Les ressources affectées au cinéma et à l’audiovisuel trainées devant la CJUE
Carrefour et la FNAC aux manettes
Le 29 septembre 2016 à 13h00
4 min
Droit
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Carrefour et la FNAC ont vainement demandé à la justice administrative la restitution de la taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes destinés à l'usage privé du public. Le dossier a été transmis à la Cour de justice de l’Union européenne par le Conseil d’État.
Ces enseignes réclament le remboursement sur plusieurs années de cette taxe affectée au Centre national du cinéma (CNC). Après un échec en appel, la patate chaude a été soumise à la plus haute juridiction administrative.
Selon le droit européen, les aides accordées par les États sont en principe interdites quand elles faussent la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Cependant, des exceptions sont prévues, mais la Commission européenne doit alors être impérativement prévenue en temps utile « pour présenter ses observations » de tout projet « tendant à instituer ou à modifier des aides ».
En France, souvent contesté, l'ensemble des aides au cinéma et à l'audiovisuel a été notifié en 2004. Le 22 mars 2006, la Commission les a déclarées temporairement compatibles. En décembre 2011, nouvelle décision : le régime est prolongé jusqu'au 31 décembre 2017. Soulagement du CNC qui voit ses ressources sacralisées.
Problème : les enseignes estiment pour leur part que le régime des aides au cinéma a subi des modifications beaucoup trop substantielles entre ces deux décisions. Or, ce glissement n’a pas été notifié à Bruxelles. « Elles en déduisent que la taxe dont elles demandent la restitution a été perçue illégalement dans la mesure où cette taxe était, selon elles, affectée au financement d'un régime d'aide irrégulièrement maintenu » explique le Conseil d’État.
Importante augmentation des taxes affectées au CNC
Très précisément, ces distributeurs dénoncent une « importante augmentation entre 2007 et 2011 du produit global de la taxe sur les billets de cinéma, de la taxe sur les services de télévision et de la taxe sur les ventes et locations de vidéogrammes », trois flux affectés.
Selon un rapport de la Cour des comptes (PDF), ces montants ont explosé de 46,3 % et même 60 % entre 2007 et 2011, selon la méthode comptable. La mèche a été spécialement allumée par une modification de l’assiette de perception grâce à laquelle la taxe sur les services de télévision est passée de 362 millions d'euros en 2007 à 631 millions d'euros en 2011.
Les timides anticipations françaises
Dans ses échanges avec Bruxelles, Paris avait anticipé, dans l’hypothèse la plus favorable, une hausse de 16,5 millions d’euros par an de ces coups de pouce. « Là où l'augmentation du produit annuel s'est élevée, en réalité, à 67 millions d'euros en moyenne entre 2007 et 2011 selon les chiffres figurant dans le rapport de la Cour des comptes » remarque la juridiction. Et selon elle, « la Commission a, ainsi, fondé sa décision sur des prévisions qui se sont, ultérieurement, révélées inexactes ».
Autre chose. Une règle européenne veut aussi que toute augmentation de plus de 20 % du budget initial d’un régime d’aides constitue en soi une modification. Seulement, le Conseil d’État ne sait pas comment s’apprécie un tel seuil : très en substance, est-ce par rapport à l’ensemble des aides ou par comparaison avec chacune des catégories d'aides identifiées ?
Toutes ces questions « préjudicielles » ont été adressées à la Cour de justice de l’Union européenne. Il faudra attendre de longs mois avant d’espérer une décision qui s’imposera au Conseil d’État.
Les ressources affectées au cinéma et à l’audiovisuel trainées devant la CJUE
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Importante augmentation des taxes affectées au CNC
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Les timides anticipations françaises
Commentaires (17)
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Abonnez-vousLe 29/09/2016 à 13h18
La “crise” c’est bien quand les rentiers s’enrichissent au détriment des travailleurs? Donc le gouvernement a délibérément encouragé la crise " />
Le 29/09/2016 à 13h36
Y a eu quoi d’autres?
