France THD : l’Europe s’interroge sur d’éventuelles aides d’État à Orange
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Le 16 septembre 2015 à 09h00
7 min
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La Commission européenne n'a pas encore validé le plan France Très Haut Débit, qui doit permettre de fibrer 80 % de la population d'ici 2022. Sans cet aval, les projets publics sont en pleine insécurité juridique. En cause : la montée en débit sur le réseau cuivre, dont la subvention par l'État pourrait s'apparenter à une aide à Orange.
Le plan France Très Haut Débit (France THD) ne plaît pas encore à la Commission européenne. Lancé en 2013, il doit permettre à l'État de coordonner les déploiements de réseaux très haut débit dans le pays et de subventionner les projets de réseaux d'initiative publique (RIP) lancés par les collectivités, à hauteur de 3 milliards d'euros (voir notre analyse).
C'est l'un des piliers de la stratégie numérique du gouvernement dans la transformation numérique du pays. Pourtant, il n'a pas été adoubé par la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne, alors que la grande majorité des collectivités ont déposé leur candidature et que les réseaux publics commencent à sortir de terre.
57 millions d'euros débloqués sans validation de l'Europe
Pour être subventionnés, ces réseaux s'appuient sur le cahier des charges rédigé par le ministère de l'Économie. Il précise notamment les objectifs ainsi que les conditions techniques et commerciales à respecter pour être dans les clous fixés par le gouvernement. L'un des rôles de la mission Très Haut Débit (mission THD) qui pilote le projet, est de notifier ce document à la Commission européenne. En validant le cahier des charges, l'Europe assure du même coup que les dizaines de réseaux publics que commencent à lancer les collectivités (départements et régions) sont protégés juridiquement. Les RIP à venir seraient donc à la fois assurés par l'État et par l'Europe. Sans cela, les collectivités pourraient en être à leurs frais en cas d'attaque de leur projet.
Le ministère de l'Économie et la Commission européenne sont « en discussion de manière informelle depuis la rentrée 2013 sur la validation du plan », nous explique une personne proche des négociations. En deux ans, trois versions du cahier des charges se sont succédé. La dernière édition, datée de fin mai, facilite entre autres la concurrence sur la fibre pour les entreprises et la montée en débit sur cuivre, qui améliore les débits sur le réseau utilisé par l'ADSL, en attendant la fibre.
Aucune de ces trois versions du cahier des charges n'a eu la validation de la Commission, alors que la situation devient pressante pour la France, qui commence à engager l'argent promis aux collectivités. En 2014, 1,3 milliard d'euros ont été promis aux projets de réseaux publics. Fin 2015, le gouvernement compte attribuer 80 % de l'enveloppe de 3 milliards d'euros de subventions. Ces fonds seront débloqués une fois les travaux commencés.
Le premier projet à en bénéficier a été celui de l'Auvergne, en août, dont le réseau est construit par Orange. La région recevra ainsi 57 millions d'euros d'aides publiques ; cela sans la protection juridique européenne. La Fédération des industriels des réseaux d'initiative publique (FIRIP), s'est d'ailleurs émue à deux reprises de cette insécurité depuis le début de l'année, notamment à la deuxième conférence annuelle du plan. Les prochains accords de financements permettront le décaissement « sous réserve de validation européenne », a-t-on appris. Pour l'instant, « le robinet est toujours peu ouvert, les fonds du Grand Emprunt dorment chez Bercy », estime un spécialiste.
La montée en débit d'Orange pose question à la Commission
Contactée, la Commission européenne nous explique discuter avec les Français sur le sujet. Une source proche confirme l'absence de décision formelle. Côté Bercy, la mission THD n'a pas répondu à nos sollicitations. La Direction générale des entreprises (DGE), qui instruit le dossier, n'a pas souhaité répondre officiellement. Alors, pourquoi ce blocage ? Un tiers, au fait des discussions, évoque une incompréhension entre DGE et Commission européenne, qui ne seraient pas toujours sur la même longueur d'onde.
