Le paiement mobile s’étend, dans les pays développés comme ailleurs
Mais le plus dur reste à faire
Le 03 avril 2015 à 14h30
8 min
Société numérique
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L’annonce d’Apple Pay l’an dernier était un premier signe d'une tendance forte : le paiement sur mobile devient désormais une priorité pour tous. Un point que nous avons pu constater notamment à l'occasion du dernier MWC de Barcelone, car ces technologies ne se retrouvent plus dans les recoins les plus sombres du salon, entre opérateurs et fabricants de cartes à puce.
Apple l’a fait en 2014, Samsung le lance en 2015 : à l'occasion du coup d’envoi de ses multiples annonces du Mobile World Congress, le constructeur coréen a ajouté une solution de paiement à ses smartphones haut de gamme, les S6 et S6 Edge. Samsung Pay, a été pensé pour contrer l’Apple Pay de son rival. Simple volonté de copie ? Pas uniquement. Mais une chose est sûre, désormais, le paiement est au cœur des préoccupations et l'on ne pouvait que le constater à l'occasion de ce salon européen qui se déroulait début mars.
Oubliez les écrans toujours plus grands, toujours plus incurvés. Oubliez les voitures connectées, les montres et autres gadgets (enfin pas trop tout de même). Le cœur du business se fait directement via le porte-monnaie. Ce n’est pas pour rien que, d’une année sur l’autre, les stands de Visa et de MasterCard se sont mis à prendre de plus en plus de place. L’annonce de Samsung n’est que la cerise sur le gâteau d'une tendance qui chamboule le marché.
Ce dernier a d'ailleurs été suivi par Google, mais de manière assez opportune. En effet, le géant de la recherche ne devrait réellement présenter sa solution Google Pay que lors de la conférence I/O qui se tiendra fin mai. Il faut dire que la manne financière est énorme, et que chacun veut sa part du gâteau. Il faut donc agir vite, car ici comme ailleurs « Winner takes all ».
Apple Pay et Samsung Pay : une MST qui fait toute la différence
Mais dans la pratique, en quoi consiste Samsung Pay ? À l'instar d'Apple Pay, et comme la solution que présentait déjà l’an dernier Samsung avec PayPal, ce système permet de payer en utilisant son smartphone et de s’identifier avec son empreinte digitale. Il sera disponible à partir de fin juin aux États-Unis et en Corée du Sud. Comme pour Apple Pay, l’utilisateur doit scanner sa carte et une trace de celle-ci est stockée sous la forme d’un token au sein de l'appareil. Comme pour Apple Pay, l’utilisateur peut ensuite payer via NFC.
Mais à la différence d’Apple, Samsung a ajouté une technologie à sa solution, connue sous l'acronyme MST (Magnetic Secure Technology). Issue de son rachat de LoopPay en février, elle fait office de mode de communication alternatif pour les terminaux de paiement n’utilisant que les pistes magnétiques. En Europe, cela présente peu d’intérêt, mais aux États-Unis où les cartes à puce sont l'exception et n’en finissent plus de commencer leurs déploiements, cela autorise les téléphones de Samsung à être compatible avec presque tous les terminaux de paiement déjà en place.
Tokenisation et HCE au cœur des discussions
Et avec deux annonces coup sur coup des deux grands opérateurs du secteur que sont Visa et MasterCard concernant la tokenisation et le HCE (Host Card Emulation) juste avant le salon, cela ne pouvait que remettre le sujet sur le tapis. Du coup, tous les acteurs de la chaîne de paiement veulent se mettre à la tokenisation. Y compris Gemalto et les autres fabricants de cartes à puce qui tiennent à se vendre auprès des banques comme un tiers de confiance pour la tokenisation.
