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Monaco Extended, le virage numérique du Rocher

Grand prix de formule E-

Monaco Extended, le virage numérique du Rocher

Le 03 mai 2019 à 12h46

L'État ville étriqué sur une superficie riquiqui a décidé de passer à la vitesse supérieure sur le terrain du numérique. « Monaco Extended », nom de son programme, a été dévoilé en présence du Prince Albert II. Compte rendu.

Toutes les huiles de la principauté étaient conviées au Yacht Club monégasque ce mardi en fin de journée. Alors que des travaux herculéens se déroulaient à quelques mètres de là pour étirer sur la mer la superficie du micro État, le prince a ouvert le bal : « il est de ma responsabilité que cette transformation numérique se fasse dans un sens positif, conforme à nos valeurs, nos idéaux ».

Un sens positif ? Au-dessus de la couronne de S.A.S. trônent l’écologie, la confiance, la sécurité, « première des libertés ».  Et surtout la volonté de gonfler l’attractivité monégasque aux yeux du monde, un doigt enfoncé dans le digital.

« Notre taille, qui a pu sembler un handicap, est un atout ». La ville État compte ainsi profiter de ses faibles mensurations pour devenir un laboratoire du numérique en mettant de concert toutes les parties prenantes, entreprises, élus, administrations, et évidemment le gouvernement dont Frédéric Genta. Un ancien de Google, passé par Amazon et Orange, désormais en charge de la délégation à la transition numérique.

Mais que recèle le programme Monaco Extended ? Sur la scène du Yatch Club, devant le prince, plusieurs personnalités et entités se sont succédé pour évoquer leur activité, louer les charmes de cette ville et surtout l’importance de son virage numérique. 

De l'E- dans le gaz

Sur le volet des smart-cities, Thomas Battaglione, administrateur et directeur général de la Société Monégasque de l’Électricité et du Gaz (SMEG) a loué l’analyse des données. Monaco, micro pays d'une densité de plus de 18 000 habitants au kilomètre carré, est confronté à de multiples contraintes environnementales : le bruit, des travaux quasi perpétuels, une organisation des services de secours parfois complexe, etc.

La SMEG entend dupliquer l’ensemble des données générées depuis le territoire (construction, routes, arbres et autres végétations, etc.) aux fins de modélisation puis d’essais in vitro. « Par exemple sur la qualité de vie, nous sommes tous ici confrontés à des chantiers, des nuisances, une congestion du trafic » relate M. Battaglione. Les espoirs sont multiples, comme la mesure des impacts et conséquences de n’importe quel projet avant le premier coup de pelleteuse. « C’est un outil d’aide à la décision » assure l’intéressé.

smeg monaco
Crédits : Marc Rees (licence: CC by SA 3.0)

Le projet pourrait également profiter aux opérateurs télécoms. En connaissant la topographie des lieux et des bâtiments existants et à venir, l’entreprise aimerait pouvoir aider à aiguiser les taux de couverture. Mais pas seulement : « nous pouvons également simuler l’incidence d’un basculement des moyens de transport en véhicules électriques, ou regarder l’impact du passage d’un changement des éclairages d’une lampe à sodium à une LED ».

Cedric Biscay, CEO de Shibuya Productions, a également installé son entreprise florissante à Monaco. Il avait glané en 2016 six millions de dollars sur Kickstarter, en un temps record pour éditer son jeu Shenmue III. Et celui-ci de plaider pour son clocher, avec au menu 5G et sécurisation des données, « afin d’attirer nos partenaires et nous développer ».  

Une ICO visée par Monaco

Le réalisateur Luc Jacquet s’est félicité d’avoir pu bénéficier de la première ICO (Initial Coin Offering) visée par l’État monégasque pour réaliser son prochain documentaire. L’enjeu ? « Permettre aux créateurs de retrouver une indépendance et de l’audace ». Rien de moins. Le visa monégasque est en tout cas destiné à garantir la provenance des fonds et leurs usages, suite à cette levée de fonds virtuelle.

