Un député veut identifier les responsables de la fracture numérique
Fool me once...
Le 14 février 2018 à 15h00
6 min
Internet
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Le député Fabrice Brun demande l'ouverture d'une commission d'enquête sur les investissements fixes et mobiles de la dernière décennie. Il veut aussi établir les responsabilités dans le problème des zones blanches et grises sur mobile. Dans un entretien, il s'affiche dubitatif face aux promesses du gouvernement, jugées trop vagues.
Via une proposition de résolution, déposée il y a quelques jours, le député ardéchois Fabrice Brun réclame la création d'une commission d'enquête sur la couverture numérique. Cosigné par une trentaine d'élus, le texte lui demande de dresser un état des lieux précis des zones blanches et grises (sans ou avec un seul opérateur), une évaluation de l'offre fixe et mobile disponible à ces endroits et un constat des responsabilités des opérateurs.
Cette commission d'enquête devrait aussi évaluer les crédits consacrés à la couverture des différents territoires, par les groupes télécoms et l'État. Elle serait aussi chargée de chercher des mesures concrètes pour résorber la fracture numérique... 15 ans après les premiers plans anti-zones blanches mobiles et cinq ans après le lancement du plan France THD.
Les annonces du gouvernement sont encore nombreuses ces derniers mois. La dernière est la conclusion d'un accord avec les opérateurs mobiles, pour déployer la 4G sur (presque) tout le territoire d'ici 2020, via 3,3 milliards d'euros d'investissements privés supplémentaires.
Des initiatives et toujours des questions
Les avancées du gouvernement et les demandes de clarification ont déjà été nombreuses ces derniers mois. Sur le déploiement de l'Internet fixe, les promesses de SFR de fibrer toute la France sur fonds propres, y compris face aux réseaux d'initiative publique (RIP) menés par les collectivités, ont mené à une remise à plat des positions du secteur.
À l'été, le Sénat avait réclamé au régulateur des télécoms (l'Arcep) une étude de la crédibilité de la marque au carré rouge, et des chances de voir le pays couvert en très haut débit en 2022. Sorti fin octobre, le rapport de l'autorité se gardait bien de toute conclusion définitive, mais pointait l'énorme travail restant dans les zones moins denses, les agglomérations moyennes où les opérateurs coinvestissent sur la fibre.
Cette situation avait mené à une proposition de loi du sénateur Patrick Chaize, aussi président de l'Avicca, une association de collectivités... complexifiant la pose d'un réseau fibre en parallèle de ceux des collectivités (voir notre analyse). Si le texte doit être étudié à partir de mars, SFR est déjà revenu sur sa promesse après un revirement important en bourse. Le suivi des déploiements est toujours assuré par l'Agence du numérique et par l'Arcep, même s'il reste (trop) imprécis.
Sur mobile, l'accord signé à la mi-janvier suscite toujours des interrogations. Le sénateur Hervé Maurey a immédiatement réclamé son contenu, tout comme nous. L'Arcep a depuis publié les engagements des opérateurs, au niveau national, sans détailler les contreparties négociées (censées apparaître dans les prochains contrats de licences mobiles).
En novembre, devant un parterre d'élus locaux, l'Agence du numérique et la Direction générale des entreprises (DGE) constataient les dysfonctionnements de la couverture mobile et de la plateforme mise en place pour remonter (et régler) ces problèmes, France Mobile. L'accord signé avec les opérateurs, à la mi-janvier, a rendu caduque une partie des projets de ces entités ministérielles, en confiant plus de responsabilités aux opérateurs eux-mêmes.
Il y a quelques jours, plusieurs associations de collectivités, dont l'Avicca, ont réclamé une visibilité des déploiements par commune. Les Régions de France ont fait bande à part, avec des demandes d'engagements locaux des opérateurs et une répartition claire des rôles entre les différentes collectivités (voir notre analyse).
