Réforme constitutionnelle : les députés PS veulent introduire un « droit d’amendement citoyen »
T'as le look co-coconstruction
Le 06 juillet 2018 à 13h27
6 min
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Dans le cadre de la réforme constitutionnelle, les parlementaires PS proposent qu'à l'avenir, des « amendements citoyens » soient débattus par le Parlement (à condition d’avoir été soutenus par au moins 10 000 internautes). Une piste qui ne semble cependant guère emballer la majorité.
« Il y a beaucoup de sujets sur lesquels il faut batailler pendant cinq, dix ou vingt ans pour que les choses arrivent à leur terme. Le vrai sujet, c'est de ne jamais lâcher », nous confie le Premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure.
L’élu, qui plaidait déjà sous la précédente majorité pour l’introduction d’amendements dits citoyens, s’apprête à revenir à la charge à partir de la semaine prochaine – l’Assemblée débutant son examen, en séance publique, du projet de réforme constitutionnelle.
« Hélas, le seul objet de la réforme proposée par Emmanuel Macron, c’est de concentrer davantage de pouvoirs dans les mains d'un seul, là où il faudrait au contraire permettre au plus grand nombre de participer aux décisions », dénonce le député « Nouvelle Gauche ».
Afin de « créer un lien continu entre les parlementaires et leurs électeurs », Olivier Faure et ses collègues proposent « d'établir une démocratie collaborative », qui s’organiserait notamment autour d’amendements et de propositions de loi que les internautes pourraient proposer et/ou soutenir directement sur Internet.
Permettre aux citoyens de faire « irruption » dans les débats parlementaires
L’idée ? Que tout amendement réunissant un certain nombre de soutiens soit examiné en séance publique, de la même manière qu’un amendement « traditionnel ». Il faudrait également que ces propositions remplissent les conditions de recevabilité des amendements parlementaires (notamment sur le plan financier).
« Ce dialogue permanent n'a nullement vocation à remettre en question le principe du mandat représentatif », souligne Olivier Faure. Et pour cause, ce serait bien entendu les parlementaires qui resteraient libres d’adopter, ou non, chaque amendement citoyen. « La seule contrainte pour les élus sera donc d'avoir à se positionner et à justifier leur point de vue. »
Un seuil non plus de 45 000, mais de 10 000 soutiens
En 2015, le député PS tablait cependant sur un seuil de 45 000 signatures minimum (soit 1/1 000ème du corps électoral). Désormais, il propose que « les propositions d’amendements soutenues par au moins 10 000 citoyens » puissent être examinées par les assemblées.
« Les amendements citoyens ne doivent pas être anecdotiques mais au contraire habituels dans les débats parlementaires », fait valoir le locataire de la Rue de Solférino pour justifier ce seuil « relativement accessible ». L’objectif affiché : éviter une procédure « trop rigide », et dès lors susceptible de « créer de la frustration du côté des citoyens ».
L’amendement soutenu par le groupe Nouvelle Gauche ne s’avance toutefois guère sur les modalités exactes de mise en œuvre de cette réforme. Les « amendements citoyens » seraient en effet examinés en séance « selon les conditions fixées par les règlements des assemblées ».
Il appartiendrait ainsi à l’Assemblée comme au Sénat de choisir une procédure de sélection. Olivier Faure suggère néanmoins dans son exposé des motifs « la désignation d'un rapporteur ad hoc », qui serait chargé de présenter les différents amendements citoyens lors des débats dans l’hémicycle.
Pour les propositions de loi citoyennes, même concept. Le seuil serait cependant fixé à 100 000 électeurs. Le texte devra alors être inscrit à l’ordre du jour « au plus tard dans les deux mois suivant son dépôt ».
La majorité préfère miser sur le « Forum de la République »
Examinée en commission, vendredi 29 juin, la proposition du groupe Nouvelle Gauche a été balayée d’un revers de la main par la majorité.
Les rapporteurs préfèrent visiblement le système de pétitions en ligne qui s’esquisse au travers de la réforme du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Renommé en « Forum de la République » (alors que le gouvernement proposait « Chambre de la société civile »), l’institution devrait pouvoir être saisie par voie de e-pétition, avant de faire « connaître au gouvernement et au Parlement les suites qu’[elle] propose d’y donner ».
Emmanuel Macron avait en effet souhaité qu’à partir d’un certain seuil, « par exemple celui de 500 000 signatures », ce qu’on appelle parfois la troisième assemblée « puisse voter leur transmission au gouvernement, mais aussi aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale, pour y déclencher un débat ».
