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Loi Renseignement : la saisine blanche du président du Sénat

Une contrariété pour les futures QPC ?

Loi Renseignement : la saisine blanche du président du Sénat

Le 29 juin 2015 à 08h00

La loi sur le renseignement a fait l’objet de trois demandes d’examen adressées au Conseil constitutionnel. Après la saisine des députés, puis celle du président de la République, nous révélons celle de Gérard Larcher. Sa particularité ? Le président du Sénat a fait le choix d'une saisine blanche.

« Face à ces enjeux, eu égard à la portée d’une telle loi, aux interrogations qu’elle a suscitées et à la brièveté des délais accordés au Parlement pour l’examiner, le président du Sénat, Gérard Larcher, saisira dès demain le Conseil Constitutionnel afin qu’il s’assure que le texte réponde aux exigences de protection des libertés fondamentales ». Voilà ce qu’avait indiqué mercredi dernier Gérard Larcher (Les Républicains). Jeudi, la saisine du Conseil constitutionnel se triplait donc à l’encontre de la loi sur le renseignement, tout juste votée par le Parlement.

Mais que dit le président du Sénat dans sa missive ? Rien de bien concret. Il se contente d’égrainer quelques considérations généralistes, en l’accompagnant de commentaires personnels : « Concernant ces nouvelles technologies, peu de références juridiques pertinentes permettent d’apprécier la constitutionnalité du cadre légal. Le Conseil constitutionnel n’a été saisi ni de la loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques, ni de la loi de programmation militaire (…) du 19 décembre 2013. »

Applaudir le Sénat, critiquer le choix du gouvernement

De fait, l’essentiel de sa saisine se contente de féliciter l’apport sénatorial dans l’ébauche du texte, et de critiquer le choix gouvernemental pour la procédure accélérée. Si le processus législatif « a permis d’améliorer substantiellement le projet de loi », le Parlement a néanmoins été contraint « par la décision du gouvernement de recourir à la procédure accélérée, alors que l’importance et les difficultés des questions posées auraient justifié que les deux assemblées aient le temps nécessaire, par la navette parlementaire, de parvenir à un équilibre plus éclairé entre les nécessités de la sécurité et les garanties des libertés. »

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Ceci posé, le président du Sénat pourra toujours se dédouaner sur le gouvernement en cas de censure constitutionnelle : ni les députés ni les sénateurs n’auront pu prévenir cette censure, le gouvernement ayant préféré limiter le temps des débats sur des dispositions parfois très floues, mais toujours très sensibles.

Le président du Sénat opte pour une saisine blanche

Plutôt que d’opter pour une mise en cause ciblée de tel ou tel article de la loi Renseignement, Gérard Larcher a fait le choix d’une saisine blanche, exprimée ainsi :

« Eu égard à la portée de ce texte, aux nombreuses interrogations qu’il a suscitées et à la brièveté des délais laissés au Parlement pour l’examiner, j’estime devoir le soumettre à l’examen du Conseil constitutionnel, sur le fondement du deuxième alinéa de l’article 61 de la Constitution, afin qu’il puisse être garanti que, dès sa promulgation, le dispositif adopté répondra pleinement aux exigences, en matière de protection des libertés, du bloc de constitutionnalité. »

L’actuel président du Conseil constitutionnel avait dit toute son opposition à ce type de saisines qui consistent à transmettre un texte à son examen sans formuler de griefs particuliers. Il est vrai cependant que la Constitution ne les interdit pas formellement (« les lois peuvent être déférées... » dit l’article 61 alinéa 2 de la Constitution).

La saisine blanche, un potentiel verrou anti-QPC

Comme on peut le lire dans les Cahiers du Conseil constitutionnel, dans pareil cas, le juge ne s’interdit pas de soulever d’office les points d’inconstitutionnalité ou, à défaut, de déclarer conforme la loi tout entière.

Seulement, depuis l’avènement des questions prioritaires de constitutionnalité, la manœuvre est potentiellement contrariante : en effet, un citoyen ne peut adresser de QPC à l’encontre d’une disposition déjà promulguée que si elle n’a pas été déclarée préalablement conforme. En d’autres termes, une déclaration de conformité globale de la loi pourrait venir bloquer les futures QPC : non, messieurs de la Quadrature du Net ou de FDN, vous ne pouvez agir contre tel article, puisque la loi a été déclarée conforme dans son ensemble...

Cependant, si la situation est tendue, elle n’est pas encore perdue pour les détracteurs : les QPC ne peuvent être déclarées irrecevables que si les dispositions en cause ont été déclarées conformes à la fois dans les motifs et dans le dispositif de la décision (considérant 4 de la décision du 2 juillet 2010). « Les motifs » sont les moyens de droit qui fondent la décision, laquelle se trouve nichée dans les « dispositifs ». Ainsi, comme l’expliquent les Cahiers, le Conseil constitutionnel considère par exemple « qu’une disposition jugée conforme à la Constitution dans les motifs d’une de ses précédentes décisions, mais non dans son dispositif n’a pas déjà été jugée conforme à la Constitution », elle peut ainsi faire l’objet d’une QPC. Bref, retenons qu'avec cette astuce, le Conseil pourrait très bien censurer un article, sans bloquer les futures QPC. Il faudra dans tous les cas ausculter avec soin la décision « Loi Renseignement » attendue dans moins d’un mois.