Concrètement, un point interroge particulièrement la Direction générale de la concurrence européenne : la solution de montée en débit d'Orange, l'offre « PRM », régulée par l'ARCEP. Selon nos informations, l'Europe cherche à savoir si la subvention de réseaux publics qui s'appuient sur l'offre PRM équivaudrait à des aides d'État pour l'opérateur historique. Le sujet aurait encore été discuté lors de la dernière réunion de la direction de la concurrence, mercredi dernier. Qu'elle passe par Orange ou non, la montée en débit concerne pour l'instant moins d'un million de lignes sur les 30 millions prévues.
« C'est un dispositif atypique en Europe. On parle ici de financer la montée en débit sur le réseau cuivre en ruralité, alors
que les financements concernent plutôt la fibre en zones urbaines chez nos voisins » nous affirme-t-on côté français. La Commission en serait encore au stade des questions. Depuis 2013, l'Europe et la France se renvoient questions et réponses sur des points plus ou moins techniques. Les Français amèneraient même des acteurs des réseaux publics aux réunions « pour mettre de l'huile dans les rouages » et défendre le dispositif, explique une personne proche des discussions.
Vers un nouveau cahier des charges ?
Dans les faits, la montée en débit consiste à tirer des fibres optiques jusqu'au sous-répartiteur le plus proche des habitations, pour finir le chemin sur le réseau cuivre d'Orange, souvent le seul disponible en zones rurales. Pour prévoir l'avenir (la fibre jusqu'à l'abonné, ou FTTH), des câbles de fibre optique supplémentaires peuvent être tirés. Deux points poseraient particulièrement question à l'Europe.
Le premier point concernerait donc ces fibres « surnuméraires », dont l'Europe souhaiterait qu'elles soient directement mises à disposition des autres opérateurs. Cela même si les autres opérateurs peuvent déjà venir proposer leurs offres. Le deuxième point concernerait les fibres directement utilisées par Orange : une fois un délai d'obligation réglementaire passé, la Commission souhaiterait qu'il soit bien précisé que les fibres reviennent à la collectivité, qui doit les louer à Orange comme à n'importe quel opérateur. Une demande qui serait déjà couverte par la jurisprudence française, selon des spécialistes.
Reste à savoir quelles seront les conséquences de ces interrogations européennes. Une source nous évoque une nouvelle version du cahier des charges du plan France THD, qui comblerait les manques identifiés par l'Europe. Après trois versions en plus de deux ans, Bercy pourrait donc accélérer la publication d'une révision, même si rien ne le confirme aujourd'hui. La dernière version avait d'ailleurs passé quelques mois entre les mains de Bercy avant sa publication. En attendant, la France a toujours besoin de cette validation européenne pour financer sans arrière-pensée les projets de réseaux publics des collectivités, que cela implique de simplement répondre aux questions de la Commission ou de revoir le cahier des charges.
France THD : l’Europe s’interroge sur d’éventuelles aides d’État à Orange
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57 millions d'euros débloqués sans validation de l'Europe
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La montée en débit d'Orange pose question à la Commission
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Vers un nouveau cahier des charges ?
Commentaires (11)
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Abonnez-vousLe 16/09/2015 à 09h11
mouais vu la lenteur à laquelle vont les choses de la part de l’europe je comprend mieux leur enquête d’opinion d’hier portant sur 2025
Le 16/09/2015 à 10h23
le VDSL en zones rurales est le “piège” de Orange pour garder la main sur le Très Haut Débit en France. Rien ne garantie que la fibre optique jusqu’au sous-répartiteur (FTTCab) se transformera un jour en fibre jusqu’au foyer et surtout dans quels délais ?
L’Union européenne devrait plutôt autoriser les RIP (Réseaux d’Initiative Publique) à investir les zones très denses lorsque les opérateurs nationaux ne respectent pas des délais de couverture de zones à couvrir (il suffirait d’ajouter un engagement de délai à la préemption des opérateurs de Droit privé sur les zones à couvrir).
