Un chauffeur Lyft attaque Uber pour concurrence déloyale et violation de la vie privée
Highway to Hell
Le 25 avril 2017 à 08h52
5 min
Droit
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Un chauffeur Lyft vient de lancer une class action contre Uber. Celle-ci s'appuie sur les récentes révélations autour de « Hell », un logiciel interne d'Uber capable de détecter les conducteurs travaillant à la fois pour lui et son concurrent Lyft.
Depuis quelques années, Lyft et Uber, les deux principaux acteurs du marché des VTC aux États-Unis, se livrent une bataille sans merci afin de prendre le dessus sur l'autre. Une bataille qui, pour l'un comme pour l'autre, se fait sur fond d'importantes pertes, compensées par de généreux investisseurs qui renflouent les deux bateaux à grands renforts de milliards. Respectivement, Lyft et Uber ont ainsi collecté 2,6 et 8,8 milliards de dollars lors de leurs différents tours de table.
Ces fonds ne permettent pas seulement aux deux entreprises de mener leurs activités quotidiennes, mais également de financer leurs recherches dans le domaine des véhicules autonomes. L'une et l'autre espèrent pouvoir un jour ne plus avoir à gérer de chauffeurs, mais seulement une armada de voitures sans pilote, transportant automatiquement les clients où bon leur semble.
En septembre dernier, John Zimmer, co-fondateur de Lyft affirmait ainsi à Bloomberg que la majorité des courses gérées par son entreprise le seront avec des véhicules autonomes d'ici cinq ans. Et déjà, des expérimentations ont lieu, aussi bien chez Lyft, que chez Uber. En attendant, les chauffeurs sont toujours là, et ils sont même le nerf de la guerre entre les deux services.
Hell, l'arme secrète d'Uber pour entraver Lyft
Uber a fait un calcul simple. Plus l'entreprise dispose de chauffeurs dans un secteur donné, plus elle a de chances de capter des courses et donc de collecter sa commission sur un plus grand nombre de trajets facturés. Sa stratégie est donc simple : attirer le plus grand nombre de conducteurs possible, quitte à aller piocher dans le vivier de la concurrence.
Les chauffeurs n'étant pas salariés et que de simples sous-traitants individuels, les débaucher est aisé. Pas besoin de rompre des contrats, de payer des bonus ou d'embaucher des avocats, il suffit de leur proposer davantage de courses que le concurrent d'en face, et les chauffeurs viennent naturellement là où les conditions sont les plus favorables.
Il y a deux semaines, le site The Information a publié un épais article concernant « Hell », un logiciel conçu par Uber dans le but de suivre à la fois ses chauffeurs et ceux travaillant pour Lyft. L'idée derrière cette application maison est de parvenir à détecter les chauffeurs travaillant pour les deux sociétés, ce afin de leur transmettre des courses.
Un conducteur inscrit sur les deux plateformes pouvait alors voir qu'Uber lui fournissait davantage de missions et donc de revenus, et pouvait alors être tenté de ne travailler exclusivement pour lui. Pareillement, tant que ce chauffeur effectue des missions Uber, il n'est pas disponible pour Lyft qui pouvait se trouver en pénurie de chauffeurs à certains moments. Les clients voyant que le temps d'attente sur cette plateforme était élevé pouvaient alors être tentés d'essayer l'autre en espérant trouver un carrosse plus vite.
Un chauffeur Lyft se rebelle
Michael Gonzales, un chauffeur travaillant pour Lyft a décidé d'amener le cas devant les tribunaux californiens. Pas seulement pour traiter son cas, mais aussi celui de tout autre sous-traitant de l'entreprise qui se serait senti lésé par cette pratique d'Uber. Une class action a donc été ouverte.
