Les éditeurs de presse américains saisissent la FTC sur le blocage publicitaire
Round 1, fight !
Le 08 juin 2016 à 09h42
6 min
Internet
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L'association américaine des éditeurs de journaux (NAA) a saisi la Federal Trade Commission (FTC) afin qu'elle enquête sur « les pratiques illégales de blocage des publicités ». Principal point de tension : l'accès payant aux listes blanches de certains éditeurs d'extensions logicielles, Eyeo (Adblock Plus) en tête.
« Les journaux reconnaissent que la technologie de blocage des publicités répond à une demande des consommateurs, et les éditeurs travaillent diligemment pour améliorer l'expérience publicitaire des clients. Cependant, quelques entreprises spécialisées dans le blocage des publicités ont opté pour des modèles économiques qui trompent les clients ». Voici comment l'association américaine des éditeurs de journaux (NAA) résume l'objet de sa plainte, formulée auprès des autorités américaines.
Plusieurs pratiques mises au pilori
Dans sa plainte adressée à la FTC, la NAA décrit plusieurs pratiques qui selon elle sont de nature à tromper les lecteurs. La première n'est autre que l'utilisation de « listes blanches payantes » et cite nommément l'exemple d'Adblock Plus. Eyeo (l'entreprise éditant l'extension) promet aux annonceurs que son produit ne bloquera pas ses publicités, en l'échange d'un versement conséquent. Simultanément elle promet aux utilisateurs de ne voir que les publicités qui répondent à un certain standard de qualité. Un double discours qui ne plait pas spécialement aux éditeurs de presse.
L'association évoque également le cas de bloqueurs qui substituent la publicité normalement présente sur les sites par d'autres campagnes pour lesquelles ils touchent des revenus. Selon elle, ces logiciels sous-entendent qu'ils ont obtenu la permission des éditeurs de sites web pour remplacer leurs publicités, or ce n'est que marginalement le cas.
L'injection de publicité est un problème soulevé de manière récurrente par l'IAB (Interactive Advertising Bureau), notamment dans son rapport de novembre 2015. Malheureusement le groupe ne fournit aucun chiffre permettant d'évaluer l'ampleur du phénomène.
Les micropaiements dans le collimateur de la NAA
La NAA s'est également attardée sur deux cas particuliers. Le premier concerne Optimal, une start-up spécialisée dans le blocage publicitaire proposant une formule d'abonnement mensuel, facturée 5,99 dollars. La société promet de conserver une partie de ces revenus pour assurer son fonctionnement, mais également de redistribuer le reste entre ses éditeurs de contenus partenaires en fonction du trafic qu'ils génèrent.
L'utilisateur peut également avoir la main sur cette répartition et l'altérer comme bon lui semble. Selon Rob Leathern, le fondateur d'Optimal, cette solution permettrait « de compenser partiellement, voire complètement les pertes de revenus publicitaires causés par les dispositifs de blocage »
L'association américaine n'est pas du même avis. « Ces services clament que les éditeurs ne sont pas touchés par le blocage de leurs publicités grâce à ces modèles de paiement supposés. Mais ces annonces sont en fait, sans aucun fondement étant donné que ces bloqueurs détruisent des millions de dollars de revenus publicitaires (et de soutien au contenu gratuit) et leurs propriétaires n'ont fait aucune démonstration du moindre paiement qu'ils ont pu offrir aux éditeurs pour compenser leurs pertes dues au blocage publicitaire », se défend-elle.
Même son de cloche pour Flattr Plus (voir notre analyse), développé par Flattr et Eyeo. Le principe est simple, les utilisateurs font des micro-donations au service qui les répartit ensuite entre les éditeurs grâce à « un algorithme intelligent qui distribue automatiquement les bons montants aux bons sites ». Une formulation vague qui n'est pas non plus du goût de la NAA.
