5G et risques sanitaires : la délicate question de la « stratégie de communication »
La 5G donne le coronavirus ?
Le 10 avril 2020 à 13h26
6 min
Société numérique
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Le lancement de la 5G est pour bientôt, ce n’est plus qu‘une question de mois. Mais de nombreuses informations, parfois fausses, circulent sur les risques sanitaires alors que l'on manque cruellement d’études scientifiques. Dans un contexte particulier de pandémie, le gouvernement et l’Arcep doivent trouver la bonne stratégie pour communiquer sur le sujet.
Ce matin, Sébastien Soriano (président de l’Arcep) et Patrick Chaize (sénateur de l’Ain et président de l’Avicca) répondaient aux questions de collectivités sur le déploiement des réseaux fixes et mobiles en France.
Il a évidemment été question du lancement de Ma connexion Internet, des améliorations pour Mon réseau mobile, du point d’étape sur le New Deal mobile au 4e trimestre et de la 5G. La procédure d’attribution n'a pas été évoquée, puisqu'elle est en cours. La première étape est déjà validée – les quatre opérateurs nationaux ayant empoché 50 MHz à prix fixe (350 millions d’euros) – et la seconde (pour les 110 MHz restants) a déjà été annoncée comme retardée.
Il était donc plutôt question des « aspects sanitaires de la 5G », « car il y a beaucoup de fausses informations qui circulent, particulièrement dans nos territoires ruraux », expliquait l'un des participants. « C’est un sujet difficile, il y a pas mal de choses qui se mélangent dans cette histoire », reconnaît Sébastien Soriano, avant d’entrer dans les détails.
Des inquiétudes « légitimes », mais aussi de fausses informations
Les craintes sur le déploiement des infrastructures, le président de l’Arcep les considèrent « comme tout à fait légitimes » : « on peut un petit peu avoir [le sentiment] en tant que citoyen que les grandes firmes font un petit peu ce qu’elles veulent et que le principe de précaution, parfois, on court un petit peu après ».
Il faut donc être prudent et attentif, ce que fait notamment l’Agence nationale des fréquences (ANFR). Elle vient d’ailleurs de mettre en ligne son observatoire de l’exposition des ondes au public pour 2019. Face aux « infox » faisant le lien « entre la 5G et le coronavirus » Sébastien Soriano ironise : « Manque de pot y’a pas la 5G aujourd’hui en France et j’ai comme l’impression qu’il y a quand même du coronavirus ».
Le gouvernement réfléchit à « une stratégie de communication »
La question des risques sanitaires et de la 5G « est bien dans le radar du gouvernement. Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre Bruno Le Maire, a fait une réunion de tous les intervenants sur ce dossier il y a quelques semaines, pour qu’on se mette effectivement à réfléchir à une stratégie de communication » précise-t-il.
La question est maintenant de savoir comment cette information va être diffusée : « ça va être très subtil. Si ce sont les pouvoirs publics traditionnels qui arrivent en mode "Grosse Bertha" de dire : "ne vous inquiétez pas, il n’y a pas de problème avec la 5G, dormez braves gens", ça aura l’effet exactement inverse que celui recherché ».
Le président de l’Arcep cite en exemple une « expérience assez douloureuse » qui reste encore aujourd’hui d’actualité : les craintes autour du compteur communicant Linky. Plusieurs études poussées ont pourtant étaient publiées à son sujet, notamment par Deus Ex Silicium et Canard PC Hardware. L’ANFR aussi y a été de son grain de sel en mesurant les niveaux d’exposions aux ondes de 178 lieux équipés de Linky, sans rien trouver à redire : les niveaux de champ crête sont « 25 fois et 37 fois inférieurs aux valeurs limites réglementaires ».
Bref, pour l’Arcep l’enjeu n’est pas seulement autour de la communication, mais aussi sur le « partage et [l]’appropriation » des informations, « pour donner des outils aux gens » afin qu’ils puissent comprendre de quoi il en retourne exactement. Le président du régulateur cite en l’exemple la maison de l’ANFR qui « vous permet de circuler entre différentes pièces d'une maison qui pourrait être la vôtre, et de constater l'émission réelle d'ondes de différents objets du quotidien ».
