Par Toutatis, la France veut « protéger et défendre » ses intérêts dans l’espace
Sans nous faire tomber le ciel sur la tête
La Direction générale de l’armement présente Toutatis, une mission dont le but est de mettre en œuvre « une chaîne de connaissances et de réactions complètes face aux tentatives d’ingérences spatiales ». Il ne s’agit pas seulement d’observer, mais aussi d’agir. Par la force si nécessaire, mais sans créer de nouveaux débris dans l’espace.
Le 18 septembre à 10h00
6 min
Sciences et espace
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Toutatis est le petit nom d’une mission baptisée Test en Orbite d’Utilisation de Techniques d’Action contre les Tentatives d’Ingérences Spatiales. Les attentes autour de ce démonstrateur sont donc claires : répondre aux ingérences dans l’espace.
Surveiller, décourager, protéger et défendre
La Direction générale de l’armement (DGA) explique que c’est « la première étape de la stratégie de défense en orbite basse, intégrée à l’opération Ares (Action et résilience spatiale) ». Il ne s’agit pas seulement de surveiller l’espace, puisque la France compte bien « décourager et, le cas échéant, protéger et défendre nos intérêts dans l’espace ».
Un projet qui s’inscrit dans la lignée des récentes annonces et déclaration des responsables militaires. Toutatis viendra d’ailleurs en complément de la mission Yoda (Yeux en orbite pour un démonstrateur agile)
Deux satellites font partie de ce projet de surveillance et de défense :
- « Un premier satellite "d’action en orbite basse" (Splinter), disposant d’une capacité de manœuvre élevée et d’un ensemble de sous-systèmes permettant une autonomie d’approche et d’actions.
- Un second satellite "guetteur" (Lisa1) aux capacités d’observation accrues à des fins de surveillance de l’espace depuis son orbite ».
Respecter le droit international et limiter les débris
La DGA prend les devants : « Toutatis respecte strictement le droit international, y compris le droit à la légitime défense, en conformité avec l’engagement de la France en faveur d’une utilisation pacifique et responsable de l’espace extra-atmosphérique ».
Dans une vidéo publiée sur X, on peut suivre une simulation d’une attaque contre une menace. Une fois le satellite et ses composantes analysées, le commandement prend la main et décide de mener une action. On peut voir un laser venir « éblouir » le satellite espion et certainement détruire ses capteurs.
🛰️ L’Agence notifie à @USpace_ la réalisation d’une démonstration d’actions en orbite basse « TOUTATIS » au profit du Commandement de l’espace de l’@Armee_de_lair, en partenariat avec @MBDAGroup.
— Agence Innovation Défense (@Agence_ID) September 17, 2024
➡️ Mise en œuvre d'une chaîne de connaissances et de réactions complètes face aux… pic.twitter.com/cdHPNYK1C7
Cette manière d’agir va dans la lignée d’une déclaration du général Philippe Adam : « dans l’espace, notre logique est de refuser les tirs destructifs, compte tenu de leurs potentielles conséquences. Il faut absolument éviter la présence de débris dans l’espace ».
Les Nations Unies ont pour rappel adopté une résolution – coparrainée par la France – demandant aux États de « s’engager à ne pas procéder à des tirs de missiles antisatellites destructifs à ascension directe, c’est-à-dire tirés depuis la surface ou les airs ». Détruire les capacités de surveillance d’un satellite sans l’exploser, permet donc d’adopter une posture offensive, sans aller à l’encontre de la résolution.
« Nos satellites sont menacés »
Le programme Ares a été lancé il y a plusieurs années maintenant, en partant d’un constat simple : « Nos satellites sont menacés ». L’année dernière, le ministère des Armées dressait un portrait de la situation : « Aujourd’hui, si la guerre se fait toujours plus par l’espace, elle risque donc aussi bientôt de se pratiquer dans l’espace ».
Ce projet Ares vise trois objectifs : cataloguer les 50 000 à 60 000 objets spatiaux déployés en permanence (c’est le rôle du radar Graves pour Grand Réseau Adapté à la VEille Spatiale), identifier d’éventuelles actions malveillantes et enfin contrer une attaque dans l’espace.
Le gouvernement rappelait la triste démonstration de la Russie – qui était aussi « un avertissement » à l’Europe et aux États-Unis – avec la création de plus de 1 500 débris dans l’espace : « En novembre 2021, quatre mois avant le début de l’offensive russe en Ukraine, Moscou avait déjà effectué une démonstration de force dans l’espace, en détruisant l’un de ses vieux satellites avec un tir effectué depuis le sol ».
Le général Philippe Adam, commandant le Commandement de l’espace (CDE), est assez peu optimiste sur l’avenir de la guerre dans l’espace : « L’objectif est bien sûr de l’éviter. Malheureusement, l’évolution de la conflictualité nous conduit à nous demander non pas si une guerre se tiendra dans le domaine spatial, mais quand ».
L’armée française se prépare, à plusieurs niveaux
Depuis quelque temps, l’armée française multiplie les annonces, aussi bien côté défensif qu’offensif. Nous avons eu une « première mondiale » avec une liaison laser stable entre un nano-satellite en orbite basse et une station sol. Cette démonstration permet d’assurer une bonne discrétion des communications, sans tomber dans la réglementation du spectre radio et donc avec plus de marge de manœuvre et de bande passante disponible.
La France se prépare aussi à riposter si besoin, en renforçant (à partir de l’année prochaine) son arsenal avec des lasers offensifs : « des expérimentations doivent nous permettre d’envisager l’utilisation de lasers depuis le sol ou l’espace », expliquait le général Stéphane Mille, chef d’état-major de l’armée de l’air et de l’espace. La loi de programmation militaire (LPM) 2024 - 2030 propose deux projets : FLAMHE depuis l’espace et BLOOMLASE depuis le sol.
Par Toutatis, la France veut « protéger et défendre » ses intérêts dans l’espace
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Surveiller, décourager, protéger et défendre
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Respecter le droit international et limiter les débris
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« Nos satellites sont menacés »
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L’armée française se prépare, à plusieurs niveaux
Commentaires (5)
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Abonnez-vousLe 18/09/2024 à 10h20
La moitié du budget a été claqué dans l'élaboration du nom
Comparé aux missions précédentes, on constate clairement un engouement sans précédent pour cette nouvelle mission :
"[...] en complément de la mission Yoda (Yeux en orbite pour un démonstrateur agile)"
Modifié le 18/09/2024 à 10h40
Le 18/09/2024 à 12h16
Le 18/09/2024 à 13h35
Le 18/09/2024 à 11h31