Domaine commun informationnel : les ayants droit marquent des points à Matignon
Ou des gnons à Matipoint
Le 05 novembre 2015 à 15h45
5 min
Droit
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Ce matin à Matignon, les ayants droit ont finalement eu (presque) gain de cause sur l’article 8 du projet de loi Lemaire, celui sur la définition positive du domaine commun informationnel. Le texte va être retiré, pour l'instant.
Le projet de loi Lemaire, amendé des propositions glanées sur la plateforme République numérique, intégrait un article destiné à apporter une définition positive du domaine public tout en protégeant le domaine commun informationnel. L’enjeu est par exemple de prohiber les pratiques de copyfraud qui vise à revendiquer des droits sur des éléments du domaine public, par exemple. D'ailleurs, l'article autoriserait des associations agréées à intenter une action en justice contre ce type de revendication.
Le texte a fait l’objet d’une analyse au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) où un avis a été élaboré par l’avocat Jean Martin à la demande de la vice-présidente Anne-Élisabeth Crédeville. Pourquoi ? Car de nombreux ayants droit craignent en particulier « une remise en cause du fragile équilibre économique de leur secteur. »
Selon eux, en effet « ce nouveau texte inverse la règle et l’exception et facilite les attaques judiciaires contre le droit d’auteur : aujourd’hui, le domaine public n’existe que par exception, lorsque cessent le droit d’auteur et les droits voisins – à l’exception du droit moral. Cette crainte est en partie confirmée par les partisans du domaine commun informationnel, pour qui la reconnaissance positive de ce concept permettrait un recours au juge plus aisé afin de faire cesser les appropriations abusives au nom d’un droit d’auteur en réalité inexistant » (propos tirés du rapport de Jean Martin, présenté en début de semaine au CSPLA).
Axelle Lemaire : « Trouvez l'erreur »
Si Jean Martin a craint des problèmes de frontières avec d’autres textes, notamment avec le projet de loi relatif à la gratuité des informations du secteur public, l’avocat a surtout noté que « les principes fondamentaux du droit d’auteur » resteraient préservés malgré l'adoption de cet article. Mais l'analyse n’a pas été partagée par le CSPLA cette semaine, où les ayants droit ont massivement voté en faveur de son retrait.
Cette confrontation entre l’avis de Me Jean Martin remis au CSPLA, et le vote de ce même CSPLA a été épinglée par la Secrétaire d’État au numérique :
@reesmarc @nextinpact Gros écart entre les conclusions juridiques du rapport et l'avis final - trouvez l'erreur #communs
— Axelle Lemaire (@axellelemaire) 4 Novembre 2015
« Un grand moment » à Matignon
Toutefois, l’arbitrage semble bien pencher en faveur du secteur culturel. Ce matin à Matignon, partisans (Wikimedia, La Quadrature du Net, le Conseil national du numérique, etc.) et adversaires (SACEM, SCAM, SACD, etc.) de l’article 8 étaient conviés. Et selon un participant, ce fut un « grand moment », mieux, une « réunion dantesque ». Rien que cela. Pourquoi ? « Les ayants droit étaient en nombre et en force. Nous étions une poignée de pro-article 8. Ils n'avaient pas tellement d'arguments réels à nous opposer, mais ils ont joué à fond la carte de la peur, et ça a eu un impact sur les conseillers du premier ministre. L'article 8 ne sera pas dans le texte soumis au Conseil d'État cette semaine. »
Selon notre source, les ayants droit se sont montrés paniqués par la notion de communs volontaires (les licences libres, cf article 8bis). Ils ont estimé que l'article 8 pouvait affaiblir les positions de la France auprès de la Commission européenne, craignant aussi un élargissement de la disposition par voie d'amendement lors des débats, ou qu'elle ne renverse la charge de la preuve lors des éventuelles actions en justice, les ayants droit devant démontrer qu'ils n'utilisent pas de communs, etc.