Luc Jacquet Albert 2 monaco
Crédits : Marc Rees (licence: CC by SA 3.0)

Pour justifier cette opération, le père de la Marche de l’Empereur estime que « l’industrie du cinéma est très malmenée par les nouveaux entrants, comme Netflix et les autres grandes plateformes. Aujourd’hui, pour faire du cinéma indépendant il faut trouver de nouvelles méthodes ». Ice Breaker, sa société de production, est évidemment installée sur le Rocher. La principauté promet elle-même d’investir « plusieurs millions dans le projet », selon Frédéric Genta.

Mettre plus de valeur ajoutée au mètre carré

Le délégué à la transition du numérique, équivalent à un secrétaire d’État, indique que l’État anticipe une dizaine de bourses virtuelles chaque année, avec emplois à la clef. Des ICO qui seraient en outre les plus sécurisées au monde. « En étant très prudents, nous aurons les bons investisseurs et les bonnes entreprises » table-t-il.

Dopée par ce besoin d’attractivité, la ligne générale du plan Extented est entendue : « on veut être l’endroit où le progrès se développe et se finance. Nous voulons attirer de nouvelles entreprises avec de nouveaux moyens ». Bref, « mettre plus de valeur ajoutée par mètre carré ».

Frederic Genta Monaco
Crédits : Marc Rees (licence: CC by SA 3.0)

C’est peu de le dire, le projet est protéiforme : outre ces ICO, les jeunes dès la maternelle jusqu’au collège bénéficieront d’une heure de programmation par semaine à compter de septembre 2019. La ville veut d’être le premier État au monde à accompagner ainsi les enfants et ados à la prise en main du numérique, avec l’espoir de trouver de nouveaux talents locaux. La mise en place d'un tel plan est facilité par la structure même de Monaco : 7 000 élèves seulement seront concernés à terme, bien loin des plus de 12 millions (primaire et secondaire) que compte la France par exemple.

Sur le volet administratif, dès juin 2019, l’ensemble des fonctionnaires et agents sera connecté. Le système de santé va être réformé pour rapprocher patients et soignants. Une plateforme de prise de rendez-vous, à l’image de Doctolib, sera mise en ligne à l’automne 2019. Les démarches seront dématérialisées cette fois à l’horizon 2022. Chaque personne, Monégasques et résidents, bénéficiera même d’une identité numérique. À la clef, téléservices, coffres-forts numériques, signature de documents à distance...

Véhicules autonomes, cloud souverain, e-administration, jumeau numérique...

Pour les transports, la ville expérimentera en juillet 2019 les premières navettes autonomes avec l’espoir de désengorger ses axes. Le long des routes, des abribus évidemment connectés profiteront aux passants.

Le représentant monégasque a également rappelé l’accord signé avec F-Secure et Monaco Télécom voilà quelques jours pour sécuriser l’ensemble des terminaux (cinq licences proposées gratuitement à tous les clients internet Ultra Haut Débit et LaBOX Mini ou Maxi).

Toujours au fil de cet inventaire, Monaco lancera fin 2019 son « cloud souverain » qui abritera l’ensemble des données locales et des OIV, opérateurs d’importance vitale. Pour prévenir les intempéries, les tremblements de terre, « la norme est qu’il faut 120 km entre deux data centers », explique Frédéric Genta.

Pour répondre à cette difficulté – l’État ne fait que 2 km² – Monaco va dupliquer ses précieuses données au Luxembourg. Une convention a été signée pour y créer une enclave composée d’un deuxième data center. « Une e-embassade », protégée par la Convention de Vienne, résume M. Genta. C’est un des leaders mondiaux du secteur qui sera chargé de gérer les infrastructures de ce « jumeau numérique ». Amazon ou Microsoft ? Le nom n’a été pour l’instant cité, le contrat n’étant pas encore tout à fait finalisé. 

