L’impression 3D séduit l’aéronautique
De la fabrication à la conception
Le 17 juillet 2015 à 08h30
5 min
Sciences et espace
Sciences
Alors que la révolution de l'impression 3D n'a pas encore eu lieu dans le grand public, on trouve déjà de nouvelles applications dans des secteurs dans lesquels on ne s'y attendait pas. C'est notamment le cas de l'aéronautique, mais aussi dans l'espace.
Pour vous, l’impression 3D ce sont surtout des figurines de Sculpteo et quelques bidouilleurs jouant avec leurs imprimantes du fond de leur garage ou au fablab du coin ? Pour le milieu aéronautique, c’est la nouvelle révolution industrielle. Mais pour ne pas effrayer les investisseurs ou les acheteurs, l’industrie ne parle pas d’impression 3D synonyme de gadgets en plastiques peu solides justes bons à amuser le grand public.
Non, non... ici on parle de fabrication « additive ». Car, selon la méthode classique, pour fabriquer la carlingue d’un avion ou d'une carrosserie de voiture, on découpe la pièce voulue dans une plaque de métal : on la « soustrait ». Alors qu’en fabrication additive, l’imprimante assemble la poudre ou les polymères pour lui donner la forme souhaitée.
Mais au-delà d’une simple différence sémantique, c’est toute la façon dont un avion est conçu qui évolue.
Des pièces impossibles à produire autrement
Pour Pierre Marchadier, vice-président de Dassault Systèmes « on arrive à une rupture : il est désormais possible de créer des pièces impossibles à faire en métallurgie classique, car contre-intuitives. » Ou tout simplement parce que les méthodes traditionnelles et la résistance du métal n’arrivent pas à les produire.
C’est notamment le cas des pales courbées du H160, le dernier hélicoptère phare d’Airbus. Avec une moindre résistance à l’air, ces pales améliorent la portance et réduisent considérablement le bruit dans l’habitacle et la consommation de carburant. La fabrication additive permet également l’utilisation de matériaux polymère qui se déforment sous l’impulsion d’un courant électrique.
Crédits : Stéphanie Chaptal (licence: CC by SA 3.0)
En clair, au lieu de voir comme à l’heure actuelle, une partie de l’aile se détacher pour freiner, ce sera la matière elle-même qui se redressera en contractant pour obtenir le même effet (en réaction à un courant électrique). Le tout sans pièce mécanique susceptible de tomber en panne, et pour un rendu plus léger.
Outre le H160, Airbus a déjà intégré des pièces réalisées en impression 3D dans son dernier-né, le A350. Et Boeing en a fait de même pour son concurrent, le 787 Dreamliner. Turbomeca qui fournit des moteurs aux deux avionneurs, mais aussi aux autres, le fait également.
La 3D dans l’espace
Et cela ne s'arrête pas là, puisque même l’espace s’intéresse à la fabrication additive ! L’ULA (United Launch Alliance) l’utilise pour la construction de ses fusées Atlas. Et dans la station spatiale internationale, l’impression 3D pourrait changer la vie des astronautes, en leur permettant de disposer de nouveaux outils ou de pièces sans attendre le ravitaillement.
Au dernier salon du Bourget, Altran présentait la POP 3D, une petite imprimante développée par sa filiale italienne qui devrait rejoindre l’ISS à la fin du mois. Celle-ci, très proche des modèles vendus au grand public, utilise l’impression par filament avec PLA. Le choix du PLA basé sur l’amidon de maïs permet d’éviter l’apparition de poussières toxiques dans l’air de l’ISS, et d’obtenir des objets plus solides à relativement faible température, même s’ils sont plus cassants.
Et là où, sur Terre, les imprimantes laissent tomber le plastique fondu sur le plateau pour créer des formes, dans un environnement de microgravité, il faut coller la buse à l’objet en cours de création. Ce qui peut entrainer un peu plus de pannes, mais permet à l’appareil de fonctionner dans toutes les positions. Si la NASA avait déjà envoyé une première imprimante dont le budget se comptait en centaines de milliers de dollars, la version d’Altran n’a coûté que 40 000 dollars à développer. Et s’il faut la reproduire, le prix devrait être divisé par 10, soit à peine plus cher qu’une MakerBot haut de gamme.
Les éditeurs de logiciels sont aussi sur le coup
Du coup, cet intérêt aéronautique et spatial pour l’impression 3D suscite les convoitises et excite les rêves des éditeurs. Qu’ils s’appellent Autodesk, Dassault Systèmes, Safran, PTC ou Thales, tous imaginent l’aéronef de demain conçu et réalisé entièrement en 3D, avec des logiciels capables de suggérer automatiquement aux ingénieurs de nouvelles évolutions de pièces pour mieux s’intégrer à l'existant. Certains indiquent déjà les meilleurs endroits où joindre deux pièces, et le but est donc d'améliorer les algorithmes pour y intégrer les problèmes propres à l'aéronautique.
