Le projet de loi Lemaire accusé de fragiliser l’économie numérique française
Lobby-Wan Kenobi
Le 15 janvier 2016 à 15h00
4 min
Droit
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Le renforcement des droits des internautes, tel que prévu par le projet de loi numérique, n’est pas du goût de tous les acteurs de l’informatique et de l’internet. Quatre organisations de professionnels du secteur demandent au législateur de revoir sa copie, y compris sur la question de l’utilisation des logiciels libres au sein de l’administration.
Ils représentent des centaines d’acteurs français pas forcément très connus mais aussi de très célèbres entreprises : Microsoft, CDiscount, Apple, Intel, la Fnac, Google, Lenovo, Facebook, HP, Dell... L’AFDEL (Association française des éditeurs de logiciels et de solutions Internet), la FEVAD (Fédération e-commerce et vente à distance), le SFIB (Syndicat de l’industrie des technologies de l’information) et le Syntec Numérique ont publiquement fait savoir jeudi 14 janvier tout le mal qu’ils pensaient de certaines des mesures contenues dans le projet de loi numérique d’Axelle Lemaire, dont l’examen vient tout juste de débuter à l’Assemblée nationale.
« Des obligations disproportionnées pour renforcer les droits du consommateur »
Alors que les députés ont jusqu’à demain, 17 heures, pour déposer leurs amendements en vue des débats en séance publique, ces organisations pointent du doigt plusieurs des dispositions du texte de la secrétaire d’État au Numérique, qui risquent selon eux de « fragilis[er] l’économie numérique française » en « instaurant des obligations disproportionnées pour renforcer les droits du consommateur ». « Portabilité, nouvelles contraintes imposées aux plateformes et atteinte à la neutralité de la commande publique : le texte impose dans sa rédaction présente des contraintes susceptibles de mettre en danger les investissements R&D des startups, PME et entreprises numériques » écrivent les quatre institutions.
L’article 21 du projet de loi, censé permettre à l’internaute de récupérer les données déposées par ses soins ou collectés à son égard par les Facebook & co (photos, vidéos...) est tout particulièrement pointé du doigt. Selon l’AFDEL, la FEVAD, le SFIB et le Syntec numérique, ses termes sont bien trop larges : « Il est légitime que les consommateurs puissent récupérer les données qu’ils ont fournies, mais les entreprises ne doivent pas être contraintes de transférer le fruit de la valeur apportée par leur service. »
Quant à l’article 22 sur la loyauté des plateformes, les quatre organisations soutiennent que « l’établissement de règles franco-françaises sur un modèle d’affaires extrêmement dynamique porterait directement atteinte à l’attractivité du territoire national vis-à-vis des investisseurs et des startupers et poserait des barrières à l’entrée ».
L'usage du libre au sein de l'administration fait encore couler beaucoup d'encre
L’adoption en commission d’un amendement prévoyant que les administrations devront « encourag[er] l’utilisation des logiciels libres et des formats ouverts lors du développement, de l’achat ou de l’utilisation d’un système informatique » donne manifestement des sueurs froides à certains acteurs du secteur. L’AFDEL, la FEVAD, le SFIB et le Syntec numérique expriment « leurs plus vives inquiétudes face à cet écart au principe de neutralité technologique de l’État ». Les quatre organisations affirment que « 90 % des éditeurs de logiciels français ont fait le choix du modèle propriétaire pour financer leur R&D et seraient de facto exclus de la commande publique » si ces dispositions étaient maintenues en l’état. Une déduction pour le moins hasardeuse dans la mesure où un encouragement au libre n’est pas incompatible avec l’utilisation de logiciels propriétaires...
Durant les débats, la députée Isabelle Attard, qui prônait elle pour que la « priorité » soit carrément accordée aux logiciels libres, a d’ailleurs bien souligné face aux réticences du gouvernement que les logiciels propriétaires pourraient toujours être utilisés, à condition qu’il n’existe pas d’équivalent libre.
