Contre la fracture numérique, État et acteurs privés vont financer des « pass » de formations
Pass le message à ton voisin
Le 14 septembre 2018 à 15h02
6 min
Droit
Droit
Alors que le gouvernement ambitionne de dématérialiser l’ensemble des démarches administratives d’ici à 2022, le secrétaire d’État au Numérique a présenté hier le « plan national pour un numérique inclusif ». Mesure phare : la création d'un « pass numérique », qui permettra à certaines personnes de bénéficier d’heures de formation.
« Aujourd'hui, c'est le jour où on s'engage tous à démarrer et à rentrer dans le "faire", dans le "faire ensemble" » a martelé hier Mounir Mahjoubi, le secrétaire d’État au Numérique, devant un parterre de représentants d’associations, de collectivités territoriales, d’acteurs de la médiation numérique...
Après huit mois de négociations, les pouvoirs publics, les opérateurs sociaux (de type Pôle emploi ou Allocations familiales) et certaines entreprises s’étaient réunis à Nantes pour donner le coup d’envoi du « plan national pour un numérique inclusif » (PDF).
Mounir Mahjoubi a insisté sur les ambitions des pouvoirs publics : former 1,5 million de personnes par an, dès 2019. Un chiffre à rapporter aux sept millions de Français qui ne se connectent jamais à Internet, et plus largement aux 13 millions de personnes jugées « éloignées » du numérique (celles pour qui il est trop compliqué d’effectuer une démarche administrative en ligne par exemple).
10 à 20 heures de formation grâce au « pass numérique »
Mesure emblématique de ce plan : la création d’un « pass numérique », qui sera remis aux « personnes en difficulté » par les Allocations familiales, Pôle emploi, la Sécurité sociale, les villes ou encore les départements selon des critères d’éligibilité qui demeurent pour l’heure extrêmement flous.
Les bénéficiaires du pass pourront suivre « 5 à 10 ateliers », assurés par des professionnels, afin qu’ils deviennent « autonomes pour créer leurs identifiants et boîte mail, accéder à leurs droits, faire des démarches ou des recherches d’emploi... »
Cet accompagnement se fera « dans des lieux labellisés et de qualité », précise le plan national. La date exacte de démarrage du dispositif reste toutefois vague, Mounir Mahjoubi ayant évoqué le lancement d’un appel à projets à destination des collectivités territoriales pour les prochaines semaines.
« 15M€ de l’Etat pour le #NumeriqueInclusif qui doivent faire levier pour atteindre 75 à 100M€ par an avec une mobilisation de toutes les collectivités, des opérateurs publics et privés. C’est ensemble que nous formerons tous les Francais éloignés du #numérique ! » #NEC18 pic.twitter.com/YP4YOeuD1j
— Mounir Mahjoubi (@mounir) 13 septembre 2018
La particularité de ce « pass numérique » ? Il sera co-financé par différents acteurs, ayant tous intérêt à ce que leurs usagers ou clients soient à l’aise avec l’outil informatique. État, collectivités territoriales, opérateurs de type Caf ou Pôle emploi et même entreprises mettront ainsi la main à la poche.
Mounir Mahjoubi a déclaré hier que « dix à quinze millions d'euros » seraient mobilisés par l’État « dès cette année », et davantage à partir de l’année prochaine. Le gouvernement espère ainsi provoquer « un effet multiplicateur dans les territoires et pour les acteurs de l’accompagnement au numérique », lequel pourrait générer « près de 40 millions d’euros mobilisés de manière complémentaire ».
Du côté des entreprises, Orange, Veolia, le Crédit Agricole et la BNP Paribas ont pour l’instant accepté de participer à l’aventure.
Le plan national s’appuie sur une étude réalisée par France Stratégie, selon laquelle former 4,5 millions de personnes « éloignées du numérique » pendant dix ans « pourrait représenter un gain de 1,6 milliard d’euros par an en moyenne sur cette période ». Et pour cause : une meilleure « autonomie numérique » aurait des impacts sur l’économie numérique, l’emploi et la formation, la relation avec les services publics, ainsi que sur le bien-être d’une manière plus générale.
Des « hubs » locaux pour coordonner les acteurs
Afin d’accompagner ce plan de formation, le plan prévoit la constitution d’un réseau d’une dizaine de « Hubs France Connectée ». Cinq millions d’euros seront mobilisés sur la période 2019 - 2020 par la Banque des Territoires, afin que ces structures « fonctionnant à l’échelle de plusieurs départements » (entre deux et cinq) viennent épauler au niveau local les « acteurs de l’inclusion et de la médiation numériques ».
