ArianeGroup présente Susie, un dernier étage réutilisable et habitable
Presque comme la crêpe
Le 19 septembre 2022 à 10h07
7 min
Sciences et espace
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Cette capsule remplacera la coiffe d’Ariane 64 et sera compatible avec d’autres lanceurs. Elle permettra d’emporter aussi bien du cargo que des humains dans l’espace, notamment vers la Lune. ArianeGroup s’inscrit dans la dynamique du réutilisable et affirme que son module « ouvre la voie à de futurs lanceurs européens totalement réutilisables ».
L’actualité spatiale est chargée ces jours-ci. Vendredi se tenait à Paris la Conférence européenne interparlementaire sur l'espace, avec l’adoption de 16 résolutions. Sophie Primas, présidente de la Commission des affaires économiques du Sénat et du groupe de travail sur l'espace, nous expliquait les enjeux : il s’agit de « parlements nationaux qui, tous ensemble, demandent quelque chose à la Commission européenne ».
Il y était évidemment question d’autonomie d’accès à l’espace, d’Ariane 6, des enjeux économiques et environnementaux ainsi que la gestion des débris ; de véritables problématiques spatiales. Cette conférence se tenait quelques mois avant la réunion ministérielle de l’Agence spatiale européenne, mais aussi à la veille du Congrès Astronautique international (IAC) qui se déroule également à Paris.
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Réutilisable et habitable… comme Crew Dragon
Alors que l’IAC ouvrait à peine ses portes, ArianeGroup a présenté Susie (Smart Upper Stage for Innovative Exploration) : « un projet d’étage entièrement réutilisable répondant aux besoins futurs de transport et de missions vers et dans l’espace ». L’entreprise explique que son module pourra « voler aussi bien avec Ariane 64 [la version d’Ariane 6 avec quatre boosters, ndlr] qu’avec un lanceur de la génération suivante », Ariane Next.
Le réutilisable est sur toutes les lèvres depuis des années. L’Europe n’a pas encore sauté le pas sur ces lanceurs commerciaux, bien que des prototypes et des essais soient déjà programmés. Ariane 6 ne sera pas réutilisable à ses débuts et « personne ne peut dire si Ariane 6 [le] sera » dans ses prochaines évolutions, expliquait récemment Philippe Bapstiste, président du CNES. Ce dernier ajoutait que « la question de savoir si on a besoin d’un lanceur réutilisable n’est pas triviale » ; cela dépend notamment de la cadence des lancements, qui doit atteindre un volume suffisant.
SpaceX est évidemment cité comme exemple. La société d’Elon Musk récupère à tour de bras ses premiers étages et les réutilise jusqu’à plus de dix fois pour certains d’entre eux. Cela lui permet notamment d’envoyer des satellites Starlink à moindres couts.
SpaceX récupère aussi ses capsules Crew Dragon après leur voyage vers la Station spatiale internationale. Tout ce petit monde est remis en état avant de redécoller. L’avenir se prépare avec Starship, un lanceur en deux parties et entièrement réutilisable.
Dans le cas de Susie l’approche est différente. Cet étage réutilisable ne remplace que la coiffe. Après sa mission, il « reviendra sur Terre se poser en douceur, après une rentrée atmosphérique de haute précision, en assurant de bout en bout la plus grande sécurité pour l’équipage en cas de mission habitée ». Jusqu’à cinq astronautes pourront s’installer, contre sept sur Crew Dragon. C’est le fruit de « plusieurs années de travail », affirme ArianeGroup.
Ce n’est pas la première annonce de l’entreprise sur le réutilisable. Pour rappel, elle a annoncé fin 2021 la création d’une filiale MaiaSpace avec le projet de proposer d’ici 2026 un lanceur léger réutilisable. L’Agence spatiale européenne aussi est sur le qui-vive avec le démonstrateur Themis, le moteur Prometheus et la navette spatiale Space Rider, tous réutilisables.
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Selon ArianeGroup, c’est son « devoir d’industriel »
« Il est de notre devoir d’industriel de contribuer à cette ambition et de proposer aux décideurs européens des solutions technologiques intelligentes et ambitieuses, capables de contribuer à l’indépendance d’accès à l’espace, mais aussi d’ouvrir la voie à une exploration spatiale européenne et de répondre aux besoins commerciaux et institutionnels de services dans l’espace des décennies à venir », explique ArianeGroup.
