Microsoft s’érige en chantre de la vie privée face aux collectes de masse
La confiance, un véritable fonds de commerce
Le 25 juin 2014 à 08h40
5 min
Internet
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Microsoft est lancée dans une véritable croisade de communication sur le terrain de la vie privée et de la surveillance des réseaux. Le responsable juridique de la firme, Brad Smith, a profité d’une intervention à la Brookings Institution pour revenir à la charge : la surveillance de masse doit cesser, et le monde de l’informatique est unanime à ce sujet.
La communication intensive d'une entreprise touchée par la crise Snowden
Les multiples révélations issues des documents dérobés par Edward Snowden ont profondément modifié la manière dont les sociétés informatiques communiquent. Impactées directement par des informations précises sur le fonctionnement du programme Prism de la NSA (National Security Agency), elles doivent se défendre pour ne pas aggraver la crise de confiance chez les clients.
Microsoft en particulier s’est improvisée chantre de la vie privée et toute sa communication est orientée de cette manière. C’est encore plus vrai quand Brad Smith, le responsable juridique de la firme, s’exprime publiquement. C’est à lui que l’on doit notamment plusieurs billets publiés sur le blog officiel de Microsoft, chacun attaquant sans relâche le bienfondé de la surveillance de la masse imposée par les agences de sécurité mondiales, mais surtout américaines.
Un « avenir lugubre » si rien n'est fait
Lors d’un passage à Washington à la Brookings Institution, Brad Smith a été questionné à nouveau lors d’une interview sur l’état actuel des collectes massives de données et métadonnées. Il a rappelé que le gouvernement devait cesser sa « collecte de masse sans entrave des données » et a appelé le Congrès américain à mettre en place une nouvelle législation. Un thème qui n’a rien de nouveau et qui suit directement la réforme annoncée par Barack Obama et qui pourrait finalement être nettement édulcorée au regard de ce qui avait été présenté en janvier dernier.
Smith se dit en outre conscient que la police et les autres agences doivent pouvoir travailler. Mais cela ne doit pas se faire à n’importe quel prix : « Je souhaite que les forces de l’ordre puissent faire leur travail de manière efficace et conformément à la loi. Mais si nous ne pouvons pas y parvenir, alors les forces de l’ordre auront dans tous les cas un avenir lugubre ». Il en veut pour preuve leur faculté actuelle à s’immiscer profondément dans la vie privée des citoyens, la situation étant nettement pire pour les étrangers, via la Section 702 de la loi FISA (Foreign Intelligence Surveillance Act).
Pour le responsable juridique, la problématique ne peut qu’enfler avec la multiplication exponentielle des objets connectés : « D’ici la fin de la décennie, il y aura 50 milliards d’objets connectés à travers le monde. Le problème va donc devenir plus important, pas moins ». En fait, l’estimation de Smith peut même sembler en-deçà d’autres analyses, le cabinet Morgan Stanley prévoyant par exemple 75 milliards d'appareils en 2020.
Coup double
Et si Microsoft cherche à communiquer aussi abondamment, ce n’est pas uniquement à cause de la surveillance de masse. La firme est actuellement en pleine bataille contre un juge de New York cherchant à lui imposer la transmission de données d’un client. En temps normal, rien ne devrait l’empêcher et un mandat a bien été émis. Problème : les données en questions sont stockées sur un serveur situé physiquement en Irlande. Microsoft s’était refusé à tout transfert et avait donc fait appel de la décision.
Mais tandis que le juge n’en démord pas, plusieurs entreprises et associations se sont liguées autour de Microsoft. C’est très notablement le cas de l’Electronic Frontier Foundation (EFF), d’Apple ou encore Cisco. Des entreprises qui ont émis des « amicus », des documents faisant part d’un éclairage de la situation par un tiers et qui peuvent aider un juge à prendre une décision… ou à la changer. Car l’EFF et les sociétés impliquées craignent les imbroglios juridiques et les effets ricochets : si les États-Unis décident de forcer Microsoft à révéler les données stockées en Irlande sans passer par les accords d’assistance mutuelle entre les pays, la firme pourrait se retrouver dans l’illégalité à l’étranger.
À situation différente, discours unique cependant : « Nous sommes dans un marché qui s’appuie sur la confiance des gens. Nous offrons un monde où vous devriez vous sentir en confiance pour stocker vos informations dans le cloud. Vous avez besoin d’avoir la certitude que ces informations sont bien toujours les vôtres ».
Une pression populaire ?
Car il n’y a pas de secret : cette confiance est le nerf de la guerre, avant même qu’il s’agisse de finances. Le marché du cloud est en grande partie bâti sur des services gratuits qui valorisent des espaces publicitaires. Plus les entreprises basculement vers les services en ligne, plus cette confiance est importante. Or, elle a été sérieusement mise à mal depuis un an par les révélations de Snowden.
