Les mesures numériques de la loi « Avenir professionnel »
Pénicaud ni tête
Le 07 septembre 2018 à 14h24
8 min
Droit
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Expérimentation d’un « journal de bord numérique » pour les chômeurs, octroi d’un « droit de communication » pour l’Inspection du travail (notamment sur les données de connexion), réforme des obligations d’accessibilité des sites publics... Next INpact revient sur plusieurs mesures de la dernière « loi Pénicaud », publiée hier au Journal officiel.
Définitivement adopté par le Parlement le 1er août dernier, le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a été promulgué par Emmanuel Macron, mercredi 5 septembre.
Le texte, principalement orienté vers l’apprentissage et la formation, avait préalablement fait les frais de son passage devant le Conseil constitutionnel. Une dizaine d’articles ont en effet été retoqués par les « Sages », notamment parce qu’il s’agissait de « cavaliers législatifs » (dispositions jugées sans lien avec le projet de loi) introduits par les parlementaires.
Plusieurs de ses articles touchent néanmoins de près à la sphère numérique.
Un « tableau de bord numérique » pour les chômeurs
En dépit de vives oppositions, le législateur a souhaité que les chômeurs de plusieurs régions soient tenus, à titre expérimental, de fournir chaque mois des renseignements sur « l’état d’avancement de leur recherche d’emploi ». L’objectif ? Améliorer « le suivi et l’accompagnement » des demandeurs d’emploi, dans une optique parfois de remotiver certaines personnes.
La mise à jour de ce « journal de bord numérique » sera obligatoire (lors de l’actualisation mensuelle). Faute de quoi, le chômeur « cessera d’être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi », explique le gouvernement dans son étude d’impact.
Pour l’heure, cette initiative s’avère néanmoins extrêmement vague. Le chômeur devra-t-il uniquement indiquer qu’il a envoyé des candidatures spontanées ou répondu à des offres d’emploi ? Devra-t-il fournir de nombreuses précisions (dates, noms des entreprises...), voire télécharger tous les justificatifs afférents ? Il faudra attendre le décret d’application de ce dispositif pour en savoir plus.
Le texte précise simplement que cette expérimentation sera « mise en œuvre pour une durée de dix‑huit mois à compter du 1er juin 2019 ». On ne sait pas non plus combien de « régions » seront exactement désignées (par arrêté du ministre chargé de l’emploi).
Un « droit de communication » pour l’Inspection du travail
Afin de lutter contre la fraude, l’Inspection du travail se voit octroyer un précieux « droit de communication », valable notamment auprès des opérateurs téléphoniques et fournisseurs d’accès à Internet.
Dans son étude d’impact, le gouvernement rappelle que cet outil juridique permet à « un service de contrôle de demander communication et éventuellement d’obtenir copie d’un document ou d’un élément d’information utile à son enquête, auprès de la personne contrôlée mais aussi auprès de tiers (par exemple, un fournisseur de matériaux de construction, un opérateur de téléphonie ou d’internet, un loueur de véhicule, etc.) ».
Dorénavant, les agents de contrôle de l’Inspection du travail sont ainsi en mesure d’exiger « tout document, renseignement ou élément d’information » qui serait « utile » à « la recherche et la constatation des infractions constitutives de travail illégal » (ce qui inclut notamment le prêt illicite de main-d’œuvre, le travail dissimulé, l’emploi d’étrangers sans titre de travail, le cumul irrégulier d’emplois, etc.). Le secret professionnel ne peut alors leur être opposé.
La loi précise néanmoins que s’agissant des données conservées et traitées par les opérateurs et FAI, ce droit de communication ne s’applique « qu’aux seules données permettant l’identification des personnes proposant un travail, une prestation ou une activité pouvant relever des infractions constitutives de travail illégal ».
Les informations sollicitées devront quoi qu’il en soit être fournies sous trente jours aux autorités, gratuitement, sans passage devant un juge ou la moindre autorité indépendante.
Accès aux logiciels et aux données, avec « restitution en clair »
Dans le même temps, le législateur a renforcé les pouvoirs d’enquête de l’Inspection du travail dans le cadre de ses contrôles sur place. « Au cours de leurs visites », les contrôleurs pourront désormais réclamer tout « élément d’information » propre à « faciliter l’accomplissement de leur mission » de recherche et de constatation des infractions constitutives de travail illégal.
