Altice : recrutements en trompe-l’œil et revenus en baisse
Un éléphant, ça trompe...
Le 22 novembre 2018 à 13h43
5 min
Économie
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Altice Europe a présenté hier ses résultats pour le troisième trimestre 2018. Le groupe de Patrick Drahi s'enorgueillit de recrutements positifs, mais le chiffre d'affaires continue de s'éroder. Le résultat d'une stratégie trop agressive ?
Recruter de nouveaux abonnés a un prix. Visiblement, la direction d'Altice est prête à faire tapis pour gonfler ses chiffres et effacer trois années de fuite de la clientèle. Particulièrement agressif dans ses offres en France ces derniers mois, SFR est en effet parvenu à convaincre de très nombreux clients sur le fixe et sur le mobile, mais cet afflux n'est pas synonyme de revenus immédiats, bien au contraire.
Un chiffre d'affaires en baisse
En France, l'ambiance n'est pas vraiment à la fête, puisqu'Altice y enregistre un chiffre d'affaires de 2,48 milliards d'euros sur le troisième trimestre, en baisse de 7,6 % sur un an. L'EBITDA reste tout de même positif, avec un bénéfice de 962 millions d'euros, à comparer au 1,093 milliard d'euros inscrit dans les livres de comptes 12 mois plus tôt.
Sur les neuf premiers mois de l'année, le constat est le même, avec un chiffre d'affaires de 7,674 milliards d'euros, en baisse de 6,5 % sur un an. Le recul est visible aussi bien sur le fixe (2,107 milliards d'euros,- 9,7 %) que sur le mobile (3,199 milliards d'euros,- 3,6 %) ou le B2B (1,403 milliard d'euros,- 5,4 %).
À chaque fois, l'excuse est la même : une concurrence qui se veut de plus intense, des niveaux de clientèle plus bas qu'un an plus tôt malgré le rebond des recrutements, et « la perte d'un traitement favorable de la TVA sur les packs presse/télécoms ». Une référence à la stratégie passée autour de SFR Presse, réduite à néant par le gouvernement.
Les abonnés affluent en France
Il ne faut toutefois pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Des points très positifs sont à noter, notamment sur le plan des recrutements. Sur le marché fixe par exemple, le dernier trimestre a été marqué par l'arrivée de 166 000 clients supplémentaires, dont 64 000 sur le FTTx et 6 000 sur la 4G Box, ainsi que le départ de 19 000 abonnés ADSL.
Si vous comptez bien, le total est donc de 51 000 recrutements, pour un parc de 6,1 millions d'abonnés. Où sont donc les 115 000 restants ? Outre une marge d'erreur de 1 000 avec les arrondis, SFR a tout simplement décidé... d'ajouter ses abonnements OTT pour RMC Sport (+ 114 000) au total de ses abonnements fixe.
Plus c'est écrit petit, mieux ça passe...
Si l'opérateur a au moins la décence de le préciser avec un renvoi au pied de page, taille 6, d'une de ses diapositives, la méthode reste plus que discutable, tant les deux services n'ont rien à voir.
Côté mobile, SFR se vante de 378 000 nouveaux abonnés mobiles, hors offres prépayées et M2M, ce qui porte le total à 13,4 millions de clients. Selon l'entreprise, il s'agit de son meilleur trimestre sur le plan des recrutements depuis 2004. Difficile de confirmer au vu du petit tour de passe-passe réalisé avec les abonnés OTT.
SFR joue en Ligue des Champions des promotions
Pour Altice, ce succès est dû à plusieurs facteurs, à commencer par son « agilité » quand il s'agit de répondre aux promotions de la concurrence. L'opérateur explique ainsi au travers d'un graphique qu'il n'est pas systématiquement l'initiateur de promotions, et qu'il sait s'adapter en 24 heures aux percées de ses pairs, aussi bien sur le fixe que sur le mobile. Il s'appuie pour cela à la fois sur les offres de SFR, engageantes, que sur celles de RED, plus souples.
Autre facteur important, celui des contenus, notamment grâce à RMC Sport et l'acquisition des droits pour la Ligue des Champions. Si recruter 114 000 clients en OTT en l'espace de trois mois est un accomplissement en soi, comme nous le notions un peu plus tôt, ce score reste encore très insuffisant pour rentabiliser le coût astronomique (350 millions d'euros par an rien que pour la LdC) de ces compétitions.
Enfin, SFR continue de vanter ses réseaux fixe et mobiles face à la concurrence. Sur le marché fixe, il estime être l'opérateur commercialisant le plus de prises « Fibre » en France, ce en comptant à la fois ses réseaux en propre (9,9 millions de prises, fibre et câble confondus) et celui qu'il loue (2 millions de prises), soit près de 12 millions de prises.
