Intel Foundry : réorientation stratégique et annonces clés
So long, german factory...
Après des semaines d’incertitude, Pat Gelsinger, CEO d’Intel, a dévoilé lundi sa nouvelle feuille de route stratégique en matière de production industrielle. Au programme : la création d’une filiale dédiée aux activités de fonderie, un gigantesque contrat avec Amazon, une aide fédérale de plus de 3 milliards de dollars et une politique générale de rationalisation des investissements, particulièrement en Europe.
Le 17 septembre à 08h29
7 min
Économie
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Couper dans les dépenses, intensifier la politique de sous-traitance, concentrer les investissements sur les activités les plus génératrices de cash, et créer une structure susceptible d’accueillir des investisseurs tiers : voilà en substance la teneur des décisions stratégiques formulées lundi par Pat Gelsinger, patron d’Intel depuis 2021.
La prise de parole s’imposait : le géant américain des semi-conducteurs est en effet sous les feux des projecteurs depuis la publication de résultats financiers décevants au deuxième trimestre. Début août, il avait annoncé un plan social concernant jusqu’à 15 000 salariés et un objectif de réduction des dépenses de l’ordre de 10 milliards par an dès 2025, mais sans préciser la teneur exacte de la réorganisation associée. Un plan d’action était attendu pour septembre, il est là.
Intel Foundry : l’activité fonderie devient une filiale
L’activité fonderie, qui englobe l’ensemble des usines d’Intel dédiées à la fabrication de semi-conducteurs, est au cœur des annonces : elle est en effet extrêmement consommatrice de cash, aussi bien en phase d’investissement (construction de nouvelle usine par exemple) qu’en termes de gestion opérationnelle (frais de fonctionnement, mise à niveau des machines, etc.).
Sur ce volet, le géant américain annonce la création d’une filiale dédiée, Intel Foundry. Intel Foundry est le renommage d’Intel Foundry Services annoncé en 2021. Il était alors question d’ouvrir sa fonderie à des partenaires pour la fabrication de puce.
Elle pilotera donc son propre compte d’exploitation et bénéficiera d’une forme d’autonomie vis-à-vis du groupe, ce qui devrait, selon Pat Gelsinger, rassurer à la fois les clients et les fournisseurs des usines Intel.
« Cela nous donne surtout la flexibilité future d’évaluer des sources de financement indépendantes et d’optimiser la structure capitalistique de chaque entité afin de maximiser la croissance et la création de valeur pour les actionnaires », écrit le CEO d’Intel. Traduction ? Intel ouvre la porte de ses usines à d’éventuels investisseurs externes même si pour l’instant, la filiale reste 100 % détenue par le groupe, avec une gouvernance inchangée.
L’usine en Allemagne retardée d’au moins deux ans
Sans surprise, Intel procède dans le même temps à une rationalisation des investissements prévus dans ses usines, avec une première conséquence très directe en Europe : le gel du projet à plus de 30 milliards de dollars annoncé par Intel en Allemagne. Le fondeur avait pourtant recueilli un soutien financier significatif dans le cadre de la politique de réindustrialisation européenne. L’usine polonaise est également abandonnée pour au moins deux ans.
À la place, Intel appuiera ses activités industrielles en Europe sur son usine irlandaise, dont les capacités ont récemment été renforcées. S’il maintient le projet, déjà bien avancé, du développement de son usine malaisienne, le groupe déclare concentrer, pour le reste, ses investissements sur le sol américain. « Maintenant que nous avons achevé notre transition vers la technologie EUV, il est temps de passer d'une période d'investissement accéléré à une cadence plus normale de développement des procédés de gravure et à un plan d'investissement plus souple et plus efficace », résume le CEO.
Début septembre, le groupe avait déjà signalé l’arrêt des travaux autour de son procédé Intel 20A, pour concentrer ses efforts autour du procédé Intel 18A.