Ce qu’ils proposent ? Rien de moins que de générer les tokens stockés dans les différents appareils, de l'iPhone d'Apple aux S6 de Samsung, en passant par n’importe quel autre smartphone sous Android ou BlackBerry OS pour le paiement par HCE. Mais aussi pour les sites appelés à stocker des informations de paiement. En pratique, ces tokens sont des DAN (Device Account Numbers) qui ressemblent aux PAN (Personal Account Numbers, les numéros en doré ou argenté sur votre carte bancaire) et les remplacent dans les différentes bases de données censées stocker ces informations. Seule la société émettant ces DAN peut faire le lien entre eux, la carte bancaire originale et son propriétaire.
En pratique, si Gemalto assure que certaines banques françaises sont intéressées pour lui confier cette tâche, selon nos sources c’est une autre histoire. Quatre banques françaises (BNP Paribas, BPCE, la Banque Postale et la Société Générale) vont lancer un pilote HCE exploitant la tokenisation fournie par Atos Worldline pour Visa. Et les autres pourraient prendre exemple sur la banque espagnole BBVA et gérer cette partie en interne.
Certains acteurs passent à la pratique, reste à convaincre
Maintenant que les offres de tokenisation se mettent en place, les offres de paiement HCE commencent à arriver. Elles sont en pilote partout en Europe, sauf en Espagne ou elle existe déjà dans la pratique. Depuis octobre dernier, la BBVA a intégré le paiement HCE dans son application de banque mobile, et en faisait fièrement la démonstration sur le stand de Visa. Outre la possibilité de payer par NFC avec la carte de leur choix, les clients peuvent ainsi disposer d'une version numérique des tickets de caisse visibles par date ou genre d’achats ou par géolocalisation de la boutique. Ils peuvent aussi après coup, demander à payer un achat important en plusieurs fois. L’application indique instantanément le montant des mensualités, le taux d’intérêt et le montant final de l’achat.
En revanche, BBVA ne dit pas combien de clients ont téléchargé cette application. De plus, si le service HCE proposé par la banque est pour l’instant gratuit, ce ne sera pas forcément le cas en France où le paiement NFC via mobile est facturé aux alentours de 15 euros par an pour la plupart des banques le facturant.
Reste qu'il faudra encore convaincre commerçant et utilisateurs. Car si le paiement sans contact commence doucement à entrer dans les mœurs, il reste tout de même contesté concernant sa sécurité. Et surtout, il apparaît souvent comme plus simple qu'un paiement via un smartphone qui peut ne plus avoir de batterie, planter ou ne pas capter. PayPal, qui expérimente depuis six mois une solution dans des restaurants à Nancy, en sait sans doute quelque chose (nous y reviendrons).
Miser sur le transfert d’argent pour les pays en développement
Mais le paiement mobile n’est pas qu’une affaire de clients riches dans des pays suffisamment développés pour que tous les citoyens disposent déjà d'une carte bancaire. Il a y a aussi un marché et de l’argent à se faire dans les pays en développement, notamment pour ce qui est du transfert d’argent de personne à personne (voir notre précédente analyse), surtout s’il est transfrontalier !
Orange, qui est particulièrement bien implanté en Afrique avec Orange Money, a profité du salon de Barcelone pour évoquer Afrimarket. Via cette plate-forme, une personne peut envoyer de l’argent à ses proches au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Sénégal ou au Togo, et il peut en prédéfinir l’usage (achat de nourriture ou de médicament, paiement des factures, remboursement d’un prêt immobilier, etc.). Ce qui évite que l’argent envoyé ne soit détourné à l’arrivée.
MasterCard propose de son côté HomeSend, une offre pour transfert de l’argent sur un compte bancaire, sur une carte MasterCard prépayée, sur un porte-monnaie mobile stocké dans le téléphone du destinataire, ou directement via un distributeur de billets. Dans ce dernier cas, le destinataire doit alors entrer un code à six chiffres approprié.
Android au cœur des terminaux de paiement
Et pour les usages locaux, pourquoi ne pas proposer un terminal à bas coût ? C’est le but de Famoco avec son terminal NFC sous Android vendu à 100 dollars. Sauf que si celui-ci fonctionne très bien pour des expérimentations (comme Bebapay, la version kenyane du Google Wallet qui vient de fermer ses portes) ou dans des environnements clos comme des festivals de musique ; pour le paiement classique, Visa et MasterCard freinent des quatre fers avec des craintes pour la sécurisation du système d’exploitation.