Pascal Rogard : « Ils sont réunis en secte geekaire »
« Ils ont des demandes idéologiques, mais derrière il y a des impacts juridiques qu’ils ont été incapables de justifier. Je crois que Matignon va faire une analyse plus sérieuse » égratigne Pascal Rogard, joint en fin de journée. « Dès lors qu’on touche à une matière aussi régulée que la propriété littéraire et artistique, ils auraient dû demander un groupe de travail commun entre le Conseil national du numérique et le CSPLA, par exemple, pour faire quelque chose qui tienne la route. »
Pour le directeur général de la SACD, « la réunion a en tout cas été très intéressante. Cela m’a permis de prendre connaissance de certaines problématiques dont nous sommes ignorants. Nous ne sommes pas au Conseil national du numérique alors qu’eux sont également au CSPLA. Nous faisons preuve d’une grande ouverture d’esprit, alors qu’ils sont réunis en secte geekaire. »
Les uns pourront espérer, les autres s'inquiéter encore et toujours, car le débat n'est peut être pas totalement enterré : « le conseiller numérique de Valls laisse encore la porte entrouverte à une possible réintroduction de l'article après réécriture » nous indique un pro-article 8.
Domaine commun informationnel : les ayants droit marquent des points à Matignon
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Axelle Lemaire : « Trouvez l'erreur »
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« Un grand moment » à Matignon
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Pascal Rogard : « Ils sont réunis en secte geekaire »
Commentaires (44)
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Abonnez-vousLe 05/11/2015 à 15h48
C’est beau des politiques autant à l’écoute du peuple, j’en ai la larme à l’oeil ^^
Le 05/11/2015 à 15h52
Toutefois, l’arbitrage semble bien pencher en faveur du secteur culturel.
comme toujours quoi… ils me font vraiment gerber ces ayants droit…
Le 05/11/2015 à 15h52
C’est bizarre.
Je ne m’attendais pas du tout à une telle action de la part de notre gouvernement, lui qui est si prompt à défendre l’intérêt général et à protéger la veuve et l’orphelin…
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J’attends de voir le reste des arbitrages, je sens que ça va être une grosse poilade.
Le 05/11/2015 à 15h59
Quelle suprise " />
Le 05/11/2015 à 16h06
Je lis mal ou les AD disent clairement que le domaine public est une exception?
Le 05/11/2015 à 16h09
Le 05/11/2015 à 16h11
Un jour, peut être, les politiques se souviendront que le seul lobby qui vaille est celui de leurs électeurs… je l’espère pour eux avant que les fourches et la carmagnole soient de retour…
Mais vu le peu de réaction du peuple à chaque fois qu’ils lui font un bras d’honneur de manière ostentatoire, je comprends que ces politiciens aient choisi la voie du mépris et de la facilité.
Le texte est jugé à peine parasitaire par les propres services des " /> et ils demandent sa suppression. Les politiques en pleine campagne ne veulent surtout pas ouvrir un nouveau front avec le monde du spectacle et ça passe….
C’est bizarre quand il s’agit de sauvegarder un acquis social favorable à une grande partie du peuple la réponse au lobbying “populaire” c’est des coups de matraques dans la gueule, des engueulades/coups de mentons/matador de valls, un silence de Hollande et des membres du PS qui passe la vaseline pommade en disant “si vous les connaissiez mieux vous verriez qu’ils ne sont pas comme ça”.
Le 05/11/2015 à 16h39
C’est l’interprétation que j’en fais. Si ce n’est pas la bonne interprétatin, bah d’une désolé et de deux merci d’avance de me dire comment il faut comprendre ça : “ le domaine public n’existe que par exception, lorsque cessent le droit d’auteur et les droits voisins “
Le 05/11/2015 à 16h47
Avec tintin, c’est plus subtile. Tous les personnages sont des marques. et donc pas d’épuisement des marques.
Le 05/11/2015 à 16h50
Le 05/11/2015 à 16h53
ou les boites noires. " />
Le 05/11/2015 à 16h57
Le 05/11/2015 à 17h36
Fut une époque, les “ayant-droit” on appelait çà des accapareurs, et on les pendait haut et court.
Le 05/11/2015 à 17h40
Le 05/11/2015 à 18h26
Le 05/11/2015 à 18h31
Puisque ce qui devait/devrait tomber dans le domaine public n’y parviendra jamais, autant tipiaker tout ce que l’on souhaite dès que le besoin s’en fait sentir non ?
Le tipiak, c’est une forme de domaine public, qui en plus permets de partager et surtout de sauvegarder la culture.
Le 05/11/2015 à 19h05
Scoop ! Next Impact, Branche Armée de la Geekologie !