Ou intégrer directement les pièces ainsi conçues dans les logiciels de maintenance ou de formations pour obtenir des résultats plus réalistes et adaptés à la vie de l’appareil. Dassault Systèmes et Safran ont d’ailleurs profité du Salon du Bourget de juin dernier pour annoncer qu'ils associaient leurs talents dans ce domaine afin d'intégrer les logiciels 3D Expérience de Dassault au savoir-faire (en tant qu’équipementier) de Safran pour développer une solution 3D complète, qui va de la conception à la maintenance des moteurs d’avion.
L’impression 3D séduit l’aéronautique
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Des pièces impossibles à produire autrement
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La 3D dans l’espace
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Les éditeurs de logiciels sont aussi sur le coup
Commentaires (34)
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Abonnez-vousLe 17/07/2015 à 08h35
Intéressant !
Le 17/07/2015 à 08h37
Il y à ce projet aussi :
http://www.wedemain.fr/Premiere-mondiale-a-Amsterdam-l-impression-3D-d-un-pont_a1098.html
Le 17/07/2015 à 08h40
On peut faire des maisons aussi, ça coûte moins cher que de payer des maçons.
Par contre, le résultat visuel est pas encore au point…
Le 17/07/2015 à 08h42
Suite à une catastrophe peut-être intéressant.
Pour les Haïtiens cela serait un luxe abordable.
Le 17/07/2015 à 08h51
Le 17/07/2015 à 08h51
Y’a plus qu’à poncer ! " />
Le 17/07/2015 à 08h53
La NASA a même imprimé un moteur fusée via impression 3D.
Le 17/07/2015 à 08h55
Le 17/07/2015 à 08h55
Préciser déjà dans l’article.
Le 17/07/2015 à 08h57
Serait mieux que des années sous des tentes et beaucoup plus salubre si les installation ne sont pas fait à l’arrache.
Le 17/07/2015 à 09h00
Miam ! Tant mieux que cette techno se développe, ça fait baisser son prix public, et la rend intéressante et pratique.
En tant que modéliste, je ne vous dis pas les applications possibles : adieu les locomotives et les wagons hors commerce, par exemple ! Il suffira de traduire les plans des engins qui m’intéressent en fichiers CAD et hop ! Je fais mon matériel roulant chez moi : à moi la SNCF à l’échelle Z, ou les chemins de fer polonais des années 1970 en N, pour ne parler que des cas où rien n’existe dans le commerce actuellement.
Le 17/07/2015 à 09h04
Pour l’espace, l’ESA envisage cela :
http://www.futura-sciences.com/videos/d/esa-etudie-possibilite-imprimer-base-lunaire-3d-787/
Le 17/07/2015 à 09h08
Le 17/07/2015 à 09h08
Au Bourget il y a 3 semaines j’avais discuté avec un cadre de chez Daher et eux aussi commencent à utiliser cette technique pour imprimer les conduits NACA de leur TBM 900.
Le 17/07/2015 à 09h09
Surtout qu’airbus à libéré le modèle 3d d’un des concept plane http://www.artilect.fr/imprimetonavions/
Il y a aussi une vidéo du fab lab sur airbus.com.
Le 17/07/2015 à 09h13
L’ULA (United Launch Alliance) l’utilise pour la construction de ses fusées Atlas , la nasa produit presque rien en propre, ce sont ces sous-traitant qui font le plus gros du travail.
Le 17/07/2015 à 09h21
Le 17/07/2015 à 09h29
Concernant la fabrication additive de métaux je suis intéressé par le sujet du certains ont plus de références ?
De mon côté je suis ingénieur en soudage donc je connais bien les problèmes liés à la transformation et à la fusion des métaux et je dois dire que je m’interroge sur les propriétés physico-chimiques des pièces métalliques “imprimées” (car les procédés d’impression sont en fait des procédés de soudage adaptés) mais j’ai beaucoup de mal à trouver de la littérature sérieuse sur le sujet…
Le 17/07/2015 à 09h54
Le 17/07/2015 à 09h58
Je suis dans une industrie où l’on a investi dans ce genre d’imprimante pour justement changer de méthode de fabrication et sur certains produits nous permettre de revenir dessus car nos marges n’étant plus assez importante nous avions arrêté de les produire.
