[Rediffusion du Mag #4] J’ai intégré Next INpact en 2004 alors que rien ne m’y prédestinait, même si j’ai été plongé très tôt dans la culture informatique.
Je suis né en 1980 à Avignon. Un pur enfant de ces années, avec tout ce que cela suppose aujourd’hui. J’ai eu 20 ans en l’an 2000 et je suis un grand fan de retrowave et synthwave, même si mon dernier concert était celui de Joe Hisaishi à Bordeaux (geek un jour, geek toujours !).
Très jeune déjà, les ordinateurs
Ma scolarité a d’abord été classique : une école élémentaire où tout le monde se connaissait, un collège où tout le monde s’ignorait, un lycée avec d’excellentes rencontres. C’est vers la fin du collège que les « choses sérieuses » ont commencé.
J’avais grandi en regardant mon père développer un tableur en BASIC sur son ZX-80, pour ses propres besoins en comptabilité, et j’avais hérité d’un ancien PC Amstrad 1640 quand j’avais 11 ans. Entre-temps, j’avais rencontré des gens de mon âge passionnés par l’informatique, même si cette passion était surtout centrée sur le jeu.
C’est à 12 ans par exemple que je rencontrais Philippe au collège, mon plus vieil ami aujourd’hui. C’était la grande époque de Warcraft 2, nous passions notre temps à formater nos machines et à tout réinstaller à la suite de tests.
Soirée typique : branchement de tout le bazar, utilisation d’ARJ pour que l’un de nous crée des archives de 1,44 Mo depuis le dossier Warcraft. Il fallait huit ou neuf échanges de disquette pour copier les archives, qu’il fallait décompresser. On pouvait alors jouer, mais c’était presque moins intéressant que les bidouilles et les tâtonnements pour arriver à ce que l’on voulait. Et pas question d’Internet à cette époque.
Je me souviens également comment un ami avait tenté l’aventure de Windows 95, qui s’était finalement bien déroulée. Il s’était acheté dans la foulée une S3 Virge 3D intégrant la quantité faramineuse de 4 Mo de mémoire. Nous avions été impressionnés par la différence de performances dans Descent, qui était sorti quelques mois plus tôt.
Des LAN, de la bière, du coaxial et du matos
Puis vinrent les LAN. C’était bien avant qu’Internet permette de se rejoindre dans des jeux de manière stable. On se réunissait chez l’un ou l’autre avec notre PC, quelques affaires et de la nourriture saine : chips, pizzas, Coca, bonbons, puis avec le temps la bière et de la fumée qui faisait plus ou moins rire. La pauvre maison se retrouvait prise d’assaut et tournait vite à la cour des miracles.
Pendant longtemps, il a fallu faire attention à la manière dont on se plaçait, car nous n’utilisions pas encore de hub en 1995. Tout était en coaxial (10base2-BNC), bien moins cher pour les pauvres adolescents que nous étions. Il arrivait fréquemment que l’on se retrouve en rade des fameux bouchons, nécessaires aux deux extrémités de la chaine de machines.
À cette époque, j’avais un PC plus que moyen, basé sur un DX2-66. Dans l’un de ces rendez-vous, nous voulions jouer à Diablo, qui venait de sortir et provoquait chez nous une frénésie. Ma configuration était trop juste pour jouer dans de bonnes conditions. Elle avait été désossée et complétée par des composants plus puissants, surtout un DX4-100 et deux barrettes de 4 Mo de RAM, pour un total de 16 Mo. Mon PC n’était plus qu’un tas de composants posés sur la table.
C’est également au cours d’un de ces LAN que je m’étais retrouvé un peu par hasard à assister aux dernières heures de Final Fantasy VII, en cherchant où tout le monde était passé. On s’est retrouvés serrés dans une chambre à assister – sur grand écran ! – à la descente dans le cratère, l’augmentation rapide des matérias grâce aux fameuses petites boules rouges dans le marais, puis l’enchainement des combats contre Jenova et Sephiroth… puis à nouveau Sephiroth. Découvrir ce combat final en étant avec une dizaine d’amis, tous avec les yeux écarquillés – « mais… il détruit le système solaire DEUX FOIS ? » – était toute une expérience. Elle avait détrôné la découverte de Puritas et sa musique ensorcelante (Still of the Night, au cas où) dans Secret of Mana quelques années plus tôt. Je ne sais pas si j’ai précisé que j’étais un geek.
