Après une année 2024 désastreuse, Sonos se cherche un nouveau PDG
Petit guide de ce qu'il ne faut pas faire
Patrick Spence, CEO de Sonos depuis huit ans, a démissionné de ses fonctions. Le spécialiste du son se cherche désormais un nouveau patron, avec l’aide d’un cabinet. Cette démission clôt une année 2024 calamiteuse, marquée par une mise à jour de l’application maison qui aura provoqué bien des problèmes.
Le 14 janvier à 14h03
6 min
Économie
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2024, annus horribilis chez Sonos ? Le constructeur, connu pour ses équipements audio milieu à haut de gamme, commence en tout cas 2025 de manière très différente d’il y a un an. Tout se passait bien en effet, jusqu’en mai, quand l’entreprise déploie une nouvelle version de son application. Celle-ci est essentielle pour régler la connexion des équipements et l’intégration avec d’autres produits Sonos. Le fabricant est également connu pour sa forte intégration avec les produits Apple.
Quand la mise à jour parait, patatras. Non seulement les bugs sont légion, mais de nombreuses fonctions ont disparu. Très vite, des torrents de commentaires négatifs déferlent sur l’App Store d’Apple et inondent les forums. En quelques jours, la totalité de ces commentaires semble unanime : la nouvelle mouture de l’application est une catastrophe à tous points de vue.
Vitesse et précipitation
Si Sonos s’est tant pressée pour sortir son application, c’est que l’entreprise avait un autre lancement : son premier casque audio, nommé Ace. L’urgence de publier la nouvelle application est la composante principale du problème, accentuée par le retrait immédiat de l’ancienne mouture et laissant les utilisateurs aux prises de nombreux bugs.
En septembre, Bloomberg était revenu sur le sujet, présentant des témoignages des développeurs impliqués. Plusieurs auraient pointé la vétusté du code de l’ancienne version. Sonos aurait ainsi accumulé une importante dette technique pendant 20 ans. La nouvelle application « visait moins à introduire de nouvelles fonctionnalités qu'à mettre de l'ordre dans le désordre existant », notait alors Bloomberg.
En plus de repartir sur des bases neuves, la nouvelle application introduisait le support des produits nomades, nécessaire pour le casque Ace. Une première pour Sonos, qui avait lancé jusqu’ici des produits pour la maison, liés par le Wi-Fi.
Autre souci relevé par Bloomberg dans les témoignages, de profondes réorganisations au sein de l’entreprise. Décidées par Maxime Bouvat-Merlin, chef de produit chez Sonos, elles auraient « séparé des gens qui travaillaient ensemble depuis des années à la création de produits formidables », selon un ancien ingénieur de Sonos.
Une partie croissante des employés, voyant la date butoir se profiler alors que l’application n’était pas prête, aurait cherché à avertir la direction. Selon les témoignages, des « cris » et « hurlements » auraient été entendus durant les réunions. Plusieurs ont affirmé également que la course aux nouveaux clients et la volonté de plaire aux investisseurs ont poussé l’entreprise à précipiter ses plans. La tension au sein des équipes aurait été particulièrement vive. Des personnes ont évoqué des craintes de perdre leur emploi si elles continuaient d'avertir que l’application n’était pas prête.
Selon Bloomberg toujours, l’application aurait même dû être lancée début 2024 et avait été repoussée en mai pour tenir compte des retours des employés.
Profil bas et promesses
Le tollé a été tel que Sonos n’a pas eu le choix. La société a reconnu le problème. Patrick Spence, CEO de l’entreprise, a présenté ses excuses en juillet, confirmant les innombrables soucis techniques auxquels les clients étaient confrontés. Outre la difficulté à ajouter de nouveaux produits aux parcs existants, les appareils déjà configurés n’apparaissaient plus forcément dans l’application. Conséquence, les installations existantes ne fonctionnaient pas toujours. En outre, de nombreux clients déploraient une latence beaucoup plus élevée.