Ce matin, je vais devoir annoncer à 400 entreprises de la #FrenchTech que le Gvt veut les exclure de la commande publique :-( #LoiNumerique
— Loïc Rivière (@loic_riviere) 14 Janvier 2016
Le projet de loi Lemaire accusé de fragiliser l’économie numérique française
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« Des obligations disproportionnées pour renforcer les droits du consommateur »
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L'usage du libre au sein de l'administration fait encore couler beaucoup d'encre
Commentaires (32)
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Abonnez-vousLe 15/01/2016 à 15h23
@TraduisonsLes lit NXi ? paske la y’a de quoi faire…
Le 15/01/2016 à 15h25
De toute façon le constat que je fais des lois qui nous intéressent tous (moi aussi fût un temps), c’est que même si on arrive à la faire fléchir dans le bon sens, elle sera toujours retoquée par amendements , décrets … durant son cycle de vie !
J’ai participé aux débats en octobre durant la consultation avec beaucoup de libriste. On a eu gains de cause sur certains sujets … mais ….
Ce sont les lobbyistes acharnées et fortunés qui auront le dernier mot : j’en suis sur maintenant.
Donc la loi peut même passer en l’état … ensuite elle sera remaniée durant les étés, les vacances etc … et on l’aura toujours dans l’os.
Le 15/01/2016 à 15h31
Certes il est très difficile de se battre contre des géants, mais si des gens comme toi qui s’y connaissent ne prennent pas la parole, alors ils auront le champ libre et ça sera bien pire.
Le 15/01/2016 à 15h39
« Il est légitime que les consommateurs puissent récupérer les
données qu’ils ont fournies, mais les entreprises ne doivent pas être
contraintes de transférer le fruit de la valeur apportée par leur
service. »
Il faudrait peut-être commencer par redire à qui appartiennent ces données ?
Un exploitant en est-il propriétaire ? " />
Le 15/01/2016 à 15h39
(a pictou) oui tu as raison : mais c’est dure.
C’est dure. " />
Quand on te balance 13 millions devant le nez en te disant : vous voyez notre solution elle est bien, c’est pour le bien de vos enfants : faites ripailles ont vous donne tout gratuitement (tablette , licence office 365, vous pouvez même les installer pour chez vous … j’ai la note interne) !
Perso : … surtout quand c’est un ami (ancien?) aux manettes et qui vends son propre pays, nos enfants et les siens … (et je ne m’étalerai pas plus)
Le 15/01/2016 à 15h42
Il nous faut des développeurs !!!! " />
Le 15/01/2016 à 15h43
+1
Je sais par de la famille dont une branche est dans la politique qu’on en arrive a faire de fausses commissions avec des jolis débats juste pour la forme… la décision est déjà là avant tout débat.
Je parle ici du projet sur l’A31 bis Nancy/luxembourg…
Le 15/01/2016 à 15h53
LA grande question est-on prêt à nous appauvrir pour garder notre dignité et notre honneur ?
… ?
Nos anciens 50 naire et au dessus : assurément pas !
Ils sont pour beaucoup égoïstes nos “power lover flower” … (la dernière chanson des” enfoirés charity business” en est un bon exemple, avec ironie en plus !)
Le 15/01/2016 à 15h56
« instaurant des obligations disproportionnées pour renforcer les droits du consommateur ».
Il faut pouvoir continuer à le tondre sans problème, et sans qu’il la ramène.
« 90 % des éditeurs de logiciels français ont fait le choix du modèle propriétaire pour financer leur R&D et seraient de facto exclus de la commande publique »
Ça en dit long sur la mentalité de ces guignols. Ils pensent être en droit de vivre uniquement sur la commande publique. Celui qui utilise des logiciels et éventuellement les achètent, doit pouvoir choisir ce qu’il veut sans tenir compte de l’avis de ceux qui en vivent.
Le 15/01/2016 à 15h57
Ah c’est dur d’avoir des principes, ça c’est clair! Le plus dur pour moi, c’est les claques qu’on reçoit quand on voit quelqu’un qui n’a absolument aucun principe bénéficier de gratifications instantannées.
