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Oreillettes filaires, « Air-Tube » et Bluetooth : quelle exposition aux ondes ?

Des ondes, sans ondes

Oreillettes filaires, « Air-Tube » et Bluetooth : quelle exposition aux ondes ?

Le 21 janvier 2022 à 15h20

Pendant des années, les recommandations officielles étaient d’utiliser des écouteurs pour réduire son exposition aux ondes, mais est-ce vraiment utile ? Si oui dans quelle mesure ? L’ANFR apporte des réponses, avec en plus un avis sur les écouteurs filaires « Air-Tube ».

En préambule, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) rappelle que « les kits oreillettes permettent de réduire le niveau d’exposition du corps humain, et plus particulièrement de la tête, aux champs électromagnétiques induits par l’usage des téléphones ». Elle se propose d’apporter une précision importante et qui manquait cruellement : dans quelle proportion.

Six kits ont été testés : deux filaires – dont un Air-Tube, nous y reviendrons – et quatre Bluetooth. Rappel important : selon la norme EN 50663:2017, les kits sans fil, « parce qu’ils émettent à une puissance inférieure à 20 mW, sont exemptés de l’évaluation du niveau de DAS », contrairement aux smartphones par exemple. Un des buts de cette étude est donc de « mieux situer l’ordre de grandeur de leur exposition, notamment en comparaison avec le DAS produit par le terminal ».

Fidèle à son habitude, l’ANFR réalise des tests en mode « pire cas », c’est-à-dire quand les niveaux de puissance des dispositifs sont réglés au maximum durant toute la durée des mesures. Ainsi, le « téléphone émet à puissance maximale en mode voix sur les bandes GSM et WCDMA. En LTE [4G, ndlr], le téléphone émet à puissance maximale en mode donnée ».

ANFR DAS oreillettes

Sans plus attendre la conclusion (sans surprise) : « Cette étude confirme que l’utilisation des kits oreillettes, qu’ils soient filaires ou sans fil, permet de réduire le niveau d’exposition maximale aux ondes par rapport à un usage direct du téléphone contre l’oreille ». Passons maintenant au détail des chiffres.

Avec des écouteurs, beaucoup moins d’expositions aux ondes

Les six kits sont testés sur trois « fantômes ». Il s’agit d’instruments simulant la tête et le corps humain : « ils contiennent des capteurs immergés dans du liquide qui simule les propriétés diélectriques du corps humain sur la plage de fréquence de 600 MHz à 6 GHz ». Ils permettent de réaliser des mesures sur deux côtés de la tête, ainsi que sur le tronc ou les membres. On peut alors en déduire le DAS des kits oreillettes. Tous les détails techniques et le protocole sont expliqués dans ce document.

Près d’un millier de mesures de DAS ont été effectuées, et le résultat est sans appel. La première série de mesures (cf. les tableaux ci-dessous) correspond aux valeurs maximales obtenues par chaque kit, puis à la moyenne de ces extrêmes. Il s’agit là encore d’appliquer la politique du « pire cas ».

ANFR DAS oreillettesANFR DAS oreillettes

La moyenne des maximums des DAS tête de l’ensemble des oreillettes est de 0,063 W/Kg, avec un maximum à 0,155 W/Kg et un minimum à 0,030 W/kg. Le maximum réglementaire est de 2 W/kg. À titre de comparaison, la moyenne est de 0,624 W/kg pour l’ensemble des smartphones testés par l’Agence. Le téléphone avec le DAS le plus faible est de 0,071 W/kg (Emporia Tell Me F210, modèle à clapet), puis on passe à plus de 0,130 W/kg avec le second.  Toutes ces données sont disponibles en open data par ici.

Les résultats sont du même acabit avec le DAS membre : la moyenne est de 0,184 W/kg pour les kits oreillettes (0,105 W/kg au minimum et 0,291 W/kg au maximum), contre 2,300 W/kg pour les smartphones. Aucun des téléphones passés entre les mains de l’ANFR n’affiche un DAS membre inférieur à 1 W/kg. Le maximum légal est de 4 W/kg sur ce genre de mesures.

Bref, « cette étude montre qu’en utilisant les kits oreillettes, l’exposition au DAS est en moyenne 9 fois plus faible à la tête (moyenne DAS tête des mobiles : 0,624 W/kg) et 12 fois plus faible aux membres (moyenne DAS membres des mobiles : 2,3 W/kg) par rapport aux valeurs de DAS des terminaux mobiles contrôlés par l’ANFR ».

