e-Commerce : un futur droit de rétractation salué par la FEVAD, critiqué par l’UFC
Un droit adapté ou raboté ?
Le 20 avril 2018 à 14h15
4 min
Droit
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Laure Baëté est en charge des affaires économiques et juridiques à la FEVAD, la fédération des entreprises de vente à distance. Elle revient au fil d’un échange sur le « New Deal » du droit de la consommation. De nouvelles règles européennes souhaitées par la Commission, avec en particulier une réforme du droit de rétractation.
Cette « nouvelle donne » ou « new deal » vise à mettre à jour de nouvelles garanties et obligations en la matière, à l’initiative par Bruxelles. Par exemple, « lors d'un achat effectué sur une place de marché en ligne, les consommateurs devront être clairement informés afin de savoir s'ils achètent des produits ou services à un commerçant professionnel ou à un particulier; ils sauront ainsi s'ils sont protégés par les droits des consommateurs en cas de problème » explique l’institution.
Laure Baëté, juriste à la FEVAD, accueille plutôt favorablement cette disposition. Alors qu’on retrouve cette notion de « plateforme » dans la loi Lemaire, il y a néanmois un risque d’entrechoquement pour les entreprises. « À la FEVAD, nous raisonnons au niveau européen, et il y a toujours des dispositions parfois franco-françaises qui arrivent soit en avance soit après. Nous serons très vigilants par rapport à l’implantation des nouvelles règles, d’un pour qu’elles ne soient pas redondantes et deux, puissent être dans la même mouvance ».
Droit de rétractation : dépréciation du bien, dépréciation du remboursement
Surtout, le droit de rétractation va connaitre une intense réforme. D’une part, il va être étendu aux services gratuits, d’autre part, il va intégrer une logique de dépréciation.
Depuis la directive Droit des consommateurs, transposée en France en 2014, « un professionnel est tenu de rembourser dès la notification du souhait par le consommateur de se rétracter, ou alors il peut prolonger le délai soit à la réception du bien soit à la réception de la preuve de l’expédition du produit. Ce qui compte est le premier des faits qui arrive » commente encore la juriste.
« Par exemple, si le professionnel reçoit la preuve de l’expédition avant de recevoir le bien effectivement, il doit rembourser ». La FEVAD n’a jamais été bien favorable à une telle obligation de remboursement à l’aveugle. Pas étonnant qu’elle soit satisfaite de la réforme en cours.
« Cette évolution nous semble normale et logique, poursuit l’intéressée. Avec la future directive, le professionnel pourra rembourser une fois qu’il aura vérifié effectivement l’état du bien. Et il pourra déprécier le bien s’il a été utilisé plus que nécessaire, puisque le droit de rétractation est un droit à l’essai ».
Un droit à l’essai ? « C’est expliqué dans les considérants, c’est une manipulation un peu comme dans un magasin. Évidemment, j’achète une robe, cela reste un droit à l’essai normal. Si je la mets pendant un mariage, cela devient plus que nécessaire. Cette notion de dépréciation ne pouvait jamais être mise en œuvre par le professionnel, il ne pouvait pas avoir les biens avant de rembourser ».
En cas de dépréciation du bien, le professionnel sera donc en droit de rembourser moins. « Le dispositif n’est pas laissé sans garde-fou, temporise Laure Baëté. Déjà, il faut que le professionnel l’ait indiqué dans les conditions générales de vente ».
Un droit de rétractation raboté, selon l'UFC Que Choisir
Pour imager une utilisation plus que nécessaire, la juriste nous cite deux exemples : « Certains de nos adhérents vendent des hachoirs à viande. Des consommateurs ont pu se rétracter en renvoyant un produit portant la trace de morceaux de viande. Autre cas, des appareils photo numériques retournés avec une carte mémoire remplie de photos de mariage du week-end. Là, clairement, il y a une preuve d’une utilisation plus que nécessaire du bien ».
Néanmoins, ce futur régime ne satisfait pas tous les acteurs. L’UFC Que Choisir évoque un droit de rétractation « raboté ». Et pour cause, « une entreprise pourra ne pas procéder au remboursement si le bien a été utilisé, l’appréciation de l’utilisation restant à la discrétion de ladite entreprise, et le paiement ne sera déclenché qu’à réception du produit par le vendeur ». Elle anticipe de possibles abus « qui risquent de rendre plus difficile la rétractation ».
e-Commerce : un futur droit de rétractation salué par la FEVAD, critiqué par l’UFC
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Droit de rétractation : dépréciation du bien, dépréciation du remboursement
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Un droit de rétractation raboté, selon l'UFC Que Choisir
Commentaires (17)
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Abonnez-vousLe 21/04/2018 à 05h25
« « … Et il pourra déprécier le bien s’il a été utilisé plus que nécessaire, puisque le droit de rétractation est un droit à l’essai ».Un droit à l’essai ? » (article NextINpact)
« En effet, d’un côté on a la vente en magasin physique, où il n’y a aucun délai de rétractation une fois l’achat effectué : Visiblement, la loi considère que le fait de voir le produit en magasin est suffisant pour se faire une idée avant d’acheter. Pas question donc d’essayer le produit en condition réelle avant l’achat.
