Loi Renseignement : inquiets, des avocats internationaux interpellent Manuel Valls
Le flou dans la bergerie
Le 07 août 2015 à 08h44
6 min
Droit
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La publication de la loi sur le renseignement, après le contrôle du Conseil constitutionnel, est loin d’éteindre les inquiétudes. En témoigne cette lettre adressée à Manuel Valls par des avocats franco-américains.
Dans sa décision du 23 juillet 2015, le Conseil constitutionnel a censuré l’une des dispositions phares de la loi sur le renseignement. C’est celle qui concerne les mesures de surveillance internationale, c’est-à-dire les communications émises ou reçues depuis l’étranger.
Pour mémoire, à cette échelle et contrairement aux mesures franco-françaises, les services auraient pu collecter des données sans avis préalable de l’organe de contrôle, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Le Conseil constitutionnel a cependant censuré cette disposition, reprochant au législateur de ne pas avoir prévu « les conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés », ni défini la mise en œuvre du contrôle a posteriori de la CNCTR.
La surveillance internationale avant et depuis la censure constitutionnelle
La French American Bar Association, une association d’avocats et juristes franco-américains, avait déjà adressé mi-juillet un mémoire au Conseil constitutionnel pour s'émouvoir de ces questions internationales. Visiblement, la décision censurant en particulier ce dispositif n'éteint pas ses inquiétudes. Elle vient du coup d'envoyer une lettre à Manuel Valls, avec en copie nombre de personnes, dont les sénateurs et députés des Français de l’étranger.
Sa missive prend appui sur un récent article du Nouvel Obs intitulé « pourquoi les écoutes de la DGSE sont illégales depuis sept ans ». Selon nos confrères, la censure du Conseil constitutionnel contamine un décret signé en avril 2008. Secret, ce texte n'a pas été publié au Journal officiel. « Par leur décision de jeudi, les Sages déclarent qu’un tel décret secret est anticonstitutionnel, affirme rapidement l’Obs. Si bien que jusqu’à l’adoption d’un nouveau texte de loi qui agréera au Conseil, c’est la loi précédente, celle de 1991, qui s’applique. Autrement dit, depuis jeudi, la DGSE n’a pas le droit d’intercepter massivement les communications qui transitent par les câbles (c'est-à-dire plus de 90 % d’entre elles) ; elle doit demander à Matignon et la CNCIS (rebaptisée CNCTR) l’autorisation pour chaque écoute réalisée sur un câble qui arrive en France. »
Les questions de la French-American Bar Association à Manuel Valls
En clair, toujours selon l'Obs, la décision du Conseil constitutionnel torpille de facto la surveillance internationale opérée depuis 2008 au moins, puisque celle-ci faisait l’économie des procédures encadrées à partir de 1991. Du coup, la FABA, rappelant le caractère secret des correspondances entre l’avocat et son client, même dans un cadre international, adresse une pluie de questions à Manuel Valls.
C'est ce qu'on découvre dans courrier qui nous a été transmis par l'un de ses destinataires, Damien Regnard, conseiller élu à l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) :
- Nous vous demandons de bien vouloir confirmer que la DGSE a, depuis le 27 juillet 2015, le lendemain de la date de la publication de la décision n° 2015 - 713 DC au Journal officiel de la République Française, cessé toute pratique décrite dans le décret secret d’avril 2008, et concernant en particulier les communications entre les avocats membres de notre association et leurs clients, si au moins l’une des parties est présente en France.
- Nous vous demandons de bien vouloir confirmer que la DGSE ne mettra en place dans le futur, aucune technique ou pratique décrite dans le décret secret d’avril 2008, en particulier les communications entre les avocats membres de notre association et leurs clients, si au moins l’une des parties est présente en France.
- Enfin, nous vous demandons de bien vouloir confirmer que le ministre de la Justice ne transmettra aucune information qu’il a pu obtenir par le biais de la captation de communications entre un avocat et son client obtenues entre le 1er avril 2008 et le 26 juillet 2015 à aucune autorité judiciaire étrangère dans le cadre d’une demande d’entraide soumise au titre de l’article 691-4-1 de la Loi n°2015è912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement, dans la mesure où ces informations ont pu être obtenues par l’intermédiaire de pratiques déclarées contraires à la Constitution, si elles concernent des écoutes pratiques entre les parties privées localisées en France et les parties privées localisées aux États-Unis, en particulier lorsque l’une des parties privées est un avocat localisé en France.
