Au troisième trimestre, Yahoo affiche un chiffre d'affaires de 1,3 milliard de dollars, pour un bénéfice de 229 millions. Le lancement de plusieurs applications est largement mis en avant, quand la fuite de données de 500 millions d'utilisateurs est dite sans impact sur les usages.

Tout va bien, madame la marquise. Yahoo vient de publier ses résultats financiers pour le troisième trimestre, affichant un chiffre d'affaires en hausse, à 1,3 milliard de dollars, contre 1,226 milliard au troisième trimestre 2015. L'EBIDTA, lui, se situe à 229 millions de dollars, contre 244 millions un an plus tôt. L'entreprise a donc gagné plus d'argent, pour un bénéfice en légère baisse. De quoi rassurer son repreneur annoncé, l'opérateur américain Verizon, du moins en apparence.

Une hausse des revenus (encore) en trompe-l'œil

Dans ses documents liés aux résultats, le groupe n'est revenu que brièvement sur la fuite de données de 500 millions d'utilisateurs, rendue publique le 22 septembre. En fait, le plus important pour l'entreprise est de signaler, à de nombreuses reprises, que sa bonne performance financière est due à un jeu comptable « subi ».

Depuis plusieurs mois, la société a dû revoir sa méthode de calcul des revenus issus de son contrat avec Microsoft, pour l'usage des résultats de recherche de Bing. En conséquence, le chiffre d'affaires n'a pas monté de plus de 70 millions de dollars, mais a baissé d'environ 170 millions à périmètre constant. « En excluant ce changement, les revenus GAAP [calculés selon les méthodes réglementaires] auraient été de 1,048 milliard de dollars, une chute de 15 % par rapport au troisième trimestre 2015 » explique la société. Les coûts d'acquisition de trafic auraient aussi baissé de 15 % sur un an, pour atteindre 190 millions de dollars.

Chiffre d'affaires de Yahoo (en violet clair, l'ajout dû au changement de présentation)

Dans le détail, 703 millions de dollars venaient de la publicité sur la recherche (445 millions à périmètre constant). Le nombre de clics facturés aux annonceurs a encore baissé de 22 %, même si même si leur prix a augmenté de 9 %. Pas de quoi compenser, donc. À calcul constant, les revenus du moteur de recherche ont fondu de 14 % depuis l'an dernier. Sur la publicité classique (« display »), les revenus ont diminué de 7 % pour atteindre 476 millions de dollars. Pour la première fois sur ce segment, le nombre de publicités facturées a baissé (de 5 %), que ne compense pas une hausse de 1 % de leur prix.

Le groupe note que ses réserves financières et ses valeurs mobilières de placement ont grimpé de 938 millions de dollars depuis la fin 2015, pour atteindre 7,8 milliards de dollars. Les dépenses de capital ont, elles, chuté de 72 % d'une année sur l'autre, pour atteindre 42 millions de dollars sur le trimestre. Yahoo a donc de quoi voir venir de nouveaux coups durs.

Sport, TV et e-sport au rayon des nouveautés

Sur le trimestre, le groupe se targue d'avoir lancé plusieurs applications mobiles, entre autres sur le sport et la TV en direct. Elle a aussi poursuivi ses investissements dans l'e-sport, un domaine très en vogue, notamment en France. Elle a signé un partenariat avec Riot Games (League of Legends) pour toucher les étudiants et un autre avec l'ESL, pour la diffusion d'événements et la création de contenus.

Tumblr, qui a subi une très forte dévaluation depuis son rachat par Yahoo, a vu ses fonctions de partage retravaillées, avec l'intégration des photos « live » et une simplification de la création de certains types de billets sur mobile. La plateforme de blogs a aussi lancé un programme pour monétiser des liens jusqu'ici non-affiliés. C'est le grand problème du service, qui peine encore énormément à vendre ses espaces publicitaires, de l'aveu même de son propriétaire.

Une fuite massive mais sans conséquences, assure Yahoo

Mais l'événement le plus important du trimestre est l'annonce, fin septembre, de la fuite de données de 500 millions d'utilisateurs fin 2014. Une fuite massive, qui a contribué à la vague de réinitialisation des mots de passe chez d'autres services, dont Amazon, Netflix et Spotify. Elle suit d'ailleurs celle de 65 millions d'identifiants de membres de Tumblr signalée en mai.

De même, il a été révélé que la société a contribué à la surveillance automatisée des messages de ses utilisateurs par les autorités américaines, en intégrant des outils spécifiques à ses services.

Yahoo reste très discrète sur ces fuites dans sa documentation. Sauf pour annoncer que... tout va bien. Dans sa présentation des résultats, la société affirme ne pas avoir été réellement affectée par le signalement de la fuite de données, montrant quatre indicateurs stables sur ses principaux services. 

Le but non-affiché : rassurer Verizon, qui est en pleines négociations pour le rachat du groupe Internet. Dernièrement, il a publiquement affirmé qu'il reconsidèrerait son rachat si la fuite de données avait un impact matériel notable sur l'activité de Yahoo. Il faut donc montrer que cet impact est inexistant, même si les données affichées par Yahoo ne sont pas vérifiables, et ne seront pas renouvelées, prévient le groupe.

Un prochain trimestre estimé sans surprise

Suite à ces annonces, le cours de l'entreprise est remonté d'un peu plus de 1 % après clôture de la bourse. Yahoo affirme d'ailleurs prévoir des revenus dans la droite lignée des trimestres précédents, sans surprise. Un élément de plus pour rassurer un éventuel repreneur sur les perspectives financières de l'entreprise.

La société s'attend officiellement à un chiffre d'affaires de 1,36 à 1,4 milliard de dollars, pour un coût d'acquisition de trafic estimé à 480 millions de dollars. L'EBITDA, lui, devrait être situé entre 260 et 300 millions de dollars. Il reste tout de même à voir quelle sera la réaction concrète de Verizon et si les données rassurantes montrées sur les usages pourront se vérifier d'une manière ou d'une autre.