« Il existe une forte aspiration à la rénovation démocratique et à la participation citoyenne, et le CESE pourrait devenir un espace de dialogue au sein de la société civile organisé pour les citoyens, pour la démocratie participative, pour l’innovation, pour des débats citoyens, pour des jurys citoyens », s’est justifiée la rapporteure Yaël Braun-Pivet (LREM).
La réforme poussée par la majorité ne convainc toutefois pas Olivier Faure, qui y voit un « gadget ». « On va créer un filtre entre l'Assemblée et les citoyens, regrette-t-il. Alors qu'il me semble qu'on devrait au contraire rechercher un rapport plus direct, ce que permet l'amendement citoyen. »
Certains pourraient par ailleurs ajouter qu’un amendement a une portée normative, susceptible de conduire rapidement à une réforme. Ce qui n’est pas forcément le cas d’un simple débat organisé suite à une pétition.
Nombreux débats en perspective
Le groupe Nouvelle Gauche prévoit sans surprise de redéposer ses amendements. Il espère même arriver à convaincre quelques élus au-delà des bancs socialistes.
En mars dernier, une centaine de députés de la majorité s’étaient en effet déclarés favorables, au travers d’une tribune, à ce que les parlementaires aient dorénavant pour mission de « favoriser la participation citoyenne ». Pour l’heure, l’article 24 de la Constitution leur demande en effet « simplement » de voter la loi, contrôler l’action du gouvernement et évaluer les politiques publiques.
Initialement portée par Paula Forteza, cette réforme permettrait à chaque député ou sénateur de choisir les « outils » qui lui semblent le plus appropriés pour remplir cette nouvelle mission : consultations en ligne, ateliers en circonscription, ou même « amendements citoyens ».
Réforme constitutionnelle : les députés PS veulent introduire un « droit d’amendement citoyen »
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Permettre aux citoyens de faire « irruption » dans les débats parlementaires
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Un seuil non plus de 45 000, mais de 10 000 soutiens
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La majorité préfère miser sur le « Forum de la République »
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Nombreux débats en perspective
Commentaires (26)
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Abonnez-vousLe 09/07/2018 à 09h47
Un moyen de savoir si la France pourra construire son Étoile Noire ? " />
Ou ce n’est pas le même principe de pétition qu’E-U ?
Le 10/07/2018 à 00h40
Je ne comprend même pas comment on peut déjà penser à 2022
Personne ne sait comment sera la situation à ce moment là
Non, vraiment, j’ai l’impression que c’est typiquement français :
Limite c’est comme si depuis mai 2017 plus personnes n’était intéressé par le quotidien, mais par un hypothétique “grand soir la prochaine fois”
Et dans 5 ans, ce sera la même chose : Car si on ne s’intéresse jamais au quotidien, celui-ci se fait sans nous
Pourtant, au quotidien, il y en a des débats politiques, et en 2022 il sera certainement trop tard pour se prononcer dessus :
Un peu comme l’état d’urgence : Il n’y a eu qu’une faible contestation sur le moment, du coup elle est maintenant entrée dans le droit commun et plus personne n’osera prendre le risque politique de vouloir le supprimer
Le 10/07/2018 à 06h56
Le 10/07/2018 à 06h58
Si tu avais lu mon message jusqu’au bout, tu aurais lu ceci :
Cela n’interdit pas de s’engager ou militer, de multiples façons.
En quoi cela est “pas intéressé par le quotidien” ou “en attente du grand soir” ?
Je me sens bien plus utile et concerné par mon engagement militant/associatif. Mais même avec la meilleure volonté du monde, il est lié à la politique, surtout si tu travailles avec des services de l’Etat, ou que ton budget dépend en partie des politiques sociales. Et là il faut bien être conscient que rien ne changera pendant ce quinquennat, d’où l’espoir que cela évolue aux prochaines élections. Je ne vois pas en quoi c’est un mal d’espérer un changement.
Le 06/07/2018 à 13h50
« Ce dialogue permanent n’a nullement vocation à remettre en question le principe du mandat représentatif »
C’est bien dommage.
Le 06/07/2018 à 13h53
quand on envoie des mails à la redaction et le support technique, il serait possible d’avoir une réponse ?
Vous ne répondez jamais !!!!!!!!!!!!!!!!!!!! " />
Le 06/07/2018 à 14h06
C’est bien, ces propositions (forum, amendement citoyens…) montrent que le pouvoir est trop loin du peuple de nos jours.