L’ANFR propose également une analyse sur l’ensemble des mesures de DAS (pas uniquement sur les maximums de chaque kit). Cette fois-ci la moyenne est de 0,014, avec 0,007 W/kg pour la tête et 0,029 W/kg pour les membres. Une analyse plus fine des mesures permet de remarquer que dans 99 % des cas, le DAS des kits oreillettes est environ 20 fois inférieur à la limite réglementaire.

ANFR DAS oreillettes

Le DAS des kits filaires plus faible qu’en Bluetooth

Sans grande surprise, l’Agence note que « le DAS des kits filaires est plus faible que le DAS des kits sans fil ». Un point important tout de même : « l’exposition du kit filaire a été évaluée alors que le téléphone était à pleine puissance [« pire cas », ndlr], ce qui ne correspond pas à l’usage courant, l’exposition typique du kit filaire est sans doute encore plus favorable au quotidien ».

De plus, « le DAS des kits filaires reste intrinsèquement lié au couplage induit avec les éléments rayonnants du téléphone auquel il est relié, ce qui explique les différences de niveaux de DAS observés dans la figure 15 où les kits filaires sont mesurés avec deux téléphones différents. Les kits sans fil produisent quant à eux un DAS en rapport avec le niveau de puissance émis en technologie Bluetooth, indépendamment des téléphones utilisés ».

ANFR DAS oreillettes

Les kits Air-Tube sont-ils plus efficaces ? Ça dépend…

Revenons maintenant quelques instants sur le cas du kit Air-Tube, parfois présenté comme « anti-onde » par certains. On en trouve plusieurs modèles chez les revendeurs et sur les marketplaces. Le principe et la promesse sont toujours les mêmes : « Le son est transmis à travers un tube à air filaire sans rayonnement électromagnétique ». Dans la pratique, est-ce efficace ?

Ça dépend, selon l’analyse de l’ANFR : « Le DAS du kit Air-Tube est plus faible que le DAS du kit filaire à condition que le câble reliant le convertisseur au micro ne soit pas collé à la joue ».

Deux scénarios ont été pris en considération. Dans le premier, l’écouteur est porté à l’oreille droite avec le passage du tube derrière l’oreille et le maintien du micro dans la main. Dans le second, le tube passe devant l’oreille et le reste ne change pas. Deux images pour illustrer le propos :

ANFR DAS oreillettes

Voici les maximums des DAS obtenus dans les deux cas de figure, avec un kit filaire basique pour référence : 

  • Kit filaire : 0,034 W/kg en DAS tête et 0,131 W/kg en DAS membres
    Air-Tube (derrière l’oreille) : 0,069 W/kg en DAS tête et 0,105 W/kg en DAS membres
    Air-Tube (devant l’oreille) : 0,030 W/kg en DAS tête et 0,105 W/kg en DAS membres

Si l’on passe le câble derrière l’oreille, le DAS tête est plus élevé qu’avec un kit filaire classique, tandis que dans le cas contraire la même est très légèrement inférieure.

Les écouteurs ne sont plus une obligation, mais une option

Pour rappel, la France exigeait jusqu’à encore récemment que les smartphones soient vendus avec « un accessoire permettant de limiter l'exposition de la tête aux émissions radioélectriques lors des communications », des écouteurs en l’occurrence.

Mais cette disposition a été réécrite fin 2021. Désormais, les professionnels doivent s’assurer de « la disponibilité d'écouteurs compatibles avec le modèle de terminal pendant sa période de commercialisation ». On est ainsi passé d’une obligation à une option.

La justification était la suivante : « Si certaines publications évoquent néanmoins une possible augmentation du risque de tumeur cérébrale, sur le long terme, pour les utilisateurs intensifs de téléphones portables, l'Anses ne recommande le recours au kit mains libres que pour les adultes utilisateurs intensifs ».

Avant, les recommandations officielles étaient d’utiliser « un kit mains libres ou le mode haut-parleur lorsque vous téléphonez […] Quelques centimètres d’éloignement permettent une diminution substantielle de l’exposition aux radiofréquences […] Oreillette filaire ou oreillette Bluetooth divisent ainsi l’exposition de la tête d’un facteur 10 à 500 suivant le modèle utilisé », pouvait-on lire sur le Portail interministériel d’information sur les radiofréquences.