Fabrice Brun « très dubitatif » sur l'objectif 2022
Pour sa part, le député Fabrice Brun ne croirait plus aux promesses du gouvernement. « On a déjà entendu ce discours en 2012 de Manuel Valls et le problème n'a absolument pas été résolu » avance-t-il, se fixant sur la fracture numérique existant encore entre le très haut débit fixe et mobile des villes et les problèmes récurrents de couverture en campagne.
Il critique l'appui des gouvernements successifs sur les opérateurs privés. « Les pouvoirs publics, au lieu de prendre en main le sujet eux-mêmes, signent avec les opérateurs, avec plus ou moins de bonheur sur la couverture » estime-t-il. « Au final, les opérateurs ont un intérêt à développer les réseaux dans les zones agglomérées et rentables, plus que dans les zones rurales », pointe-t-il. « Je suis très dubitatif sur l'Internet très haut débit pour tous en 2022. »
« On manque d'éléments tangibles pour savoir si on a mis les moyens financiers et techniques pour en finir avec ce problème en 2022. J'ai peur qu'on soit dans un marché de dupes » lance l'élu.
Pour lui, « le chiffre de 3,3 milliards d'euros est jeté en pâture », sans plus de détails, alors qu'il s'agit d'un facteur de compétitivité des territoires. « Je veux la garantie que le problème sera réglé en 2022. Cela représente beaucoup d'opportunités manquées pour développer des activités en Ardèche méridionale, qui est un peu le paradis » lance le député, bien dans son rôle.
Un fonds de péréquation pour le très haut débit
Quel espoir a-t-il vraiment qu'une commission parlementaire change quoi que ce soit à la situation ? L'élu reste vague, insistant simplement sur le besoin de transparence, et la pression que l'Assemblée doit faire peser sur le gouvernement et les opérateurs.
Au fond, Fabrice Brun voudrait voir émerger un fonds de péréquation pour le très haut débit, comme il y en a eu pour l'électrification du pays. Autrement dit, le député souhaite que les bénéfices des zones urbaines financent les coûts de déploiement dans les zones rurales les plus reculées. C'est déjà le principe des réseaux d'initiative publique pour la fibre, comme l'admet Fabrice Brun. Pourtant, « cette péréquation n'est pas totale sur les RIP », en n'incluant pas les agglomérations les plus denses où vit 57 % de la population, couvertes par les opérateurs privés sur leurs deniers.
Concrètement, il est partisan d'une taxe de « 75 centimes par mois et par abonnement » sur les opérateurs télécoms, proposée en août. L'idée est un véritable serpent de mer, déjà retoquée dans une forme proche en 2016. Pourtant, selon le député, en taxant les opérateurs « 900 millions d'euros par an, ça les ferait bouger ! ».
Concernant sa proposition de commission, le député a peu d'éléments concrets à apporter, le calendrier éventuel lui étant inconnu pour le moment.
Un député veut identifier les responsables de la fracture numérique
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Des initiatives et toujours des questions
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Fabrice Brun « très dubitatif » sur l'objectif 2022
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Un fonds de péréquation pour le très haut débit
Commentaires (40)
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Abonnez-vousLe 14/02/2018 à 15h16
Si le boulot est bien fait, y à quelques opérateurs qui vont pas apprécier ^^
En tout cas c’est pas mal que les parlementaires mènent l’enquête et veillent au grain " />
Le 14/02/2018 à 15h16
Il veut aussi établir les responsabilités dans le problème des zones blanches et grises sur mobile.: En partis les association du genre robin des toits et cie, ainsi que ceux qui panique d’avoir une antenne tour proche d’eux pour X raisons." />
Le 14/02/2018 à 15h17
Je continue ?
Le 14/02/2018 à 15h21
Le 18/02/2018 à 19h47
Le 19/02/2018 à 12h58
Le 19/02/2018 à 14h51
Le 19/02/2018 à 14h54
Pourquoi les effets sont arrivés avec l’installation de la nouvelle mais pas avec la présence de l’ancienne ?