Voisins de stands, Famoco et Uhuru, une société spécialisée dans la sécurisation d’Android pour les usages professionnels, ont profité du salon pour s’allier et proposer d’ici quelques semaines, une version sécurisée du terminal conforme aux standards EMVCo. Elle sera donc utilisable par n’importe quel commerçant.
Le paiement mobile s’étend, dans les pays développés comme ailleurs
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Apple Pay et Samsung Pay : une MST qui fait toute la différence
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Tokenisation et HCE au cœur des discussions
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Certains acteurs passent à la pratique, reste à convaincre
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Miser sur le transfert d’argent pour les pays en développement
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Android au cœur des terminaux de paiement
Commentaires (31)
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Abonnez-vousLe 03/04/2015 à 14h38
Je n’ai aucune confiance dans mon smartphone. Google et les autres: Touchez pas a mon grisbi…
Le 03/04/2015 à 14h41
Mouai le paiement sans contact, c’est pas mon délire. A première vue c’est pratique, mais dans les fait, je préfère un système plus sécurisé. La carte à puce me semble un bon compromis.
Et plus ça va, moins j’apprécie que l’on puisse tracer informatiquement mes transaction.
Quant à la sécurité des smartphones…" />
.
Le 03/04/2015 à 14h44
Oui enfin on part de la CB. Tu connais moins sécurisé qu’un code exposé à l’air libre ? " />
Le 03/04/2015 à 14h47
Oui, un code exposé dans une boite noire sur laquelle on a aucune maitrise.
Le 03/04/2015 à 15h03
L’erreur, c’est d’avoir permis les achats sur la foi des seules informations présentes en clair sur la carte.
La puce en elle même reste plutôt sûre (notez la subtile nuance dans le “plutôt” " />)
Le 03/04/2015 à 15h05
Comme un TPE tu veux dire ? #OhWait
Le 03/04/2015 à 15h17
Le problème du TPE concerne le commerçant, s’ il y a un keylogger sur le téléphone qui est responsable ?
Le 03/04/2015 à 16h59
On peut effacer les digits inscrits au dos de la carte.
Pour celles ayant le paiement sans contact, il est possible de le neutraliser en faisant un petit trou qui va bien.
Ce qui me fait plus peur, c’est que le téléphone qui sert de paiement peut recevoir une pléthore de programme (appli, jeux, etc…) avec tous les bugs qui peuvent l’accompagner et ainsi affaiblir la sécurité du système.
Le 03/04/2015 à 18h02
Sans doute très utile dans les autres pays du monde où leurs moyens de paiements reste majoritairement le “liquide” ou des cartes avec uniquement bande magnétique, mais chez nous je n’en vois vraiment pas l’intérêt à part ajouter un tiers supplémentaire dans la chaine de paiement qui vas prendre sa commission et pioché dans les informations privés. Nos banques savent déjà quasiment tout de nous pas besoin que apple/google
et autres en sachent autant.
Et ça rajoute aussi un intérêt supplémentaire au piratage des smartphones, les œufs, le panier tout ça.
Le 03/04/2015 à 19h08
Personnellement, j’y vois un nouveau moyen pour Google ou Apple d’en connaître plus sur moi.
Le 04/04/2015 à 07h13
Pour moi c’est trop tard… le paiement sans contact avec les CB a déjà pris son envol ! Autant j’attendais avec impatience le paiement sans contact pour payer mon boulanger maintenant que c’est possible avec les CB sans contact est dispo je vais pas m’emmerder à installer une application pour la même chose.
Et quoi qu’on en dise la paiement par CB en France est très sécurisé, pas techniquement c’est pareil qu’ailleurs, mais juridiquement !