Rationaliser le portefeuille produits
Début août, Intel avait annoncé une revue stratégique de l’ensemble de ses divisions. « Nous prenons également des mesures pour renforcer et rationaliser notre portefeuille produits, au sein duquel nous avons identifié des opportunités claires pour mieux concentrer nos forces et améliorer notre efficacité », déclare aujourd’hui Pat Gelsinger.
Outre quelques réallocations internes (l’activité Integrated Photonics Solutions rejoint par exemple la division Datacenter et produits IA), Intel réaffirme à cette occasion son ambition de se concentrer sur la franchise x86 et de décliner plus largement cette dernière sur les marchés professionnels liés au traitement de données et à l’intelligence artificielle.
Pour ce faire, Intel mise sur les capacités industrielles que devrait lui conférer son procédé de fabrication Intel 18A. Attendu dans ses propres produits, au travers des processeurs Panther Lake (CPU pour ordinateur) et Clearwater Forest (CPU serveur) dès 2025, l’Intel 18A va surtout permettre la création de processeurs personnalisés pour un client de taille.
Un immense contrat avec AWS
Intel a, en effet, dévoilé lundi la signature d’un contrat « sur plusieurs années et pour plusieurs milliards de dollars » avec AWS (Amazon Web Services). Il prend la forme d’un investissement conjoint, autour de capacités de production dédiées à la fabrication de puces x86 personnalisées selon les besoins du géant du cloud.
Au programme : des puces dédiées à l’IA (NPU) en Intel A18, mais aussi un Xeon 6 produit selon le procédé Intel 3 (déjà déployé dans plusieurs usines américaines), dans le prolongement des accords commerciaux qui lient déjà les deux entreprises. « Nous prévoyons plus largement avec AWS de nouveaux designs faisant appel à Intel 18A, Intel 18AP et Intel 14A », indique le groupe.
Intel avait déjà annoncé au début de l’année un autre partenaire de choix : Microsoft pour ses puces maison Maia 100 (IA) et Cobalt 100 (CPU)
3 milliards de dollars d’aides fédérales
À cette promesse de chiffre d’affaires, Intel ajoute une autre manne, sous forme de subvention cette fois. Le groupe annonce en effet s’être vu attribuer une aide financière de 3 milliards de dollars de la part du gouvernement fédéral américain, dans le cadre du CHIPS and Science Act, le programme de soutien aux investissements dans les semi-conducteurs. « En tant que seule entreprise américaine qui conçoit et fabrique des puces logiques de pointe, nous contribuerons à sécuriser la chaîne d'approvisionnement nationale », déclare Intel dans un communiqué.
Saluées positivement par la bourse américaine, ces annonces ne signent toutefois pas la fin des opérations de restructuration interne. Intel précise ainsi avoir encore à réaliser près de la moitié de son plan social. « Nous avons encore des décisions difficiles à prendre et nous informerons les employés concernés à la mi-octobre. En outre, nous mettons en œuvre des plans de réduction ou d'abandon d'environ deux tiers de nos biens immobiliers dans le monde d'ici à la fin de l'année », indique le groupe.
Intel Foundry : réorientation stratégique et annonces clés
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Intel Foundry : l’activité fonderie devient une filiale
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L’usine en Allemagne retardée d’au moins deux ans
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Rationaliser le portefeuille produits
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Un immense contrat avec AWS
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3 milliards de dollars d’aides fédérales
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Abonnez-vousLe 17/09/2024 à 08h39
Si le projet n’est pas annulé, c’est un camouflet pour l’Allemagne, qui a promis près de dix milliards d’euros de subventions pour attirer le géant des microprocesseurs à Magdebourg (centre-est).
Le chantier n’avait pas encore commencé, alors qu’Intel avait initialement annoncé le début des travaux pour le premier semestre 2023. Le retard avait été justifié par des surcoûts liés à l’inflation.
La subvention du gouvernement allemand représentait environ un tiers du coût du projet, estimé à 30 milliards d’euros.
