« Une fois encore, la France est mise en cause devant la CEDH au sujet du fichage des empreintes génétiques », relève Nicolas Hervieu, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui fait office, sur Twitter, de vigie de leurs travaux, ainsi que de ceux de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de justice de l'Union européenne.
Mediapart précise qu’elle a en effet été saisie par deux personnes condamnées en France pour avoir refusé de donner leur ADN et ainsi alimenter le fichier national des empreintes génétiques (FNAEG, où figure près de 10 % de la population française de plus de 20 ans, comme nous l’avions révélé), une infraction passible d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende.
À l’appui de leur recours, elles invoquent une jurisprudence de la CEDH datant de 2017, qui avait condamné la France en 2017, estimant que le Fnaeg portait une « atteinte disproportionnée » à la vie privée.
Le juge européen avait en effet été saisi par un agriculteur qui avait refusé un prélèvement d’ADN après avoir été condamné à deux mois de prison avec sursis pour avoir donné un coup de parapluie en direction de CRS, lors d’une manifestation organisée par un syndicat et qui avait été émaillée de quelques accrochages avec les forces de l’ordre rappelle Mediapart.
La Cour européenne avait relevé « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter ».
« Or, poursuivaient les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes. »
En résumé, souligne Mediapart, la CEDH estimait que des violences commises lors d’un mouvement social ne peuvent être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
Le FNAEG, initialement conçu pour permettre d’identifier les criminels sexuels, avait en effet été considérablement élargi par la suite, de sorte de pouvoir ficher, non seulement les terroristes et autres auteurs de crimes particulièrement graves, mais également toute personne simplement soupçonnée de crimes ou délits, sans qu’elle en ait pour autant été jugée coupable.
La durée moyenne des procédures devant la CEDH étant en moyenne de trois ans, il faudra encore plusieurs années afin de savoir si le Fnaeg respecte la législation européenne, conclut Mediapart.
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