Ou quelqu’un qui n’a aucun principe se vanter d’en avoir, celle là aussi elle fait mal par là où ça passe xD
Le 15/01/2016 à 17h18
“Ce matin, je vais devoir annoncer à 400 entreprises de la #FrenchTech que le Gvt veut les exclure de la commande publique :-( #LoiNumerique”
mais non !!!! Tu vas juste leur expliquer qu’elles vont “changer de modèle économique”, et probablement mutualiser leur dev et faire de grosses économies d’échelles …. Accessoirement s’assujettir de la tutelle de M\( ou Appl€ ...
D'ailleurs pense-t-il que M\) va voir ses bénéfices diminuer avec la mise en Open Source de Visual Studio ?
le monde change, demande donc aux dinosaures ce qu’ils pensent d’un changement climatique brutal ?
Le 15/01/2016 à 17h40
Problématique typique de change management. Nos amis du syntec devraient pourtant y être habitué…
Le 15/01/2016 à 18h37
La semaine de travail à 40H, l’arret du travail des enfants, la mise en place du smic, toutes ces choses ont aussi menacé l’économie francaise, ndlr.
Le 15/01/2016 à 19h37
Le 15/01/2016 à 19h51
suite pour Jarodd
Tout comme FB, les gens acceptent souvent pour faire comme tout le monde (naïvement de peur de se faire passer pour un con vis à vis des autres. Il est bien bon cet abonnement)" />
Le 15/01/2016 à 20h00
Quelle bande de pleureuses! Franchement, vu le boulot que tirent désormais les “boites blanches” voire “les boites noires” pleurer un sénateur Palpatine c’est grotesque!
Le 15/01/2016 à 15h08
Pour une fois qu’un gouvernement fait des efforts pour le logiciel libre…
Il est autrement intéressant pour l’économie francaise d’utiliser des softs libre que balancer des millions dans des softs payant dont les éditeurs sont bien souvent au USA… Il n’est pas nécessaire d’augmenter encore le déficit commercial de la france…
Le 15/01/2016 à 15h12
Ah ben ça, dès qu’on donne une infime parcelle de droits en plus au consommateur (recours collectifs, pourtant très encadrés dans la Loi Conso, logement..) ou au citoyen (liberté de panorama, biens communs informationnels, vie privée), les lobbies hurlent à la mort, idem pour le droit du travail (et la possibilité, avec plafond prudhommal, de licencier “facilement” des CDI réclamé par le Medef).
Si l’encouragement au logiciel libre, qui ne sera d’aucune utilité ni n’aura pas de conséquence (cf les contrats Open-bar de Microsoft dans les Ministères - Défense, Éducation) ou positiver le domaine public sans rien enlever au droit d’auteur les affolent autant, c’est dire à quel point tout le système est fragile en fait… " />
Le 15/01/2016 à 15h13
Pour un gouvernement, autant utiliser des formats libres me parait indispensable (je dirais même que c’est presque criminel de ne pas le faire), autant pour les logiciels eux même, le débat reste bien plus ouvert (même si à titre personnel je préférerais que mon gouvernement participe au développement de Linux plutôt que d’enrichir MS)
Le 15/01/2016 à 15h18
Ça pique au portefeuille non ?
Allez je parie sur le chantage à l’emploi.
Le 15/01/2016 à 15h19
Isabelle Attard : une élue bien sympa.
Par contre l’autre squale de “Rivière” … pffff : il balance des mots sans en mesurer la portée. On sait pour qui il roule de toute façon.
Le 15/01/2016 à 20h25
oui , je comprends pas précisément où cela va nous mener : mais c’est par là qu’il faut aller !
C’est une certitude : M$ fait une distrib GNU/linux pour son Azure.
Le problème c’est que nos amis financiers vont eux aussi y allé … tout flétrira à nouveau , on devra recommencer !
Le 15/01/2016 à 20h31
Logiciels libres ?
Mais comment donc ?