Ces « hubs » auront ainsi pour mission de « recenser, articuler et coordonner » les différents intervenants (associations, collectivités...), tant pour assurer la mise en commun de ressources que pour monter certains projets – tels que demander des aides financières auprès de l’Union européenne.
Vers un bouton « FranceConnect Aidants »
Autre mesure du plan : l’expérimentation d’un bouton « FranceConnect Aidants », du nom du dispositif d’authentification proposé désormais sur de nombreux sites publics. L’idée : que le professionnel (agent de la Caf, de Pôle emploi, etc.) qui réalise une démarche en ligne pour une personne qui n’en n’est pas capable puisse s’identifier comme tel.
Cet outil sera ainsi conçu pour permettre « un suivi des actions réalisées sur le compte de la personne, à destination des usagers et des autorités administratives compétentes, et une protection du professionnel déclarant comme de la personne accompagnée en cas d’erreur ». Aucun calendrier n’est cependant précisé, le plan faisant simplement état d’une « réflexion ».
Un sursaut ou « le chaos », anticipe Mahjoubi
Il est enfin prévu qu’une « instance nationale partenariale » soit mise en place afin de « donner une suite opérationnelle » au plan d’inclusion numérique dévoilé hier. Cet organe, qui devrait se réunir plusieurs fois par an, « regroupera des représentants de l’État, des collectivités territoriales, des opérateurs de service public et des acteurs de la médiation numérique ». Un comité de pilotage et de suivi sera notamment instauré en son sein.
Mounir Mahjoubi a quant à lui longuement insisté hier sur le rôle des acteurs privés pour la réussite de ce plan. Le secrétaire d’État au Numérique espère que de nombreuses entreprises se joindront bientôt à cette initiative, en vue de la création d’une « fondation de l’inclusion numérique ».
L’ancien président du Conseil national du numérique a ensuite promis que s'agissant des services publics, les transformations seraient « radicales » au fil des prochaines années. « Je peux vous assurer que tous nous tiendrons tous nos objectifs et que vous aurez des services publics de qualité avec une identité numérique publique qui vous permettra de vous connecter à tous les services publics de demain » a notamment lancé Mounir Mahjoubi, en écho à l’objectif de dématérialisation de l’ensemble des démarches administratives d'ici à la fin du quinquennat.
« Si en même temps, on laisse 20 % des personnes à côté, on se dirige vers le chaos » a néanmoins prédit le secrétaire d’État au Numérique.
Contre la fracture numérique, État et acteurs privés vont financer des « pass » de formations
-
10 à 20 heures de formation grâce au « pass numérique »
-
Des « hubs » locaux pour coordonner les acteurs
-
Vers un bouton « FranceConnect Aidants »
-
Un sursaut ou « le chaos », anticipe Mahjoubi
Commentaires (36)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 14/09/2018 à 17h25
Très bonne initiative ! La « numérisation » des services publiques va permettre de supprimer des centaines de milliers de parasites payés (avec nos impôts) à regarder la pendule. Si en plus on confie la formation des vieillards et de ces crétins de pauvres à des associations nourries aux chômeurs bénévoles, c’est win-win.
Vu comme ça, elle me plait bien la startup nation. " />
Le 14/09/2018 à 17h38
Y’aura des cours pour les anciens de 80 ans et plus qui utilisent GNU-Linux ? …" />
Le 14/09/2018 à 17h46
Tu veux dire la Tartuffe Nation , oui …" />
Le 14/09/2018 à 19h21
Mais est-ce qu’on a pas déjà atteint la part incompressible de la population inapte à faire ses démarches administratives via des outils numériques ?
beaucoup de structures (publiques ou associatives) existent déjà depuis des années. Or elles ne sont pas parvenues à résorber davantage la fracture numérique.
Parce que ces personnes n’ont aucune capacité d’apprentissage (personnes âgées diminuées, déficients mentaux, vieux cons pathologiques), parce qu’elles accumulent d’autres handicaps sociaux et que leur illectronisme n’est qu’une conséquence de leur situation, ou autre, ce “pass numérique” ne les aidera en rien !
En plus toutes ces personnes sont déjà prises en charge par les structures d’aide existantes lorsqu’elles ont besoin d’effectuer des démarches.
J’ai l’impression que ce “pass numérique” est surtout une très bonne excuse pour rejeter la responsabilité des exclusions qu’entraînera le tout numérique pour les démarches administratives sur leurs victimes.
“Vous n’êtes pas capable de faire vos démarches en ligne ? C’est de votre faute, il fallait être attentif pendant votre formation !”