L’ANFR est plus mesurée dans son analyse : l’utilisation d’oreillettes « permet de réduire l’exposition maximale d’un facteur d’environ 10 par rapport à l’usage direct du téléphone contre l’oreille ». Dans tous les cas, la baisse est bien là, et loin d’être négligeable.

Commentaires (18)

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Merci pour l’article, au top ! C’était instructif.
C’est en plus une question que je me posais, l’intérêt du kit mains libre et surtout la différence entre le Kit BT et celui filaire. Je ne pensais pas l’écart si mince entre les deux.



D’ailleurs j’aurais eu tendance à prioriser le kit “ tour de coup” en me disant que ca devait réduire l’exposition alors que finalement ca semble être l’inverse :mad2:

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(quote:1925712:dvr-x)
Merci pour l’article, au top ! C’était instructif. C’est en plus une question que je me posais, l’intérêt du kit mains libre et surtout la différence entre le Kit BT et celui filaire. Je ne pensais pas l’écart si mince entre les deux.



D’ailleurs j’aurais eu tendance à prioriser le kit “ tour de coup” en me disant que ca devait réduire l’exposition alors que finalement ca semble être l’inverse :mad2:


on est vendredi donc je peu : y’a moyen d’avoir encore moins mette le tel sur haut parleur :D
Bon ok je sort -> []

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si c’est pour faire comme les trop nombreux qui utilisent le tel sur haut parleur bien à font comme oreillette bien collée à la perpendiculaire sur l’oreille (et genre pendant 1h30 dans le train …), j’ai comme un gros doute :fumer:

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D’ailleurs, j’ai jamais compris l’intérêt.
L’écouteur est pas suffisamment puissant pour entendre ce qu’à dire l’autre ?

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Ne pas oublier que beaucoup de personne sont “sourde” à force d’avoir le son trop fort…genre les personnes avec la musique à fond en voiture que quand tu passes à 5m loin tu as mal aux oreilles déjà.

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L’HP main libre est prévu pour fonctionner sur une table qui fait caisse de résonance. Alors qu’en mode à l’oreille, tu es plutôt bien isolé (sur cette oreille :) ) des sons extérieurs. Techniquement c’est quasiment le même HP, en main libre souvent il sature un peu.
En main libre, le gars est surtout emmerdé par les bruits alentours, c’est pour ça qu’il colle généralement son oreille au HP main libre. Idem pour le micro en main libre il est prévu pour tout enregistrer et reproduire correctement plusieurs personnes qui parlent en même temps, alors qu’en mode téléphone c’est l’inverse et il y’a en général 2 micros, un qui enregistre au niveau de la bouche et un autre qui enregistre le bruit de fond pour pouvoir le réduire.
Bref là aussi en main libre, la personne au bout du fil n’entend rien donc il faut parler proche du micro et lui détruire l’oreille au milieu des bruits ambiants.
A noté que quand ces deux idiots qui s’appellent de la même manière le problème est largement empiré. :)



Bref c’est des moutons de Panurge aucun de ses utilisateurs n’a jamais utilisé normalement son téléphone pour se rendre compte que le son est nettement meilleur. Je ne serais pas surpris que les nouveaux téléphones intègrent un capteur de proximité en bas du téléphone, ou utilise la caméra pour reconnaitre le ciel et ajuster les algos à cet usage farfelu.

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:) sort vite !
Mais il y a des intras c’est des vrais HP ! Tu entends tout à côté. Donc ça peut être une solution en effet ;)

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C’est vache, ils ont rembauché Benalla. :troll:

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Je suis extrêmement étonné de voir que les écouteurs air-tube existaient encore. Je pensais que c’était plus utilisé depuis les années 7080 ou pour les films d’espionnage.



Il existe aussi la version année 5060 pour l’aviation : https://apex.aero/articles/sound-tube-surprising-history-airline-headsets/

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Excellent la version aviation. Ce qui me fait songer que ces tubes devaient être super longs. Du coup ils devaient subir une latence due à la vitesse du son. Après je suppose que pour un film des années 50, qui plus est projeté en avion, ça ne devait pas changer grand chose.

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C’est encore utilisé dans le domaine médicale lors des examens bruyants (scanner par exemple). C’est mieux qu’un simple casque antibruit surtout que tu ne peux pas utiliser de casque actif.