Des études déjà disponibles sur la 5G, mais l’ANSES manque de données
Pour rappel, l’Agence nationale des fréquences a déjà publié mi-2019 plusieurs études sur la 5G dans la bande des 3,5 GHz (qui n’existe pas pour les 2G, 3G et 4G) : « Trente-six sites ont déjà fait l’objet de mesures qui ont montré qu’avant allumage des sites 5G, il n’y avait pas d’émission dans cette bande de fréquence et qu’après allumage des sites 5G, en l’absence de trafic, le niveau moyen d’exposition dans la bande 5G s’établit à 0,06 V/m avec un niveau maximal de 0,36 V/m. Ces niveaux se situent très au-dessous de la valeur limite réglementaire qui est fixée à 61 V/m dans cette bande de fréquences ».
Il y a quelques jours, l’ANFR expliquait travailler sur les expérimentations de la 5G afin de « caractériser les réseaux 5G en termes d’exposition du public aux ondes électromagnétiques ». Dans tous les cas, il faudra attendre le déploiement et l’utilisation massifs de cette technologie pour avoir des chiffres plus significatifs.
Le principal problème pour le moment est l’absence en quantité suffisante d’études sur les effets des fréquences dans les bandes de 3,5 et 26 GHz, comme l’expliquait l’ANSES dans son rapport préliminaire sur les risques sanitaires liés à la 5G. Sa version finale est attendue pour le premier trimestre 2021, la 5G devant commencer à se déployer d’ici la fin de l’année.
5G et risques sanitaires : la délicate question de la « stratégie de communication »
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Des inquiétudes « légitimes », mais aussi de fausses informations
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Le gouvernement réfléchit à « une stratégie de communication »
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Des études déjà disponibles sur la 5G, mais l’ANSES manque de données
Commentaires (27)
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Abonnez-vousLe 11/04/2020 à 15h22
Un truc que je ne m’explique pas c’est que quand on a annoncé la 4G, je ne me souviens pas avoir entendu de gens comme maintenant sur la 5G. C’était la suite naturelle des générations précédentes, avec plein d’améliorations à différents niveaux.
Quelqu’un a une explication ?
Le 11/04/2020 à 16h15
Le 11/04/2020 à 17h16
Le 11/04/2020 à 17h59
AMHA la 5G correspond à une réelle évolution technologique et sociale, alors que la 4G (LTE advanced) n’est que l’aboutissement de ce que promettait déjà la 3G (des débits pour les données en mobilité renforcés, du THD). Donc, à part l’agrégation de fréquences et la voix sur réseau LTE (VoLTE, qui n’existe pas encore pour la plupart des utilisateurs…), la 4G n’apportent qu’un peu plus de confort dans les usages du quotidien du quidam.
J’en ai sûrement oublié, en tout cas, ça illustre un peu combien la 5G est une révolution technologique qui va immanquablement marquer le quotidien de chacun et dont la surenchère marketing (et pas seulement de la part des opérateurs, la 5G provoque des tensions un peu partout entre les États, provoque l’intérêt d’autres entreprises) ne cesse pas de vanter les soit-disant bénéfices. Alors même que :
Et pour me montrer encore plus dubitatif, je dirais que la 5G, c’est comme l’eau en bouteille, ça ne sert qu’à stocker encore plus de données et vendre plus de services. Alors qu’un réseau devrait se contenter d’acheminer des flux de données, comme l’eau du robinet. Sobre et efficace (et on supprimerait la surenchère de qualité 4K 8K etc du streaming vidéo, personne ne s’en plaindrait).
Le 11/04/2020 à 20h50
Des objets communicants partout (SafeCities, SmartCities, SmartBuilding… jusque dans les objets dans le salon, dans la cuisine, les assistants vocaux, les voitures, etc).
Les fourchettes n’ont pas besoin d’être « connectés », tout comme la cafetière, le mixeur, etc.