Témoignage anonyme d’un des gourous, que l’on nommera Marc :
“Un barbu habillé d’un vieux T-Shirt Pac-Man me force à lire soit des textes de lois soit du code linux… Sans Café !!! Je n’en peux plus…”
Faut appeler enquêtes exclusives ?
Le 05/11/2015 à 20h02
Domaine commun informationnel : les ayants droit marquent des points vivent désormais à Matignon
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Le 05/11/2015 à 20h50
Il faudra bien un jour ou l’autre se rendre à l’évidence : plus on s’intéresse à la question du droit d’auteur et plus on déteste les ayants-droit. C’est une règle quasi mathématique. Or comme nous ne sommes pas tous des pirates patentés assoiffés d’illégalité, il y a forcément quelque chose qui cloche de l’autre côté…
Le 05/11/2015 à 20h58
Le 06/11/2015 à 07h48
Tant que les SACEM, SCAM, SACD etc seront financés par nos impots taxes, rien ne sera jamais fait sans qu’ils donnent leur accord. Le débat est faussé d’entrée de jeux.
Le 06/11/2015 à 08h23
Le 06/11/2015 à 09h07
ces $@#”*% de néant droit commence serieusement a me sortir par les yeux! " />
Le 06/11/2015 à 12h41
Le 06/11/2015 à 13h07
Le 07/11/2015 à 13h21
M’enfin, à un moment il y aura quand même des arguments juridiques solides et sérieux que les AD devront fournir, sinon cette partie du texte de loi sera tellement bancale qu’il sera facile à attaquer au pénal en cas de contestations.
Et à jouer à ce petit jeu, il y aura bien un retour de flamme qu’ils n’auront pas prévu et qui fera que leur système va s’effondrer sur eux-mêmes; ce qui n’est, je pense, qu’une question de temps.
Le 07/11/2015 à 14h21
pour l’instant “leur système” tient………mais, pour combien de temps ………………….encore ?
arrivera un moment..où ça sera plus tenable !
“leur tient” !!!" />
Le 07/11/2015 à 15h27
(oups) “leur DIGUE tient” !
Le 05/11/2015 à 16h14
FYI : Les propos de Pascal Rogard ont été (finalement) obtenus après publication, puis rajoutés.
Le 05/11/2015 à 16h15
Donc en extrapolant, ça donne :
Le droit d’auteur sur machin truc se termine 70 années après la mort de l’auteur mais machin truc ne tombe dans le domaine public que si les AD veulent… j’ai bon?
Le 05/11/2015 à 16h16
je rêve :“d’un Lobby des internautes” !
c’est vrai quoi..quand on parle “de Lobby” (en matière d’informatique), c’est tjrs. “le Lobby des A.D.”
qui revient (pour faire PRESSION sur le Gouv.) dès qu’un “truc” ne leur convient pas !
Le 05/11/2015 à 16h18
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Le 05/11/2015 à 16h20
Nous faisons preuve d’une grande ouverture d’esprit
P. Rogard, humoriste.
Le 05/11/2015 à 16h21
Le 05/11/2015 à 16h24
Le 05/11/2015 à 16h24
bref, foutage de gueule quoi ! " />
Le 05/11/2015 à 16h29
Comme pour le Journal d’Anne Frank
Le 05/11/2015 à 16h29
Quand les droits cessent l’oeuvre tombe dans le domaine public, c’est la règle. Mais là, on lit bien la même chose, les AD disent que la règle est en fait une exception
Le 05/11/2015 à 16h29
Le 05/11/2015 à 16h30
Le 05/11/2015 à 16h33
Le 05/11/2015 à 16h35
Nous faisons preuve d’une grande ouverture d’esprit, alors qu’ils sont réunis en secte geekaire.
Une attaque aussi basse que ridicule et puérile, ça montre bien le niveau des discussions…
Le 05/11/2015 à 16h37
Nous faisons preuve d’une grande ouverture d’esprit, alors qu’ils sont réunis en secte geekaire
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enfin en tout cas, on aura pas eu de surprise, tout le monde s’attendait à cette conclusion.
bien évidemment “réécriture du texte” équivaut à “vidage de substance”." />
c’est ça l’analyse “plus sérieuse” dont parle Rogard.
Le 05/11/2015 à 16h37
le pire étant je crois Peter Pan, j’ai cherché l’ebook (qui devrait être dans le domaine public) et c’est vrai bordel !