Le chauffeur y explique en s'appuyant sur l'article de The Information qu'une équipe de développeurs d'Uber s'est rendue compte d'une vulnérabilité dans le système informatique de Lyft, qui lui a permis d'obtenir des informations sur les chauffeurs présents dans certaines zones. Ces données comprennent notamment leur localisation, leur identifiant unique et leurs habitudes. Uber pouvait ainsi donner prioritairement des courses aux chauffeurs connectés à la fois chez eux et chez Lyft. Un point que l'entreprise dément formellement pour le moment.
Le programme aurait été utilisé entre 2014 et 2016, à un moment où Lyft tentait de s'installer dans davantage de villes américaines, étendant son empreinte de 20 à 65 communes. Selon la plainte, sur cette période, 315 000 personnes ont réalisé des courses pour le compte de Lyft, dont environ 60 % auraient aussi conduit pour Uber.
Concurrence déloyale et autres réjouissances
Au total, la plainte déroule quatre chefs d'accusation. Le premier concerne l'interception de communications électroniques. Uber est ici soupçonnée d'avoir collecté et utilisé intentionnellement des informations qui ne lui étaient pas destinées, par le biais d'un système d'interception de données.
Deux chefs d'accusation concernent des violations de la vie privée. L'un concerne une loi californienne (le California Invasion of Privacy Act de 1967), le second s'appuie sur la loi fédérale. Dans les deux cas, le plaignant et ses avocats estiment qu'Uber a fait usage d'informations sur la vie privée des chauffeurs (leurs liens avec Lyft et leurs habitudes de travail) pour interférer avec leurs habitudes.
Enfin, Michael Gonzales met en avant que les agissements d'Uber avec Hell violent la loi californienne sur la concurrence déloyale. Selon lui, Lyft n'était pas en mesure d'obtenir conventionnellement les mêmes informations sur les chauffeurs Uber, alors que son concurrent aurait fait usage de moyens illégaux.
Le tribunal du district Nord de Californie est chargé de cette affaire, qui ne devrait pas se démêler avant de longs mois. Pour l'heure, Lyft et Uber se refusent à tout commentaire sur cette procédure.
Un chauffeur Lyft attaque Uber pour concurrence déloyale et violation de la vie privée
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Hell, l'arme secrète d'Uber pour entraver Lyft
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Un chauffeur Lyft se rebelle
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Concurrence déloyale et autres réjouissances
Commentaires (31)
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Abonnez-vousLe 25/04/2017 à 09h12
Les chauffeurs Uber sont vraiment des “micro-tâcherons” gérés comme des fourmis…
Il est beau le modèle économique.
Le 25/04/2017 à 09h24
Le 25/04/2017 à 09h32
Me semble que si maintenant on les a aussi en france => Wikipedia
Peut etre pas aussi efficace que la version US … mais mieux que rien !
Le 25/04/2017 à 13h10
Le 25/04/2017 à 13h18
Pour avoir été “auto entrepreneur” pendant 4 ou 5 ans, je te jure que c’est là que tu te sens le plus marginalisé. Un RSi qui est une vaste blague, qu’à l’hôpital on me regardait la larme à l’œil quand il était question de payer.
“Ha vous êtes au RSI… Bon courage monsieur” Oui merci heureusement que j’en ai à revendre " />
Que tu te crées tout seul, et que tu n’as le droit à RIEN. Tu te foires t’as plus que le RSA… T’as aucune garantie, ta femme te regarde bizarre car la stabilité n’est pas simple, et en plus tu bosses 70h par semaine si tu compte réussir.
Alors que les personnes qui créent des boites sont quand même ceux qui vont pouvoir embaucher après, c’est quand même une vaste blague.
Le 25/04/2017 à 13h25
Le 25/04/2017 à 13h29
J’avais forget le terme français. Je corrige ASAP pour que ça fasse sens.