Commentaires (17)

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Comme dit dans l’actu, la Constitution dit qu’une loi peut être déférée au contrôle du CC (sans plus de détail)

  Je ne sais pas quelle sera la marge de manoeuvre de JL sur ce terrain.

 

 

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WereWindle a écrit :



L’autre possibilité est qu’il veuille volontairement empêcher les QPC à venir en faisant valider tout le texte en bloc… mais ça serait bas…





C’est l’évidence même, surtout que l’autre flamby a fait la même manœuvre, deux fois.

Ils veulent faire passer leur merde en force par tous les moyens.



La question que je me pose est celle de l’ordre d’étude des saisines, parce qu’il me semble que celle de QDN et compagnie a été envoyée en premier non ? Ou bien c’est à la tête du client ?


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La “saisie blanche” a un autre effet pernicieux : selon l’article de la constitution cité le CC soit rendre sa décision dans un délai d’un mois. Ça me paraît très difficile d’analyser une loi dans son entier et de ne rien louper dans un délai si court. Le risque est réel que dans le futur des QPC pertinentes soient retoquées pour raison de “procédure” avant même d’arriver au CC, surtout si c’est le conseil d’état qui fait le filtre.

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Resman a écrit :



Ça me paraît très difficile d’analyser une loi dans son entier et de ne rien louper dans un délai si court.





  Le Conseil Constitutionnel a d’excellents juristes, merci pour eux ;)


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Chers amis IMpactiens,



Arrêtez de vous triturer les méninges.



Cette loi parfaitement liberticide a été conçue et votée autant par la droite, le centre et la gauche que même par certains écolos.



Très peu de nos “élus” s’y sont opposés, sauf bien évidemment à s’en exclure eux-mêmes (faites ce que je dis, pas ce que je fais).



La riposte ne pourra certainement pas être d’ordre juridique tant le Conseil Constitutionnel va tout faire pour bloquer les éventuelles QPC à venir.



Donc, préparons très activement une riposte technique, accessible à tous permettant de noyer les boites noires de faux positifs par millions quitte à dire des choses comme : t’as vu, c’est une bombe (en parlant de sa copine).



Inventez des centaines de messages comprenant les mots clefs filtrés mais sans aucun rapport avec les buts recherchés (je fais confiance à votre imagination fertile).



Lorsqu’ils constateront, comme aux USA, que ça coûte un maximum de fric et que ça ne sert strictement à rien vu le manque de moyens judiciaires, peut-être comprendront-ils leur con…rie ?



Mais surtout, adressez chacun de vous une lettre motivée à votre député et à votre sénateur (s’ils ont voté cette loi) pour bien leur faire comprendre que vous ne les oublierez pas en 2017.



Là cela aura du poids, surtout si vous renouvelez vos missives chaque mois jusqu’aux prochaines élections !


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Si je ne m’abuse, les “boites noires” n’analyseront pas le contenu des communications, mais juste les données de connexions.

 

Elles ne seront pas noyées par des mots clefs contenus dans les messages.

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Tous laisse à penser que ce qu’ils appellent”données de connexions”, ce sont les métadonnées de la couche 7 (typiquement la requête que fait ton navigateur à un serveur Web). En les ayant, plus besoin du contenu

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En même temps, si un article a été déclaré conformé, il le serait déclaré une seconde fois en cas de QPC, donc ça ne change rien non ?

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lysbleu a écrit :



En même temps, si un article a été déclaré conformé, il le serait déclaré une seconde fois en cas de QPC, donc ça ne change rien non ?





Non, pour la QPC tu pointes un point particulier et tu apportes tes arguments contre ce points. Le conseil constitutionnel va prendre en compte tes arguments et déclarer le point conforme ou non conforme à la lumière de tes arguments.



Là il n’y a pas d’arguments particuliers avancés, donc si le CC ne voit pas un truc, et qu’il déclare la loi conforme, le truc est déclaré conforme et tu n’as aucun moyen de présenter tes arguments.



Le CC ce sont juste des hommes, quand tu vois la portée de la loi c’est dur de prendre tout en considération (ils peuvent y arriver, mais les erreurs arrivent).



Dit toi que c’est un peu comme un procès sauf qu’il n’y a aucun moyen de faire appel ou de présenter de nouvelles preuves. Le premier jugement est aussi le dernier.


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Une QPC doit concerner une question nouvelle.



Donc si un truc est déclaré conforme -> pas de QPC possible sur ce point dans le futur.



Je remarque quand même que le Sénat a pondu un peu plus de texte de l’Élysée. Y a du progrès.

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Khalev a écrit :



Non, pour la QPC tu pointes un point particulier et tu apportes tes arguments contre ce points. Le conseil constitutionnel va prendre en compte tes arguments et déclarer le point conforme ou non conforme à la lumière de tes arguments.