Le 14/09/2018 à 22h22
On s’en fiche des vieux qui ne sont pas capable d’utiliser un ordinateur ils vont mourir donc bon
Le 15/09/2018 à 04h04
Et, en même temps si on ne se bouge pas pour réduire drastiquement notre impact sur la planète ce sera le chaos (S’il n’est pas déjà trop tard). Celui que promet Mounir est un épiphénomène, qu’il sorte un dictionnaire pour lire la définition du mot.
Le 15/09/2018 à 06h59
En même temps, pas mal de service “numériques” sont simplement la mise à disposition des CERFA en PDF à imprimer, remplir à la main et renvoyer par la poste. Quel intérêt ?
La priorité serait plutôt de réduire drastiquement le nombre de papelards à remplir dans tous les sens pour chaque acte administratif, le plus insignifiant et le plus récurent soit-il.
Le 15/09/2018 à 07h40
Le 15/09/2018 à 08h10
Le 15/09/2018 à 08h26
Un ou deux postes informatique en libre service (plus un portable pour ceux qui peuvent pas se déplacer) dans caque mairie pour aider ces personnes serait plus facile et plus rapide, avec une tourné régulière pour vérifier quel font partis des vivants.
Le 15/09/2018 à 08h58
Le 15/09/2018 à 09h10
ou alors parce qu’elles n’ont pas envie d’avoir un ordi juste pour ça, et que l’informatique les gonfle au plus haut point.
Mon grand père n’en voulait tout simplement pas chez lui, et pourtant on lui avait fait des ponts d’or en 1998-1999 pour se prémunir du bug de l’an 2000. Son discourt était, mon p’tit gars j’ai pas fait de l’informatique durant 40 ans pour en faire une fois à la retraite, en plus ça crée du chômage.
bien joué papy " />
Le 15/09/2018 à 12h22
Au delà des sinistres nécessités de remplir des formulaires administratifs c’est quand même dommage de manquer de curiosité et de rester bloqué dans des préjugés à deux sous.
en 1998 s’il avait été un peu moins tête de con peut-être que ton grand-père aurait connu des plaisirs simples de la vie comme une bonne partie de Starcraft.
Le 15/09/2018 à 15h11
C’est ensemble que nous formerons tous les Francais éloignés du #numérique !
Tous sauf ceux qui n’en ont rien à foutre du numérique " />
Le 15/09/2018 à 19h50
Le 16/09/2018 à 02h36
C’est juste un moyen de détourné de l’argent publique
Le gouvernement doit avoir des amis qui ont des entreprises sur la formation
Le 16/09/2018 à 08h09
Le 16/09/2018 à 11h32
L’anachronisme de l’Hôpital Public est en train de se résoudre de lui-même, sous le regard bienveillant des ARS et du Ministère. Pris en tenaille entre le non renouvellement des postes, l’externalisation et les partenariats public-privé, il ne sera bientôt plus maintenu en vie qu’artificiellement, sous perfusion de dons défiscalisés, pour coexister avec un système privé conventionné, aux bénéfices dopés aux subventions publiques.
Les vouchers (plus communément appelés pass en bon français), c’est l’avenir. C’est l’une des armes les plus efficaces contre le « trop d’État », les citoyens-clients étant ravis de pouvoir choisir, en toute liberté, le secteur privé, plus innovant et efficace.
Le 16/09/2018 à 11h50
Le 16/09/2018 à 12h39
Le 16/09/2018 à 12h43
Pass la monaie et tu va goûter au digital
Le 16/09/2018 à 12h58
Le 16/09/2018 à 15h44
Non, le numérique ne réduit pas la pollution.
L’impression papier permet par ailleurs de renouveler les forêts françaises :-).
Le 16/09/2018 à 15h50
Tout à fait d’accord.
On parle depuis plus d’une génération de la nouveauté numérique.
L’informatique est dans les entreprises depuis les années 80’s.
Elle s’est généralisée chez les particuliers dans les années 90’s.
Elle est devenue incontournable dans les 2000’s.
Elle est devenue mobiles dans les 2010’s.
Qui à part ceux qui ne sauront ou ne pourront jamais s’en servir
Il y a 5 ans, j’ai connu un gars plein de bonne volonté qui s’est proposé pour donner bénévolement des cours d’informatique générale (surf/burautique). Dans une petite ville de 8000 habitants, il a eu moins d’une dizaine de candidats. Il a arrêté après un trimestre, tout le monde pensait “apprendre plus”…
Le 16/09/2018 à 17h14
Mais nous sommes d’accord. Je réagissais juste à l’usage du mot “chaos” par le sieur Mahjoubi.
