La CJUE restreint l'accès par le grand public aux registres des bénéficiaires de sociétés de l’UE

La CJUE restreint l’accès par le grand public aux registres des bénéficiaires de sociétés de l’UE

La CJUE restreint l'accès par le grand public aux registres des bénéficiaires de sociétés de l’UE

« C’est une décision inattendue, en même temps qu’un sérieux coup de canif porté à la transparence financière au sein même de l’Europe », souligne Le Monde : la grande chambre de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) – son assemblée plénière, qui réunit quinze juges – a en effet « invalidé une disposition législative permettant la consultation par le grand public des registres des bénéficiaires de sociétés créées dans l’Union européenne (UE) ».

Cette possibilité avait été introduite dans le cadre de la 5e directive antiblanchiment de 2018, et permettait jusque-là de consulter les informations de base relatives à ces entités – nom de leurs propriétaires, mois et année de naissance, pays de résidence et nationalité : 

« Le législateur européen aspirait à lutter contre la prolifération dans l’UE de sociétés-écrans dirigées par des hommes de paille, permettant à des particuliers ou à des réseaux criminels de dissimuler des actifs issus de la fraude fiscale ou de la corruption. »

Mais deux plaignants, propriétaires de sociétés immatriculées dans le Grand-Duché, s’étaient depuis opposés à ce que leurs données personnelles soient librement accessibles, arguant que cela les exposerait « à un risque disproportionné de fraude, d’enlèvement, de chantage, d’extorsion, de harcèlement, de violence ou d’intimidation ».

La CJUE explique que cette faculté va à l’encontre de la Charte des droits fondamentaux de l’Union, adopté en 2000, et « constitue une ingérence grave dans les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel », à mesure qu'elle permet à un « nombre potentiellement illimité de personnes de s’informer » sur la situation financière des propriétaires de sociétés. 

Le Luxembourg Business Registers, qui administre le registre des bénéficiaires effectifs (RBE) du Grand-Duché, a dans la foulée fait savoir qu’il suspendait « provisoirement » l’accès en consultation du registre par le biais d’Internet. 

Sa consultation devrait cela dit rester de l'ordre du possible pour les personnes pouvant attester d’un « intérêt légitime », à savoir notamment les ONG et les journalistes, relève Le Monde.

Commentaires (18)


J’ai l’analyse inverse : c’est le fait de restreindre l’accès à ces données qui expose l’UE « à un risque disproportionné de fraude et d’extorsion ».



Plus sérieusement, il n’y a eu aucun cas avéré (je pense), c’est juste une excuse pour pouvoir détourner l’argent de l’UE sans être inquiétés.


bah on doit attendre que ça se produise pour réagir alors.
Sinon, en effet ces données n’ont pas à être rendues publiques.
Un peu comme si FICOBA était en accès libre, lol…


D’un côté, je comprends la décision: Éviter qu’on porte atteinte à quelqu’un me semble une sage initiative. “Il n’y a pas que des crabes dans le panier”



La dernière ligne de la brève souligne, tout de même, qu’il est toujours possible que ces données soient consultées au travers d’[intérêts légitimes].



Malgré tout, la CJUE pourrait imaginer que ses informations individuelles soient anonymisées. Ne plus mettre le nom, l’âge, etc. Mais un identifiant unique à une personne. Cela donnerait toujours la qualité de transparence financière et la possibilité à quidam de détecter les personnalités de pailles. La seule condition serait que les gestionnaires des données garantissent l’unicité de ce lien entre un identifiant unique et une personne physique ou morale. De la sorte, on pourrait porter à jugement par une autorité compétente un fait décelé sans avoir à dévoiler l’identité réelle de l’accusé(e).


Sauf qu’en connaissant le bénéficiaire unique d’une entité, l’identifiant unique n’est plus très anonyme, ce qui permet toujours de faire des recoupements. Et c’est probablement là l’un des intérêt pour que les données ne soient plus disponibles à tous


Gamble

Sauf qu’en connaissant le bénéficiaire unique d’une entité, l’identifiant unique n’est plus très anonyme, ce qui permet toujours de faire des recoupements. Et c’est probablement là l’un des intérêt pour que les données ne soient plus disponibles à tous


Non, pas directement. Si cet lien entre identifiant unique et la personnification du bénéficiaire n’est connu que du gestionnaire des données et uniquement accessible, lors de requêtes judiciaires, aux seules personnes en charge du dossier.



Disons que tout personne peut savoir que l’identifiant X soit en relation avec les entités Y, Z et W. On peut constater que identifiant-X semble manigancer et porter son cas à contrôle. En aucun cas, nous ne saurions que X est Monsieur ou Madame Untel vivant en Magouïcompanie… Par ailleurs, même les contrôleurs ne devraient pas connaître ce lien: recherches sur les faits uniquement, suppression d’un possible conflit d’intérêt…



Ce qui, somme toute, anonymise la personne. On ne peut faire le lien entre X et Untel qu’au moment d’un requis judiciaire. Et on évite toute mauvaise action à l’encontre du bénéficiaire au travers de ce moyen.


Il suffit de multiplier les hommes de paille, non ?


v1nce

Il suffit de multiplier les hommes de paille, non ?