Aujourd’hui, si Microsoft se voit obligé par un tribunal de remettre des données situées dans un autre pays, l’onde de choc pourrait être violente pour son chiffre d’affaires. En effet, les entreprises étrangères recevraient le signal qu’en cas de problème, la juridiction de leur pays ne serait pas prise en compte. Cette communication intensive pourrait permettre un contexte favorable en sensibilisant le grand public et en créant donc une forme de pression.
Microsoft s’érige en chantre de la vie privée face aux collectes de masse
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La communication intensive d'une entreprise touchée par la crise Snowden
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Un « avenir lugubre » si rien n'est fait
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Coup double
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Une pression populaire ?
Commentaires (29)
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Abonnez-vousLe 25/06/2014 à 08h53
Je n’avais pas confiance avant, que ce soit le Cloud d’Ubuntu ou celui d’Apple, Microsoft, Google… J’ai encore moins confiance depuis les révélations de Snowden.
Mes données restent chez moi, je ne serai jamais client d’un quelconque Cloud. " />
(PS: ces propos n’engagent que moi hein, je ne dis pas que tout le monde doit faire comme moi…)
Le 25/06/2014 à 08h53
« Nous sommes dans un marché qui s’appuie sur la confiance des gens. Nous offrons un monde où vous devriez vous sentir en confiance pour stocker vos informations dans le cloud. Vous avez besoin d’avoir la certitude que ces informations sont bien toujours les vôtres ».
Oh, cela veut dire que même MS ne pourra pas utiliser les metadata pour son propre compte comme le ciblage de pubs/produits ?
Le 25/06/2014 à 08h53
un pas dans la bonne direction " />
bon maintenant il faudrait éviter de faire ce genre d’actes aussi:
Next INpact
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Le 25/06/2014 à 08h54
C’est les soldes même chez les défenseurs de la vie privée…
Le 25/06/2014 à 09h00
De toute façon cloud et vie privée ça ne va pas ensemble. La maitrise des données et de leur stockage, il n’y a que ça de vrai.
Le 25/06/2014 à 09h02
Le 25/06/2014 à 09h05
Vie privée OK, droits de l’homme, pas OK ?
Ils gagneraient à être cohérents…
Le 25/06/2014 à 09h05
De toute façon ils peuvent bien dire ce qu’ils veulent personne ne pourra vérifier.
Le 25/06/2014 à 09h09
Le 25/06/2014 à 09h25
Et le scorpion dit : « Ne faites pas confiance à l’araignée ! »
Le 25/06/2014 à 09h27
Le 25/06/2014 à 09h31
Microsoft s’érige en chantre de la vie privée face aux collectes de masse
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Merci pour cette bonne tranche de rigolade…
Le 25/06/2014 à 09h32
Le 25/06/2014 à 09h33
Le 25/06/2014 à 09h35
Le 25/06/2014 à 10h01
Le 25/06/2014 à 10h22
Très difficile de ne stocker aucune de ses données sur un serveur d’une grande société, ne serait-ce que pour ses emails. La plupart des gens ont une adresse chez un grand groupe américain (Google, Yahoo, Microsoft), ou chez son fournisseur d’accès (et en France, c’est à peu près certain qu’ils échangent aussi leurs données avec les services de renseignement français). Il faut vraiment être militant pour héberger son propre serveur mail. Tous les services sont gratuits, alors que l’hébergement coûte un peu d’argent, et surtout du temps.
Le 25/06/2014 à 10h42
Le 25/06/2014 à 11h09
Le 25/06/2014 à 11h27
Microsoft cherche désespérément à protéger son chiffre d’affaires. Les pertes dues à l’affaire Snowden commencent à se faire sentir.
Le 25/06/2014 à 11h32
Le 25/06/2014 à 11h37
Juste une question… Microsoft, c’étaient pas eux qui avaient mis au point la plate-forme Palladium il y a de cela quelques temps~? Si mes souvenirs sont bons, c’était un système de flicage intégré directement en dur dans le processeur…
Je n’ai jamais fait confiance aux grandes sociétés comme celle-là, et je vois que je n’ai pas de raison de changer. La communication, vous dis-je…
Le 25/06/2014 à 12h02
Le 25/06/2014 à 12h02
Un beau plan de communication…
Faut-il encore y croire…" />
Le 25/06/2014 à 12h04
Pour ceux qui ont la mémoire courte : http://reflets.info/microsoft-et-ben-ali-wikileaks-confirme-les-soupcons-d-une-aide-pour-la-surveillance-des-citoyens-tunisiens/
Le 25/06/2014 à 12h18
Le 25/06/2014 à 21h28
La NSA continuera a faire du fist-fucking a Microsoft et autre…." />
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Le 27/06/2014 à 15h47
Vous pouvez me rappeler dans les documents dévoilés par Snowden qui est la toute première entreprise à avoir activement collaboré avec la NSA pour fournir des infos ?
Il me semble que ça commence par “Micro” et que ça fini par “Soft”…
Le 27/06/2014 à 19h04