Cela inclut les documents comptables et professionnels, mais aussi l’ensemble des « données informatisées » dont ils auraient besoin. Les inspecteurs du travail peuvent ainsi « prendre copie immédiate » de ces fichiers, « par tout moyen et sur tout support ». La loi prévoit même qu’une « restitution en clair » de ces informations puisse être exigée, outre une « transcription par tout traitement approprié en des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle ».
Travail au noir : des condamnations systématiquement mises en ligne
Toujours afin de lutter contre la fraude, le législateur a souhaité que les condamnations pour travail dissimulé (en bande organisée) soient systématiquement rendues publiques sur Internet, via le site du ministère du Travail. Un tel dispositif existe déjà depuis 2014, mais il ne s’agit que d’une peine complémentaire, non automatique.
Pendant une durée maximale d’un an, ont ainsi vocation à se retrouver en ligne : le nom de l’entreprise condamnée, son numéro de SIREN ou de SIRET, son adresse, l’identité de son représentant légal, la date et le « dispositif » de la décision (c’est-à-dire le détail des sanctions), etc.
Les juges pourront néanmoins exempter certains condamnés, « en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur ». Leur décision devra alors être « spécialement motivée ».
Réforme des règles d’accessibilité des sites publics
Le gouvernement a – assez curieusement – profité du projet de loi « Avenir professionnel » pour revoir les règles relatives à l’accessibilité des sites, applications, intranets, progiciels... publics (notamment pour les personnes ayant des problèmes de vue), conformément à une directive européenne de 2016.
Il est ainsi prévu que de nouveaux organismes, à l’image des groupements d’intérêts publics, soient tenus de rendre leurs « services de communication au public en ligne » accessibles aux personnes handicapées, tel que le prévoit la « loi Handicap » de 2005.
La véritable nouveauté réside dans le fait que les administrations ne sont désormais plus tenues de se mettre en conformité avec ces règles d’accessibilité lorsque cela leur crée « une charge disproportionnée ». Le problème est que cette notion, issue de la directive, n’a pas été précisée par le législateur. Celui-ci a renvoyé la balle au gouvernement, qui devra la définir au travers d’un décret en Conseil d’État.
Si ce flou inquiétait les associations, le gouvernement faisait de son côté valoir que « le fait de clarifier les critères pour déterminer une telle charge, comme l’impose la directive, est un progrès dans la mesure où il encadre l’exercice et ses dérogations et crédibilise l’obligation d’accessibilité ».
Il n’en demeure pas moins que l’introduction de cette dérogation s’apparente pour certains à une sorte de « joker », facilement utilisable par les administrations guère pressées de rendre leurs contenus accessibles, notamment dans le contexte actuel de restrictions budgétaires. « Les acteurs, tant qu'ils peuvent déroger... Ils dérogent » nous avait ainsi expliqué Nicolas Mérille, de l’association APF France Handicap (voir notre article).
Lot de consolation : le législateur a rehaussé les sanctions encourues en cas de défaut de mise en conformité. Les administrations s’exposent désormais à des amendes administratives de 25 000 euros maximum, contre 5 000 euros jusqu'ici.
Les dispositions sur la « responsabilité sociale des plateformes » retoquées
Notons enfin que parmi les articles censurés par le Conseil constitutionnel pour défaut de lien, « même indirect », avec le texte présenté par le gouvernement, figure notamment des dispositions qui visaient à renforcer la « responsabilité sociale » des plateformes de type Uber ou Deliveroo. Le législateur souhaitait notamment que chacun de ces intermédiaires établisse une charte « définissant ses droits et obligations ainsi que ceux des travailleurs avec lesquels elle est en relation ».
Autre article à avoir été retoqué : celui qui venait compléter la loi Numérique de 2016, en prévoyant que les établissements d’enseignement supérieur privés puissent dispenser, tout comme les universités publiques, des cours à distance (avec possibilité de validation).
Les mesures numériques de la loi « Avenir professionnel »
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Un « tableau de bord numérique » pour les chômeurs
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Un « droit de communication » pour l’Inspection du travail
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Accès aux logiciels et aux données, avec « restitution en clair »
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Travail au noir : des condamnations systématiquement mises en ligne
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Réforme des règles d’accessibilité des sites publics
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Les dispositions sur la « responsabilité sociale des plateformes » retoquées
Commentaires (27)
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Abonnez-vousLe 09/09/2018 à 09h29
Le 09/09/2018 à 19h25
Le 09/09/2018 à 22h32
Le 09/09/2018 à 23h08
Le 10/09/2018 à 07h53
Le 10/09/2018 à 11h38
+1
surtout que niveau formation, aucune aide de pôle emploi, il faut pratiquement les violer avec son dossier complètement rempli et accepté par l’organisme formateur et même comme cela, ils te répondent non (du vécu après le licenciement économique de ma femme, ma député en marche se trouvait toute conne quand on a gueulé auprès d’elle, évidemment tout le monde s’est empressé de ne rien faire) et après les mêmes feignasses viennent te dire qu’elles vont te pister parce que tu es un vilain chômeur qui coûtent cher et ne veux pas travailler.
