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État de l’Internet en France : 46,5 Tb/s de trafic entrant (interconnexion), neutralité du Net

Tout ça pour des vidéos de chatons

État de l’Internet en France : 46,5 Tb/s de trafic entrant (interconnexion), neutralité du Net

Comme chaque année depuis 2017, l‘Arcep (autorité de régulation des télécoms) publie son observatoire de « l’état de l’Internet en France ». C’est un rendez-vous important puisqu’il permet d’avoir des données agrégées des quatre opérateurs nationaux français.

Le 04 juillet à 08h34

On commence par l’interconnexion en France. Si cela ne vous dit pas grand-chose, on ne peut que vous recommander d’aller lire notre dossier sur le fonctionnement d’Internet. Après les définitions d’usage, on y explique justement les différentes interconnexions, les Tiers 1, 2 et 3, le BGP, etc. L’Arcep propose aussi une page dédiée pour comprendre l’interconnexion.

Interconnexion : le trafic entrant grimpe à 46,5 Tb/s

Selon les calculs de l’Arcep, « le trafic entrant au point d’interconnexion en France est estimé à 46,5 Tb/s fin 2023, soit une augmentation annuelle de 7,6 % par rapport à l’année 2022 ». C’est donc de nouveau en hausse (c’est le cas depuis des années), mais cela progresse bien moins vite que l’année dernière où il était question de 21,5 %.

Pour le régulateur, « cette décélération de la consommation de bande passante est cohérente avec l’évolution de la consommation de données mobiles publiée par l’Arcep dans son observatoire des marchés des communications électroniques ».

L’Arcep pointe du doigt deux vecteurs pour expliquer ce ralentissement : « une croissance faible de la proportion d’abonnés à au moins un service de vidéo à la demande (56 %,+ 1 point en un an ) » et « des efforts entrepris par certains acteurs du contenu en termes de compression et d’optimisation du trafic ».

Transit et peering se partagent la quasi-totalité du gâteau

Sur les 46.5 Tb/s, plus de la moitié du débit (54,1 % précisément, soit 25,2 Tb/s) vient du transit et 44,7 % (20,8 Tbms) du peering privé entre deux opérateurs. Le peering public (sur des points d’échange Internet) n’est que de 1,2 % (0,6 Tb/s).

L’état de l’Internet en France est toujours très fortement asymétrique, avec un trafic sortant bien plus faible : « en 2023, pour 1 Gb/s de trafic transmis dans le sens sortant, il y a eu 10,6 Gb/s dans le sens entrant ». C’est la seconde diminution consécutive de ce ratio. Il était de 1 pour 11,3 en 2022 et de 1 pour 12 en 2021. On est quasiment revenu au niveau de 2019.

Plusieurs pistes sont mises en avant par le régulateur pour expliquer cette baisse. Tout d’abord, « la progression de modes de diffusion du contenu qui pourraient s’appuyer davantage sur le trafic sortant, avec des technologies proches du peer-to-peer ». Ensuite, une augmentation de publication sur les réseaux sociaux, provoquant plus de trafic sortant sur le réseau des opérateurs.

Les CDN internes sont dans la place

L’Arcep note aussi une forte progression des CDN (Content Delivery Network, un cache pour simplifier) internes. On ne parle pas ici des CDN mondiaux tels que ceux d’Akamai, Cloudflare ou encore Lumen, mais bien de CDN directement implantés dans les réseaux des opérateurs, à la manière de Netflix ou Google. Nous en avions parlé lors du lancement de Disney+ en France.

L’Autorité de régulation des communications électroniques récupère des données sur les capacités des CDN internes depuis 2016, année où le trafic était alors de 0,82 Tb/s. Il est désormais multiplié par plus de 10 pour atteindre 10,62 Tb/s en 2022 et même 11,37 Tb/s en 2023. Le trafic des CDN internes représente 20 % de l’ensemble chez les principaux FAI.

On peut voir sur le graphique ci-dessous que la progression se fait par marches, avec de fortes hausses en 2018, 2020 et 2022.

NAGMA : le quinté dans l’ordre !

Les cinq plus gros acteurs du numérique à envoyer des données en France sont, sans surprise, un peu toujours les mêmes : Netflix arrive en tête et représente 15,3 % du trafic, Akamai est second avec 12,3 % (CDN notamment utilisé pour des contenus vidéo), Google troisième à 9,8 %, puis Meta à 6,8 % et Amazon avec 6,4 %.

Ils représentent à eux cinq 53 % du trafic (si on ajoute les 2,1 % de Twitch à Amazon, puisque le géant de la vente en ligne en est le propriétaire).

En dessous des 3 % on retrouve pêle-mêle des acteurs comme Apple, Microsoft, Twitch, Canal+, Valve, OVHcloud, Bytedance… Ce dernier, propriétaire de TikTok, a doublé son volume de données depuis 2021.

