Hadopi-CSA : la novlangue avant le télécran
Miniver
Le 11 septembre 2013 à 10h30
4 min
Droit
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De la pilule, du beurre et de la sémantique. Hier devant la commission des affaires culturelles, Olivier Schrameck et Aurélie Filippetti ont tous les deux milité pour un transfert rapide des compétences de l’Hadopi au CSA. À cette occasion, le président du CSA a réajusté son discours sur les rapports entre numérique et audiovisuel.
Pas plus tard que le 24 juillet 2013, le président du CSA tentait de justifier le déploiement tentaculaire du CSA sur le net par ces mots fleuris : « Internet n’a pas de frontière, mais précisément il est à l’intérieur des frontières de l’audiovisuel, par tous les canaux d’accès, les ordiphones, les tablettes, les ordinateurs, la télévision connectée qui se développe de plus en plus. C’est bien Internet qui surgit au sein de la télévision, qui l’accompagne même avec ses écrans compagnons qui permettent d’assurer une réactivité. » Bref, l’audiovisuel englobant le numérique, le CSA qui contrôle l’audiovisuel doit contrôler le numérique. Compris ?
La théorie des ensembles, version Inception
Cette envolée a sans doute provoqué trop de remous si on en croit la mise à jour de Schrameck. Lors des échanges hier en commission de la Culture au Sénat, Schrameck a tout juste affirmé l’inverse de ce qu’Olivier nous disait fin juillet : « le secteur de l’audiovisuel est un secteur immergé dans le monde du numérique. Le numérique n’est pas un média parmi d’autres, il est un média englobant. Non seulement il englobe le secteur de l’audiovisuel, mais il le pénètre par tous les ports des canaux techniques, des contenus, des nouvelles chaines qui se créent. ».
Le président du CSA milite ainsi pour une « régulation globale » où évidemment le CSA prétend être au premier poste. Bel exercice de style qui consiste à affirmer l’inverse de ce qu’on a dit pour arriver à la même conclusion : que le numérique englobe l’audiovisuel ou que l’audiovisuel englobe le numérique, ne discutez pas, le CSA doit réguler tout ça.
Alléger, supprimer, réorienter
Ces efforts pour faire passer la pilule connaissent un autre expert : le ministère de la Culture. Trois exemples.
Quand la Rue de Valois envisageait des sanctions administratives au lieu et place de la suspension, on y présentait cet avenir comme l’allègement des sanctions. « Alléger, quel terme bien choisi ! » rétorquait la députée écologiste Isabelle Attard face à Aurélie Filippetti. Vous proposez de remplacer la sanction de déconnexion de l’accès internet par une amende légère. Cela reviendrait à distribuer des amendes à tour de bras sans que les faits soient solidement établis ». Le projet d’amende administrative a finalement été abandonné pour laisser intacte la contravention de 1500 euros prononcée par un tribunal de police.
Justement. Lorsque la suspension fut finalement supprimée par décret, la même Aurélie Filippetti annonçait sur Twitter : « La coupure internet c'est finie. Le changement c'est maintenant ». L’essentiel est d’y croire, car manque de chance, la coupure n’est pas seulement finie, elle n’aura surtout jamais été appliquée comme révélé dans nos colonnes.
Devant chaque audition en commission des affaires culturelles, Aurélie Filippetti annonce enfin une « réorientation très nette de la politique de lutte contre le piratage vers la lutte contre la contrefaçon commerciale. » La réorientation laisse entendre un changement de cap. On abandonne une route pour une autre. On file vers l’Ouest quand hier on voguait vers l’Est. En réalité, il n’en est rien : la riposte graduée sera dédoublée d’une action contre les sites. Un cumul, non une réorientation. Qu’ils soient commerciaux ou non marchands, il y aura surveillance, analyse et sanction de ces deux fronts d’échange.
Ce méli-mélo sémantique est sans doute inévitable pour toute ancienne opposante à la politique pénale de son prédécesseur qui compte aujourd’hui l’amplifier, la muscler, la démultiplier.