Au delà du solutionnisme technologique, il faudrait aussi se méfier de la surenchère technologique.
Le 11/04/2020 à 23h58
Exact. C’est comme la VR, la 3D, la ultra haute définition, la réalité augmentée, etc, qui sont présentées périodiquement comme bénéfiques pour le quidam, alors que le succès de leur commercialisation reste encore à prouver (en imaginant dans le même temps que ce soit réellement un bienfait social).
Le 12/04/2020 à 09h31
Le 13/04/2020 à 08h53
“Dans tous les cas, il faudra attendre le déploiement et l’utilisation
massifs de cette technologie pour avoir des chiffres plus significatifs.”
Sympa, le principe de précaution. En gros, la population devrait servir (une fois de plus, diront certains) de cobaye pour une expérience à grande échelle, sans avoir véritablement le choix, pour avoir des résultats que les industriels et les autorités daigneront (peut-être) prendre en compte " />
Le 13/04/2020 à 09h42
Le 14/04/2020 à 10h55
Peut-être tout simplement que pour la 4G les gens ont cru à la communication qui leur promettait une révolution, et qu’ils se feront pas avoir une deuxième fois ?
Ou peut-être parce qu’ils ne voient aucune intérêt à rechanger de technologie (qui est toujours payée par nous consommateurs au final, qu’on le veuille ou non, qu’on l’admette ou non) qui ne présente aucun bénéfice majeur pour eux, car la 4G suffit déjà largement à leurs besoins ?
Ou encore parce que ça les gave de voir qu’on parle déjà de repartir sur une nouvelle techno alors que les téléphones ne sont pas démocratisés (à la limite on s’en fout ça), et surtout que LA FIBRE ET LA 4G sont encore LOIN d’avoir atteint un niveau de couverture et de qualité suffisant même dans les cas d’usage où elles conviennent largement ?
Ou parce que ça les soûle d’avoir des objets qui récupèrent masse données, mais qu’on n’a pour l’instant aucune garantie sérieuse et sur leur gestion en bon père de famille et sur leur exploitation pour faire évoluer le modèle économique de manière équitable pour les clients ?
Perso, la 5G m’horripile pour toutes ces raisons, mais plus encore, et avant tout, pour les conséquences désastreuses pour l’environnement que ça va provoquer, directement (nouvelles technos -> nouvelles lignes de production, et peut-être plus de matériaux ou de nouveaux matériaux rares ? Aucune idée), et indirectement (explosion de l’internet des objets qui est aussi fumeux sur les bénéfices sociétaux supposés - mis à part quelques cas bien précis notamment dans la santé ou la sécurité militaire- que ravageur structurellement sur l’environnement).
Le 15/04/2020 à 07h08
Pour aller dans ton sens, il me semble qu’actuellement la voix passe par la 3G. Pour utiliser pleinement la 4G, il faut la VoLTE (Voice over LTE). Et je ne crois pas que cette technologie soit déployée partout les opérateurs et sur tous téléphone 4G. En plus la VoLTE permet d’améliorer le codec voix et donc la qualité sonore.
Avant de parler de la 5G, avons-nous exploité tout le potentiel de la 4G ??
Le 10/04/2020 à 13h42
> Sébastien Soriano ironise : « Manque de pot y’a pas la 5G aujourd’hui en France et j’ai comme l’impression qu’il y a quand même du coronavirus ». Ce n’est pas l’argument qui est donné. L’argument de base c’est que la 5G a causé une propagation du coronavirus aux USA et en Chine notamment, et que ça a ensuite été transmis d’humain à humain dans le reste du monde.
Ça reste débile comme argument mais il faut bien reprendre celui d’origine " />
Le 10/04/2020 à 14h25
Comme en ce qui concerne Linky, la 5G fait la même erreur de communication. Il faudrait arrêter de nous survendre les bienfaits d’un truc qui ne servira au final qu’aux grands opérateurs et aux grands fabricants d’équipements et de terminaux en tout genre.