N’est-ce pas déjà le cas ?


Cette décision peut-elle impacter l’accès aux données de la base SIRENE ou des bénéficiaires d’une société enregistrés auprès de l’INPI ?


L’accès au SIRENE ne donne pas d’informations particulières : https://avis-situation-sirene.insee.fr/



v1nce a dit:


Il suffit de multiplier les hommes de paille, non ?




Du coup comment tu veux détecter les hommes de paille ? Si tu as une personne (ou un identifiant) qui est gérant de 100 sociétés, c’est suspect. Si tu as un pool d’une vingtaine d’homme de paille ça fait 5 sociétés ce qui est moins remarquable.
Tant qu’on a une identité (plutôt qu’un identifiant) tu peux espérer croiser les données et trouver des aberrations (train de vie) avec un simple identifiant c’est mort.


Le Luxembourg, le pays le moins auto-suffisant au monde (hors micro Etats comme Monaco). Ils importent quasiment tout, ne produisent quasiment rien… à part la “production” de boîtes aux lettres qu’ils arrivent à caser par milliers dans quasiment chaque immeuble de bureaux… Ils sont très forts là dessus…


T’y as déjà au moins été ou vécu pour pouvoir dire ça?


mk_kev

T’y as déjà au moins été ou vécu pour pouvoir dire ça?


Ha bon il faut avoir été obligatoirement sur place ou y être resté à un endroit pour avoir le droit d’en parler? Non, jamais été, mais je me cultive, j’ai internet, je lis la presse et je regarde aussi des documentaires à la TV. Y’a un problème à citer des faits avérés sur le Luxembourg? Ca a l’air de chagriner un peu… Vois pas bien pourquoi… :D


Et il faudrait qu’on prouve que les personnes aient un lien entre-elles afin de corroborer l’association de malfaiteurs. C’est donc un devoir d’enquête, il me semble. La dernière ligne de la brève inspire le faits que cela soit toujours possible pour les ONG et les journalistes.



En tant que particulier, je pense qu’on n’a pas le droit d’aller farfouiller dans la sphère privée d’un tiers sans y être légalement/légitimement autorisé(e). Maintenant, il est probable qu’on puisse mener enquête de son propre chef, mais je ne suis pas sûr qu’on pourrait le publier ouvertement en tant que particulier.



Au final, si notre but est de dénicher des malversations, il serait préférable que l’on s’inscrive officiellement en tant qu’enquêteur et avoir accès à ces données et produire un travail révélateur. Et, tutti quanti, garantir une certaines quiétude publique aux personnes de bonne foi.



Arkeen a dit:


Plus sérieusement, il n’y a eu aucun cas avéré (je pense), c’est juste une excuse pour pouvoir détourner l’argent de l’UE sans être inquiétés.




Rien que ça ? Complotisme quand tu nous tiens !



ungars a dit:


bah on doit attendre que ça se produise pour réagir alors. Sinon, en effet ces données n’ont pas à être rendues publiques. Un peu comme si FICOBA était en accès libre, lol…




Quel rapport avec le FICOBA ? De l’argent public qui atterrit dans la poche d’acteurs privés à but lucratif, ça devrait être transparent, précisément pour éviter la corruption, le favoritisme, les détournements, etc.
Au nom de quoi est-ce que l’utilisation de l’argent public devrait être opacifié ? (hors secteurs militaire en renseignement)




fred42 a dit:


Rien que ça ? Complotisme quand tu nous tiens !




Tu parles de complotisme pour [des] [faits] [avérés] et [récurrents] depuis des [décennies] ?
‘va p’tet falloir revoir ta définition …



Arkeen a dit:


Tu parles de complotisme pour [des] [faits] [avérés] et [récurrents] depuis des [décennies] ? ‘va p’tet falloir revoir ta définition …




Le complotisme est de croire que cette décision est faite pour cacher ces fraudes (qui existent, je ne le nie pas) alors que c’est une décision de la CJUE pour faire respecter les droits fondamentaux que sont le droit à la vie privée et la protection des données personnelles. En particulier, c’est une violation du RGPD en laissant l’accès à ces fichiers à tout le monde.



Cette décision permet toujours l’accès non seulement aux services fiscaux et aux services de police mais aussi aux ONG et aux journalistes. Donc, oui, croire ce que tu dis en dépit des informations que tu avais, c’est bien du complotisme : les juges de la CJUE sont-ils achetés ou complices ? Un peu de sérieux, voyons !


OK je comprends mieux. Ce n’est pas hyper clair dans mon 1er commentaire, mais j’accuse les “plaignants” (pas les juges) de se servir de la privée comme d’une excuse pour obfusquer leurs activités. Le fait que ces mêmes “plaignants” possèdent des entreprises basées dans un paradis fiscal européen renforce encore mes soupçons. Un peu comme les mafieux qui mettaient des billes contre les lois anti-mafia en Italie.



Je comprends que l’argument soit recevable, et que les juges puissent l’accepter. Par contre ils ne peuvent pas ignorer que ce que les intérêts privés vont gagner en vie privée, l’Europe va le perdre en termes de corruption (déjà galopante).


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