Des chiffres qu’il convient de prendre avec quelques pincettes, comme le rappelle à juste titre le régulateur des télécoms : « seuls les acteurs du contenu directement connectés au point d’interconnexion des fournisseurs d’accès à internet sont représentés. Certains fournisseurs de services, pourtant très utilisés par les terminaux des utilisateurs, ne sont pas représentés puisque leur trafic est acheminé via des intermédiaires (CDN, transitaires, etc.) ».

C’est le cas d’acteurs de l’audiovisuel avec TF1, M6 et France TV, ainsi que des plateformes comme Disney+. Le trafic est ainsi compté du côté des CDN, transitaires ou d’autres partenaires et pas directement imputé à un service en particulier. Il en ressort donc « une part de trafic relativement moins importante que leur usage réel ». Les chiffres publiés par l’Arcep permettent néanmoins d’avoir une vision globale.

Le gendarme veille à la neutralité du Net

Puisqu’on parle des tuyaux d’Internet, c’est l’occasion de revenir sur un sujet important : la neutralité
du Net, c’est-à-dire « l’égalité de traitement et d’acheminement de tous les flux d’information sur internet ».

Depuis maintenant six ans, l’Arcep propose un outil de détection : Wehe. Elle « analyse le trafic généré par l’application pour déterminer si l’opérateur est susceptible de brider ou de prioriser certains flux ou certains ports logiciels ».

L’année dernière, « plus de 13 000 tests ont été réalisés en France […] portant le nombre total de tests effectués en France depuis le lancement de l’application à plus de 680 000 ». YouTube, Netflix et Amazon arrivent largement en tête sur le nombre d’essais. Des « différenciations » ont été identifiées dans 1 727 cas.

L’Arcep ne donne pas beaucoup de détails, mais cite un exemple dans son rapport du jour : « ces signalements ont permis d’identifier une pratique rendant impossible pour certains consommateurs la réception d’e-mails envoyés vers les services de messagerie électronique d’un fournisseur d’accès à internet ».

Commentaires (10)

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Miaou (prem's en chaton)
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"la réception d’e-mails envoyés vers" ?
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la réception d’e-mails envoyés vers les services de messagerie électronique d’un fournisseur d’accès à internet
Quand tu utilises le service de messagerie électronique de ton FAI, ça arrive que tu ne reçoives pas certains courriels.
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La phrase que je trouve dans le lien vers l'ARCEP est :
Des signalements reçus sur la plateforme J’alerte l’Arcep ont également permis de détecter un dysfonctionnement entre un fournisseur d’accès à internet et un fournisseur de contenu concernant l’accès d’utilisateurs aux e-mails.
Et dans leur rapport, ils disent (le début est la citation de l'article) :
À titre d’exemple, ces signalements ont permis d’identifier une pratique rendant impossible pour certains consommateurs la réception d’e-mails envoyés vers les services de messagerie électronique d’un fournisseur d’accès à internet. Cette pratique pourrait ainsi contrevenir au principe de neutralité, en opérant une discrimination non justifiée entre utilisateurs dans l’accès à l’internet. L’Arcep a donc entrepris de dialoguer avec les parties concernées afin de faire évoluer le service pour le rendre conforme aux dispositions portant sur la neutralité des réseaux
Ce n'est donc pas l'appli Wehe mais leur plateforme d'alerte qui a permis de voir ce problème.

Je ne comprenais pas très bien comment cette appli aurait pu détecter ce problème parce que je ne pense pas qu'il soit lié à de la priorisation de flux de données : les e-mails représentent trop peu de données pour qu'on envisage de baisser leur priorité et ça aurait de toute façon peu de risque d'empêcher de les recevoir.

Ensuite, j'ai du mal à comprendre d'où venait le problème puisque l'on n'a pas plus d'informations. Je soupçonne plus des soucis au niveau protocoles mails ou blackliste.
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Donc c'est "depuis" les services de messagerie electronique d'un FAI, ou "vers" les services de mess...
?
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Voir mon commentaire juste au-dessus. Ce n'était effectivement pas clair.
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La concentration du traffic vers quelques grands acteurs ne fait que s'amplifier si je comprends bien. À ce propos la part d'Akamai est énorme !
Par contre 1% pour OVH, c'est pas mal. J'interprète cela comme le fait que les sites consultés par les Français (autres que les très grandes plate-formes) sont hébergés chez OVH. Cocorico
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En effet. Et on remarque qu'OVH sort du lot, alors que Scaleway n'est même pas mentionné.
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Si, à 0,3% (soit un tiers d’OVH) mais le nom est à côté du graphique parce que ça ne rentre pas.
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Je me demande dans quoi est classé le trafic des "VPN" publics

État de l’Internet en France : 46,5 Tb/s de trafic entrant (interconnexion), neutralité du Net

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