Le 17/09/2018 à 02h47
C’est encore open bar en France…
100 millions pour des formations de Qualitay™, 500€ de pass-Kultur™ pour que les djeunz aillent ecouter du Verdi Bouba .. Les caisses de l’Etat doivent etres pleines " />
Le 17/09/2018 à 07h36
Le 17/09/2018 à 08h06
en même temps, si on veut qu’ils payent leurs impôts jusqu’au bout, va falloir quand même faire kekchose.
Le 17/09/2018 à 08h11
Un point de réponse important c’est l’accompagnement personnalisé à domicile. Si le plan inclusion numérique passe à côté de ça, effectivement il perdra les 20% d’irréductibles.
Le 17/09/2018 à 08h21
En première impression, ça pue l’arrosage des copains à des kilomètres à la ronde cette histoire ; surtout quand je lis “Cet accompagnement se fera « dans des lieux labellisés et de qualité »”.
Déjà je doute que les “vieux” bougeront de chez eux pour aller se former : ils n’en ont plus rien à foutre, et quelque part, ils ont raison de profiter de ce qu’il leur reste de temps à vivre sans se prendre la tête.
Ensuite 20h de formation, ce n’est pas sérieux. Vous espérez faire quoi en 20h, avec des gens qui n’ont pas d’ordinateur chez eux pour s’entraîner ? Un peu de réalisme : sans un accès régulier à des ordinateurs, même externes, c’est cuit d’avance… Cela étant, on dira aux bénéficiaires : vous avez eu une formation de 20h payée par la collectivité, donc vous n’avez plus aucun excuse pour ne pas savoir remplir nos formulaires en ligne !
Trop facile. Surtout quand on voit encore aujourd’hui des documents officiels poser des problèmes suivant le navigateur internet utilisé - et je parle bien du site gouv.fr avec des gens formés qui se retrouvent des messages d’erreur à la con !
Rappelons enfin que la dématérialisation “éclair” de nos services publics n’a qu’un seul but : éliminer quelques centaines de milliers de fonctionnaires de plus, pour satisfaire les GOPÉ bruxelloises. Une fois encore, on tue le contact humain pour le remplacer par des machines, mais on oublie que la machine, elle, ne paie pas d’impôts…
Le 17/09/2018 à 08h30
En 2018, les gens qui sont toujours incapable d’utiliser un pc sont pour la plupart réfractaire au “ progrès”, donc ca sert à rien de leur faire une formation car cela ne les intéresse pas, l’informatique ne les intéresse pas donc à quoi sert cette idée de merde ? Comment des gens aux gouv peuvent avoir des idées aussi moisis ?
Arrêtez donc, ca pu l’arosage de fric sur les copains concernés, un jour le foutage de gueule va t-il stopper ?
Le 17/09/2018 à 08h45
bof, mon grand ère a toujours préféré une bonne partie de boules avec des enjeux de petit coup de rouge au point avec ses potes ou alors taquiner le goujon…
quand au moins con, le jour ou tu seras chef analyste programmeur on en reparle " />
Le 17/09/2018 à 10h39
Le 17/09/2018 à 11h37
mon discours garde tout sons sens : mon p’tit gars j’ai pas fait de l’informatique durant 40 ans pour en faire une fois à la retraite
Et oui, c’était lui l’analyste progammeur, moi je ne suis qu’un con de dev ;), j’ai pas son niveau.
Et pour me taper entre 9 à 10 heures d’écran par jour, je n’ai pas du tout envie de voir un ordi une fois rentré à la maison, un bon bouquin me suffis amplement. Donc je comprend tout à fait sa réaction à ne plus en avoir chez lui.
Il faut dire aussi que quand il a arrêté de bosser l’informatique n’était pas encore démocratisé (1987) au point d’avoir du matos à la maison pour un coût raisonnable.
Le 17/09/2018 à 15h40
Magnifique, tout s’éclaire " />
En tant qu’autre con de dev je ne vais pas non plus lui jeter la pierre de vouloir lâcher les écrans. Surtout en ce moment où je profite de petits travaux de constructions domestiques pour m’infliger quelques jours de sevrage (et voir si je peux arriver à m’y tenir).
Mais se refermer complètement sans la moindre curiosité intellectuelle à un domaine aussi vaste et prometteur, ça je maintiens que c’est une belle réaction de con, tout brillant chef analyste programmeur qu’il ait pu être par ailleurs, et même si l’air du temps pourrait faire passer ça pour de la résistance sympathique au techno-fétichisme bêlant.
Le 18/09/2018 à 07h28
bof de toute façon il est mort, donc la question ne se pose plus.
mais effectivement je trouvais ça sympathique et il a meme conservé un téléphone à clapet jusqu’au bout :)