Aux yeux de l'association, ces affirmations lancées par les éditeurs de solutions de blocage sont trompeuses et enfreindraient donc la loi américaine. « Les consommateurs peuvent raisonnablement comprendre que leur paiement compensera toute nuisance causée aux éditeurs en se basant sur les annonces expliquant que les éditeurs pourront "compenser partiellement, voire complètement les pertes de revenus publicitaires causés par les dispositifs de blocage " ». Or, le compte serait loin d'y être.
Les paywalls, l'autre nerf de la guerre
La NAA ne s'est pas seulement attaquée aux solutions de blocage des publicités, mais aussi à celles permettant de contourner les « metered paywalls », ces systèmes n'autorisant la lecture que d'un nombre limité d'articles sur une période donnée.
Certains bloqueurs de publicités proposent également des parades à ce genre de modèle économique « en empêchant les éditeurs d'identifier les visiteurs récurrents et de leur proposer des formules d'abonnement ». Là encore selon l'association, il s'agirait d'une forme de concurrence déloyale. Elle oublie que, souvent, bloquer les cookies au sein du navigateur pour un site donné suffit à contourner ce genre de dispositif.
« Ces formules d'abonnement représentent une part significative des efforts des éditeurs pour soutenir des contenus journalistiques de haute qualité rédigés par des professionnels, et l'offre de technologies permettant d'esquiver ces formules nuit à la capacité de l'industrie à poursuivre ses innovations et à répondre aux attentes des clients », fait valoir la NAA.
Quatre requêtes
À la fin de sa saisine, la NAA a formulé quatre requêtes précises à la FTC, que voici :
- Imposer aux bloqueurs de publicités pratiquant le « paid whitelisting » de mettre fin à ce type de programmes ou bien de clarifier la nature de leurs services aux consommateurs
- Imposer aux bloqueurs de publicités de cesser de substituer leurs publicités à celles diffusées par éditeurs
- Imposer aux bloqueurs de publicités de cesser de faire des annonces trompeuses aux consommateurs
- D'empêcher les bloqueurs de publicités de contourner les limites imposées par les « paywalls ».
À cette liste, la FTC pourra ajouter toute mesure qui lui semblera utile. Pour l'heure les autorités américaines n'ont pas encore rendu leurs conclusions, celles-ci réclamant en règle générale plusieurs mois avant de se prononcer sur pareil cas.
Pour rappel, en France, le GESTE a toujours évoqué la possibilité d'une attaque sur le terrain juridique concernant les bloqueurs de publicité. Cela n'a pour le moment pas encore été le cas, les membres ayant dans un premier temps opté pour une approche visant à sensibiliser les utilisateurs par des solutions de blocage diverses et variées. Une pratique identique à celle d'Axel Springer en Allemagne pour certains de ses sites, après quelques procès perdus.
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Les paywalls, l'autre nerf de la guerre
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Quatre requêtes
Commentaires (45)
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Abonnez-vousLe 08/06/2016 à 16h42
Il y’a aussi sofoot,entre les vidéos imposées qui font arrêter ma musique. Pour au final,etre redirigé sur un site m’indiquant que j’ai un virus. Vous savez comment faire pour bloquer le lancement automatique des vidéos ?
Le 08/06/2016 à 16h46
Le racket c’est si tu es obligé de payer. Là c’est pas le cas. Les pubs bloquées peuvent le rester. L’agence de pub à pas de flingue sur la tempe hein.
Adblock Plushttps://addons.mozilla.org/en-US/firefox/user/Wladimir-Palant/?src=api “Created by Wladimir Palant in 2006, Adblock Plus is an open source project. In 2011, Palant, together with Till Faida, founded Eyeo to make its development sustainable.” Et j’ai toujours le message : “Donation suggérée : $5”
Le 08/06/2016 à 16h59
« Les journaux reconnaissent que la technologie de blocage des publicités répond à une demande des consommateurs, et les éditeurs travaillent diligemment pour améliorer l’expérience publicitaire des clients. … »
C’est un peu comme la vaseline qui améliore l’expérience anale.
C’est quand même l’internaute/consommateur qui se fait toujours enculer.