Le 14/02/2018 à 15h38
Penser aussi aux électro-sensible, ceux pleurant la perte de valeur de leurs biens." />
Le 14/02/2018 à 15h42
Le 14/02/2018 à 15h47
M’avait bien fait marrer cet histoire." />
Le 14/02/2018 à 15h53
Le 14/02/2018 à 15h56
Ah bon ? Alors pourquoi on capte sur le trottoir quand l’antenne est en haut d’un immeuble ? " />
Sinon, le député questionne aussi sur la fibre, pas que sur le mobile " />
Le 14/02/2018 à 15h59
Le 14/02/2018 à 16h22
Ce député méconnaît la réalité politique : il suffit de redéfinir à la baisse la notion de très haut débit pour réussir à afficher une parfaite tenue des engagements de l’état.
Je crois que dans ce cadre on est déjà bien en avance, puisqu’à ma connaissance il suffit d’une synchro VDSL 30mbps ATM pour faire partie du club THD. Autant dire, vu les garanties de débit sur ce genre d’offres commerciales : quelque chose entre 512kbps et 30mbps. Src fiche standardisée Orange : “Débit descendant minimum garanti de 512 kb/s”.
Donc pas de panique ! Nous sommes en bonne voie.
Le 14/02/2018 à 16h37
(Pas le bon comm.)
Le 14/02/2018 à 16h38
Je n’ai pas spécialement d’avis sur la question, mais cela ne signifie pas pour autant que les antennes actives sont sans effet sur la santé.
Le 14/02/2018 à 16h59
« Je suis très dubitatif sur l’Internet très haut débit pour tous en 2022. »
Rahhhh mais faut qu’il arrête , lui , de dévoiler sur la place publique ce que tout ceux qui travaillent dans le domaine savent déjà ! Les gens veulent des promesses, Macron & sa clique leur donne, point….
Le 14/02/2018 à 17h25
déjà voila: “15 ans après les premiers plans anti-zones blanches mobiles et cinq ans après le lancement du plan France THD.” Rien qu’avec cela tout le monde se marre.
Mais en plus il ne faut pas oublier que la fracture numérique n’est pas seulement le fait de la couverture. L’éducation aussi est un thème à aborder quand on parle du sujet… Et il y en a d’autres des sujets. Ça fait pas moins de 30ans que le gouvernement est juste “même pas là” voire complice des atrocités qu’on a pu voir dans le domaine.
Ironie du sort c’est le gouvernement qui va se mandater lui-même pour trouver un coupable. Problème c’est aussi un peu (voire très beaucoup complètement) lui le coupable…
Le 14/02/2018 à 17h27
Le 14/02/2018 à 17h29
Le 14/02/2018 à 17h35
Le 14/02/2018 à 19h04
la fracture numérique ? responsable…mais pas coupable !" />
Le 14/02/2018 à 19h11
Le 14/02/2018 à 19h33
“900 millions d’euros par an, ça les ferait bouger ! ”
Le 14/02/2018 à 22h52
J’vais passer pour un connard, mais de toute façon, nous vivons bien trop longtemps et c’est pas forcément une bonne chose " />
Le 14/02/2018 à 22h54
“SFR propose de fibrer* toute la France à ses frais”
" />
Le 15/02/2018 à 04h12
Yep, j’ai vu " />
“Edité par kevinz le mercredi 14 février 2018 à 20:35” ;)
Le 15/02/2018 à 06h14
Le 15/02/2018 à 06h42
Sans compter qu’une grosse dose de gros mythos hurle à la mort dès qu’on parle d’antenne ou plus simplement de déployer le Wifi dans l’enterprise.
Je l’ai vécu quand nous avons posé les bornes Wifi dans un batiment, deux jours plus tard, il y a avait des plaintes indiquant des maux de têtes mystérieux, une hausse de la nervosité… sauf que les bornes n’étaient pas branchées…
J’ai une borne Wifi à 1m de moi pour des tests et la 1ère personne du CHCST qui me fait une remarque va prendre la porte.