Un chiffre opposé aux 10,3 millions pour Orange, 6,8 millions pour Free et 4,7 millions pour Bouygues Telecom. Pour le mobile, ce sont ses 34 000 antennes qu'il met sur le devant de la scène, ce qui placerait l'opérateur en position de force au moment de basculer vers de la « 4G +++ ».
Une dette sous contrôle
Difficile de parler d'Altice sans évoquer sa dette. En Europe, elle s'élève au total à 32,47 milliards d'euros, répartis en plusieurs silos. Le plus important reste celui formé par SFR et Next Radio TV, puisqu'il compte pour 16,24 milliards d'euros.
Altice International ajoute 8,27 milliards à la note, tandis que la holding luxembourgeoise a emprunté au total 6,23 milliards d'euros. Altice Corporate complète le tableau avec 1,73 milliard d'euros empruntés ainsi qu'Altice TV, pour 303 petits millions (et un EBITDA négatif :- 231 millions d'euros).
Fait notable, le coût de cette dette a fondu de 21 % en un an, passant de 1,64 milliard de dollars sur les 9 premiers mois de 2017 à 1,29 milliard sur la période janvier - septembre 2018. Une amélioration due à la restructuration de plusieurs volets et à la baisse des taux d'intérêt. Une bouffée d'oxygène de 100 millions de dollars par trimestre, ça ne se refuse pas.
Le 22 novembre 2018 à 13h43
Commentaires (13)
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Abonnez-vousLe 22/11/2018 à 14h30
#1
SFR a tout simplement décidé… d’ajouter ses abonnements OTT pour RMC Sport (+114 000) au total de ses abonnements fixe.
Ils sont trop forts ! " />
Le 22/11/2018 à 14h48
#2
Je comprend pas l’histoire du nombre de prise en réseau Fibre *
Comment ont ils les chiffrent des concurrents et surtout comment ont ils les chiffres des concurrents “loués” ?
Le 22/11/2018 à 15h01
#3
le job du chargé de communication dans ces outils là, c’est d’enrober les chiffres un max pour leur faire dire n’importe quoi. SFR ne retrouvera de toutes façons jamais ces petits par rapport aux droits de la LDC qu’ils ont surpayé.
Le 22/11/2018 à 15h04
#4
nan mais il faut attendre l’arrivée de la freebox V7 " />
Le 22/11/2018 à 15h16
#5
Ils osent tout.
Le 22/11/2018 à 15h52
#6
C’est même à ça qu’on les reconnaît!
J’ai dû sortir la loupe pour l’astérisque concernant les abonnments OTT.
Dire que j’ai failli m’abonner à RMC Sport - et donc devenir un abonné SFR fixe…parfois on passe à côté d’une catastrophe sans s’en rendre compte " />
Le 22/11/2018 à 17h01
#7
Enfin, les articles économiques de Kévin Hottot sont de retour. :-)
Le 22/11/2018 à 17h33
#8
Orange continue de rattraper son retard sur le réseau de distribution Très Haut Débit de SFR/Numericable. Les cadres d’Orange doivent être aux anges.
Le 22/11/2018 à 17h35
#9
SFR déploie des réseaux FttH qu’elle loue, entre autres à Free ou à Bouygues Telecom. Ce sont les statistiques de SFR que SFR publie.
Le 22/11/2018 à 17h46
#10
… comme Bouygues Telecom était sensée faire faillite en 2014 quand Free mobile lui taillait des croupières.
Le 22/11/2018 à 20h01
#11
Et un accueil très frais de ces résultats, près de -12% à la bourse (-11..88%), où l’action est passée très largement en dessous des deux euros, à 1.78 €.
Le 22/11/2018 à 22h11
#12
Bah ils vendent des forfaits RED à prix cassés. Ensuite ils essaient de te faire passer chez SFR au même prix pendant 1 an avec 1⁄2 option en plus. Et au bout d’un an, tu ne peux pas repasser de SFR à RED. Mais faut croire que ca marche ne pas si bien " />
En tous cas, cette année, j’ai payé que 6 mois mon abonnement SFR du coup… Maintenant faut que je vois comment faire dans un mois quand je vais passer de 10 à 30 " /> Et pour avoir un multi-SIM Orange/SFR, le réseau n’a plus grand chose à envier à Orange je trouve.
Je savais pas qu’il y avait une 4G+++ qui arrivait par contre -_-‘. Ca devient n’imp ces + de partout, c’est un peu comme les consos d’énergie, tu comprends plus rien.
Le 23/11/2018 à 08h20
#13
“Je savais pas qu’il y avait une 4G+++ qui arrivait par contre”
Agrégation de trois bandes probablement, 800, 1800 et 2600 MHz, pour les téléphones qui le supporte (catégorie 12, 18 ?).