« Les fonds dont Intel n’a pas besoin doivent être réservés au traitement des problèmes financiers du budget fédéral », a réagi, dans un message posté sur X (ex-Twitter), le ministre allemand des Finances, Christian Lindner. « Toute autre option ne relèverait pas d’une politique responsable. »
Quant au site polonais, situé à Wroclaw (sud-ouest), Intel s’était engagé à y investir jusqu’à 4,6 milliards de dollars avec, à la clé, la création de 2.000 emplois directs.
Le groupe a justifié le gel des deux sites par ses prévisions d’évolution de la demande, sans donner plus de précisions.
Plus tôt cette année, l’entreprise américaine avait déjà ajourné la mise en chantier d’un nouveau centre de recherche et développement en France et gelé un projet d’usine en Italie.
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Ce revirement en Europe contraste avec le développement industriel d’Intel aux Etats-Unis, soutenu à bout de bras par le gouvernement américain, qui a débloqué, en mars, une enveloppe de 20 milliards de dollars de subventions pour permettre au groupe d’augmenter sa production.
Les autorités fédérales américaines comptent sur l’utilisation de ces fonds pour développer ou construire des usines en Arizona, dans l’Ohio, au Nouveau-Mexique et en Oregon, ce qui pourrait créer jusqu’à 30.000 emplois.
L’entreprise doit investir, de son côté, quelque 100 milliards de dollars dans son pays d’origine.
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Lundi toujours, Intel a dévoilé un nouveau contrat de fourniture de puces ultrasécurisées au ministère américain de la Défense, pour un montant qui pourrait atteindre trois milliards de dollars.
Le 17/09/2024 à 10h18
Au premier accroc, elles se carapatent vers leur pays d'origine. Et encore, si Trump est élu, ça va encore aller en s'accentuant.
Modifié le 18/09/2024 à 13h32
Les US sous Trump puis Biden qui continuera voir accentuera les droits de douane, le protectionnisme, le CHIPS Act, Inflation Reduction Act, et toutes les autres subventions. Détruisant par la même occasion les règles de libre-échanges et même les règles qu’ils se sont crées sur mesure à travers l’OMC ne sont pas respectées, bref c’est la compétition ultime de tous contre tous. Bon après ils ont un peu baissé leurs ambitions passant d'un découplage à un derisking mais le résultat est là voir même s'ils ont vanté le Friendshoring qui m'a plus fait marrer qu'autre chose.
https://globalaffairs.org/commentary-and-analysis/blogs/changing-us-attitudes-trade
https://www.nytimes.com/2022/11/18/business/friendshoring-jargon-business.html
https://commission.europa.eu/strategy-and-policy/priorities-2019-2024/stronger-europe-world/eu-us-trade-and-technology-council_en
De toute manière que ce soit une Harris ou un Trump qui passe se sera pareils par contre ce qui me frappe c'est de voir les politiques de l'UE ne pas avoir réagit à l'époque Trump et même avec Biden. Alors que l'on voit actuellement les industriels Allemands mais aussi français et d'autres pays de l'UE partir aux US ou en Chine. Tout en constatant que des petits pays reprenant presque l'ancienne voie française du non alignement ni US , ni Chine s'en tirent plutôt bien ce que n'a pas été capable de faire l'UE.
Le 18/09/2024 à 13h36
Le 18/09/2024 à 14h10
Bon c'est le figaro tu peux passer le blahblah.
https://www.lefigaro.fr/societes/les-etats-unis-eldorado-des-groupes-francais-20240311
Le 17/09/2024 à 13h53
ça promet.
Le 17/09/2024 à 16h27
Le 17/09/2024 à 17h10
Le 17/09/2024 à 17h16
Modifié le 18/09/2024 à 01h19
Je crois qu'ils se sont arrêté au 12nm. C'est une des raisons qui fait qu'AMD ne travaille plus trop avec eux.
Et maintenant ils perdent des clients car ils passent a des gravures que GF ne maitrise pas.
https://www.anandtech.com/show/21266/globalfoundries-clients-are-migrating-to-sub10nm-faster-than-expected
https://www.forbes.com/sites/tiriasresearch/2022/05/24/globalfoundries-finally-hits-its-stride-on-the-road-not-taken/