DAS : plongée dans les rapports détaillés de l’ANFR, sur les ondes émises par 442 téléphones
20 000 pages sous la mer
Lire notre dossier sur le DAS et la publication des rapports de l'ANFR :
Le 08 mars 2018 à 14h04
10 min
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L'ANFR publie enfin ses rapports de mesures détaillés sur les DAS de 442 smartphones, et en profite pour ajouter quatorze nouveaux modèles. Gilles Brégant, directeur général de l'ANFR, nous explique néanmoins que les chiffres de certains « ne sont pas bons ». Des enquêtes sont en cours, avec des sanctions possibles à la clé.
Si l'ANFR publie depuis l'année dernière les maximums des DAS mesurés lors de ses opérations de contrôles, ce n'est pas le cas des rapports complets effectués par des laboratoires certifiés. Annoncée en novembre 2017, leur mise en ligne est désormais effective. « Nous n’avons rien à cacher » se justifie à nouveau le directeur général de l'agence des fréquences.
L'ANFR profite du tir pour publier les résultats de quatorze nouveaux téléphones, tous conformes aux normes actuelles. Pour rappel, le choix des modèles se fait en interne. Parmi les critères : la popularité ou l'apparition d'une marque. Un TP-Link Neffos Y5 est ainsi disponible dans ce nouveau bilan, une première pour le fabricant.
Tous les résultats ne sont pas roses pour autant : cette nouvelle publication étant seulement la partie visible de l'iceberg. Des dossiers contentieux sont en cours de traitement, nous indique le directeur général de l'ANFR, avec de possibles sanctions à la clé (nous y reviendrons).
- Ondes émises par les smartphones : #PhoneGate, risques sanitaires et mesure du DAS
- Le long chemin de la mise en ligne (partielle) des mesures du DAS de l'ANFR
- DAS : plongée dans les rapports détaillés de l'ANFR, sur les ondes émises par 442 téléphones
Des rapports de plusieurs dizaines de pages, avec un guide de lecture
C'est enfin fait. Ce long travail, ralenti fin 2017 avec l'entrée en vigueur de la directive RED, porte désormais ses fruits. Une grille de lecture annotée accompagne cette publication. Sont mises en évidence les parties importantes, histoire de faciliter la lecture même par le grand public.
Les données sont disponibles sous forme de tableau, avec des filtres pour affiner la recherche. Chaque téléphone est associé à un lien permettant d'accéder au(x) rapport(s) complet(s) le concernant. Bien évidemment, il est possible d'exporter l'ensemble des données au format CVS, JSON et Excel. Pour les rapports, il faudra les télécharger manuellement.
Une vidéo présentant le déroulement d'un test a aussi été mise en ligne. De la mise en place du liquide à la vérification des instruments, l'étalonnage et les mesures, tout y passe. Elle permet également de bien cerner visuellement la différence entre des mesures DAS tête et tronc :
Le guide et la vidéo n'étaient pas les seuls travaux préalables à la publication nous commente Gilles Brégant, directeur général de l'ANFR : « il fallait auparavant avoir des accords de la part des laboratoires, les documents n'étant pas destinés à une publication ».
De plus, ils proviennent de différents laboratoires européens, essentiellement trois sélectionnés par appel d'offres. L'agence a « essayé de faire en sorte que les rapports aient une forme aussi proche que possible les unes des autres », toujours dans un souci de simplicité.
Un cas pratique avec les deux rapports du Honor 6A
Certains smartphones peuvent avoir deux rapports : un pour le DAS tête, l'autre pour le DAS tronc. À chaque fois, le principe reste le même : quelques informations générales pour commencer, ensuite un résumé des résultats, les conditions et l'environnement des tests, le détail complet des mesures et des schémas pour finir.
Le résumé est intéressant, car il donne le DAS maximum mesuré pour chaque bande de fréquences du test : 800, 900, 1 800, 1 950 et 2 600 MHz dans le cas de l'Honor 6A qui servira d'exemple aujourd'hui. Dans son tableau récapitulatif, l'ANFR reprend simplement des DAS tête et tronc, de respectivement 0,373 et 1,11 W/kg.