Il s’agit donc de se positionner en amont du prochain Conseil ministériel de l’ESA qui se tiendra en novembre 2022, exactement comme l’a fait la Conférence européenne interparlementaire sur l'espace avec ces 16 propositions.
Plusieurs spécialistes du secteur nous ont récemment confirmé que les enjeux de cette réunion sont colossaux. L’Europe ne peut pas se permettre de rester les bras croisés pendant encore plusieurs années, des décisions importantes doivent être prises. Le Conseil se réunit en effet tous les trois ans. Depuis le rapport sénatorial de fin 2019 sur l’espace, les choses semblent n’avoir que peu évolué…
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40 m³ de volume, 7 tonnes de chargement lors du retour
Côté caractéristiques techniques, Susie mesurera 12 m de haut pour 5 m de large et proposera 40 m³ de volume utile, sans que l’on sache le volume de la partie pressurisable. Lors du retour sur Terre, Susie pourra emporter plus de 7 tonnes de charge utile. Le fabricant affirme qu’il s’agit d’un « concept totalement intégré », c’est-à-dire que toutes les fonctions sont gérées en interne. Comme sur les autres capsules du genre, un système de sécurité permet de s’écarter rapidement de la fusée en cas de danger lors du lancement.
ArianeGroup présente son projet comme un véritable couteau suisse : « Parmi les missions rendues possibles par Susie, on trouve le remorquage, l’inspection ou la mise à niveau de satellites et d’autres charges utiles, le ravitaillement de stations spatiales en carburant, nourriture et équipements. Il pourra aussi permettre les changements d’équipages et les travaux humains en orbite ». Cette capsule pourra aussi aider à construire « de grandes infrastructures en orbite ».
Susie est aussi présentée comme évolutive. Avec ce projet, il sera possible de « réaliser des missions de longue distance, notamment atteindre l’orbite lunaire, grâce à sa capacité à recevoir un module de transfert spatial, assurant la propulsion et l’alimentation en énergie et en air pour l’équipage ». Pas un mot en revanche sur une destination plus lointaine comme Mars, visée par SpaceX.
Ariane 64, mais pas que
Susie sera compatible avec « différents types de lanceurs dans une optique de long terme ». Ariane 6 en fera bien sûr parti, « sans modification pour la version cargo automatique, et moyennant quelques adaptations du lanceur et des moyens au sol pour le vol habité », sans plus de précision sur l’ampleur des travaux.
Il faudra par contre passer par Ariane 64, la version avec quatre boosters (contre deux pour Ariane 62), car la masse est de 25 tonnes, « ce qui correspond aux performances en orbite basse d’Ariane 64 ». Ariane 6 peut pour rappel être équipée d’une coiffe de 20 m au maximum, avec une capacité de 20 tonnes en orbite basse pour la version 64 et 10 tonnes pour la 62.
« Susie pourra ensuite, sans aucune modification ultérieure majeure, embarquer sur une future génération de lanceur lourd européen réutilisable ». Dans le cadre du projet Themis, plusieurs types de lanceurs – léger, moyen et lourd – réutilisables pourront voir le jour. ArianeGroup évoque une version « super lourde » du lanceur lourd, avec « deux boosters à propulsion liquide réutilisables communs avec le premier étage du mini lanceur ».
Vers de « futurs lanceurs européens totalement réutilisables » ?
« Ces lanceurs lourds pourront emporter Susie, ce qui ouvre la voie à de futurs lanceurs européens totalement réutilisables ». Tout le monde avance ses billes dans la course à l’exploration spatiale, en attendant les décisions de l’ESA en novembre prochain.
ArianeGroup présente Susie, un dernier étage réutilisable et habitable
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Réutilisable et habitable… comme Crew Dragon
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Selon ArianeGroup, c’est son « devoir d’industriel »
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40 m³ de volume, 7 tonnes de chargement lors du retour
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Ariane 64, mais pas que
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Vers de « futurs lanceurs européens totalement réutilisables » ?
