La taxe YouTube ou Dailymotion sur l’échafaud du Sénat
L'ARP et la SACD en deuil
Le 14 décembre 2016 à 15h40
4 min
Droit
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La commission des finances plaide pour la suppression pure et simple de la Taxe YouTube ou Dailymotion. Non sans expliquer pourquoi dans le cadre des discussions autour du projet de loi de finances rectificatives pour 2016.
Cette taxe sur la publicité des vidéos gratuites et sur les abonnements sur les sites de vidéo à la demande a été adoptée par les députés le 6 décembre dernier. La ponction, plébiscitée par le CNC qui en touchera les fruits, est évidemment étrillée par les services concernés, mais saluées par les sociétés de gestion collective.
Côté SACD, c’est la satisfaction : ce dispositif « répond à un enjeu capital : moderniser le financement de la création audiovisuelle et cinématographique et renforcer le soutien aux créateurs du numérique et aux YouTubers tout en assurant une stricte égalité entre des services et des plateformes qui ont pour activité de distribuer et de mettre à disposition des œuvres audiovisuelles et cinématographiques ».
Même son de cloche à l’Arp, la société civile des auteurs réalisateurs et producteurs : « L’inscription dans la loi de ce principe vertueux, selon lequel tous ceux qui profitent de la création doivent contribuer à son financement, représente une avancée fondamentale en faveur de la création. Elle affirme aussi l’objectif d’une équité fiscale et d’une responsabilité partagée entre plateformes payantes et gratuites ».
L’Asic, association des services internet communautaire dans laquelle on retrouve YouTube, Dailymotion, Facebook et bien d’autres, a publié ce 12 décembre un nouveau communiqué. Selon elle, au contraire, « aucun Youtubeur ou MotionMaker n’est en mesure de bénéficier d’un quelconque centime d’euro de la part du CNC pour ses courtes vidéos diffusées exclusivement sur le réseau Internet ».
Elle aurait ainsi aimé que « les parlementaires adoptent une mesure fléchant 30% de l’ensemble des aides octroyées par le CNC au bénéfice des créateurs présents uniquement sur des plates-formes en ligne ». Elle résume son coup de griffe par ce graphique :
Au Sénat, cette disposition a subi des critiques similaires. « Quatre raisons fondamentales » ont été identifiées hier par la Commission des finances pour justifier sa suppression.
Des problèmes de territorialité, un visa pour la délocalisation
D’un, la question de la territorialité. « Si la taxe est en principe due par toutes plateformes françaises et étrangères, l’administration fiscale française aura en pratique les plus grandes difficultés à recouvrer celle-ci auprès des grandes plateformes étrangères, qui représentent environ 90 % du marché ». En ciblant des acteurs étrangers, Google pour ne pas le citer, la taxe va surtout peser sur Dailymotion. Le tout pour un rendement faible, un million d’euros, expurgé au prix de recouvrements parfois complexes.
De deux, cette disposition pourrait créer un risque de délocalisation notamment en dehors des frontières européennes.
Une assiette complexe, un approche sectorielle contestée
De trois, l’assiette est difficile à établir. Le texte prévoit par exemple un abattement de 66 % pour les pubs engrangées sur les vidéos amateurs. Mais quand est-ce que ce critère est opérationnel ? « Qu’en est-il, par exemple, des vidéos amateurs totalisant des centaines de milliers de vues, telles que celles des Youtubers ? » Amateur, Pro ?
De quatre enfin, une approche sectorielle est jugée contestable. Pour résoudre le problème de la fiscalité des géants du net, est-il judicieux de prévoir une nouvelle taxe, contraire aux engagements de la majorité ? Faut-il faire le choix d’une taxe affectée, taillée pour les seuls intérêts défendus par le CNC ? Le Centre est d‘ailleurs « l’opérateur de l’État qui perçoit les plus importantes ressources fiscales affectées » (666 millions d’euros en 2016). Dans l’esprit de la commission, « aborder la question de l’évasion fiscale des géants du numérique par le prisme du financement de la création » est tout sauf opportun puisqu’ « il s’agit d’un problème plus global ».
Le texte sera bientôt débattu en séance. En cas d'échec de la commission mixte paritaire, les députés auront le dernier mot.
La taxe YouTube ou Dailymotion sur l’échafaud du Sénat
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Des problèmes de territorialité, un visa pour la délocalisation
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Une assiette complexe, un approche sectorielle contestée
Commentaires (18)
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Abonnez-vousLe 14/12/2016 à 17h16
Y’aura une taxe sur les publicités des sites de streaming illégal (bah oui les vidéos sont gratuites) ? " />
Le 14/12/2016 à 18h02
après qui veux gagnée des millions , qui veux tous taxer
Le 14/12/2016 à 19h24
C’est pas pour financer les ayant droits qu’il faut taxer la pub. Il faut taxer la pub en tant que nuisance et parasite de l’activité économique. Au point où on en est arrivés, la pub pompe trop de ressources pour un rendement effectif plus que discutable.