Petit geek devient administrateur réseau
La voie scientifique m’intéressait depuis longtemps. J’avais grandi en regardant mon père développer en BASIC sur un ZX-80, j’étais abonné à Science & Vie Junior, je collectionnais les roches et cristaux, les timbres. Oui, j’avais aussi les lunettes.
Tout ça s’est traduit par un bac S. Circonstance aggravante, il était option Maths. J’ai enchainé avec un BTS Informatique, administration des réseaux. En alternance, je travaillais trois jours par semaine et étudiais les deux restants.
La première année s’est malheureusement mal passée. J’avais été embauché dans un Leclerc près d’Avignon, et la description du poste était quelque peu mensongère. Je ne me suis pas occupé de réseau, car j’avais été engagé… pour saisir les prix des produits dans une base de données. Je n’ai strictement rien appris, au point que l’école (l’IFP de Nîmes) avait dû appeler l’entreprise pour demander des explications, ce qui n’avait rien changé.
Le rythme est devenu beaucoup plus effréné et complexe la deuxième année, quand je suis entré dans une clinique privée pour prendre en charge leur parc vieillissant. Un projet idéal pour le rapport de fin d’année : l’ancien parc sous Windows 95 et 98 avait transité vers Windows 2000. La découverte de la première version d’Active Directory est encore (douloureusement) vive.
C’est également à ce moment que l’avertissement qui nous avait été fait en début de première année s’était pleinement vérifié : en cas d’emploi intéressant, attention à ne pas négliger les cours. Mais quand on est porté par un projet de migration à plus d’un million d’euros (le vieil AS/400 de la compta devait également être changé), les travaux scolaires ont mystérieusement tendance à s’effacer. Je continuais malgré tout à bien m’en sortir.
L’examen en lui-même a quand même réservé son lot de surprises. Les sujets n’étaient pas plus complexes que les BTS blancs réalisés en deuxième année, d’autant que beaucoup de nos professeurs étaient correcteurs à l’examen. Le pire fut le moment du mini-projet technique.
Parmi un lot de six est tiré au sort le plus simple : monter un serveur DHCP. Un ami m’avait prêté son ordinateur, qui allait servir de client pour ma machine, sous Windows 2000 Server. Sachant que l’épreuve durait 20 min, il a fallu que je meuble en expliquant le fonctionnement et tout le volet théorique, car il ne faut pas 20 min pour mettre en place un DHCP et prouver son fonctionnement. Mais en arrivant à la fin des manipulations, catastrophe : le serveur plante et je me retrouve avec un bel écran bleu (ça ne s’invente pas). L’examinateur me prévient : « Vous connaissez très bien votre sujet, mais puisque la démonstration n’a pas pu être finie, vous aurez un petit malus ». 5/20.
Incursion dans la restauration (pas celle des données)
Après le BTS, je suis resté un temps dans la clinique pour finaliser les projets en cours. Après quoi, ce fut la période creuse. La bulle Internet avait éclaté, le travail se faisait tout à coup beaucoup plus rare, particulièrement à Avignon et alentours. Petit intermède : on dit bien « à Avignon » et pas « en Avignon », l’expression n’avait cours que lorsque l’on parlait d’Avignon comme un pays, avant la Révolution française.
J’ai été un moment au chômage, avant de basculer dans la restauration. Une période difficile, mais intéressante, notamment parce que je travaillais dans le Palais des Papes et l’Espace Jeanne Laurent, une reconversion de l’ancien réservoir d’eau du Palais. Grande époque, où il fallait notamment mémoriser les « passages secrets » de cet immense édifice.