Le résumé du rapport détaillé permet d'apprendre que le DAS tête de 0,373 W/kg est atteint sur la bande des 1 950 MHz (3G). À titre de comparaison, le débit d'absorption n'est que de 0,120 W/kg sur les 1 800 MHz (4G). Sur le DAS tronc, le maximum de 1,11 W/kg arrive sur la bande des 1 800 MHz (2G), alors qu'il descend à 0,342 W/kg sur les 800 MHz (4G).
Les résultats détaillés du DAS tronc et tête
Au total, 98 mesures de DAS juste pour un smartphone
Plus loin dans le rapport, l'ensemble des résultats permet d'être plus précis. Sur le DAS tête, le smartphone peut être posé sur la joue ou incliné de 15°, en étant tenu par la main gauche ou droite. Dans le cas du Honor 6A, six combinaisons sont testées sur sept bandes de fréquences, soit 42 mesures en tout. Avec le DAS tronc (à 5 mm), les résultats mesures sont faites sur la face avant, arrière, droite, gauche, dessus et dessous, et ce, pour chaque bande de fréquence. Cela représente pas moins de 56 mesures pour notre smartphone du jour.
Si l'on revient sur le maximum de 1,11 W/kg, le rapport précise qu'il s'agit de la face du dessous. Sur le dessus, le DAS n'est plus que de 0,014 W/kg, contre 0,208 W/kg à droite, 0,101 W/kg à gauche, 0,599 W/kg sur l'avant et enfin 1 080 W/kg à l'arrière. Bref, selon la position du smartphone, les résultats sont loin d'être les mêmes.
Le détail des mesures du DAS tête présente une situation analogue, mais avec des écarts moins marqués. Rien de surprenant puisque le maximum est bien moins élevé que sur le tronc. On remarque tout de même des différences notables entre la main gauche et la main droite suivant les cas : respectivement 0,286 et 0,349 W/kg sur la bande des 900 MHz par exemple.
Au total, 98 DAS sont ainsi disponibles pour le Honor 6A, contre seulement 2 sur le tableau proposé jusqu'à présent.
Une partie de l'ensemble des mesures des DAS tronc et tête
« On a des téléphones dont les chiffres ne sont pas bons »
L'autre nouvelle du jour, c'est la mise en ligne des résultats de quatorze nouveaux smartphones : Sony Xperia X et XA1, Alcatel Pixi 4, U5 et Shine Lite, Huawei Nova et P10 Lite, LG G6, Motorola X4, TP-Link Neffos, HTC Desire 650, Thomson T Link 11, Honor 6A et Galaxy J3.
Tous ont passé les tests avec succès, contrairement à d'autres modèles. L'ANFR est encore en train de régler certains dossiers avec des constructeurs. Elle communiquera de manière individuelle à chaque fois que l'un d'entre eux se clôturera, pas avant. La procédure étant couverte par un équivalent du secret de l'instruction.
Avec « le DAS tête, on a rarement des soucis de dépassement, car il est vraiment bien compris par les constructeurs depuis longtemps » nous explique l'agence. Par contre, « sur le DAS tronc, on a des téléphones dont les chiffres ne sont pas bons », mais nous n'en saurons pas plus pour le moment.
L'ANFR peut prononcer des sanctions, sous conditions
Lorsque les mesures de contrôle de l'ANFR ne sont pas conformes, l'agence contacte le fabricant et lui adresse son rapport. Il peut alors émettre des objections ou des remarques afin de se justifier. Par exemple, contester les conditions du test ou les résultats notamment à cause de l'incertitude des mesures (de l'ordre de 20 %), demander une seconde expertise, expliquer que le téléphone a été retiré du marché, etc.
« On constate les défauts, on les communique au constructeur, on lui dit qu'il se met en infraction et on le met en demeure de mettre fin à cette situation » résume Gilles Brégant. Telle une Hadopi des ondes, « on envoie un coup de semonce au constructeur : vous avez été flashé à tel niveau ».