Des articles autorisent encore cette surveillance internationale
L’inquiétude née de cette loi est d’autant plus vive que la censure ouvre un important flou sur ce que peut ou ne peut désormais faire la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). La loi sur le renseignement prévoit en effet toujours toute une série d’autres articles donnant pleine compétence aux services d’agir à l’échelle mondiale.
Par exemple, le nouvel article L 821 - 1 du Code de la sécurité intérieure dit que seule « la mise en œuvre sur le territoire national des techniques de recueil de renseignements (…) est soumise à autorisation préalable du Premier ministre, délivrée après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ». La loi n'encadre donc plus rien au delà du territoire national. De même, l’article L 811 - 2 du même code prévient que les services spécialisés de renseignement « ont pour missions, en France et à l'étranger, la recherche, la collecte, l'exploitation et la mise à disposition du gouvernement des renseignements relatifs aux enjeux géopolitiques et stratégiques ainsi qu'aux menaces et aux risques susceptibles d'affecter la vie de la Nation ». Pire, l’article 18 de la loi dépénalise à l’international les actes de piratage informatique dont seraient coupables ces mêmes services, signe d'un joli feu vert...
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Les questions de la French-American Bar Association à Manuel Valls
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Des articles autorisent encore cette surveillance internationale
Commentaires (35)
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Abonnez-vousLe 07/08/2015 à 08h54
C’est pas ça qui va stopper la machine. Ça reste très spécifique.
Suffit de faire comme les ambassades / consulats : Valise diplomatique " />
La loi du renseignement ça va relancer l’activité courrier des postes.
Le 07/08/2015 à 08h55
French-American Bar Association …
Non mais rien que le nom ça me fait penser directement à la manière dont tout cela s’opère. Des mecs au plus haut gradés qui discutent de points hautement critiques autour d’un verre, à la cool !
Le 07/08/2015 à 09h05
Le 07/08/2015 à 09h06
Comme le G7 à sa création?
Le 07/08/2015 à 09h10
Étonnant que des avocats précisent “DGSE” alors qu’il suffit au gouvernement de répondre oui aux deux premiers points et en confiant la mission de surveillance à un autre organisme.
Le 07/08/2015 à 09h11
“Bon les gars: Cheers, allons diriger le monde !”
Le 07/08/2015 à 09h18
Ceci dit, tu peux aussi aller discuter avec les exégètes amateurs à la cool autour d’un verre " />
Le 07/08/2015 à 09h23
Et quoi qu’il arrive …. tu refais le monde ! " />
Le 07/08/2015 à 09h25
Avec le chat sur les genoux
Le 07/08/2015 à 09h25
Pas faux " />
Le 07/08/2015 à 09h26
Le 07/08/2015 à 09h47
Le 07/08/2015 à 09h49
Le 07/08/2015 à 09h49
Réponse de valls,
mais ouais
on vous laisses faire vos affaires, laissez nous faire les nôtres
Vous savez quand on a besoin de vous on sait ou vous trouver de toute façon ^^
C’est marrant a quel point il se soucient de la défense des échanges qu’ils peuvent avoir avec leur clients alors qu’à coté, rien à battre pour le reste des citoyens.
Je trouve que c’est dommage, ils pourraient faire d’une pierre deux coups :)
Le 07/08/2015 à 09h52
Le 08/08/2015 à 14h10
Vous voulez davantage de “liberté”? Parce que c’est comme ça qu’on se retrouve avec davantage de “libertés”!
Le 08/08/2015 à 14h18
Un rapide tour sur Google m’indique que ce FABA existe depuis 2007. Je n’ai trouvé aucune trace d’une quelconque réaction aux révélations Snowden ou vis à vis du Patriot Act.