Le 25/04/2017 à 13h59
Oui guy, ce sera mieux ainsi " />
Le 25/04/2017 à 14h35
Le 25/04/2017 à 14h48
Le 25/04/2017 à 14h50
Je vois que la secte du premier degré est de sortie " />
Le 25/04/2017 à 15h38
" />
Le 25/04/2017 à 18h57
Le 25/04/2017 à 20h35
Le 25/04/2017 à 21h26
Le 25/04/2017 à 09h35
Ce qui me démonte le plus dans le modèle économique de Uber et ses concurrents c’est qu’ils bâtissent leur réputation (et leur chiffre d’affaire) grâce aux chauffeurs dont ils vont débarrasser d’ici 10 ans (voir moins) quand Uber aura un parc de voiture autonome suffisant.
Je me doute bien que la grande majorité de ces chauffeurs en sont conscients et n’ont pas vraiment d’autre choix, mais ça me fait halluciner une boite qui emploi des chauffeurs en annonçant publiquement que dans 5 ou 10 ans elle va se débarrasser de ces chauffeurs en passant aux voitures autonomes et qu’ils ont été gentils de permettre à la boite de survivre en attendant que la technologie des voitures autonomes se développe suffisamment…
Le 25/04/2017 à 09h46
Le 25/04/2017 à 09h49
Le 25/04/2017 à 09h51
Le 25/04/2017 à 09h51
De toute manière, toutes les professions du transport routier (VTC, taxi, ambulancier, transports en commun) connaissent les transformations que subiront leurs métiers. Ils s’y préparent déjà, comme les journalistes audiovisuels ont dû changé leur façon de travailler avec la suppression des caméramans et des monteurs de vidéo-reportages, comme les métiers du secrétariat ont abandonné la dactylographie et s’apprêtent à voir disparaître les tâches d’accueil.
Le 25/04/2017 à 09h57
Le 25/04/2017 à 11h18
Le 25/04/2017 à 11h25
Le 25/04/2017 à 11h52
“Dans les deux cas, le plaintif et ses avocats estiment qu’Uber a fait usage d’informations sur la vie privée des chauffeurs (leurs liens avec Lyft et leurs habitudes de travail) pour interférer avec leurs habitudes.”
Il y a de l’inflation ubérisation américanisation dans l’air, c’est le plaignant en France " />
Le 25/04/2017 à 12h10
C’est pas spécifique a Uber. C’est déjà comme cela dans tout ce qui ressemble à un réseau commercial de type “franchise”.
Le 25/04/2017 à 12h31
Je te trouve un peu trop catégorique. Non, toutes les entreprises n’engloutissent pas leur pognon dans des recherches servant à remplacer 90% de leur masse salariale par un algorithme.
Ok, Uber n’est pas la seule, les grandes surfaces aussi n’attendent que ça de pouvoir se débarrasser de leurs caissier(ere)s, mais faut pas généraliser ça à toutes les boites non plus.
Le 25/04/2017 à 12h48
Le 25/04/2017 à 12h51
Le 25/04/2017 à 12h59
Entre vouloir faire des bénéfices en optimisant ta masse salariale (ce que fait toutes les boites, on est d’accord) et investir masse d’argent dans un technologie dont la finalité est de supprimer 90% de ta masse salariale (masse salariale sans qui ta boite ne serait pas viable tant que la techno n’est pas finalisée) afin de pouvoir enfin faire des bénéfice, t’avouera quand même qu’il y a une subtile différence.
Le côté “venez travailler chez nous. On vous garde 10 ans histoire de faire survivre la boite et récolter assez de pognon grâce à vous pour développer une technologie qui va tous vous mettre au chômage” me gêne beaucoup.
Le 25/04/2017 à 12h59
Il y a la volonté de donner au Entrepreneur l’accès au chômage et au régime de sécu classique (donc tous les employé d’Uber). Et jusqu’à présent ce n’est pas lui qui à créer Uber, mais un vide législatif qui au vu de la pression ne va pas rester en rester là.
Après wait&see je suis pas devin.
Le 25/04/2017 à 13h01
Le modèle économique d’Uber est une horreur, mais l’UX de Uber est au top, d’où une partie de leur réussite.