Il faut savoir une chose importante c’est que l’imprimante 3D (sans rentrer dans le débat du cout matière) permet de revenir sur des marchers qui étaient trop couteux en MO et process assemblage. Du coût avec ces nouveaux outils ont peut de nouveaux dans certains cas concurrencer les marchés qui étaient perdu a cause du faible cout MO…
On verra quel impacte économique ça apportera mais je suis curieux d’en voir l’évolution, surtout du côté de la Chine qui pour le moment écrase le Cout MO sur beaucoup de fabrication…
Le 17/07/2015 à 10h08
Le 17/07/2015 à 10h31
Au jour d’aujourd’hui les caractéristiques mécanique des pièces 3D print (métallique, plastic) n’arrive pas encore au niveau des pièces méca actuelle. Pour cela que les pièces primaire ne sont pas encore réaliser en 3D print.
Pour l’impression métallique, généralement, le principe est :
1 - Un chariot dépose la poudre
2 - Un laser viens agglomérer la matière en suivant un trajet bien précis.
ainsi de suite pour les différentes couches.
Snecma a produit et tester des injecteurs pour son nouveau moteur (Silvercrest), réduisant ainsi le nombre de pièces (une 100ene) a 1 seul, et réussi a y intégrer un circuit de refroidissement.
Airbus lance des études pour reproduire des outillages existant en 3D print.
Le 17/07/2015 à 11h57
Le 17/07/2015 à 12h01
Le 17/07/2015 à 12h09
Le 17/07/2015 à 12h26
Le 17/07/2015 à 12h29
Le 17/07/2015 à 12h42
Et des injecteurs sur les nouveaux moteur LEAP CFM:
21 pièces en fabrication classiques
1 seul pièce en fabrication additive…
Le 17/07/2015 à 12h44
Le 17/07/2015 à 13h02
Le 17/07/2015 à 13h48
Pour des usages moins exigeants, on peut imprimer un semblant de métal avec une imprimante grand public. De la poudre de métal est mélangée avec le PLA, ce qui donne à la pièce une apparence métallique et l’alourdit considérablement. Évidement d’un point de vue structurel, ce n’est pas du métal ; mais le rendu est très intéressant. Un petit polissage et ça brille. Pour des figurines ou du modélisme, c’est tip top. Chercher “bronzefill” par exemple.
Une solution différente, est d’imprimer la pièce en PLA classique, de la placer dans un moule (en sable par exemple) puis d’y injecter du métal en fusion. Le PLA fond et est remplacé par le métal (rien de révolutionnaire, on le faisait depuis longtemps avec des pièces en cire par exemple). Pour le coup, on obtient évidement du vrai métal, mais on perd pas mal d’avantages de la fabrication additive, puisqu’on passe par un moulage finalement très traditionnel.
Le 17/07/2015 à 14h28
Des prototypes de machines au stade pré-industriel produisent aujourd’hui des pièces aux caractéristiques mécaniques proches à 90% à des pièces usinées, notamment avec du titane. Justement, certains savent produire des pièces sans ces micro-cavités…
Les cycles sont longs dans l’industrie, et les méthodes appliquées sur les pièces qui fonctionnent aujourd’hui sont celles développées dans les labo il y a 5 ans. Ce qui reste court.
Donc il s’agit dans un premier temps de conforter le modèle économique sur des pièces non critiques et néanmoins complexes, et ensuite un vrai déploiement sera mis en place.
PS : pour les pales d’hélico, il s’agit en premier lieu de réduire la vitesse en bout de pale, pour augmenter la vitesse de l’appareil et allonger la durée de vie des pales. La moindre résistance à l’air est une conséquence de la recherche d’une vitesse la plus éloignée de celle du son en bout de pale.
Le 17/07/2015 à 15h22
Je suis certain que la technologie progresse, et que peu à peu les défauts induits par l’utilisation de ce procédé vont être minimisés et maîtrisés. Mon commentaire est peut-être négatif car je n’évoque pas tous les avantages de la fabrication additive, qui existent et sont bien réels.
Hier on choisissait entre faire une pièce par usinage, matriçage ou fonderie (liste non exhaustive) et on combinait souvent plusieurs techniques ; demain on aura la fabrication additive qui permettra d’étendre le domaine des possibles et coexistera avec les autres procédés. Mais finalement, dans notre système productiviste, ce sera la logique économique qui prévaudra : je veux pouvoir faire tant de pièces et que ça me coûte le moins cher possible ; quelle gamme je choisis ?
Le 18/07/2015 à 09h01
Comment ca “on ne s’y attendait pas” ? Evidemment que tout le monde qui connait l’industrie s’y attendait !
Quant à la fabrication additive, ca ne date carrement pas d’hier, l’impression 3D n’en est qu’une forme de plus.
Le frittage(le plus classique), la reticulation laser ou par UV, c’est déjà TRES LARGEMENT employé.
Je crois même qu’on classe les procédés modernes de création de microprocesseurs (stéréolithographie, etc.) dans la fabrication additive…