Le 08/06/2016 à 17h52
a quand un procès contre les régies de pub qui volent honteusement la bande passante (et donc le débit) chèrement payée par le consommateur qui n’a rien demandé hormis d’avoir du débit (qui lui est utile) moyennant un abonnement mensuel (aussi valable pour ceux qui ont des abonnements au volume) ?
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Le 08/06/2016 à 19h47
Le 09/06/2016 à 03h05
Le 09/06/2016 à 05h53
J’ai le même problème concernant mon téléphone, la plus part des sites sont une vraie horreur pour mobile, en particulier ceux qui redirigent vers une page “virus”.
Et même pire, ça arrive moins souvent sur le porn que sur d’autres sites d’info
Le 09/06/2016 à 05h55
long ? en quoi ça serait long dans l’informatique ; une fois l’appli créée c’est instant ; nombres d’adware malware remplace même pas ils ajoutent c’est encore mieux :o
Le 09/06/2016 à 07h08
Ouais, enfin Eyeo et leurs pratiques font quand même polémique, ce n’est pas pour rien que de plus en plus de personnes se dirigent vers d’autres bloqueurs publicitaires " />
Le 09/06/2016 à 09h05
Il me semble qu’il suffit de ne pas coder le paywall en tant que layer par dessus le contenu de la page, mais servir une page spécifique (une redirection auto) lorsque le paywall doit être affiché. De cette manière, même en supprimant dynamiquement le layer, il n’y a rien à voir “dessous”.
Le 10/06/2016 à 08h46
edit
Le 11/06/2016 à 15h10
Perso j’ai un GROS logo “Stop Pub” sur ma boîte aux lettres …
Bien même avec ça j’arrive à avoir de temps en temps de la pub dedans.
Noooon c’est pas du forcing la pub … heureusement qu’on peut encore zapper sur la TV, c’est quasi le seul endroit où on te laisse encore la possibilité de le faire … mais pour combien de temps ?
Le 14/06/2016 à 18h33
Le 08/06/2016 à 11h55
Le 08/06/2016 à 12h10
Y’a un épisode de black mirrors (série orientée satyre de la société) qui traite de ce sujet.
L’épisode est très bien, par contre faut pas être dépressif car c’est glauque.
C’est d’ailleurs effrayant de voir à quelle vitesse on se rapproche de ces satyre. Il me semble que c’est justement l’auteur de cette série qui expliquait que plusieurs de ces idées étaient abandonnée avant d’être finies car rattrapées par la réalité.
Le 08/06/2016 à 12h11
Le 08/06/2016 à 12h31
« les pratiques illégales de blocage des publicités ».
Nous ne sommes pas juges mais nous déclarons que c’est illégale. Sont fort " />
Le 08/06/2016 à 12h55
Tu parles d’Adblock Plus ? Parce que ce n’est pas un gus dans un garage, mais bien une société qui est derrière cette extension. Et “autres sources de financement” ou pas, bloquer quelque chose et demander de l’argent pour le faire débloquer, c’est une forme de racket " />
Le 08/06/2016 à 12h56
Le pire c’est le surf sur smartphone :
Ca devient vraiment nimp….
Le 08/06/2016 à 12h59
Le 08/06/2016 à 13h02
Le 08/06/2016 à 13h13
Le 08/06/2016 à 13h40
Intéressant ces micropaiements. C’est une réponse assez osée à ceux qui crient à la mort du financement des contenus internet.
Bon après on troque une régie de pub toute puissante pour une autre boite toute puissante. Et nos données continuent d’être aspirées.
Pour le reste je n’ai aucune pitié. Les publicitaires ont joué, gagné et pensaient (pensent) qu’ils peuvent imposer tout et n’importe quoi aux sites et aux lecteurs, mais maintenant c’est pour une fois les consommateurs qui peuvent un peu plus se faire entendre.
Le 08/06/2016 à 13h56
Ce qui est encore plus fort, c’est que de leur propre aveu, la plupart (pour ne pas dire tous) les sites de grands médias, traitent avec des régies pubs sans même se soucier de savoir ce qu’ils “annoncent” et encore moins de quelle manière (cf les précédents et excellents articles de nxi).