Hadopi-CSA : la novlangue avant le télécran
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La théorie des ensembles, version Inception
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Alléger, supprimer, réorienter
Commentaires (37)
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Abonnez-vousLe 11/09/2013 à 12h01
De la pilule, du beurre et de la sémantique
et des infos qui auraient pu être mises en màj de la première actu Hadopi de ce matin, à mon humble avis.
Le 11/09/2013 à 12h14
Bref, l’audiovisuel englobant le numérique, le CSA qui contrôler l’audiovisuel doit contrôle le numérique.
c’est moi ou cette phrase n’a pas de sens ?
A moins que ce ne soit fait exprès…
Le 11/09/2013 à 12h32
Le 11/09/2013 à 12h34
Le pouvoir n’est pas un moyen, il est une fin. On n’établit pas une dictature pour sauvegarder une révolution. On fait une révolution pour établir une dictature. La persécution a pour objet la persécution. La torture a pour objet la torture. Le pouvoir a pour objet le pouvoir.
Il n’est important de savoir qui détient le pouvoir pourvu que la structure hiérarchique demeure toujours la même.
" />
Le 11/09/2013 à 12h39
Réguler internet ? Impossible. C’est comme réguler le chaos.
Internet est dérégulé ou n’est pas.
Ces socialistes, ils veulent nous réinventer l’économie planifiée au niveau des réseaux informatiques…
Le 11/09/2013 à 12h39
Le 11/09/2013 à 12h40
Bel exercice de style qui consiste à affirmer l’inverse de ce qu’on a dit pour arriver à la même conclusion
Pile je gagne, face tu perds. " />
Le 11/09/2013 à 12h44
Le 11/09/2013 à 12h49
Le 11/09/2013 à 12h49
Ce méli-mélo sémantique est sans doute inévitable pour toute ancienne opposante à la politique pénale de son prédécesseur qui compte aujourd’hui l’amplifier, la muscler, la démultiplier.
Si’l n’y avait qu’en matière de politique culturel que ce gouvernement avait retourné sa veste, ce serait vraiment pas mal…..
Le 11/09/2013 à 12h51
Le 11/09/2013 à 12h59
Le 11/09/2013 à 13h04
De toute façon, du moment où ça a été négocié à l’abri des regards et que la conclusion est “le web internet va dans le giron du CSA“…
Le 11/09/2013 à 13h06
Le 11/09/2013 à 13h21
Ah l’enregistrement de Derrick sur magnétoscope, quel fléau " />
Le 11/09/2013 à 15h04
Quelle conclusion superbe à la Audiard !
Après un an de tergiversation, d’allers et de retours vers l’internaute, vers les lobbys, de coups de comm anti-hadopi … on se rend finalement compte, une fois le verni d’hypocrisie craqué que tout continue comme avant, voir pire …
Le 11/09/2013 à 19h00
On va enlever des gens, pas toujours compétents, à la HADOPI, pour les remplacer par des gens encore moins compétent du CSA et continuer d’aller dans le mur (encore plus vite d’ailleurs).
J’ai bien tout compris ?
Le 11/09/2013 à 22h00
Ils n’auraient pas idée de mettre un péage sur les pistes cyclables, hein ?" />
Le 11/09/2013 à 22h21
Lorsque la suspension fut finalement supprimée par décret, la même Aurélie Filippetti annonçait sur Twitter : « La coupure internet c’est finie. Le changement c’est maintenant ». L’essentiel est d’y croire …
me va relire la page 7 du Canard enchaîné du 04/09/2013 et le changement, ce n’est pas maintenant.
Comment cette personne (je m’auto-censure pour ne pas prendre moultes procès dans la face) peut-elle avoir avoir plus de poids dans son parti sur ce sujet que messieurs PAUL ou BLOCHE ?
Question inutile puisque d’obsolescence programmée, pour quand ? bientôt.
Le 11/09/2013 à 22h34
hs : oops, moult est un adjectif invariable " />
Le 12/09/2013 à 22h59
Le 11/09/2013 à 10h32
Ah la la… cette référence à 1984 de George Orwell. " />
Le novlangue est le nouvel idiome !