Le patron avait publié un plan de bataille dans son billet d’excuses, allant de juillet à octobre, avec des mises à jour de l’application prévues toutes les deux semaines. Un rythme que l’entreprise a honoré, réparant petit à petit les bugs et ajoutant les fonctions manquantes, dont la configuration de la bibliothèque musicale, grande absente. Il a fallu cependant attendre l’automne pour retrouver la possibilité de modifier les listes de lecture et d’attente, une fonction pourtant élémentaire.
Le lancement calamiteux de cette application a eu plusieurs conséquences importantes. En août, Patrick Spence a ainsi affirmé que Sonos allait dépenser entre 20 et 30 millions de dollars dans son application pour qu’elle retrouve les standards de qualité de l’entreprise. Cependant, le même mois, celle-ci a annoncé le licenciement de 100 personnes. Parallèlement, si les dirigeants de Sonos avaient reçu l’année précédente une prime de 72 000 dollars, aucune n’a été versé sur le dernier exercice fiscal, qui s’est terminé en septembre.
Patrick Spence démissionne
À la lumière des évènements de l’année dernière, il n’est pas surprenant que Patrick Spence démissionne. Aujourd’hui, la valeur du titre Sonos est 13 % plus basse que ce qu’elle était au lancement de la nouvelle application.
Si le CEO n’avait pas touché de prime sur la dernière année fiscale, il ne repart pas les mains vides. Son indemnité de départ s’élève à 1 875 000 dollars, auxquels viennent s’ajouter un salaire de 7 500 dollars par mois jusqu’en juin. Patrick Spence siègera en effet au conseil d’administration jusqu’en juin en qualité de conseiller.
Il sera remplacé quelque temps par le responsable Tom Conrad, également au conseil d’administration. Selon The Verge, via une porte-parole, Conrad a dirigé les efforts de correction dans l’application avec Nick Millington, chef de produit de Sonos et architecte de l'application originale. « Je pense que nous serons tous d'accord pour dire que cette année, nous avons laissé tomber beaucoup trop de gens », a indiqué Tom Conrad dans un courrier adressé aux employés.
À compter du mois prochain, Sonos se mettra à la recherche d’un nouveau CEO. Il aura fort à faire, car la relation avec la clientèle est aujourd’hui endommagée. Même si l’application s’est améliorée et s’est stabilisée, les nombreux mois nécessaires pour y parvenir ont laissé une empreinte durable. Il suffit de lire les réactions sur Reddit au sujet de la démission de Patrick Spence : les esprits sont encore échaudés.
En outre, tout ne semble pas réglé. Dans cet autre fil sur Reddit, on peut lire de nombreuses plaintes sur des problèmes récents, étant apparus ces derniers jours. De nombreux utilisateurs évoquent de nouveau des équipements disparaissant des configurations et des bugs, tels que des coupures de son pendant la lecture musicale et des déconnexions. Selon certains, désinstaller et réinstaller l’application peut résoudre le problème.
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Commentaires (18)
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Abonnez-vousHier à 14h38
Depuis ils cherchent à remonter mais il y 6 mois, les responsables écartés à l'époque sont revenu au pouvoir, et bizarrement les décisions aberrantes aussi.
Bon on rigole bien (parfois nerveusement) entre collègues mais c'est fou quand même.
Hier à 14h41
Je suis le seul dans ce cas ? En cherchant je n'ai pas trouvé de messages avec des personnes ayant le même soucis.
Modifié le 14/01/2025 à 14h56
Hier à 17h00
Hier à 15h18
Hier à 16h59
Hier à 15h03
C'est bien de couler un truc et d'avoir quand même un ptit chèque à la fin...
Hier à 15h19
Modifié le 14/01/2025 à 15h20
Je pense que l'on devrait pouvoir revenir en arrière selon notre choix. Je pense même qu'on devrait obliger les constructeurs à ce que l'appareil soit toujours utilisable sans connexion internet si celle-ci n'est pas indispensable (quitte à ce que ça soit juste les fonctionnalités de base).