Avant de penser aux sanctions, le constructeur doit se mettre en conformité. Il propose ainsi une liste des mesures qu'il entend prendre. Il a plusieurs possibilités d'action nous précise l'ANFR : cesser la production, rappeler les stocks, demander aux clients de retourner leur smartphone et/ou déployer une mise à jour afin de limiter la puissance du téléphone et ainsi diminuer le DAS.
Il faut néanmoins que l'agence donne son accord et surtout « constate que la mesure est efficace sans une démarche trop complexe de la part de l'usager ». Pour cela, de nouvelles vérifications sont effectuées si nécessaire (dans le cas d'une mise à jour OTA par exemple). Seul regret, la procédure n'a pas de limite de durée, elle peut donc trainer en longueur.
Suite à quoi, soit le téléphone est jugé conforme et la procédure prend fin, soit il est définitivement en infraction et l'ANFR peut prononcer une amende et transférer le dossier au pénal. « Aujourd'hui, des téléphones sont dans cette procédure » et l'agence n'exclut pas de prononcer des sanctions « dans les semaines qui viennent ». Affaire à suivre.
Dans tous les cas, « on n'a pas la capacité de sanctionner une infraction, on a la capacité de sanctionner la réitération de l'infraction ». Pour éviter toute mauvaise surprise, les échanges dans le cadre d'une procédure se font par courrier afin d'en garder une trace.
Et maintenant ? Le DAS membre en ligne de mire
L'ANFR va continuer de vérifier les allégations des constructeurs avec un rythme plus ou moins identique de 80/90 smartphones par an environ. Le DAS membre devrait faire son apparition prochainement, lorsque l'arrêté manquant sera publié : « on envisage de pouvoir commencer les travaux de DAS membre quand le texte sera applicable, c'est-à-dire plutôt au deuxième semestre » lâche le directeur général de l'agence.
Comme c'est le cas pour les DAS tête et tronc, le détail des mesures et des rapports sera mis en ligne. L'agence prévoit de continuer ses publications au rythme de deux fois par an (automne et printemps environ). Mais le calendrier pourra être bousculé en fonction de la fin de certaines procédures.
Dans tous les cas, la publication des rapports détaillés est une bonne chose, allant dans le sens d'une meilleure information au public. Une personne peut ainsi consulter l'ensemble des mesures du DAS avant de choisir un smartphone. Sachez enfin que si vous souhaitez réduire le niveau d'exposition aux ondes émises par votre mobile, un guide a été récemment mis en ligne.
Six recommandations pour réduire son exposition aux ondes
Fin novembre, le Ministère de la Transition écologique et solidaire lançait une campagne d'information « téléphone mobile et santé ». Elle s'appuie sur les recommandations de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES).
Le gouvernement commence par rappeler qu'il « n’existe pas aujourd’hui de preuve scientifique démontrant que l’usage des téléphones mobiles présente un risque pour la santé ». Néanmoins, à titre de précaution et faute de recul suffisant, « des interrogations subsistent sur d’éventuels effets à long terme des ondes radiofréquences, d’autant plus que certains consommateurs font de ces technologies un usage intensif et ce de plus en plus jeune ».
Six recommandations sont faites :
- Utiliser un kit mains-libres ou le haut-parleur
- Éviter les conversations trop longues
- Privilégier les messages texte pour communiquer
- Éviter de maintenir votre téléphone à l’oreille dans les transports
- Privilégier les zones de bonne réception
- Choisir un téléphone mobile ayant un DAS faible
DAS : plongée dans les rapports détaillés de l’ANFR, sur les ondes émises par 442 téléphones
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Des rapports de plusieurs dizaines de pages, avec un guide de lecture
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Et maintenant ? Le DAS membre en ligne de mire
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Six recommandations pour réduire son exposition aux ondes
Commentaires (15)
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Abonnez-vousLe 08/03/2018 à 14h12
1, 2, 3… #Shitstorm !