L’organisme de formation était les gobelins (très bon accueil, des gens charmant et compétant), la députée celle de la circonscription de melun, le pôle emploi CSP celui de lieusaint, le pôle emploi remplis de débiles, celui de dammarie les lys…autant tout balancer, ça fait très nouveau monde!!!
Le 10/09/2018 à 11h42
Le 10/09/2018 à 11h53
Le 10/09/2018 à 14h36
Hé oui.
Système de merde encore.
Le 10/09/2018 à 14h55
Le 11/09/2018 à 08h44
Le 11/09/2018 à 17h40
Le 07/09/2018 à 15h24
On a 6 millions de pas/mal employés dont 4 millions sont employables quasi immédiatement et environ 200 000 à 300 000 postes non pourvus dont une moitié environ est fantaisiste ou illégale (voir le tests en aveugle menés par la CGT à pôle emploi depuis quelques années).
Je pense que on peut raisonnablement repasser les CP de REP à 13 élèves et envoyer quelques politiciens et hauts fonctionnaires et journalistes/communicants refaire le programme de maths avec les petits. " />
C’est tellement honteux ce harcèlement et cette stigmatisation des chômeurs alors que tout le monde sait pertinemment qu’il n’y a pas de boulot pour eux. Le but c’est quoi, que les gens se suicident avec leur famille tellement on leur renvoie une image de feignasses de merde?
Que ceux qui ont des jobs à la con se sentent valorisés par rapport aux feignasses de merde?
D’avoir l’air de faire quelque chose alors qu’on touille une gamelle de pus?
De réintroduire le livret ouvrier en passant par le dispositif pôle emploi?
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Le 07/09/2018 à 15h25
Visiblement les personnes handicapées ne sont pas aimés de ce gouvernement. Et je ne comprends toujours pas où est la difficulté insurmontable de faire des sites accessibles (par exemple et à tout hasard, naturellement, comme Parcoursup, en 2018, et ne répondant pas aux normes d’accessibilité). Il y a des tonnes de développeurs compétents qui pourraient faire le travail sans que cela coute forcément des fortunes.
Concernent les pouvoirs de l’inspection du Travail, ça va rester théorique étant donné la faiblesse des effectifs…
Le 07/09/2018 à 15h30
Le 07/09/2018 à 15h30
Sinon c’est bien pour les inspecteurs du travail mais tant qu’on ne leur rendra pas au moins l’effectif qu’ils avaient avant les grandes saignées de la dernière décennie même avec des pouvoir renforcés ils ne feront quasi pas de contrôles. Pas assez en tous cas.
Et pour l’emploi au noir comme ce sont des sous traitants de sous traitants généralement qui font venir des étrangers au noir sur les chantiers ça crée juste un annuaire des sous traitants indélicats qui acceptent de servir de fusible non?
Le 07/09/2018 à 15h30
Je pige pas bien leur accès aux données. Surtout en informatique où on peut avoir de la rémunération contre découvertes de failles, ça va finir en suspicion de travail dissimulé, et l’entreprise derrière va refuser de donner accès à ses données.
Le 07/09/2018 à 15h33
Et une part importante des allocataires est constituée de personnes entre 2 contrats précaires.
La durée moyenne d’indemnisation est de 10 mois.
Mais ce gouvernement n’est bon qu’à de la communication populiste. Sur l’immigration, c’est encore pire.
Le 07/09/2018 à 15h34
D’autant qu’il existe des administrations qui bossent sur le sujet et publient en open source
GitHub(Bon ça a l’air “jeune” comme techno " /> mais c’est la preuve que c’est possible)
Le 07/09/2018 à 15h37
L’objectif ? Améliorer « le suivi et l’accompagnement » des demandeurs d’emploi, dans une optique parfois de remotiver certaines personnes. La mise à jour de ce « journal de bord numérique » sera obligatoire (lors de l’actualisation mensuelle). Faute de quoi, le chômeur « cessera d’être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi », explique le gouvernement dans son étude d’impact.
