Le statut des plateformes est aujourd’hui remis en cause sur plusieurs fronts. La refonte de la directive sur le droit d’auteur d’abord, mais n’oublions pas une proposition de résolution du parlement européen. Un texte sur lequel entend peser le ministère de la Culture.
À l’occasion des débats autour de la réforme de la directive sur le droit européen dans le marché unique, le statut des intermédiaires techniques est la cible de vives attentions. La Commission européenne voudrait ainsi faire peser de nouvelles obligations sur leurs épaules avec notamment des mesures de filtrage, de nettoyages des contenus, des systèmes de reconnaissance des contenus embarqués grâce à des accords passés entre les plateformes et sociétés de gestion collective, etc.
Le projet de rapport de Henna Virkkunen et Philippe Juvin
Un autre texte est sur la rampe. Il s’agit de la résolution sur les plateformes en ligne et le marché unique numérique. Le texte, privé certes d’effets juridiques a pour vocation de peser politiquement. Il est actuellement ausculté par la commission de l’Industrie (ITRE et celle du marché intérieur et de la protection des consommateurs (IMCO). Deux rapporteurs ont été nommés, ce sont les eurodéputés Henna Virkkunen et Philippe Juvin, ce dernier étant également porte-parole Europe des Républicains et donc proche de François Fillon.
Les deux parlementaires ont déjà ébauché un projet de rapport s’inscrivant dans la lignée de la communication de la Commission européenne.
Leur document salue le rôle des plateformes pour l’économie numérique, leur rôle pour le collaboratif, , etc. Passées ces formules de politesse, leur texte souhaite aussi que les obligations de ces intermédiaires soient mieux précisées et pas seulement sur le terrain concurrentiel. Ils aimeraient ainsi que les plateformes en ligne développent « de nouvelles mesures volontaires et davantage de moyens techniques plus efficaces visant à détecter et à supprimer les contenus dangereux ».
Ce n’est pas tout. Le document invite également « la Commission à examiner la directive relative au respect des droits de propriété intellectuelle actuellement en vigueur, afin de trouver des moyens plus efficaces de combattre la contrefaçon en adoptant des mesures proactives, proportionnelles et efficaces ». On pourra lire le reste des recommandations sur ce lien.
Le ministère de la Culture et la question des algorithmes
Le plus intéressant n’est peut-être pas là, mais dans nos frontières. Les autorités françaises sont en train d’ébaucher la note de cadrage à destination des eurodéputés, laquelle définira les différentes priorités identifiées par Paris. Et bien entendu, vu le sujet, le ministère de la Culture y a mis son grain de sel.
La Rue de Valois pense ainsi qu’il serait utile d’indiquer dans le document européen que « les plates-formes participent au financement de la création des contenus dont elles tirent leurs revenus ». Surtout, le ministère de la Culture et de la Communication voudrait injecter la problématique de l’algorithme dans le texte final. « La question de la gouvernance des algorithmes est aussi une question importante qu’il convient d’inscrire urgemment à l’agenda européen ».
Il suggère pour sa part que « la mise en valeur en tête du classement de certains contenus au détriment d’autres par l’algorithme s’apparente en effet à un processus de sélection de contenus à partir de critères objectifs comme le prix, la nouveauté et la popularité du contenu ».
Un algorithme, une responsabilité éditoriale
Ceci dit, le ministre considère « que les plateformes de moteur de recherche exercent une forme de responsabilité éditoriale, en tant qu’elles sélectionnent et organisent les contenus qu’elles indexent ». L’idée qui surgit immédiatement est simple : il serait « pertinent d’envisager les implications sur la diversité culturelle de cette responsabilité éditoriale pour les plateformes structurantes pour l’économie numérique, du fait en particulier de leur capacité de diffusion de contenus culturels à grande échelle ».