Le 16/09/2015 à 10h30
Le 16/09/2015 à 10h57
Les opérateurs doivent signer des engagements formels avec les collectivités, qui ont le droit de déployer là où elles constatent une “carence”. Donc on se dirige déjà concrètement vers ça, si besoin. D’ailleurs, le président de l’AVICCA l’avait bien signalé (sous forme de menace) lors de la dernière conf du plan THD en juillet.
Le 16/09/2015 à 11h13
Mouais, si je prend ma région (Alsace), un vieux communiqué de presse (lors du lancement de la procédure de création de la DSP) :
Le 15 juillet dernier, le Premier Ministre a notifié l’aide de l’Etat à hauteur de 101,3 M€, avec un complément de 8,35 M€ « en cas de confirmation de la bonne articulation du réseau de collecte avec les réseaux des opérateurs privés ». L’aide de l’Etat est conditionnée à l’absence de déploiement fibre (FTTH) sur les communes disposant d’une offre de service fournie par un réseau câblé privé modernisé ou qui le sera d’ici trois ans.
Alors bon, désolé hein, mais l’incertitude Européenne …
D’ailleurs, pour Reguen, moi si je reprend mon CP, l’état dit plutôt à la région : “Si tu déploie à la place d’Orange, j’te file pas 8M€, gaffe copain !” :P
Le 16/09/2015 à 13h08
Ce que tu cites, c’est le principe pour les aides. Par contre, si derrière la collectivité constate que les opérateurs privés ne font pas leur job en zones denses, il y a carence, donc elle a théoriquement le droit d’aller les connecter elle-même. Mais le cas ne s’est pas encore présenté à ma connaissance.
Le 16/09/2015 à 15h20
J’ai du mal à voir le rapport entre le problème de la montée en débits des zones rurales, dont les fibres sont payées par les régions et Orange, et la mise en place de RIP en zone dense.
Le 16/09/2015 à 15h40
Orange s’occupe de tout ou partie d’une dizaine de RIP (construction et/ou exploitation) " />
Le 16/09/2015 à 16h35
Un RIP ne peut pas monter un réseau si un opérateur de Droit privé (généralement Orange ou Numericable-SFR) a annoncé son intérêt pour une zone du territoire : question de concurrence et de fonds publics qui sont 2 notions incompatibles, et question de favoriser la concurrence des infrastructures entre opérateurs de Droit privé.
Généralement un opérateur de Droit privé qui souhaite développer un réseau fibre dans la rue, commencera par les zones très denses (les plus rentables à court terme). Ce qui, de fait, interdit à un RIP de s’étendre dans les zones les plus rentables.
D’autre part, les opérateurs de Droit privé ont parfois tendance à ralentir ou bloquer la présence des RIP afin de les neutraliser car devenir exploitant d’un réseau tiers n’est pas le plus rentable pour eux. Comme Orange (le plus gros contributeur dans les zones rurales) ne peut pas se permettre de s’opposer frontalement aux élus locaux, l’opérateur agit parfois en défaut de ses engagements/promesses, en prétextant des problèmes de normes techniques, etc.
A ce sujet, lire d’autre articles de Next Inpact très éclairants sur la situation.
Le 17/09/2015 à 08h12
La situation ne s’est pas présentée car il faut attendre 5 ans après la signature de la convention de zone AMII pour constater la carence, non ?
En zone dense, je crois de toute façon que c’est complètement exclu. C’est en zone non dense (divisée en zones AMII et non-AMII) que la question se posera…. après 2020…
Le 17/09/2015 à 08h29
Honnêtement, je n’ai pas du tout le délai en tête. Je vérifierai ça, merci ! L’AVICCA parlait bien des zones où se sont engagés les opérateurs ceci dit (voir cette actu).