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Bonjour y’a un truc qui me chiffonne :



Quand j’ai lu cette phrase, j’ai compris qu’il ne faut pas mettre le tube devant l’oreille, collé à la joue :



“Ça dépend, selon l’analyse de l’ANFR : « Le DAS du kit Air-Tube est plus faible que le DAS du kit filaire à condition que le câble reliant le convertisseur au micro ne soit pas collé à la joue ».”



Or, quand on voit les résultats :



“Kit filaire : 0,034 W/kg en DAS tête et 0,131 W/kg en DAS membres
Air-Tube (derrière l’oreille) : 0,069 W/kg en DAS tête et 0,105 W/kg en DAS membres
Air-Tube (devant l’oreille) : 0,030 W/kg en DAS tête et 0,105 W/kg en DAS membres”



Devant l’oreille, collé à la joue on est inférieur au filaire. Contrairement à ce que l’ANFR cite, juste au dessus. Dans cette phrase au dessus, je comprends qu’il ne faut PAS qu’il soit côté joue (à moins de ne plus savoir lire), or, quand il est PAS contre la joue c’est 2x plus élevé que justement contre la joue (devant l’oreille).



C’est ambigü et j’ai l’impression que ça se contredit.



Suis-je fatigué ou… ? ^^ Merci !

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Alors regarde les images d’illustration du kit air tube. Quand le tube reste devant l’oreille, l’endroit où est le convertisseur est plus loin du visage que lorsqu’elle passe derrière.
Je suppose que la différence de DAS vien de cette différence.



C’est pas la position du tube qui est important, c’est celle du convertisseur (le composant électronique qui produit les son, et donc l’émetteur d’ondes)

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ho j’avais raté l’arrêt de l’obligation de fournir des écouteurs, merci.

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jpaul a dit:


Excellent la version aviation. Ce qui me fait songer que ces tubes devaient être super longs. Du coup ils devaient subir une latence due à la vitesse du son. Après je suppose que pour un film des années 50, qui plus est projeté en avion, ça ne devait pas changer grand chose.


C’est une excellente question. Il semble que les écouteurs pneumatiques sont restés en utilisation jusqu’au début des années 2000.



https://en.m.wikipedia.org/wiki/In-flight_entertainment



Après, j’ai essayé des écouteurs de ce type (je pense des écouteurs des années 6070 avec un câble de 2m), et je n’ai pas le souvenir d’une si grosse latence. Après quand on voit parfois la latence de certains appareils bluetooth … :bravo:

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kd9 a dit:


C’est une excellente question. Il semble que les écouteurs pneumatiques sont restés en utilisation jusqu’au début des années 2000.



https://en.m.wikipedia.org/wiki/In-flight_entertainment



Après, j’ai essayé des écouteurs de ce type (je pense des écouteurs des années 6070 avec un câble de 2m), et je n’ai pas le souvenir d’une si grosse latence. Après quand on voit parfois la latence de certains appareils bluetooth … :bravo:


2m, c’est 2340 secondes de latence, soit environ 6ms. Rien de perceptible, donc. D’ailleurs si quelqu’un te parle, à 2m de toi, tu ne perçois pas de latence ;)

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Alxnd a dit:


C’est utilisé dans les dispositifs d’imagerie médicale par résonance magnétique, parce que tout métal ferro magnétique introduit dans la pièce se colle très violemment sur la paroi du tube au risque de blesser. Le bruit de fonctionnement est important lié aux variations de champ magnétique rapidement pulsés, il est donc moins stressant d’écouter Mike Brant ou ABBA dans un casque à tubes plastiques de conduction audio, plutôt que d’expliquer ou convaincre de l’unocuité. Accessoirement, le casque diminue la pression acoustique, relativement forte dans le tube.

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Quelqu'un pourrait-il m'expliquer pourquoi les écouteurs à tubes pneumatiques sont souvent associés aux agents de sécurité ? Est-ce une image fantasmée ou basée sur une réalité technique ?

Oreillettes filaires, « Air-Tube » et Bluetooth : quelle exposition aux ondes ?

  • Avec des écouteurs, beaucoup moins d’expositions aux ondes

  • Le DAS des kits filaires plus faible qu’en Bluetooth

  • Les kits Air-Tube sont-ils plus efficaces ? Ça dépend…

  • Les écouteurs ne sont plus une obligation, mais une option

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