Huawei ? Un « partenaire historique »

Le numérique à Monaco passera aussi par le déploiement de la 5G. Monaco Télécom a dévoilé son projet avec Huawei. L’équipementier fait l’objet régulièrement de vives critiques de la part des États-Unis, qui le soupçonne d’espionnage au profit de la Chine.

Questionné sur le sujet épidermique, Frédéric Genta nous répond que Huawei « est un partenaire historique de Monaco. Cela fait entre 7 et 9 ans qu’on travaille avec eux. Ils ont fait notre 3G, notre 4G, notre 4G+, notre 5G. C’est Monaco Télécom, possédé par Xavier Niel, qui a contractualisé avec Huawei pour qu’on soit le premier pays 5G au monde, évidemment avec la bénédiction du gouvernement princier, basé sur l’ancienneté de notre relation ».

« On créera un bastion autour de la 5G Huawei » poursuit-il, assurant que ce niveau de sécurité aurait été appliqué pour n'importe quel autre concurrent. Huawei, une entreprise comme les autres, en somme. 

L’effort financier d’Extented Monaco sera entre 35 et 40 millions d’euros chaque année au niveau du gouvernement (33 millions en 2019). Au sein de la délégation, plus de 120 personnes y sont concentrées. Mais la facture totale est bien plus lourde si on ajoute les interventions de la SMEG dans les projets 3D ou encore les investissements de Monaco Télécom.

Individuellement, ces déploiements ne sont pas exceptionnels. D'autres expériences dans le monde ont déjà sauté le pas (voir cette actualité de 2014 concernant les abribus connectés parisiens, l'ICO estonienne de 2017, la 5G en Corée du Sud, etc.) mais le point notable reste le calendrier de ce basculement, comme en témoigne cette frise 2018 - 2019.

calendrier monaco

Bref, Monaco tire tous azimuts sur le numérique et semble vouloir mettre en avant toutes les technologies qui font le buzz actuellement. C'est certes la première fois qu'un État saute le pas, mais c'est aussi l'un des plus petits au monde. Il est bien plus facile de déployer une armada technologique sur une superficie de 2 km² seulement, qu'à l’échelle d'un pays de plusieurs centaines de milliers de km². 

Cette armada technologique, en particulier le volet Smart Cities, aura nécessairement une composante liée à la sûreté. Quelles sont justement les velléités de ce micro-État bardé de caméras, connecté à la 5G, qui place la sécurité en tête des libertés ? Va-t-il suivre les pas de Saint-Étienne, Marseille, ou Nice ? Questionné, Frédéric Genta renvoie notre question dans les fonds marins : « C’est une priorité, nous avançons, mais c’est le seul sujet sur lequel nous ne communiquons pas ».

Commentaires (17)

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Et ben ! Monaco ça envoi ! Je veux bien devenir Monégasque! Ils ont entre guillemets pour eux leur superficie c’est vrai. Ceci étant dit on ne peut que reconnaître que leur plan est audacieux et en avance par rapport à ce qui se fait ailleurs. Nombres de villes pourraient s’en inspirer. Cela serait déjà un bon début avant de basculer sur une échelle nationale qui impose beaucoup plus de contraintes.

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J’imagine tellement Marc dans son élément là-bas <img data-src=" />

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oué enfin faible population + faible superficie + infinite money&nbsp;

ca aide à avoir de l’ambition&nbsp;

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peacebyacting a écrit :



leur plan est audacieux et en avance par rapport à ce qui se fait ailleurs





Pardon ? De mon point de vue c’est plutôt un best-of du bullsh#t digital de ce qui s’est justement fait ailleurs ces dernières années. Ils ont d’ailleurs cochés un paquet de cases, impressionnant !

Après, vu l’envergure restreinte du projet (à l’échelle du µ-état), et le pognon de dingue qu’ils peuvent y mettre, ça peut p’tet donner quelque chose … à leur échelle, toujours.