L’administration Française n’est pas là pour remplir les poches des gros éditeurs étrangers avec l’argent des contribuables Français qui, eux, payent leurs impôts ?
" />
Le 15/01/2016 à 20h36
Le 15/01/2016 à 21h14
Le 15/01/2016 à 21h26
Cette loi est une grande avancée. Axelle Lemaire doit tenir le coup et aller jusqu’au bout.
Le 15/01/2016 à 21h31
Le 16/01/2016 à 09h55
“ 90 % des éditeurs de logiciels français ont fait le choix du modèle propriétaire pour financer leur R&D et seraient de facto exclus de la commande publique “Ben “90% des éditeurs de logiciels français ” sont mauvais, pourquoi je financerait par mes impots les mauvaises pratiques de certains éditeurs de logiciels Ne pas oublier que le débat le plus important cette année est l’obligation d’utiliser des programmes inaltérables comme outils de facturation…
Le 18/01/2016 à 07h49
T’inquiète pas, tu seras quand même baptisé par les mormons. C’est le facebook à l’ancienne, t’es obligé d’être baptisé par eux (et comme c’est après ta mort, va t’y opposer " />)
Le 18/01/2016 à 08h40
Très honnêtement…je suis dans une start-up. Nous sommes en train de créer un logiciel et il sera propriétaire (tout au moins le coeur du système), au départ. C’est le moyen le plus sur de rentabiliser l’ investissement de départ! Croire que l’on va gagner sa vie uniquement sur le “service” associé est une utopie. Tout le monde n’est pas RedHat… Ni Microsoft pour éponger l’ investissement de départ…Faire la chasse aux logiciels propriétaires est a mon sens le mauvais choix, il faut surtout faire la chasse au logiciels non interopérables, avec formats propriétaires et qui ne sont pas ouverts pour communiquer avec les logiciels des autres éditeurs.
Alors oui certain vont me dire libre c’est pas gratuit…Vous avez fait un don à chaque logiciel open-source que vous utilisez? Vous avez payé un prestataire (en particulier celui a l’origine du code) pour faire installer votre logiciel open source? Soyez honnêtes…
Malheureusement dans notre société personne ne veut plus payer (quitte à devenir le produit), et le plus dommage c’est de croire que créer un logiciel c’est justement gratuit (idée faussement induite, entre autres, par les logiciels libres).
Allez je suis prêt à me faire lynché…
Le 18/01/2016 à 08h45
Bon courage bro… " />
Le 18/01/2016 à 15h47
C’est pas que les gens ne veulent plus payer, c’est qu’on les gens en ont marre d’être pris pour des cons, nuance. Et le principe est le même dans les contrats publics: combien de fois ça arrive d’avoir un boulot fait à l’arrache parce que le prestataire expédie ça le plus rapidement possible pour rentrer dans ses frais…Je comprends bien qu’il faut qu’il bouffe, mais à un moment y en a marre de perdre du temps et de l’argent (public!) à corriger/remettre en forme la donnée que certains bureaux d’études peuvent nous renvoyer. Et la situation est la même avec les logiciels: notre logiciel de carto (propriétaire) ne prendra en charge nativement le format postgreSQL qu’en juillet cette année…ça fait juste depuis 2002 que c’est le cas dans le libre, mais c’est pas grave. En attendant on est obligé d’utiliser un connecteur tiers développé, je te le donne en mille, par communauté " />
Si, comme tu dis, des efforts étaient faits par les éditeurs de logiciels propriétaires sur l’interopérabilité on aurait pas besoin d’en arriver là. La vérité, c’est que tu sais très bien que ces boites continueront à favoriser le format propriétaire, parce que ça leur assure que tous les utilisateurs tournent avec leur logiciel et donc de meilleurs revenus.
Donc voilà, à un moment y en a marre de voir l’argent public partir dans les poches de ces gens…et si il faut que ça passe par prioriser le choix d’un logiciel libre lors d’un marché, je trouve personnellement que c’est une excellent chose!