Le 29/09/2016 à 13h38
On sait maintenant que la hadopi va devoir régulariser sa situation vis à vis de l’identification des abonnés à Internet.
Le 29/09/2016 à 13h46
Il est vrai que cette situation aberrante devait être résolue mais il n’empêche que la douloureuse sera pour les contribuables
Le 29/09/2016 à 13h48
Oui je m’en suis plaint (une fois de plus) dans les commentaires.
Le 29/09/2016 à 13h49
C’est bien ce qui me fait peur : qu’on ait dû payer la taxe une première fois mais aussi le remboursement… ou même ne serait-ce que compenser financièrement une éventuelle perte de ventes… Les seuls perdants, suivant la décision, ce sont les contribuables…
Le 29/09/2016 à 13h50
Mouais
Le 29/09/2016 à 14h00
Le 29/09/2016 à 16h26
Ils ne vont rien rembourser. Le gouvernement va nous sortir une loi de derrière les fagots bien dissimulees dans un projet de loi bidon. Cette loi sera rétroactive comme d’habitude même si c’est illégalle.
Le 29/09/2016 à 17h45
@Marc :
Je peux comprendre qu’on demande la restitution du trop perçu par rapport à la taxation initiale (puisqu’elle a beaucoup augmenté), mais je me demande comment on peut demander “la restitution de la taxe”, formulé comme ça, ça voudrait dire l’intégralité.
Le 29/09/2016 à 18h23
C’est le scandale du cinéma français subventionné qui aboutit à gaspiller notre argent pour encourager la production au kilomètre de navets immondes vite faits, mal faits.
Il y a 30 ans, notre industrie du cinéma était l’une des plus brillante. Aujourd’hui, c’est devenu une grande machine à fric qui ne se préoccupe plus réellement du spectateur.
Il est urgent de cesser de subventionner le cinéma si l’on veut que ce domaine ait un futur en France.
Le 29/09/2016 à 18h45
La taxe en question n’est pas “naturelle” comme peut l’etre la redevance copie privée dans les états membres ayants reconnu cette exception.
En somme, si la taxe repose sur une base juridique non notifiée à BXL, alors elle tombe.
Le 29/09/2016 à 22h26
Le problème n’est pas tant le principe de la subvention que le fait qu’elle soit toujours et systématiquement versée aux seuls membres d’une “caste d’élite” autoproclamée de la culture, un cercle très fermé dans lequel on ne rentre que si on fait parti des amis/relations proches d’une poignée de familles qui tiennent historiquement le cinéma Français dans leurs pognes depuis plusieurs décennies, c’est a la limite de la consanguinité ce milieu. (c’est encore pire que chez les politiques, c’est dire)
Du coup alors que dans la théorie une bonne partie de ces aides sont prévues pour aider des jeunes à percer en fait quand un jeune réalisateur indépendant veux produire un truc original, ou qu’un nouvel acteur prometteur veux percer, s’ils ne font pas partie de la caste des maîtres ils se font systématiquement barrer la route pour ne surtout pas faire d’ombre aux copains en place ce qui débouche sur la vacuité intersidérale du cinéma Français actuel dans lequel ne peuvent s’exprimer qu’une poignée de wanabe réalisateurs avec plus de prétention/arrogance que de talent et des acteurs à l’avenant … " /> (c’est le même problème que dans la musique où les financements pour aider les jeunes talents finissent en fait dans les poches des Johnny (Walker " />), Sardou, ou Goldman … " /> )
Le 30/09/2016 à 09h44
bien vu le coup des aides d’état.
En matière de concurrence, l’UE veut vraiment imposer un marché unique intégré, et les aides d’état le faussent souvent.
Le 30/09/2016 à 19h07
Le 29/09/2016 à 13h06
Une bonne nouvelle de plus cette semaine. " />
Le 29/09/2016 à 13h15
Cette taxe s’applique aux acheteurs ou aux vendeurs ? A qui l’Etat devrait-il les rembourser si elles avaient été perçues illégalement ?