Commentaires (12)
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Abonnez-vousLe 19/09/2022 à 10h47
Voilà qui est très intéressant. Et qui devrait permettre à l’Europe de se détacher complètement des russes et américains pour l’accès humain à l’espace.
Le 19/09/2022 à 11h16
Ça me rappelle Hermès, la navette européenne qui n’a finalement jamais volé. Au chapitre des projets menés à terme et jetés à la poubelle, on peut aussi citer le cargo de l’espace, l’ATV, qui emportait 8 tonnes vers l’ISS. Abandonné aussi après 5 vols réussis “faute de financements et de réelle volonté politique”.
Donc Susie, j’y croirai quand elle sera effectivement utilisée.
Le 19/09/2022 à 11h42
Source ?
Le 19/09/2022 à 12h40
Wikipedia
Le 19/09/2022 à 17h45
Il est de notre devoir d’industriel […] de proposer aux décideurs européens des solutions technologiques intelligentes et ambitieuses,..
Le boulot est fait, c’est effectivement une solution sur le papier…
Parmi les missions rendues possibles par Susie, on trouve le remorquage, l’inspection ou la mise à niveau de satellites et d’autres charges utiles, le ravitaillement de stations spatiales en carburant, nourriture et équipements. Il pourra aussi permettre les changements d’équipages et les travaux humains en orbite
…mais pour le problème que ça résout, on dirait qu’ils cherchent encore !
Quelles stations spatiales seront accessibles à l’Europe lorsque ce module sera prêt (d’ailleurs, y-a-t-il une date prévisionnelle pour la mise en service) ?
J’ai du mal à comprendre l’intérêt financier d’utiliser un module potentiellement habitable (avec les coûts de maintenance que ça implique) pour effectuer des missions automatisables comme le remorquage, l’inspection ou la mise à niveau de satellites, etc.
Sur l’aspect habitable, on dirait plus un objet “politique” qui restera à l’état de plans, permettant de négocier l’accès à des places dans les modules américains qu’un véritable projet industriel destiné à voler un jour.
Le 20/09/2022 à 07h29
Ça se fait difficilement à distance, même avec un robot télécommandé.
Et on est très dépendant des russes pour l’envoi d’hommes dans l’espace.
En ce moment, c’est pas l’idéal…
Le 20/09/2022 à 09h42
Suivant les délais, peut être encore l’ISS, probablement la Lunar Gateway.
Il est probable que les vaisseaux qui conduiront des personne et qui feront le remorquage ne seront pas strictement identiques et que les espace inutiles seront récupérés. L’intérêt d’avoir un modèle de base est de permettre de réduire les coûts de développement.
Le 20/09/2022 à 09h53
Si je comprends bien, vu la masse de Susie, le lanceur européen le plus puissant (Ariane 64) ne permet qu’un envoi en orbite basse. On a pas de lanceur suffisamment puissant pour envoyer Susie vers Lunar Gateway. Ca doit correspondre à la version “super lourde” qui est évoquée dans l’article, mais il n’y a pas de plan concret de développement.
Donc en gros, c’est la période de négociation des budgets, Ariane fait sa lettre au Père Noël en présentant ce qu’ils seraient capables de faire avec un budget illimité, communique au grand public avec de jolies images de synthèse inspirées de SpaceX pour faire monter les attentes et faire pression sur les décideurs politiques, mais c’est très probable que tout ça fasse pchit une fois qu’on parlera de budget effectif.
Le 20/09/2022 à 10h27
Après il faut voir les capacités de propulsion propres de Susie, peut-être qu’elle sera capable de faire le complément du trajet elle même, atteindre l’orbite basse étant le plus gros du travail.
Le 20/09/2022 à 15h43
SpaceX rend des comptes.
Ce serait plutôt le public qui croit encore au père Noël et notamment à l’Euro qui pour l’instant a perdu son avantage face au dollard. Un “truc & Tips” qui depuis Paypal a donné un peu trop de crédit et d’image de marque à la concurrence au détriment des projets publics.
Le danger provient donc aussi des décideurs maintenant.
Le 20/09/2022 à 16h14
Pour le coup c’est désormais via les USA.
Le 20/09/2022 à 17h34
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