Plébiscite du smartphone, confiance accrue dans l’information présentée par les moteurs de recherche, faible considération de leurs effets environnementaux… tour d’horizon des usages numériques de la population française.

92% des Français de plus de 12 ans sont connectés à internet et 82% y naviguent chaque jour, mais plus de la moitié subissent au moins un type de difficulté au moment d’effectuer des démarches en ligne. Tel est le constat posé par le Crédoc, qui a interrogé 3611 personnes en ligne et 573 autres, « éloignées du numérique », par téléphone, pour dresser un baromètre de la diffusion des technologies numériques en France. 

Intégrées entre autres par l’Arcep et l’Arcom, les questions de l’étude ont porté sur trois axes de réflexion : le taux d’équipement des Français, leurs usages, la place et les modalités que prennent leurs outils numériques dans le quotidien.

Parmi les résultats de cette enquête, la Covid a laissé des traces évidentes aussi bien dans l’adoption de certains types d’outils que dans celle d’usages spécifiques. La visioconférence, en particulier, est désormais bien ancrée dans les usages d’une personne sur deux… de même que le brouillage entre temps professionnels et personnels : un tiers des répondants disent utiliser de temps en temps des outils numériques pour des raisons professionnelles en dehors de leur temps de travail, un autre tiers déclare le faire régulièrement. 

Le smartphone à l’assaut des activités déconnectées

87% des personnes interrogées possèdent désormais un smartphone, contre 85% en 2020. En parallèle, le téléphone fixe persiste dans sa chute lente mais régulière, avec 80% de propriétaires en 2022 contre 90% en 2013, année où la majorité des interrogées ne possédait pas de téléphone intelligent. 

Depuis, celui-ci a largement investi les usages les plus classiques (82% l’utilisent pour naviguer sur internet, quatre sur cinq pour échanger des messages via des applications, trois sur quatre pour téléphoner via lesdites applications). Il s’est, surtout, généralisé pour meubler les espaces vides du quotidien : une personne sur deux l’utilise pour regarder des vidéos, à peine moins pour jouer à des jeux, pas loin de deux sur trois pour écouter de la musique. 

Ceci a pour effet de faire régresser différentes activités non connectées, de la lecture de livre ou de journaux (pratique de 53% des Français interrogés, en baisse de 10 points par rapport à 2021) à la discussion avec les gens autour de soi (71%, en baisse de 6 points) ou l’observation de l’environnement (87% contre 94% en 2021). 

Fréquence de connexion et usage des réseaux sociaux en recul…

Rien n’est perdu toutefois ! Le Crédoc note que si la part de propriétaires de smartphones bat des records, son usage journalier décroît : 83% l’utilisent désormais chaque jour, contre 94% des personnes en 2019. 

En parallèle, l’usage de l’ordinateur reflue un peu par rapport à ce qui était observé en 2020, mais reste bien au-dessus de la période pré-pandémie, à la fois par maintien des habitudes acquis en confinement et parce que l’augmentation des coûts de l’énergie et le recours au télétravail poussent les Français à limiter leurs sorties.

Autre retrait notable : celui de l’usage des réseaux sociaux, qui se retrouve au niveau de 2017 (c’est-à-dire utilisés au cours de l’année précédente par 62% de la population globale et 67% de celle des internautes), après une forte hausse au plus fort de la crise de la Covid-19. 

… domotique et confiance dans les plateformes d'intermédiation en hausse

S’il est un type d’équipement qui gagne en succès, c’est celui des enceintes connectées, présentes chez 37% des personnes interrogées contre 9% en 2019. Plus largement, quatre Français sur dix possèdent désormais au moins un objet connecté, que celui-ci concerne la santé, l’électroménager, la sécurité ou la domotique. En parallèle, l’équipement en très haut débit continue de progresser à grande vitesse.

Côté usage, les sites d’intermédiation confirment leur succès : près de 4 français sur cinq ont désormais pris le pli d’effectuer des achats en ligne – ils ne sont pas loin d’un sur deux à le faire au moins une fois par mois. Par ailleurs, plus de deux personnes sur trois préfèrent passer par une plateforme intercédant la relation plutôt que d’appeler directement la compagnie de taxi, le restaurateur ou l’hôtel visé. 

Parmi les usages qui continuent de progresser, 71% de la population globale effectue désormais ses démarches administratives en ligne. Plus d’une personne sur deux utilise des services de vidéos à la demande, (bien au-dessus des 36% comptabilisées en 2019). La radio, en revanche, reste pour le moment incontournable : sur les 75% de Français qui écoutent des contenus audio, deux sur trois continuent de le faire via le réseau hertzien. 

La famille ou les cours en ligne pour se former au numérique…

Plus d’une personne interrogée sur deux déclare ne plus pouvoir passer une journée sans qu’internet (et en particulier leurs mails) leur manque. Pourtant, entre maîtrise insuffisante des outils et manque d’équipement, 54 % citent au moins un frein à l’usage des outils numériques au quotidien, en plus des 8% de Français interrogés par le Crédoc qui ne se connecte jamais à internet. 

Pour y remédier, plus d’un sur quatre cite l’environnement familial comme meilleur espace de formation. La même proportion cite aussi la formation autonome en ligne, en hausse de 16 points par rapport à 2017.

La conscience des différentes formes d’escroquerie et de criminalité en ligne progresse aussi, même si pas toujours de manière positive : plus d’une personne interrogée sur deux pense avoir subi un accès non désiré à ses données, soit à peu près autant que de gens se déclarant très vigilants à leurs données personnelles en ligne. 



En pratique, plus de deux sur trois ont installé un logiciel de sécurité, plus d’une sur deux fait un choix de matériel impliquant un système d’exploitation sécurisé et à peine moins installe de quoi protéger sa navigation. En revanche, 65% des personnes interrogées déclare accepter régulièrement ou systématiquement les cookies, ne tirant pas tellement profit de la systématisation de la demande de consentement à la collecte des données imposées par le RGPD. 

… quid de la formation à l’information ? 

Autre enjeu d’éducation : celle aux médias disponibles en ligne. La consultation de sites d’informations d’actualité en ligne continue de baisser, potentiellement au profit d’émissions audio ou vidéo dites « natives », produites directement en ligne. 

Surtout, les réseaux sociaux et les moteurs de recherche le dispute aux médias traditionnels : une personne interrogée sur deux déclare faire confiance à la manière dont les deux sélectionnent et présentent les informations, et 41% font confiance aux informations relayées sur les réseaux, soit 15 points de plus qu’en 2017.

Selon le Crédoc, ceci s’explique au moins en partie par les mécanismes de régulation qui sont apparus au fil du temps. Ainsi, deux internautes sur cinq ont déjà utilisé l’un des dispositifs permettant de signaler des éléments inappropriés, et la grande majorité a à chaque fois trouvé ces outils simples à trouver, à comprendre et à utiliser. 

Numérique et environnement : des réflexions balbutiantes

Quand on réfléchit aux effets du monde numérique sur la planète, la question de l’origine et de la fabrication des terminaux électroniques vient en tête. Selon une étude GreenIT de 2021, la fabrication des équipements est en effet responsable de 76% du coût environnemental des usages technologiques des particuliers.

• Qu’implique la construction d’un smartphone équitable ?

Mais la problématique n’est pas forcément bien connue du grand public : selon le baromètre du numérique, parmi les 95% de personnes possédant au moins un téléviseur, une sur deux a acheté son poste principal dans les cinq dernières années. Et seulement 10% d’entre eux ont été obtenus d’occasion ou reconditionnés (contre 20% des smartphones).