Le 21/04/2018 à 19h25
Ce genre de situation ne fonctionne que si le transporteur reconnaît sa responsabilité. Enfin, en ce qui concerne ce genre d’assurance, j’ai déjà eu des soucis avec un transporteur qui refusait d’endosser la responsabilité de la casse…
Quels seront les moyens pour un consommateur de faire appel de la décision du commerçant dans ce genre de cas ?
Le 21/04/2018 à 19h45
Je basais mon propos sur le contenu de l’article, où il est bien mentionné : « Il pourra déprécier le bien s’il a été utilisé plus que nécessaire, puisque le droit de rétractation est un droit à l’essai ». On parle donc bien de “droit à l’essai” et pas uniquement d’adéquation entre la couleur d’une photo et celle de l’objet reçu.
D’ailleurs, ils parlent ensuite de dépréciation si l’objet a été utilisé “plus que nécessaire”. Mais bon, pour moi “plus que nécessaire”, ça ne veut rien dire dans le sens où dans 99% des cas te auras toutes les peines du monde pour justifier qu’en effet tu entres dans ce cas, ainsi que la valeur de la dépréciation que tu appliqueras.
Par exemple un emballage défait, c’est déjà une dépréciation de l’objet puisqu’il n’est plus “neuf” : le prochain acheteur verra bien que le carton a déjà été ouvert, que les protections ne sont pas bien remises… Le vendeur devra éventuellement refaire ça proprement (donc temps passé = argent perdu). Et là on est toujours dans un cas “normal” sans abus de la part du client. Je ne parle pas non plus d’un objet essayé (type mixeur, arbre à chat, produit Hi-Tech etc) où l’usage peut rendre le produit sale et difficilement lavable (surtout si le client ne l’a pas fait correctement et que ça a séché plusieurs jours).
Je comprends le délai de rétractation pour de la vente au porte-à-porte où comme dit Radithor, il peut y avoir des pratiques assez discutables, des closes mal comprises ou inconnues, de pressions pour signer.
Mais pour un site de e-commerce, tu es seul devant ton PC, personne ne peut te forcer à cliquer avant de lire, et je trouve que tu es même dans des meilleures conditions pour réfléchir (pas de vendeur devant toi, temps pour lire le contrat sans que quelqu’un s’impatiente pour que tu le signes, etc) que pour une vente en magasin. D’où le fait que je trouve le droit à la rétractation beaucoup trop large pour le moment.
Pour moi, le droit à la rétractation devrait porter comme tu le dis sur une différence entre l’objet réel et la fiche de l’article (ex: couleur, fonctionnalités manquantes etc), et donc où le vendeur a fait une “faute” en n’indiquant pas les bonnes infos. Mais pas un retour libre et sans même besoin de justification valable comme c’est le cas maintenant, et encore moins pendant 14 jours…
Le 22/04/2018 à 05h46
Non mais pourquoi protéger les vendeurs ? La vente par internet a explosé ! Clairement, les conditions actuelles ne freinent pas le commerce. C’est plutôt les conditions de vente en magasin qu’il faudrait aligner sur la vente en ligne. Et pas l’inverse. Encore et toujours, l’intérêt des puissants….
Le 22/04/2018 à 06h33
Le 23/04/2018 à 07h44
Dans les conditions décrites par l’article, tant que les conditions d’utilisation abusives ne sont pas exhaustivement précisées, on est clairement sur un rabot de la protection des consommateurs… Et donc une mise en péril de la confiance des consommateurs dans l’e-commerce… J’espère que ça va être retravaillé en ce sens !
Le 24/04/2018 à 09h07
L’exemple bidon….
“des appareils photo numériques retournés avec une carte mémoire remplie de photos”
La fameuse carte mémoire n’étant jamais vendue avec l’appareil, ce qu’elle dit ne fait aucun sens. Le vendeur vient de gagner une carte mémoire, sans que l’appareil ne soit déprécié.
Au fait, à partir de combien de photos l’utilisation est-elle jugée “plus que nécessaire”?
à partir de combien de morceaux de viande sur le hachoir? non parce que l’essayer sans y mettre de la viande, je vois pas…
“j’achète une robe, cela reste un droit à l’essai normal. Si je la mets pendant un mariage, cela devient plus que nécessaire”
Encore une fois, on aurait moins le droit de porter un vêtement qu’en cabine d’essayage? Comment définir précisément le temps que la tenue a été portée???
https://droit-finances.commentcamarche.com/faq/37724-delai-de-retractation-les-d…
“Motif: Le consommateur qui revient sur son choix n’a pas à donner les motifs de sa décision au vendeur. ”
Donc ce droit n’est pas défini comme “droit à l’essai”.
idem ici
http://www.cgv-pro.fr/retractation
“droit à un consommateur de “changer d’avis” “
Enfin, le droit de rétractation ayant sa place pour les services, cette notion d’essai qui enlève de la valeur n’a aucune logique.