Le 08/06/2016 à 14h52
Le 08/06/2016 à 14h57
Le 08/06/2016 à 15h01
Le 08/06/2016 à 15h59
On imagine ou tu navigues petit cochon ! " />
Le 08/06/2016 à 16h37
Le 08/06/2016 à 09h51
A quand la pub obligatoire, où l’on paiera pour ne pas la voire ? Les pauvres seront alors gavés à la pub et auront une obésité publicitaire… il ne réfléchiront que par ce biais. Bienvenu au XXIème siècle !
Le 08/06/2016 à 09h51
S’ils codaient leurs solutions un peu mieux, il ne suffirait pas du premier plugin anti-javascript pour les contourner…
Le 08/06/2016 à 09h59
Je m’attendais à des requêtes à la con mais elles ont du sens dans l’ensemble. La 4e par contre c’est plus un problème de dev, il y a des moyens efficace de fingerprint un browser quand un cookie ne suffit pas.
Le 08/06/2016 à 09h59
Me vient à l’esprit “L’arroseur arrosé”.
Le 08/06/2016 à 10h03
Le 08/06/2016 à 10h07
Heu… c’est déjà le cas non ?
Le 08/06/2016 à 10h10
Le dev d’Adblock a basculé sur 100% de son temps sur l’appli. Avant de proposer les “listes blanches” il a mis son logiciel en donationware pour faire vivre sa famille mais ca a pas du marcher. D’où son orientation vers d’autres sources de financement.
De toute facon la pub c’est le client final qui la paye. Le marketing se finance dans le produit qu’il vend. C’est çà le vrai racket : tu payes la pub dans le produit que tu achetes.
Le 08/06/2016 à 10h13
“les éditeurs travaillent diligemment pour améliorer l’expérience publicitaire des clients.” Si c’est pas du trollage en règle ça…S’ils travaillaient aussi diligemment à améliorer l’expérience utilisateur qu’à déployer des nouveaux formats publicitaires (le plus souvent) intrusifs, le problème serait réglé depuis longtemps.
Le 08/06/2016 à 10h44
J’étais aussi venu lire la news avec un a priori… mais finalement les requêtes sont dans l’ensemble fondées.
Après cela ne résoudra toujours pas les problèmes de fond
Le 08/06/2016 à 10h58
Encore un combat d’arrière-garde, les whitelists c’est les utilisateurs eu-mêmes qui leur ont dit : " />
Le 08/06/2016 à 11h14
« Les journaux reconnaissent que la technologie de blocage des
publicités répond à une demande des consommateurs, et les éditeurs
travaillent diligemment pour améliorer l’expérience publicitaire des
clients. … ».
« …et l’offre de technologies
permettant d’esquiver ces formules nuit à la capacité de l’industrie
à poursuivre ses innovations et à répondre aux attentes des clients »
" />" />
Pour le reste, leur argumentation face aux bloqueurs (surtout Eyo) est pertinente : les requins vont se bouffer entre eux.
Le 08/06/2016 à 11h16
Les journaux reconnaissent que la technologie de blocage des
publicités répond à une demande des consommateurs, et les éditeurs
travaillent diligemment pour améliorer l’expérience publicitaire des
clients.
Traduction: On sait que les gens en ont marre des pubs, mais on s’en fout, on recherche surtout un moyen efficace de bloquer les bloqueurs de pubs (mais avec diligence).
Le 08/06/2016 à 11h18
Le 08/06/2016 à 11h22
Le 08/06/2016 à 11h24
+1 je trouve cela très clair comme demandes ; ils ont bien notifier les bloque ure paytowhitelist. Pas les gratuit. D’ailleurs leur 2emer demande sur pub remplacé, j’appelle ça un logiciel malveillant sur PC client
Le 08/06/2016 à 11h35
“bloqueurs qui substituent la publicité normalement présente sur les sites par d’autres campagnes”
Bloquer de la publicité pour mettre à la place…de la publicité.
Ce concept est génial !