Le 04/04/2015 à 08h38
Et qui peut déjà fournir des infos pour les règlements sans contact (du moins, bien plus que ce qui ne semble utile).
Testé avec plusieurs cartes bancaires, certaines sont très bavardes.
Apres, je ne pense pas que ce soit une excuse valable pour démultiplier les appareils et services qui possèdent nos informations (bien au contraire).
Le 04/04/2015 à 11h56
Le 04/04/2015 à 12h00
Le 04/04/2015 à 13h10
C’est mon avis aussi… depuis une petite expérience personnelle d’un incident CB. D’une manière générale, en matière d’assurance (moyens de paiement ou autres), le Diable se cache dans les détails et l’énergie qu’il faut déployer pour faire reconnaître ses droits n’est pas négligeable.
Depuis cette mauvaise expérience, je n’adopte plus que la CB à autorisation systématique (Electron/Maestro) et la CB rechargeables ou prépayée (pour mes achats sur internet). Et qu’on ne me dise pas que la CB à autorisation systématique est réservée aux interdits bancaires. Car la dénomination d’une CB (Electron, Gold, Platine, etc) ne présume pas précisément de son fonctionnement : le fonctionnement dépend de la banque qui émet la CB.
la définition générique de la CB à autorisation systématique : « Une carte à autorisation systématique interroge le solde du compte bancaire auquel elle est attachée avant chaque transaction. »
lafinancepourtous.com
Le contrôle a priori du solde de mon compte bancaire constitue pour moi une sécurité supplémentaire pour ne pas me retrouver à découvert en cas d’usurpation ou de vol de ma CB. Et c’est une contrainte éventuelle que j’assume, d’autant que je suis disposé à payer en espèces (paiement anonyme de surcroît) ou par chèque : car le format numérique et le format papier sont complémentaires et le resteront très longtemps (n’en déplaise aux banques)
Le 04/04/2015 à 13h17
Tu parles, la plupart des banquiers ne doivent même pas êtres conscients de ces problèmes de sécurité.
Le 04/04/2015 à 15h58
Le 04/04/2015 à 21h15
Je paye sans contact pratiquement en permanence avec ma carte. Ça me va et je comprends le principe.
En revanche, je me permets d’émettre des doutes sur ces paiements ou les donnees de la carte sont stockées sur les téléphones mobiles. Il va falloir me convaincre sérieusement sur la sécurité (si mon téléphone est volé par exemple ou tout simplement une faille du système d’exploitation).
Le 05/04/2015 à 13h33
Chez Boursorama possibilité d’activer ou désactiver le sans fil sur le carte, je l’ai activé bah c’est assez pratique même si ce n’est pas un énorme gain de temps au vu du risque pris.
Pour le portable je suis partagé entre le coté pratique et les dérives possibles, même si je penche plutôt pour car les petites pièces et les prix à la con du type 0.97 € la baguette tradition ou 0.63 € le timbre éco c’est juste hyper chiant, et ça force à se trimballer de la ferraille.
Le 05/04/2015 à 15h28
Le 05/04/2015 à 15h32
Le 06/04/2015 à 02h11
Le 06/04/2015 à 07h51
Le 06/04/2015 à 09h28
Le 06/04/2015 à 09h33
Le 06/04/2015 à 11h37
Le 07/04/2015 à 07h26
Le 07/04/2015 à 08h43
Le 07/04/2015 à 20h31
Le 08/04/2015 à 04h59
Le 08/04/2015 à 13h17
pour ceux que ça intéressent :
« « Changeons la banque ! », c’est le titre du livre de Benoît Legrand, le patron d’ING Bank France, à paraître le 9 avril. Il y fait, sans surprises, l’apologie du modèle digital et low cost, et fournit quelques scénarios de « banque fiction » pour l’avenir. Extraits en avant-première. »
« Réinventer la banque grâce aux données »
paragraphe intéressant (Big Data …)
source : cBanque
Nota Bene : “en ligne” (par ex.) au lieu de “digital” serait plus approprié. Sacrés web-marketeur !!