Là il n’y a pas d’arguments particuliers avancés, donc si le CC ne voit pas un truc, et qu’il déclare la loi conforme, le truc est déclaré conforme et tu n’as aucun moyen de présenter tes arguments.



Le CC ce sont juste des hommes, quand tu vois la portée de la loi c’est dur de prendre tout en considération (ils peuvent y arriver, mais les erreurs arrivent).



Dit toi que c’est un peu comme un procès sauf qu’il n’y a aucun moyen de faire appel ou de présenter de nouvelles preuves. Le premier jugement est aussi le dernier.









John Shaft a écrit :



Une QPC doit concerner une question nouvelle.



Donc si un truc est déclaré conforme -> pas de QPC possible sur ce point dans le futur.



Je remarque quand même que le Sénat a pondu un peu plus de texte de l’Élysée. Y a du progrès.





D’accord merci pour vos réponses <img data-src=" />


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Une saisine blanche ca ne revient pas à dire que Mr Larcher n’a pas lu le texte? Si il l’a lu et qu’il ne trouve rien à y redire, pourquoi faire une saisine?

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L’eclaireur a écrit :



Une saisine blanche ca ne revient pas à dire que Mr Larcher n’a pas lu le texte? Si il l’a lu et qu’il ne trouve rien à y redire, pourquoi faire une saisine?





parce qu’il peut reconnaitre ne pas avoir la science infuse et que des détails peuvent lui échapper, qui n’échapperont pas au CC ?



L’autre possibilité est qu’il veuille volontairement empêcher les QPC à venir en faisant valider tout le texte en bloc… mais ça serait bas…


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Cependant, si la situation est tendue, elle n’est pas encore perdue pour

les détracteurs : les QPC ne peuvent être déclarées irrecevables que si

les dispositions en cause ont été déclarées conformes à la fois dans

les motifs et dans le dispositif de la décision (considérant 4 de la décision du 2 juillet 2010). « Les motifs » sont les moyens de droit qui fondent la décision, laquelle se trouve nichée dans les « dispositifs ». Ainsi, comme l’expliquent les Cahiers, le Conseil constitutionnel considère par exemple « qu’une

disposition jugée conforme à la Constitution dans les motifs d’une de

ses précédentes décisions, mais non dans son dispositif n’a pas déjà été

jugée conforme à la Constitution », elle peut ainsi faire l’objet

d’une QPC. Bref, retenons qu’avec cette astuce, le Conseil pourrait très

bien censurer un article, sans bloquer les futures QPC. Il faudra dans

tous les cas ausculter avec soin la décision « Loi Renseignement »

attendue dans moins d’un mois



Oula.



Alors déjà, on dit LE dispositif <img data-src=" />

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Ensuite, dès lors que le texte est déféré en son entier, le Conseil Constitutionnel va l’analyser dans son entier au regard de l’ensemble du bloc de constitutionnalité.



Il n’y a absolument aucune chance pour qu’il n’y ait pas dans le dispositif de la décision du Conseil constitutionnel un chef déclarant conforme l’ensemble des dispositions qui auront échappé à une éventuelle censure.

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La décision du Conseil Constitutionnel verrouillera l’ensemble des QPC futures et c’est tant mieux, parce que c’est comme ça que fonctionne le dispositif.

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WereWindle a écrit :



parce qu’il peut reconnaitre ne pas avoir la science infuse et que des détails peuvent lui échapper, qui n’échapperont pas au CC ?



L’autre possibilité est qu’il veuille volontairement empêcher les QPC à venir en faisant valider tout le texte en bloc… mais ça serait bas…





Ou pure manœuvre politique pour ne pas porter la responsabilité en cas de censure du conseil constitutionnel.



D’ailleurs qu’il y ait censure ou pas, le président/gouvernement se félicitera d’avoir fait évolué la loi dans le bon sens en la rendant compatible avec la constitution, pareil pour les députés.



Le seul méchant restant dans l’histoire serait le sénat qui n’aurait rien fait (déjà que pour beaucoup les vieux du sénat ne servent à rien…), d’où l’idée pour le sénat de saisir pour la forme le conseil constitutionnel.


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Le président du CC n’avait pas fait remarquer au Président de la République que les saisines blanches se verraient refusées ?

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Et du coup ça passerait pour le Sénat ? Etrange.

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warfie a écrit :



Le président du CC n’avait pas fait remarquer au Président de la République que les saisines blanches se verraient refusées ?

 



Et du coup ça passerait pour le Sénat ? Etrange.





Jean-Louis Debré avait jalonné le terrain : « Nous ne sommes pas là pour donner un avis. Nous sommes une juridiction constitutionnelle et nous rendons des décisions. Il faudra donc que la saisine du président de la République soit motivée. »

« Nous n’acceptons pas les saisines blanches » tambourinait-il ainsi sur le plateau de BFM.


Loi Renseignement : la saisine blanche du président du Sénat

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  • Le président du Sénat opte pour une saisine blanche

  • La saisine blanche, un potentiel verrou anti-QPC

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