Va falloir sérieusement penser à une 6eme république, bien plus décentralisée… mais là, on casse l’espèce de nomenklatura au pouvoir… c’est pas pour demain " />
Le 06/07/2018 à 14h14
Marrant que ce genre de proposition émane toujours de l’opposition st soit systématiquement rejeté par la majorité et ce quelle que soit le parti dans la majorité. C’est comme pour Hadopi. Ca a été mis en place par le droite avec forte opposition de la gauche. Une fois la gauche au pouvoir ils l’ont renforcée….
Au final ce n’est pas le parti qui définit les idées mais le positionnement majorité / opposition.
Le 06/07/2018 à 15h29
Dommage…
Pourtant, ça donnerait un nouveau souffle à notre pays.
Pour ma part, je poserais un amendement essentiel à mes yeux: faire de Montcuq la capitale de la France.
Le 06/07/2018 à 15h47
Une piste qui ne semble cependant guère emballer la majorité.
D’un autre côté, on a jamais vu une majorité de droite s’enthousiasmer pour un projet de gauche. (et vice versa)
Le 06/07/2018 à 17h13
Nuance : avec la gauche qu’on a eu, on avait pas besoin de droite …
Le 06/07/2018 à 17h16
Oui m’enfin pour se faire il faudrait être au courant de la pétition et donc suivre les réseaux de manières assidues pour pouvoir agir en temps et en heure. Ce qui n’est pas le cas pour la majorité des gens. Déjà qu’une consultation sur le PLUm je ne l’ai appris qu’au détour d’un site et que mes collègues, informaticiens pour la plupart, c’est moi qui leurs est donné l’information. Alors pour la majorité des citoyens " />
Le 06/07/2018 à 18h20
Le 06/07/2018 à 18h25
Le 06/07/2018 à 18h26
“avis défavorable ?”
“anéfé”
…
“amendement rejeté”
10 secondes montre en main !
ça ne leur coûte pas grand chose cette petite carotte.
Le 07/07/2018 à 10h23
Le 07/07/2018 à 12h48
Exact, et il ne faut rien attendre du PS ni LR de toute façon, ils font semblant de se préoccuper du peuple quand ils sont dans l’opposition pour mieux nous bouffer ensuite, y’a qu’à voir les deux dernières présidences…
S’ils déposent ce genre d’amendements, c’est parce qu’ils sont sûr que ça sera refusé, mais les gens ne sont pas cons, ils apprennent et ne sont pas dupes sur ces petits jeux de leur part, désormais.
Le 07/07/2018 à 12h52
C’est exactement ça, c’est une carotte pour faire genre “on est vos copains votez pour nous”.
Sauf qu’on sait très bien ce dont ils sont capables (ou plutôt incapable), désormais.
C’est sûr les listes citoyennes/groupes qu’il faut compter, plus les partis.
Le 07/07/2018 à 13h32
Le 07/07/2018 à 17h57
Je pense plutôt qu’une fois râlé sur le moment, on oublie, et ensuite on “fait barrage”, comme s’il ne s’était rien passé avant. Nous verrons bien en 2022…
Le 08/07/2018 à 05h52
Le 09/07/2018 à 00h34
Le 09/07/2018 à 00h38
En 2022 ?
Mais c’est une éternité
Je n’ai jamais compris cette manie qu’on a en France de sans cesse attendre les elections d’après
C’est un temps fou de perdu…
Il serait intéressant d’avoir un système comme au R-U, où l’on ne connait jamais la durée d’une legislature, ça éviterait ce genre de dérive…
Le 09/07/2018 à 00h43
L’adjectif correspondant à citoyen, c’est civique
Citoyen est un nom <_<
Le 09/07/2018 à 08h08
mouais dans son contexte, liste civique n’aurait pas de vrai sens. Quitte à corriger, je dirais qu’il manque un “de”, à la rigueur, puisque l’idée semble être de faire une opposition citoyens (non affiliés) vs partis.
(+1 million contre l’usage abusif de citoyen en tant qu’adjectif, cela étant. Ça commence à devenir saoûlant).
Le 09/07/2018 à 09h15
Si tu as des idées, propose les (puisque désormais on écoute le citoyen " />). Moi, en tant qu’électeur, je suis obligé d’attendre la prochaine. Comme tout le monde en fait (même ceux qui sont satisfaits de Macron).
Cela n’interdit pas de s’engager ou militer, de multiples façons. Mais pour les élections, à part attendre la prochaine, je ne vois pas ce qu’on peut faire d’autre.