
" />
Le 12/12/2019 à 10h35
[parenthèse]
Les punitions sont nocives.
Pas spécialement le temps de vous ressortir toutes les études sur le sujet, creusez par vous même, mais une rapide recherche et une diagonalisation du résultat trouvé pour valider le propos me fait trouver ça :https://apprendreaeduquer.fr/inconvenients-punitions/
Les punitions sont contre productives à bien des égards.
Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas qu’il y ait de conséquences à un acte hors des clous (si tant est que ces clous aient été bien défini).
[/parenthèse]
Le 12/12/2019 à 10h58
Joli !
Par contre, je n’ai pas compris le “démagnétisée” du titre.
Le 12/12/2019 à 11h04
Le 12/12/2019 à 11h11
La PPL […] crée également un observatoire de la haine en ligne auprès du CSA.
Intéressant ça … Après, ça aurait été encore + intéressant de le mettre en place avant tout ça, et d’étudier les résultats pour orienter la PPL. Mais bon, c’est surement un détail …
Le 12/12/2019 à 11h36
En même temps il ne faut pas être dupe du fait que le sénat dans sa composition actuelle et un organe d’opposition au gouvernement et que Larcher se rêve un destin de recours de la droite pour le présidentielles…..