Déclaration automatique des revenus issus des plateformes : le Sénat veut une application dès 2018
Revenus vs ventes
Le 19 décembre 2016 à 10h40
4 min
Droit
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En fin de semaine dernière, les sénateurs ont adopté, en la modifiant quelque peu, l’obligation pour les plateformes de mise en relation de notifier au fisc les revenus de leurs utilisateurs.
Le Sénat a donc voté l’article 19 ter du projet de loi de finances rectificative pour 2016. Cette disposition va avoir des effets mécaniques directs pour les utilisateurs d’eBay, Airbnb, Uber, Priceminister... Du moins ceux qui arrondissent leurs fins de mois via ces intermédiaires.
Ces plateformes devront en effet adresser chaque année à l’administration fiscale une déclaration électronique, mentionnant, pour chacun de leurs utilisateurs présumés redevables de l’impôt en France, tout un lot d’informations :
- Pour une personne physique, le nom, le prénom et la date de naissance de l’utilisateur ;
- Pour une personne morale, la dénomination, l’adresse et le numéro Siren de l’utilisateur ;
- L’adresse électronique de l’utilisateur ;
- Le statut de particulier ou de professionnel caractérisant l’utilisateur sur la plateforme ;
- Le montant total des revenus bruts perçus par l’utilisateur au cours de l’année civile au titre de ses activités sur la plateforme en ligne, ou versés par l’intermédiaire de celle-ci ;
- La catégorie à laquelle se rattachent les revenus bruts perçus ;
Et encore, cette liste n’est pas définitive, puisqu'un décret programmé par le législateur pourra ajouter à ce stock « toute autre information (…) à titre facultatif ou obligatoire », non encore précisées dans le marbre de la loi.
Deux ajustements votés au Sénat
L’article a été voté par les sénateurs avec deux ajustements qui devront être arbitrés avec les députés.
D’une part, seules seront obligées les plateformes de « mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d'un bien, de la fourniture d'un service ou de l'échange ou du partage d'un contenu, d'un bien ou d'un service » (2° du I. de l’article L111-7 du Code de la consommation).
Sur ce point, l’Assemblée nationale avait vu plus large encore, en intégrant ceux qui classent ou référencent au moyen d’algorithmiques les contenus de tiers, et donc les comparateurs de prix et les moteurs de recherche.
Autre adaptation : alors que les députés voulaient déporter cette obligation au 1er janvier 2019, les sénateurs ont prévu sa mise en œuvre une année plus tôt, au 1er janvier 2018.
Pour un meilleur recouvrement de l'impôt
Ces dispositions « participent au combat pour un meilleur recouvrement de l'impôt », s’est félicité en séance le sénateur Richard Yung. Dans la logique de l'amendement, les gains calculés par Bercy pourront en effet être déportés dans les déclarations préremplies que doivent signer les contribuables.
Ajoutons que suite à l’adoption de la loi de finances pour 2016, les plateformes devront adresser également un récapitulatif des transactions à leurs abonnés. Un décret notifié à la Commission européenne est sur la rampe.
Les internautes recevront au final deux documents annuels : ce récapitulatif mais aussi une copie de la notification adressée automatiquement au fisc.
Une disposition impraticable
Contacté, Benjamin Moutte-Caruel, ne décolère pas. « La notion de revenus bruts est impraticable » considère le responsable juridique de Priceminister. Et pour cause, ces intermédiaires n’ont connaissance que du montant des ventes cumulées par une personne outre la commission prélevée, mais sans plus. « Et le prix vendu ne quantifie pas le revenu ! »
De même, l’intermédiaire devra souffler à l’oreille du fisc le statut de particulier ou de professionnel caractérisant l’utilisateur. Or, il s’agit d’un critère tout aussi flou, uniquement déclaratif aux yeux des plateformes. Juridiquement, il revient en effet aux tribunaux, in fine, de déterminer si tel utilisateur peut être requalifié en commerçant, parce qu’il a effectivement réalisé des actes de commerce (achats pour reventes, etc.).