Le 11/09/2013 à 10h38
Le numérique n’est pas un média parmi d’autres, il est un média englobant. Non seulement il englobe le secteur de l’audiovisuel, mais il le pénètre par tous les ports …
Y versent dans le trash à l’Elysée!
Le 11/09/2013 à 10h40
D’habitude on a une rupture avec les promesses, mais lui est épatant, par des acrobaties digne d’un champion olympique, il arrive à tenir ses promesses. " />
Le 11/09/2013 à 10h43
Le 11/09/2013 à 10h50
Les lois française sont faites sur mesure pour les riches (majors , industriels, politiques … )
Le 11/09/2013 à 10h53
Le 11/09/2013 à 10h54
anéfé
Le 11/09/2013 à 10h59
Retour de l’ORTF pour Internet.
Et pendant ce temps, les dealers dealent, les tueurs tuent, les jeunes sombrent en masse dans la délinquance. Et visiblement, avec de plus en plus d’impunité.
Maintenant, mettons le paquet sur le VRAI problème de la société française : le téléchargement illégal. Attrapons les “acheteurs”, donnons les peines maximales aux dealers (les sites), surveillons un maximum, mettons plus de moyens.
Je suis un peu perdu " />
Le 11/09/2013 à 11h01
Olivier Schrameck me fait penser à Frank Underwood, de la série House of Cards, mais sans la profondeur et la subtilité de ce dernier " />
Le 11/09/2013 à 11h09
Le 11/09/2013 à 11h15
Le CSA pourrait proposer une évolution de protocole, pour que chaque flux soit taggué avec un “CSA Level”.
Les FAI tracerait les statistiques de connexions, et enverraient les résultats aux abonnés. En cas de consultation de sites interdits(*), la police débarquerait chez toi.
Les autres protocoles, sans la métadonnée du CSA, seront interdits car non sécurisés.
(*) : ça commence avec le pédonazi, et ensuite on ajoute les blogueurs gêneurs.
Le 11/09/2013 à 11h22
c’est marrant quand même.
On nous parle de réguler le net (" />) mais pendant ce temps à la TV on laisse les gosses (les ados et les adultes) s’abrutir avec les crétins à pétaoushnok (adulés par Morandini and co) ou avec des émissions voyeuristes malsaines.
Que le CSA régule ces émissions de merde avant de s’occuper du net, ça serait déjà une grande avancée.
Le 11/09/2013 à 11h26
Et après ils pourront dire qu’ils ont fermé HADOPI.
C’est beau….
Elle arrive encore à se regarder dans le miroir la Filippetti? Non parce que se renier de la sorte…
HADOPI passe au CSA et prend quelques hormones au passage.
Mais bon, je pense qu’il faudrait faire plus simple :
prise de 10% sur les salaires (pas le revenu du capital hein, on pourrait toucher les copains) en compensation du préjudice du piratage + prison ferme d’une semaine tous les 3 mois parce que ça ne donne pas le droit à pirater et que tout le monde (la France d’en bas) pirate (car tout le monde veut faire du mal aux ayants droit) : c’est automatique, proportionné, pédagogique (mais si, cherche bien) et ça coûte moins cher à mettre en place.
Le 11/09/2013 à 11h32
Ce méli-mélo sémantique est sans doute inévitable pour toute ancienne opposante à la politique pénale de son prédécesseur qui compte aujourd’hui l’amplifier, la muscler, la démultiplier.
Honnêtement, une news axée sur le fait que les politiciens retournent leur veste quand ils sont au pouvoir, qu’ils utilisent les feintes sémantiques, qu’ils embellissent le discours pour faire passer les pilules difficiles…..
C’est pas nouveau, c’est pas surprenant, et en quelque sorte, c’est pas anormal non plus.
Le 11/09/2013 à 11h35
Internet n’a pas de frontière, mais précisément il est à l’intérieur des frontières de l’audiovisuel, par tous les canaux d’accès, les ordiphones, les tablettes, les ordinateurs
A vocabulaire d’un autre âge, idées d’un autre âge, ça se tient. " />
Bref, l’audiovisuel englobant le numérique, le CSA qui contrôler l’audiovisuel doit contrôle le numérique. Compris ?
Non " />
Le 11/09/2013 à 11h59