La motivation c’est “cool” mais soyons réaliste ce n’est pas ça qui nous fera retrouver un emploi… La plupart de ces gens la ont bien été motivé à une époque et la plupart du temps ont perdus leur motivation car trouver un emploi était quasiment impossible…
Il y à effectivement un énorme facteur humain la dedans et je ne pense pas que la solution viendra du numérique mais d’une solution beaucoup plus humaine car actuellement toute la chaine est corrompue ce qui explique un haut taux de démotivation chez les candidats, explications :
Dès l’age de 6 ans tu passe 6h / 8h 5 jours par semaine le cul sur une chaise pendant 12 ans avec des résultat au niveau mondial plus que moyen… C’est pas vraiment motivant au plan humain. D’autre nous détruisent littéralement alors qu’ils ne passe que 4h par jours le cul sur la chaise mais n’ont que 1 mois de vacance l’été qui est bien suffisant surtout si après midi libre contrairement à nos 3 mois…
Puis tu enchaine sur 3 ans d’études le cul sur la chaise + parfois un petit boulot, c’est loin d’être motivant. Mais bon dans un coin de ta tête tu te dis c’est pas grave, ensuite je vais pouvoir m’amuser les soirs et week end après le taff avec ma paye.
Tu sort de l’école diplôme en poche et la deux cas de figure :
. Tu cherche direct du travail et tu ne trouve rien car tous les boulot exigent 2 ans d’expérience minium et tu est en concurrence avec des gens exp +4 car le secteur est bouché…
. Tu te donne 6 mois pour vivre ta vie et commencer à chercher du travail l’hiver venu et tu te rend compte que c’est difficile et qu’en plus avoir rien fait 6 mois est extrêmement pénalisant.
Passé un an à chercher du travail tu perd toute motivation, et plus le temps passe moins tu à de chance pour trouver du travail, comme si 16 ans d’études n’avais servis à rien. Le pire c’est quand on te rabâche “réseau” qui équivaut à du piston et tout le monde n’a pas un réseau…
3 ans plus tard tu décide de te sortir les doigts et de passer de l’autre côté de la barrière. Tu crée ton propre emploi et au bout de quelques temps tu commence à gagner un peu d’argent. L’imposition arrive et tu te rend compte que même en enchainant 50 heures par semaines tu ne gagnera que 100€ de plus en ne foutant rien. Sauf que en ne foutant rien il est possible de faire quelques petit trucs au black, donc tu aura plus. Et puis de toute façon dans la majorité des cas ce n’est pas assez pour vivre, donc le choix est vite fait.
La solution serais de passer au niveau supérieur et d’employer mais les frais sont considérable, donc pas possible et tu cesse ton activité. C’est dommage car il y à une demande mais l’offre coute trop cher et les clients ont un budget limité.
Au final le modèle français actuel de l’école à la recherche d’emploi est plus ou moins la pour briser les gens. Dans mon entourage quasiment tout le monde c’est tiré faire un stage à l’étranger passé 6 mois de chômage à refuser des job chez mac do… Personne n’est revenu par la suite car le pays est de moins en moins attractif.
Il va vraiment falloir refaire le système en profondeur sinon on fonce tout droit dans le mur. Si demain j’avais un gamin il est clair que je ne voudrais pour rien au monde lui faire vivre tout ça.
Le 07/09/2018 à 17h08
Le 07/09/2018 à 17h26
Oui, c’est la novlangue habituelle : à défaut de mener une guerre contre le chômage, on mène une guerre contre les chômeurs sous les applaudissements de quelques neuneus qui se croient à l’abri.
Au demeurant, les évolutions depuis quelques mois du site Pôle emploi sont assez éloquentes quant à la volonté de flicage du vilain “profiteur”, même s’il n’est pas indemnisé.
Sans parler de leur contrôle intempestif par voies télématiques qui est franchement intrusif et malveillant puisqu’il ne vise qu’à vous rayer des statistiques si vous ne montrez pas vos muscles “juridiques”.
Au final, du temps perdu et de la collecte de données en veux tu en voila.
Le plus navrant et de voir le contenu de certaines offres “validées” par Police emploi.
Quelle sinistre farce.
Le 07/09/2018 à 19h24
Le 07/09/2018 à 19h41
Le 08/09/2018 à 09h33
Oui mais ils votent, comme les chasseurs à qui on fait des cadeaux…
Le 08/09/2018 à 10h07
Le 08/09/2018 à 22h28