Le 10/04/2020 à 14h39
Ça m’a fait tiquer aussi. AMHA ironiser sur la corrélation entre 5G et Coronavirus, c’est bien beau mais c’est pas ça qui va calmer les infox et les rumeurs.
Ce que n’a pas l’air de comprendre S.Soriano, c’est que la 5G est perçue comme néfaste et inutile pour les gens qui l’incriminent. Les corrélations invoquées avec le Coronavirus ou avec le cancer ou n’importe quel fléau naturel ou sanitaire n’ont aucune importance.
Ces corrélations douteuses ne sont que le symptôme d’une défiance qui, comme toute réaction émotionnelle, ne se combat certainement pas avec des faits, mais résulte d’une relation industriels/consommateurs abîmée. La confiance ne se gagne pas avec du réalisme, elle se gagne avec le coeur (au sens qu’on employait au Moyen-Âge), avec les tripes (comme on dirait aujourd’hui).
Le 10/04/2020 à 15h05
Le 10/04/2020 à 15h06
Le 10/04/2020 à 15h45
Justement, la question n’est pas de chercher à convaincre les gens, la question est de rétablir la confiance entre les gens. Ça ne sert strictement à rien de dire aux gens ce qu’ils doivent penser. Chacun pense ce qu’il veut.
C’est comme le film “Le Dîner de Cons”, et comme ce que dit Harry Callahan dans le film “La dernière Cible” : « Les avis c’est comme les trous du cul, tout le monde en a un. »
Le 10/04/2020 à 15h49
Les mecs qui se plaignent du rayonnement et des maux de tête sont en général les mêmes ignares qui refusent l’implantation d’une antenne au dessus de l’école du village “parce que c’est mauvais pour les enfants” alors que c’est sans doute l’endroit le plus safe pour eux…
Le 10/04/2020 à 16h02
Le 10/04/2020 à 16h33
Le 10/04/2020 à 19h57
En relations publiques, on utilise souvent le mot “communication” (voir le titre de l’article). Parfois, on parle aussi de “pédagogie” quand une décision est mal acceptée par le public.
On peut souvent vendre un mauvais produit grâce à une bonne “communication”, mais on peut aussi parfois mal vendre un produit qui pourrait être bon. Tout le problème est là, pour Linky, pour la 5G, pour les 11 vaccins obligatoires (en 2017 pour les bébés de moins de 2 ans), pour la chloroquine, les masques en 2020, etc.
Le problème n’est pas que les gens ne comprennent pas ou que des charlatans manipulent les foules ou que des journalistes racontent des conneries qui font peur (ça existe et ça existera toujours). L’enjeu, c’est l’autoritarisme et la défiance du public. Une autorité publique ne peut pas à la fois imposer des choix (même par la force de la loi) et à la fois s’attendre à ce que les personnes qui ne sont pas d’accord changent d’avis (on n’obtient jamais l’adhésion des gens comme ça) : si une autorité rend obligatoire quelque chose, il faut d’abord qu’elle s’assure d’avoir les moyens de rétorsion adéquats (et actuellement, l’État semble chercher sa voie).
Bref, c’est pas d’expliquer en quoi la 5G est utile (voire géniale) qui va arrondir les angles, ça sert seulement à gagner du temps et faire admettre des choix technologiques à une population dubitative et méfiante qui est prête à faire de la “pédagogie” et de la “communication” dans l’autre sens.
Le 10/04/2020 à 20h01
Le 10/04/2020 à 21h36
Le 11/04/2020 à 09h38
Rappelons que parmi les problèmes du mouchard Linky, on peut citer celui de la combustion spontanée. Un peu comme pour les Teslas…
Concernant la 5G, j’ai fini par comprendre qu’on peut dire ce qu’on veut, ils vont quand même nous la mettre, alors j’ai juste hâte de pouvoir régler les clims sur 40°C à Neuilly, et je suis également très curieux de découvrir les commandes upnp des frigos.
Le 11/04/2020 à 11h00
Le 11/04/2020 à 15h07
Le 11/04/2020 à 15h19