Évidemment, pour écouter des webradios, il en faut une, mais qu'il ne soit pas nécessaire de passer par un service tiers : Sonos, Squeezbox, etc...
Hier à 15h24
Les clients "historiques" n'auraient ainsi pas été dans l'incapacité d'utiliser leur matériel ou perdu des fonctionnalités.
Cela aurait évité bien des soucis...
Hier à 16h20
De toute façon, le problème fût résolu - si je puis dire - avec l'arrêt définitif des deux services.
Hier à 21h20
* la nouvelle app pourrait utiliser une nouvelle partie serveur avec une nouvelle API (incompatible, avec des données différentes), et avoir un compte utilisateur qui utilise les deux (avec les 2 versions d’app) ou veut passer de l’un à l’autre pourrait se révéler problématique/impossible.
* si la nouvelle version est une cata, les utilisateurs seront moins nombreux donc moins de retour d’expérience
* il faudra des devs à la fois pour la nouvelle version (qui vont bosser sur la correction de bugs et sur les nouvelles fonctionnalités ou le support de nouveau matos), et des devs pour la maintenance de l’existant.
Modifié le 14/01/2025 à 16h30
Hier à 15h20
Hier à 16h33
Modifié le 14/01/2025 à 15h59
Quand on lit dans l'article qu'il a mis le feu aux équipes, on se dit que la désorganisation qui en a découlé n'ont forcément pas aidé.
Par contre que la vente se fasse en aout, c'est à dire au creux de l'action, est dommage pour lui ^^
Hier à 16h19
Hier à 17h11
Sonos dispose d'un protocole de beta test, dont je faisais partie dans le cadre de Sonos Voice Control. Nous avons reçu l'alpha du "New Sonos" sans aucune information préalable, sans aucun questionnaire de feedback (comme il est normalement de rigueur chez Sonos) et ce environ 2 jours avant la première annonce sur X de l'arrivée imminente de la release officielle, sous une quinzaine de jours.
Même avec les ressources d'un Sonos, ça me semblait compromis d'être capable de publier tout ce qui était noté en "TODO" et de finaliser les tests dans un délai aussi court. Les alertes se sont multipliées sur les outils d'échange avec les équipes, car tout était évidemment cassé de partout, comme ça a été le cas sur la première release. Je vois pas comment un beta testeur lambda comme moi a pu voir une évidence mais pas les instances dirigeantes.
Le départ du PDG me semblait inévitable, l'image de Sonos a dégringolée de façon vertigineuse en une update, tout ça pour commercialiser le Sonos Ace qui fait un bide.
Pire, ils ont perdu la confiance des utilisateurs existants qui sont pourtant cruciaux pour le modèle économique de Sonos, basé sur la dépendance à l'écosystème qui impose d'acheter toujours plus de Sonos pour compléter son installation. Confiance déjà légèrement entachée avec l'affaire du "Sonos S2" qui avait exclu du matériel plus ancien de l'écosystème Sonos... De la part d'une société qui se positionne aussi haut de gamme que Sonos, c'est juste inacceptable, on se parle d'installations qui dépassent vite plusieurs milliers d'euros (un home cinema complet chez Sonos peut revenir plus cher que d'acheter un pack iPhone+MacBook+Apple Watch...).
Surtout, on est maintenant bien plus de 6 mois après cette énorme raté, et je râle encore au quotidien sur des trucs qui fonctionnent mal sur l'application, comme des réglages que l'application affiche mais n'applique pas sur le device, et ce sur des fonctions aussi basiques que le simple réglage du volume !
Évidemment, tout ça me fait hésiter pour l'acquisition du caisson que je regardais avec envie jusque là, donc c'est encore quelques centaines d'euros de CA que Sonos n'est pas sûr de faire.