Le 15/02/2018 à 07h09
Le problème c’est pas vraiment le haut débit mais les sites qui deviennent de plus en plus lourd pour rien comme nxi.
Le 15/02/2018 à 11h00
C’est quand même pas banal de demander encore une contribution aux gens qui, pour avoir de meilleures services, acceptent également les inconvénients de la vie en zone dense (dont des surcoûts sur le logement ou les temps de transport, notamment). D’autant qu’il n’y a pas non plus AUCUN service en Ardèche méridionale, du moins dans les zones un peu peuplées, juste un service pas terrible.
Pour rappel quand même, l’Ardèche méridionale, c’est grosso modo 50 hab / km², et une seule commune dépassant les 10 000 habitants; l’Île-de-France, 1000 hab / km² (et à peu près autant dans les zones centrales de la plupart des aires urbaines moyennes). De la à dire qu’équiper cette dernière était vingt fois plus important, il y a un pas que je franchis l’esprit tranquille.
Cela sans tenir compte des pesanteurs, problèmes techniques et de gouvernance du déploiement des infrastructures, qui n’en doivent pas moins être combattues.
Le 15/02/2018 à 12h00
Le 15/02/2018 à 13h49
Le 15/02/2018 à 15h44
C’est inverser le problème: il y a déjà d’importants transferts villes > campagnes sous plein de formes, et même Île-de-France vers tout le reste du pays (hors peut-être départements savoyards) qui font que l’effort financier public est plus important par habitant de zone périurbaine ou rurale. Idem du côté de la représentation nationale, dans un registre un peu différent : il y a une sur-représentation nette et bien connue de sénateurs de territoires ruraux par rapport aux urbains. Ce n’est que rarement dit, et on imagine souvent l’inverse, mais les faits sont là. En somme, les urbains bénéficient collectivement d’avantages territoriaux qui tiennent à divers effets d’agglomération (c’est tout l’intérêt de la ville), mais individuellement ils subventionnent largement le mode de vie de leurs concitoyens vivant hors des agglomérations, voire hors des aires urbaines. Dans le domaine des infrastructures, ce député ne fait d’ailleurs pas autre chose que de demander à ce qu’on refasse de la “péréquation” comme on l’a fait pour les routes, le téléphone, ou l’électricité… ce qui ne signifie pas autre chose que de construire et d’entretenir des réseaux très étendus financés par tous essentiellement au bénéfice d’une minorité. Alors dans le cas de certaines infrastructures considérées comme essentielles, je veux bien faire jouer la solidarité, mais le refrain de la ruralité sacrifiée a ses limites quand il s’agit de la fibre.
Je ne sais pas si vous connaissez le sud de l’Ardèche, mais assez vite on se retrouve avec une maison ou deux perdues tous les 300 mètres, je ne vois pas bien comment quelqu’un qui déciderait de vivre là pourrait trouver justifié qu’on lui creuse une tranchée et qu’on lui tire de la fibre à son bénéfice exclusif sur des dizaines de mètres pour qu’il puisse prétendre tout seul à du FTTH, alors que des petites villes proches comme Bollène, pourtant dans la vallée du Rhône, ne sont pas elles-mêmes fibrées. Je force un peu le trait, mais l’idée est quand même là.
Après, encore une fois, dans le cas de problèmes type un super RIP auto-financé où les opérateurs feraient les morts sans motif valable, je suis d’accord qu’il y a un souci. Je récusais plutôt l’argument général du “on est sacrifiés”, qu’on n’a d’ailleurs pas attendu vingt ans pour entendre.
Le 15/02/2018 à 16h12
Le 16/02/2018 à 02h37
Le 16/02/2018 à 05h22
Moi ce qui me fait rire ,c’est que ça fait 20 ans que ça dure ^^,rendez vous dans 20 ans pour voir ou on en sera.
Peut être la création d’une commission d’expertise de responsabilité pour savoir ou sont passés les fonds accordés ^^
Le 16/02/2018 à 12h04
Le 16/02/2018 à 15h09