2001, premiers écrits pour INpact Hardware... et Écosse !
C’est aussi à cette époque, en 2001 et 2002, que j’ai commencé à écrire pour ce qui était à l’époque INpact Hardware, après une simple prise de contact avec Christophe, alias Teuf. Un site de passionnés pour lequel j’ai rédigé des articles parlant surtout de logiciels et de systèmes d’exploitation. Il n’était bien sûr pas question de salaire : il n’y avait pas encore d’entreprise derrière et nous le faisions sur notre temps libre, par plaisir.
En 2003, changement soudain. Un ami me propose de l’accompagner, avec un autre, à Edinburgh. Il y avait déjà passé deux ans et souhaitait y aller une année supplémentaire. J’ai sauté sur l’occasion. L’année fut pleine d’aventures, entre l’immersion dans la culture écossaise, la découverte d’une ville où il fait très bon vivre, la galère pour se nourrir correctement (les Écossais ont tendance à tout passer à la friteuse) et une inscription dans une boite d’intérim qui me fera surtout faire du nettoyage.
Mention spéciale au premier travail, pour une société de logistique dans le grand hôpital qui venait alors d’ouvrir à Edinburgh. Les tâches ont été très variées en trois mois, mais une sortait nettement du lot. Durant une nuit (nous faisions les trois 8), mon manager m’appelle sur le talkie-walkie et m’annonce quelque chose. À travers le terrible accent écossais, je ne comprends que « white card » (carte blanche). Je me suis retrouvé à transporter un corps vers la morgue, la fameuse carte blanche étant collée sur les draps repliés sur la personne, pour indiquer le nom du patient et autres informations. Après ça, j’étais sorti fumer quatre cigarettes. C’était effectivement l’une des attributions du poste, et j’ai renouvelé l’expérience à plusieurs reprises.
Retour en France et premier contrat chez Next INpact
En rentrant en juin 2004, je cherche à nouveau du travail. La situation n’a que peu évolué et je loge chez mes parents. Au bout de plusieurs semaines, mon père me demande tout à coup : « Et pourquoi pas l’armée ? ». L’idée me fait rire, puis je me mets à l’envisager sérieusement. Un coup d’œil au site de l’Armée de Terre me confirme qu’ils proposent pratiquement tous les corps de métier en informatique, particulièrement en réseau.
C’est au moment où je commençais à préparer le dossier que je me suis souvenu d’INpact Hardware, devenu entre-temps Next INpact. Pour occuper mes journées, je recontacte Teuf, désormais patron de la structure. Il est content que je lui propose d’écrire à nouveau. Pendant trois jours, je ne fais que ça. À la fin de la troisième journée, il m’appelle et me fait remarquer que je n’ai pas demandé d’argent. Je réponds que la question ne s’était jamais posée jusque-là. Mais le contexte a changé : « On est une entreprise maintenant, et si ça te tente, je t’engage ».
Patatras ! Je n’avais pas pensé à cette activité comme autre chose qu’une passion. L’idée d’en faire mon métier était à la fois grisante et perturbante : cette passion pouvait-elle continuer à respirer une fois prise dans le corset des obligations ? Après quelques jours de réflexion, je proposais un test : un CDD de trois mois, pour vérifier que l'activité me plaisait – et accessoirement pour Christophe que je convenais.
Cette première période, perdue dans les limbes de la fin 2004, s’est très bien déroulée. Nous avons décidé d’en faire une deuxième, « pour être sûr », qui s’est aussi bien passée que la première fois. Je ne savais pas vraiment si j’étais « fait pour ça », mais je m’y sentais indéniablement bien.
Comme une évidence
Je fais partie de ces nombreuses personnes chez Next INpact à avoir appris leur métier sur le tas. J’ai toujours eu un bon niveau en français, je ne faisais pas ou peu de fautes, et le style journalistique s’est imposé comme une évidence : aller à l’essentiel, sans circonlocutions, avec le moins de mots possible. C’est même devenu un mantra l’année suivante quand Marc nous a rejoints : « Relis-toi, encore et encore. Tant que tu peux enlever des mots, c’est que ce n’est pas parfait ».