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Va y avoir des tours a la Singapor/Shenzhen



On devrait faire pareil avec la Corse imo, un potentiel de fou!

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Arkken et Typhon oui vous avez raison après j’attends quand même de voir ce que ça va donné je rejoins Naneday pour la Corse :)

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Un peu hors-sujet (quoique…) mais s’ils pouvaient aider à financer la ligne SNCF Cannes-Nice-Monaco dont la qualité est pire qu’épouvantable, ça aurait des conséquences très concrètes.

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“Pour répondre à cette difficulté – l’État ne fait que 2 km² – Monaco va dupliquer ses précieuses données au Luxembourg”

Oui évidement, entre ultra-riches on s’entraide ! Faudrait pas que des miettes de sous tombent dans la main des Français pauvres. Ils pouvaient pas ne serait-ce qu’imaginer faire un datacenter en France et arroser un peu quelques français avec leur argent sale…

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Ils le font déjà

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Je crois qu’on aurait du créer un bingo. Il manque juste certains termes tels que Chatbot ou AI et on était bon <img data-src=" />



Sérieusement, un cloud souverain géré par un GAFAM ? Sérieusement ?

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Ils n’ont aucun intérêt à trop faciliter l’accès chez eux, ils sont déjà en surpopulation au km² <img data-src=" />



(et puis faudrait pas que les indigents puissent venir trop facilement <img data-src=" />)

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vince120 a écrit :



Ils n’ont aucun intérêt à trop faciliter l’accès chez eux, ils sont déjà en surpopulation au km² <img data-src=" />



(et puis faudrait pas que les indigents puissent venir trop facilement <img data-src=" />)



Qu’ils viennent ne les dérange pas trop, surtout si c’est pour y dépenser du pognon.

C’est qu’ils y restent qui les gènent <img data-src=" />


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Monaco, c’est un Dysneyland pour riches. C’est aussi le paradis de la caméra et de la police, j’y vais assez souvent maintenant…



Bref, le rêve de tout bourgeois (au sens marxiste) car tout est fait pour les gens bossent et se cassent le soir, et les touristes viennent et dépensent leur argent.



Du coup, ça aide pour avoir des utopies comme celle-là. Et pendant ce temps, on parle pas de la destruction des fonds marins de la principauté.

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Pourquoi un GAFAM ?



Scaleway et Online ont le même actionnaire que Monaco Telecom.


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linkin623 a écrit :



Monaco, c’est un Dysneyland pour riches. C’est aussi le paradis de la caméra et de la police, j’y vais assez souvent maintenant…



Bref, le rêve de tout bourgeois (au sens marxiste) car tout est fait pour les gens bossent et se cassent le soir, et les touristes viennent et dépensent leur argent.





Marrant je liais plus leur situation à la mafia qu’à l’exploitation de travailleurs frontaliers. Les deux ne sont pas incompatibles…


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linkin623 a écrit :



Du coup, ça aide pour avoir des utopies comme celle-là. Et pendant ce temps, on parle pas de la destruction des fonds marins de la principauté.





Pourtant c’est un vieux sujet, Monaco s’en préoccupe.

Plus récemment :https://www.decouvertemondemarin.org/monaco-comment-gagner-du-terrain-sur-la-mer…







yvan a écrit :



Marrant je liais plus leur situation à la mafia qu’à l’exploitation de travailleurs frontaliers. Les deux ne sont pas incompatibles…





La mafia ?

Que ferait-elle à Monaco ?


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Copiner avec Caroline :)



Blanchir, cette question…

Monaco Extended, le virage numérique du Rocher

  • De l'E- dans le gaz

  • Une ICO visée par Monaco

  • Mettre plus de valeur ajoutée au mètre carré

  • Véhicules autonomes, cloud souverain, e-administration, jumeau numérique...

  • Huawei ? Un « partenaire historique »

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