Le 08/03/2018 à 14h17
Beaucoup de test et d’argent pour une “norme” que seul quelques initiés comprennent xD
Faudrait trouver des étudiants pour exploiter les data et sortir une étude plus détaillée
Le 08/03/2018 à 14h24
Les datas sont “un plus”, comme expliqué, le rôle de l’ANFR c’est aussi de vérifier les allégations des constructeurs sur des smartphones du commerce ;)
Le 08/03/2018 à 14h29
Et le DAS coucougnette/foufoune ? C’est le plus important quand on a son téléphone dans la poche du pantalon/jupe " />
Le 08/03/2018 à 14h33
ok ok merci de la précision, je trouve ça presque lourd comme vérification…
Je m’interroge sur la personne qui paye le dit test… Dans mon esprit c’est au constructeur de passer par un labo indépendant qui testera en suivant les demandes de l’ANFR, qui elle se contentera de l’auditer de temps en temps. Je ne vois surement pas tout le tableau
Le 08/03/2018 à 14h34
Petits problèmes de saisie par endroits " />
IPHONE 3 GSÿ 8GB
Le 08/03/2018 à 14h55
ça va, mon SE est dans les clous même en burnes-contact. Je vais le remettre dans ma poche de ce pas!
Étonnant de voir une telle différence entre le SE et le 5 alors qu’ils partagent la même carcasse.
Le 08/03/2018 à 15h00
C’est expliqué dans les autres parties de ce dossier ;)
Pour résumer :
Les constructeurs ont obligation de passer des tests dans des labos indépendants. Mais les résultats protégés par le secret des affaires, donc pas public. C’est une demande de l’ANFR de les rendre publics pour justement améliorer l’information aux utilisateurs, d’autant que les tests des constructeurs sont plus complet (notamment avec le DAS membre).
L’ANFR a un rôle de vérification, donc elle effectue des contre-mesures (un constructeur peut changer son téléphone après les tests, déployer des màj, etc.). Les tests sont payés par l’ANFR qui prend l’argent sur sa subvention ministérielle pour payer les labos.
Contrairement aux opérateurs mobiles par exemple qui doivent donner de l’argent à l’ARCEP pour que le régulateur puisse effectuer des tests de qualité (c’est inscrit dans les licences 3G/4G) , il n’a y pas de “licence” (ou autres) à accorder pour la France pour les constructeurs de smartphones (marché européen unique toussa)
" />
Le 08/03/2018 à 16h06
Néanmoins, à titre de précaution et faute de recul suffisant,
Je ne comprends pas pourquoi nos responsables politiques n’ont pas directement interdit ces engins communicants sataniques au nom de la plus élémentaire précaution de santé du public, souvent très jeune d’ailleurs. Si des effets à longs termes sont soupçonnés, pourquoi attendre le scandale sanitaire ? Pourquoi nos associations escrolos ne sont-elles pas plus écoutées ?
Voilà qui est quand même hypocrite. Dans un autre contexte où l’on a la chance de disposer de 40 ans de recul d’innocuité avérée, on les écoute et on hésite pas à interdire au nom de ce même principe. " />
Un principe qui fonctionne quand il est inutile, ce n’est pas un principe mais un alibi au service d’une cause agenda.
Le 08/03/2018 à 17h16
Le 08/03/2018 à 18h51
Le 08/03/2018 à 19h12
Pas un seul téléphone de Google : ni Nexus (LG, Huawei), ni Pixel " />
Comment Google est passé à travers ?
Le 09/03/2018 à 07h22
Oneplus non plus ne fait pas partie de la liste… Alors que des marques dont personne n’a jamais entendu parler ont été analysées :/
Le 09/03/2018 à 08h46
Merci beaucoup " /> c’est plus clair !
Le 09/03/2018 à 12h11
ce que j’aimerai qu’ils testent c’est :
1/ est ce que un téléphone avec un das élevé émet plus que un téléphone avec un das faible pour recevoir une signal donné, car ici ils testent combien le tel émet au plus mais pas combien il émet pour “capter” un signal donné, ce n’est pas parce que il peut émettre 1W/kg de das que ce tel va tout le temps le faire.
2/ voir si un tel “capte” mieux qu’un autre (avec une appli sur le tel pour voir combien il capte de signal ou le nombre de barrette du signal réseau) sur un signal donné
Ça serait vraiment bien car du coup on pourrait savoir s’il y a un lien de causalité entre das et réçeption ou forme de l’antenne ou puce mobile.