Et au fait, oui, ils se réunissent parfois autour d’un verre pour discuter. Voir la section “Events” de leur site. Ça se trouve ils fument peut-être même des gros barreaux de chaise! ">
Le 08/08/2015 à 14h31
On dirait quand même qu’ils ne se sont pas limités à cette facette du problème. http://www.efb.fr/tools/upload-fichier/read?file=201503031347309476fb-Invitation_FABA_25_mars_2015.pdf
Le 08/08/2015 à 14h48
Il faudrait que je te retrouve le “text mining” que j’avais fait suite à un discours d’Obama et une interview de Snowden, c’était intéressant surtout en remettant ça en perspective avec ce qui s’est passé par la suite " />
Le 07/08/2015 à 09h55
Franchement,
imaginons que je veuille tuer mon voisin alors que la loi l’interdit,
qui m’empêchera concrètement de le faire, et en prenant soin de disposer des éléments de preuve pour faire croire à un suicide ?
Personne, donc les lois n’engagent que ceux qui y croient !
C’est sympa quand même ce paravent théâtral que sont les lois et la politique. Parce qu’en attendant, ceux qui les conçoivent, en ont que faire également.
Arf, ça passe le temps de contempler toutes ces histoires insipides et minables, et permet de ne pas penser de manière primordiale.
Le 07/08/2015 à 10h14
Politicien, c’est pas un métier facile. On a tous des “mauvais côtés” dans notre boulot. Eux, c’est le peuple. Ils doivent faire avec. Nous sommes une source d’emmerde à râler en permanence alors qu’ils essayent tant bien que mal de se faire un nom dans l’histoire du pays.
Respectez les un peu ces braves gens. Ils font les choses en notre nom et pour notre bien.
Qui veut du pain et des jeux pour passer le temps ?
Le 07/08/2015 à 10h57
‘Old men, ruling the world’ ?
Le 07/08/2015 à 11h26
Le 07/08/2015 à 12h06
je pari un requinsarkozyx (niveau 10 et +5 en footing) et un hollandetoutmoux (protection 100% contre les critiques) que c’est un troll.
Le 07/08/2015 à 12h17
Eh bien je t’en pris, développe l’ami.
Parce qu’en l’état, c’est comme si je te jugeais être un co…rd sans donner aucunes raisons et explications.
Tu en conviendras que ce serait risible. Donc tu peux connaître mon point de vue en l’état actuel des choses.
Le 07/08/2015 à 13h15
Je trouve ça “bizarre” toute cette armada d’avocats qui intervient après la “bataille”, au vu de leur connaissance… Ils n’avaient pas le “poids” pour intervenir plus en amont? " />
Le 07/08/2015 à 17h29
Le 07/08/2015 à 18h49
Le 07/08/2015 à 18h55
Ben oui tout à fait, rien ne m’empêche de prendre les sens interdits sur les bretelles autoroute.
Et du coup, quand je fais quelque chose d’interdit, cela ne m’empêche pas d’assumer mes actes contrairement à ceux qui ne savent pas assumer et qui pour éviter cette tâche, se gardent bien de rester dans les clous afin d’éviter le moindre effort de responsabilisation. Tu me suis ?
Au fait, j’ai déjà testé avec une google car. C’est très au point comme matériel (petite pub pour google en passant). D’ailleurs, couplé avec une cape d’invisibilité, tu es tranquille pour ne pas te faire prendre par la police et/ou les radars.
" />
Le 07/08/2015 à 20h41
On est bien d’accord que si on parle d’avocats franco-américains, c’est franco-étasunien d’amérique, le fameux pays où il n’y a aucune surveillance ni national et encore moins international ?
Le fameux pays où il n’y a pas non plus de tribunaux secret ni de zone où il ne respect pas leur propre lois…
Le 07/08/2015 à 20h45
Roohhhh tout de suite les stéréotypes " />
Le 08/08/2015 à 05h36
Le 08/08/2015 à 05h41
Le 08/08/2015 à 14h04
Et avaient-ils réagi de façon symétrique envers l’appareil US après les révélations Snowden?
Le 08/08/2015 à 14h07
Bonne question, à laquelle je n’ai pas la réponse " />