Un problème concurrentiel entre les plateformes
« Cette disposition engendre aussi un vrai problème concurrentiel entre les places de marchés comme Priceminister ou eBay et les sites d’annonces, qui, une fois de plus, ne sont pas concernés ».
Le risque est que ces couches successives sur ce premier groupe incitent les internautes à se rendre par exemple sur LeBonCoin, qui échappe à une telle régulation. « Et encore, le texte va se heurter aux réalités » ajoute le juriste de Priceminister. Comment faire par exemple lorsqu’une personne ou un foyer a plusieurs comptes, en utilisant des noms différents et des adresses bidon ?
Déclaration automatique des revenus issus des plateformes : le Sénat veut une application dès 2018
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Deux ajustements votés au Sénat
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Pour un meilleur recouvrement de l'impôt
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Une disposition impraticable
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Un problème concurrentiel entre les plateformes
Commentaires (23)
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Abonnez-vousLe 19/12/2016 à 12h41
” il n’y a qu’à taxer a priori tout le monde comme des professionnels, charge revenant au contribuable par la suite de monter un dossier en plusieurs exemplaires pour justifier son statut de non professionnel et après avis d’une commission éventuellement favorable il pourrait se voir notifier la possibilité d’envisager peut-être pour plus tard un remboursement du trop perçu. “
-Trop gros, passera pas !
Le 19/12/2016 à 13h09
Et les sites étrangers ne serront sans doute pas concerné ou c’est prévu?
Le 19/12/2016 à 13h27
Le 19/12/2016 à 13h39
Le 19/12/2016 à 13h48
Ouaip…
Le 19/12/2016 à 15h10
Le 19/12/2016 à 15h24
“De même, l’intermédiaire devra souffler à l’oreille du fisc le statut de particulier ou de professionnel caractérisant l’utilisateur. Or, il s’agit d’un critère tout aussi flou, uniquement déclaratif aux yeux des plateformes. Juridiquement, il revient en effet aux tribunaux, in fine, de déterminer si tel utilisateur peut être requalifié en commerçant, parce qu’il a effectivement réalisé des actes de commerce (achats pour reventes, etc.)”.
Cette détermination est possible directement par les plateformes, bien qu’il faille comprendre correctement les droit fiscal et social. (technique de renvois multiple). Par exemple pour la location d’objets (voiture p, la loi de financement de la sécurité sociale voté le 5 décembre 2016 contient u article rédigé dans ces termes
“Les personnes exerçant une activité de location de biens meubles
mentionnée au 4° de l’article L. 110-1 du code de commerce et dont les
recettes annuelles tirées de cette activité sont supérieures à 20 % du
montant annuel du plafond mentionné à l’article L. 241-3 du présent
code, sauf option contraire de ces personnes lors de l’affiliation pour
relever du régime général dans les conditions prévues au 35° de
l’article L. 311-3.”
Après la prestation du juriste, le critère qui permet permet de distinguer le vendeur professionnel du particulier, est d’avoir réaliser plus de de chiffre d’affairesannuel sur les plateformes pour la
Le 19/12/2016 à 15h30
le Sénat veut une application dès 2018…
Sur Androïd et iOS ?
Le 19/12/2016 à 16h18
Le 20/12/2016 à 02h06
y’a qu’à se faire payer en bitcoin ou mieux en crypto monnaie anonymisée comme le monero. bon courage pour retrouver où va l’argent !
quand les compagnies de cartes de crédit et les banques ont bloqué Uber en argentine, Uber a activé dans son application le paiement par bitcoin.
ça sera pareil pour les nouvelles lois
PS : pour ceux qui iraient dire que c’est virtuel et ne vaut rien, je les invite à aller voir les taux de change !