Le 20/04/2018 à 14h19
Personne ne voudrais combiner irl et ecommerce ? Tu test le produit en magasin et ensuite tu l’achète via le net.
Le 20/04/2018 à 14h24
C’est un peu déjà ce qui existe. On va à la Fnac tester et on achete sur Amazon ^-^
Le 20/04/2018 à 14h38
Merci à NXI de porter l’info sur la réforme du droit de consommation façon “on vous la fait à l’envers mais on vous la met bien profond quand même”…
Le 20/04/2018 à 15h10
Moué, y a des failles dans le raisonnement de la gentille dame : qui sera responsable, si on renvoie le bien en parfait état, juste après déballage, remballage correct et qu’il y a des dégâts au transport qui fait que le bien sera déprécié ?
Qui contrôlera les critères de dépréciation pour diminuer le remboursement de 10, 20 ou 50% ? qui les définira ?
Bref, évolution du droit toute moisie… Ce sont les vendeurs de vaseline qui en feront leurs choux gras….. " />
Le 20/04/2018 à 16h28
C’est pas très sympa, et à long terme, pas très malin …. :-(
Le 20/04/2018 à 18h11
Combien d’abus pour en arriver là ?
Le 20/04/2018 à 19h14
Personnellement, je ne trouve que le droit de rétractation est TROP permissif actuellement et ouvre la porte à beaucoup trop d’abus.
En effet, d’un côté on a la vente en magasin physique, où il n’y a aucun délai de rétractation une fois l’achat effectué : Visiblement, la loi considère que le fait de voir le produit en magasin est suffisant pour se faire une idée avant d’acheter. Pas question donc d’essayer le produit en condition réelle avant l’achat.
Pourtant, cette logique est beaucoup moins claire pour un site de e-commerce, où là vous avez une période de 14 jours pour “tester” le produit. Pourquoi 14 jours ? Qui a besoin de 14 jours pour vérifier que le produit correspond bien à l’idée qu’on s’en était fait ?
De même, à ma connaissance, il n’y a pas de limitation claire à ce qu’est un essai. En magasin, comme dit plus haut, ça consiste en général à voir l’article réel, éventuellement à le manipuler… Rarement à le brancher et encore moins à l’utiliser en condition réelle.
Pour le e-commerce, où se limite l’essai? Moi je n’en ai aucune idée.
Est-ce qu’un client a le droit par exemple d’utiliser un mixeur une fois, et de le retourner vaguement nettoyé, avec les protections en polystyrène abimées, les plastiques partiellement arrachés ou manquants, simplement parce que “finalement j’en veux un plus puissant” ou “finalement j’en ai pas besoin” ? Et qui couvre la dépréciation dû à l’ouverture de l’emballage et les traces d’usage ?
De même, si le client commande un article très spécifique donc difficile à revendre et/ou à stocker (s’il est particulièrement encombrant) ? Qui couvre les frais de ports si c’est un article très lourd (par exemple 100kg, encombrant et devant donc être envoyé par un transporteur privé à un coût supérieur à 50€) ? Tout ça parce que le client “a changé d’avis”…
Et je ne parle pas des vrais abus, où les personnes commandent des objets pour les utiliser pendant une courte période et les retourner. Allez prouver que la personne l’a fait en sachant très bien qu’il allait le retourner…
Bref, je trouve que si sur le principe il est bien de protéger le consommateur, il faudrait aussi penser un peu au professionnel et trouver un juste milieu où à la fois le consommateur est protégé, mais où il a aussi des responsabilités et des devoirs à respecter pour limiter les abus.
Actuellement, je trouve qu’il n’y a pas assez de garde-fous, d’où les abus réguliers.
Mais bon, encore une fois c’est un avis personnel. Pas taper SVP :)
Le 21/04/2018 à 03h06
Pour cela, les transporteur on des assurances il suffit de la prendre quand tu retourne un produit. (et oui sa a un cout, mais tu a la choix)
Le 21/04/2018 à 03h08
trop quand tu voit que par exemple des rasoirs “neuf” sont revenu par amazon, avec des poils…. (donc déja utiliser). Et quand realité, c’est une personne qui avait acheter, la utiliser, et la renvoyer a amazon pour retractation….
Le 21/04/2018 à 03h10
“vous avez une période de 14 jours pour “tester” le produit.” justement ce que tu dit c’est ce que beaucoup crois, le délai de retracation a la base il n’est pas pour “tester” le produit.
Pour le reste c’est déja le cas surtout sur amazon, beaucoup on des probléme en achetant des rasoirs électrique “neuf” qui on deja des poils sur la tete de rasage, etc …
pour ton 100Kg je pense que sa pourrait monté a plutot dans + de 100€ ;)