J’ai surtout été très à l’aise dans la philosophie véhiculée par Next INpact : prendre le temps de digérer une information, la creuser, ne pas s’emballer, ce qui en soi nous démarquait de nombreux sites concurrents et constituait pourtant la base du journalisme. Ce courant s’est encore affirmé dans les années suivantes, nous poussant toujours plus avant vers une professionnalisation qui n’allait plus nous quitter.
Je suis devenu il y a quelques années le secrétaire de rédaction et j’ai la main sur une partie des corrections. Beaucoup me connaissent d’ailleurs via email, puisque je réponds aux lecteurs ayant la gentillesse de nous signaler des fautes (moins en ce moment, à cause d’un changement technique qui sera très bientôt réparé). Je les en remercie encore, car ces signalements nous aident à augmenter la qualité du site, même si certains me remplissent de honte quand je constate que des horreurs ont été publiées.
D’autres me connaissent pour mes « interventions » dans les commentaires. J’ai longtemps été surnommé « la sword » car on se tournait volontiers vers moi quand la situation dérapait et qu’il fallait donner la chasse aux trolls. Aujourd’hui, la modération est à nouveau un travail d’équipe et un thème sur lequel nous échangeons régulièrement.
J’entame ma vingtième année dans cette entreprise, qui a connu au cours des quelques derniers mois plus de changements qu’au cours de la dernière décennie.
C’est peu dire que le rachat par Moji est un bousculement complet. L’arrivée (providentielle) de Ferdinand nous permet désormais de repartir du bon pied, avec des réunions fréquentes, de nombreuses idées, une motivation renouvelée et un nouveau site qui va connaître au cours des prochains mois toute une série d’évolutions. Alors que j’entame ma vingtième année dans la structure, renommée Next, et avec toute l’affection que je porte au chemin parcouru ensemble, c’est encore un nouveau départ !
Avec Sébastien, Jean-Marc, Martin, Mathilde et Flock, nous n’avons pas fini de vous informer :)
Commentaires (30)
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Sanctionner un élève pour un plantage de Windows...
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Ô que c'est joliment dit ❤
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Content que la motivation soit là à nouveau ! Quand je vois Vincent à la rédaction, je sais que j'ai pas mal de chances de passer un moment de lecture intéressant, souvent bon ! 👍
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Et depuis ce jour maudit, Windows disparut et il vécut heureux avec Linux et eurent beaucoup de PC... !
Merci Vincent de t'être escrimé (puf, puf) à l'exercice de l'autoportrait à ton tour. Très heureux d'en savoir plus sur toi, vu que je lis toujours tes articles en priorité en raison des sujets que tu abordes. À bientôt !
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PC Inpact, Next INpact et Next ont toujours été une référence pour moi. Par exemple, depuis toujours, quand je souhaite vérifier une information et que je la trouve ici, j'ai confiance et je n'ai JAMAIS été déçu !
Merci à toi, merci à Teuf, à toute l'équipe et à Ferdinand aujourd'hui !
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Naïvement, je n'avais à l'époque pas rapprocher la sword et le journaliste, il faut dire que je n'avais jamais été confronté à l'implacable couperet.
L'article sur ton parcours est enrichissante, elle me rappelle mes jeunes années, le BNC, les bouchons, les Hub, 10 puis 100 puis les switchs 10/100 puis ... que de bons souvenirs de vieux
Belle continuation à toi chez Next :)
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Je déduis d'un commentaire lu ailleurs (ne me demandez pas où, je rattrape du retard de lecture !) que ces signalements seraient les seuls où il est autorisé de citer l'Académie Française sur ce site...?
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Et il y aura toujours des réponses aux mails d'erreurs, vous nous rendez service en signalant les problèmes, c'est la moindre des choses de vous en remercier
(oui t'as vu, je prends mon temps pour répondre huhuhu)
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(à la prochaine réponse je propose qu'on se souhaite un joyeux Noël )