Le 20/12/2016 à 07h41
Le 20/12/2016 à 12h27
Tout dépend pourquoi tu revends ton DVD/BR.
grossiste pour le revendre, et que tu en revends en quantité, alors tu effectues
des actes de commerce à titre habituel. Tu deviens un commerçant de fait. Si
l’administration fiscale considère que tu es un commerçant de fait, alors elle
procédera à la requalification de ton statut, car tu exerces une activité
commerciale de façon occulte. En cas d’activité occulte, le fisc peut exercer
un redressement sur les 10 derniers exercices comptables. En droit, il faut
articuler les dispositions suivantes du code de commerce et du livre des
procédures fiscales
L121-1 du code commerce :“Sont commerçants ceux
qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle”.
L 111-1 du code de commerce : La loi
répute actes de commerce [1°] Tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les
avoir travaillés et mis en oeuvre”.
ET
Article L169 du Livre des
procédures fiscales : “L’activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n’a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu’il était tenu de souscrire et soit n’a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au
greffe du tribunal de commerce, soit s’est livré à une activité illicite”. “ Le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la
dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due,
lorsque le contribuable exerce une activité occulte”.
La possibilité offerte au fisc de revenir sur les 10 derniers exercices lorsque la personne n’a pas procédé à la déclaration de son activité commerciale (“droit de
reprise” en termes juridiques) incite fortement les gens à ceux déclarer, même
lorsqu’ils réalisent de faibles montants de chiffre d’affaires (CF. Statut
micro-entreprises, et donc micro-social).
2° Mais, si tu revends ton DVD
qui te fut offert à Noel par exemple, alors tu ne seras pas considéré comme un
commerçant.
Le 20/12/2016 à 18h34
Le 20/12/2016 à 18h38
merci pour ces précisions
Le 20/12/2016 à 19h32
Bravo Jurinord pour la qualité de ces précisions !
Il est bon en effet de préciser/rappeler que ce n’est pas le revendeur occasionnel qui est visé, mais celui qui en fait une activité habituelle sans la déclarer (et qui de ce fait porte atteinte à tous ceux qui honntement/légalement, se déclarent et payent des charges et impôts).
Le 19/12/2016 à 10h45
On a une liste précise des plateformes concernées ?
Le 19/12/2016 à 10h49
il n’y a qu’à taxer a priori tout le monde comme des professionnels, charge revenant au contribuable par la suite de monter un dossier en plusieurs exemplaires pour justifier son statut de non professionnel et après avis d’une commission éventuellement favorable il pourrait se voir notifier la possibilité d’envisager peut-être pour plus tard un remboursement du trop perçu.
Le 19/12/2016 à 10h53
Regarde la disposition du Code de la consommation listée..c’est hypra large.
Le 19/12/2016 à 12h09
On est ici dans une situation très classique : pour choper une minorité de personnes qui abusent effectivement d’une situation (la possibilité de se générer un revenu au noir via ces plateformes est réelle, et il y a réellement des gens qui en usent), on va mettre la suspicion sur tout le monde. Ce n’est pas blanc ou noir, et déterminer ce qui est réellement du revenu est infaisable en pratique.
Ou alors on souhaite la mort des sites entre particuliers, pour ne faire que du très classique marchand vers client, à l’ancienne.
Concrètement PriceMinister perdra encore un peu plus de particuliers, effrayés par l’éventualité d’un contrôle fiscal. Et ça ira grossir leboncoin, dont les revenus sont essentiellement publicitaires, donc payés par tout le monde - en tout cas tous les clients des annonceurs.
Le 19/12/2016 à 12h12
Le 19/12/2016 à 12h15
Ah oui merci ! C’est large en effet !
“les plateformes de mise en relation de plusieurs parties en vue […] du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service”…
Le partage de frais est imposable maintenant. C’est parfait. Belle carotte ( ça rend les fesses roses et on sait pourquoi maintenant ).
Le 19/12/2016 à 12h35
Le 19/12/2016 à 12h37