Une ribambelle d’organisations professionnelles du numérique s’inquiète vivement de plusieurs dispositions du projet de loi Lemaire sur la République numérique, en particulier celles contraignant à la localisation des données personnelles en Europe.
En première lecture, au Sénat, les parlementaires ont en effet adopté un article obligeant les acteurs à stocker les données personnelles des citoyens français dans l’un des États membres de l'Union européenne. Pour le groupe communiste, auteur de cette disposition, l’idée est « de s’assurer ainsi de l’applicabilité des dispositions législatives prises au niveau européen, en matière de protection des données personnelles ».
Un texte adopté à l'unanimité des suffrages exprimés
En séance, la sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin a souligné en particulier que ce texte était « conforté par les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne du 6 octobre 2015, qui a invalidé le mécanisme d’adéquation Safe Harbor permettant le transfert de données vers des entreprises adhérentes aux États-Unis ». Et pour cause, « cet accord très controversé a notamment été mis à mal par les révélations d’Edward Snowden sur les programmes de surveillance de masse de la NSA en 2013. »
Axelle Lemaire a vu au contraire un article n’apportant aucune « réponse adaptée à un problème très important ». Elle a demandé en particulier d’attendre la fin des négociations sur la suite du Safe Harbor. Raté : la disposition est passée à l’unanimité.
À huit jours de l’ultime étape parlementaire, celle de la commission mixte paritaire, différentes organisations professionnelles du numérique ont dénoncé ce mécanisme dans un communiqué commun (l’ASIC, France Digitale, le SFIB, Syntec Numérique et TECH IN France). Alors que le projet de loi visait notamment « à favoriser la circulation des données et du savoir », cet amendement porterait au contraire « atteinte à des principes fondamentaux du numérique, en particulier ceux qui garantissent un Internet libre, neutre, ouvert et propice à l’innovation ».
Réguler plutôt qu'enfermer
Toujours selon leur analyse, « le numérique est indifférent à la territorialité par définition. Imposer le lieu de stockage des données en Europe n’a donc pas de sens, ni en termes de technologie, ni de sécurité, ni encore de protection des citoyens ». En somme, « ce qui importe, c’est le régime juridique appliqué à ces données et à leur transfert et donc ce qui est actuellement en discussion entre l’Europe et les États-Unis au titre du Privacy Shield ».
Du coup, plutôt qu’un mur à frontières européennes, ils plaident, à l’instar de la secrétaire d’État, pour un meilleur encadrement des transferts hors Union, « quel que soit le lieu de stockage ». D'après eux, « la France ne doit pas se singulariser par une position réfractaire vis-à-vis du développement de l’économie numérique, en introduisant des barrières réglementaires spécifiques aux nouveaux usages qui voient le jour au sein de l’économie collaborative. Ce serait aller contre le sens de l’histoire et, à terme, contre la croissance et l’emploi. »
Le statut de la plateforme
Ils profitent d’ailleurs de l’occasion pour égratigner une nouvelle fois les différentes dispositions ajoutées au projet de loi sur le statut de l’hébergeur. « Demander aux plateformes de contrôler et d’agir de façon excessive sur contenu des utilisateurs qu’elles hébergent ou référencent, c’est prendre la responsabilité d’un Internet de moins en moins démocratique. Il va de soi que le point d’équilibre est difficile à trouver entre réglementation et liberté sur Internet, c’est pourquoi le législateur doit prendre le temps de l’analyse et de la concertation ».
Commentaires (13)
#1
On pourrait par exemple stocker les données chez GLI " />
#2
Qu’ils ne s’inquiètent pas, la NSA y aura toujours accès.
#3
Ça manque d’un lien vers le communiqué commun en question @Marc 🤓
EDIT :http://www.lasic.fr/wp-content/uploads/2016/06/CP-COMMUN-PJL-Nume%CC%81rique_La-…
#4
#5
Toujours selon leur analyse, « le numérique est indifférent à la territorialité par définition. Imposer le lieu de stockage des données en Europe n’a donc pas de sens, ni en termes de technologie, ni de sécurité, ni encore de protection des citoyens ».
C’est beau la fausse naïveté :larmaloeil:
Si le numérique est indifférent à la territorialité dans sa partie dématérialisée, il n’est est pas de même pour sa partie matériel: Internet ce n’est pas uniquement de l’Ether, cela nécessite des locaux, des serveurs, de l’énergie et des emplois… Alors balayer toutes ces questions économiques d’un simple revers de main au profit d’une
« atteinte à des principes fondamentaux du numérique, en particulier ceux qui garantissent un Internet libre, neutre, ouvert et propice à l’innovation ».
c’est digne du discours d’un politicien…
#6
Pour une fois qu’un amendement passe a l’unanimité et n’est pas dénué d’intérêt, faut marqué ça d’une pierre blanche !
#7
Pour le groupe communiste, auteur de cette disposition…
de fervents défenseurs des libertés individuelles
" />
#8
#9
Perso, cela ne m’insuiète pas, au contraire, c’est même un argument en faveur de la société si elle stocke ses données en Europe (pas nécessairement en France).
#10
Encore un coup des ayants droits, si les données sont stockés en europe, elles sont soumises au racket de la RCP donc c’est tout bénéf pour les AD. (me parler pas du remboursement des pros, c’est juste une blague)
Je dit ça sur le ton de l’humour mais je pense qu’il en serait bien capable O_o
#11
#12
imposer le lieu de stockage des données en Europe n’a donc pas de sens, ni en termes de technologie, ni de sécurité, ni encore de protection des citoyens
Juridiquement par contre ça à l’air d’avoir un intérêt vu ce qu’il c’est passé avec microsoft et certaines données stocké en Irlande. Une société qui stock des données dans l’UE est sous juridiction de l’union, il est évident que ces données sont accessible du monde entier mais la société en question aura tout de même des comptes à rendre ce qui n’est pas le cas quand tout ça est stocké de l’autre côté de l’Atlantique. Est-ce-que je me trompe ?
#13