De fait, parce qu’un moteur classe par algorithme, il engagerait une certaine responsabilité éditoriale. De cette responsabilité, tirée par les cheveux, les services d’Audrey Azoulay voudraient faire peser des obligations au chevet de la diversité culturelle afin, pourquoi pas, que certains contenus soient mieux référencés que d’autres.
Cette idée tisse un lien avec un récent rapport du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Dans son rapport de 2013, Pierre Lescure avait lui aussi marqué son attention pour les moteurs. Son imagination était telle qu’il avait cette fois suggéré que les sites labellisés par le CSA soient mis en valeur dans les résultats à l’aide d’un « mécanisme de signalisation ». Quelques années plus tôt, un amendement du fidèle Franck Riester avait prévu un régime similaire lors des débats Hadopi.
Commentaires (14)
#1
Avant de lire l’article, je me demandais ce que le Ministère de la Culture avait à voir avec les algorithmes qui sont des “objets” mathématiques.
Après la lecture, je me dis que ce ministère ferait bien d’éviter de parler d’un sujet qu’il ne maîtrise pas.
Quelle requête de recherche peut aboutir à un classement éditorial de la part d’un moteur ?
TOP 50 va effectivement me permettre d’accéder à un classement, mais celui-ci n’est pas fait par le moteur.
films à voir va m’orienter vers des sites de liste de films, liste encore une fois pas fait par le moteur. Google me propose aussi un bandeau de films à voir dans mon département et là, il fait sûrement un classement, mais est-ce une œuvre éditoriale ?
Bref, j’ai vraiment du mal à voir à qui ils veulent prendre du fric et pourquoi. En fait, ils veulent plutôt faire peser des obligations. Mais feront-ils peser ces mêmes obligations aux autres médias (TV, radios, journaux, sites spécialisés ?
#2
Ils aimeraient ainsi que les plateformes en ligne développent « de nouvelles mesures volontaires et davantage de moyens techniques plus efficaces visant à détecter et à supprimer les contenus dangereux ».
Il existe une définition précise de ce qu’est un contenu dangereux ? Ou bien c’est open bar ? " />
#3
D’après ce que je comprends, le gvt veut influencer les réponses Google en lui tordant le bras ?
#4
Mais par pitié qu’ils arrêtent avec leur très effrayant “algorithmes”….
Un algorithme est une suite finie et non ambiguë d’opérations ou d’instructions permettant de résoudre un problème ou d’obtenir un résultat
Tout est algo…
#5
C’est vraiment une approche d’enculé: ça fait des années que le législateur insiste pour intervenir dans les résultats de recherche (suppression de suggestions réputées diffamantes, déclassement de sites de téléchargement illégal, droit à l’oubli, etc…) et maintenant le même législateur invoque ces interventions pour justifier le rôle éditorial du fournisseur de service.
#6
“la gouvernance des algorithmes” c’est quand les algorithmes rentrent au gouvernement et sont ministres ?
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On sent le vécu
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En même temps, quand on code sans specs….. " />
#12
Ne pas confondre algorithme et programme. Le second correspond souvent à ce que tu décris, le premier est généralement bien foutu.
#13
la mise en valeur en tête du classement de certains contenus au détriment d’autres par l’algorithme s’apparente en effet à un processus de sélection de contenus à partir de critères objectifs comme le prix, la nouveauté et la popularité du contenu
Je vois d’ici la jouissance de ces tocards du sinistère, en train de tripatouiller les résultats de Google et autres (un peu comme les climastrologistes ne triturent les températures qu’à la hausse) afin de vanter les navets et sous-merdes inculturelles qu’ils financent sur notre dos, et de propager leurs idées nauséabondes de pseudo-diversité, mais seulement celle qu’ils tolèrent.
Le seul but de ces fascistes modernes est de soumettre nos espaces de liberté à leur bon vouloir, comme ils tiennent déjà le restant des autres vecteurs de désinformations.
Merci à l’auteur de l’article de nous tenir informés des tentatives de ces immondes cancrelats.
#14