Le 14/12/2016 à 21h39
Si il y a autant de pub, c’est qu’ils trouvent leurs comptes…(budget marketing est compris dans le prix, qui paye? devine)
Le 15/12/2016 à 05h03
Tout le monde. La pub est une taxe privée qui sert à payer grassement des pseudo-créatifs spécialisés dans la manipulation mentale, avec le prétexte de financer quelques services au passage. L’enrichissement phénoménal de gens dont le train de vie est payé par la pub devrait nous scandaliser autant que les affaires de détournement de fonds publics, car dans les deux cas c’est nous qui payons. La publicité est un racket déguisé.
Le 15/12/2016 à 08h41
En quoi le fait de visionner une pub nous coûte de l’argent et en quoi quelqu’un payé par la pub devrait nous scandaliser ?
Je comprend rien à ton raisonnement.
Le 15/12/2016 à 08h57
Ce n’est pas regarder de la pub qui coûte de l’argent, c’est acheter quelque chose pour lequel on a fait de la pub qui en coûte.
Le 15/12/2016 à 09h24
Le visionnage ne te coûte rien à toi directement.
En revanche, les clients qui achètent le produit de l’annonceur payent lors de chaque achat une petite partie de la pub que tu regardes / subis.
Toi-même, tu finances indirectement certaines pubs, selon ce que tu achètes. C’est une deuxième taxe. Il y a la TVA prélevée par l’état, et il y a la taxe pub prélevée par l’annonceur.
Cette taxe indolore, cumulée, semble capable de générer des millions.
On justifie par exemple les revenus indécents des sportifs professionnels par le nombre de spectateurs, c’est-à-dire de cibles des pubs, et on explique que l’industrie de la pub peut payer ces sommes astronomiques. Au bout de la chaîne, c’est NOUS qui payons. C’est toujours nous qui payons. Les salaires mirobolants des stars issus des pubs sont scandaleux, pas seulement d’un point de vue moral, pas seulement parce que certains fraudent le fisc, ils sont scandaleux par principe. C’est structurel. On prend un petit peu à beaucoup de pauvres pour financer des super-riches ET nous polluer avec des pubs partout. C’est hallucinant d’absurdité, mais on l’accepte parce qu’on baigne dedans.
Réfléchissons.
Le 15/12/2016 à 09h30
La publicité, c’est le consommateur qui la paie chez son commerçant. Comme disait Bruno Masure, le téléspectateur de TF1 paie les émissions qu’il regarde quand il va acheter ses yaourts au supermarché.
Sachant que la publicité est le nerd de la guerre pour TF1 (et pour YouTube et Dailymotion également), les programmes qui y sont diffusés sont au service de la publicité (le summum étant les programmes courts entre 20h30 et 21h qui ne servent qu’à diffuser autant de spots publicitaires et autres contenus sponsorisés supplémentaires. Le téléspectateur n’est donc qu’un consommateur influençable au lieu d’être un téléspectateur actif et éveillé.
Le 15/12/2016 à 09h56
Le 15/12/2016 à 10h03
Le 15/12/2016 à 10h39
Ce serait plus que très intéressant, ça devrait être obligatoire sur les produits.
De même qu’on sait que la TVA pèse 20% du prix, il faudrait obliger les entreprises à afficher la part du budget publicité / mercatique sur le prix du produit. C’est légitime pour le consommateur de savoir quelle part va vraiment payer le produit et quelle part en paye la promotion. Selon le poids de la pub, on comprend mieux où vont les ressources : qualité du produit ou publicité ?
Bref, tout ça pour dire que les contenus financés par la pub ne sont pas gratuits, ils sont payés en différé, et pas forcément par celui qui accède à ces contenus.
Le 14/12/2016 à 15h46
« L’inscription dans la loi de ce principe vertueux, selon lequel tous ceux qui profitent de la création doivent contribuer à son financement, représente une avancée fondamentale en faveur de la création[…] ».C’est pour ça que les films pr0n sont super taxés alors que le CNC n’y contribue quasiment pas ?pfff…
Le 14/12/2016 à 15h46
Les AD savent cultivés la Dîme mieux que les religieux de l’ancienne époque. " />
Le 14/12/2016 à 16h22
Tous ceux qui profitent de la création doivent contribuer à son financement, hein?
Quid des AD?
Le 14/12/2016 à 16h33
Le 14/12/2016 à 17h02
YouTube contribue infinement plus que le CNC à la création hors du microcosme Cinéma / tv français bobo.
je propose donc une taxe sur le cnc pour alimenter les Asic
Le 14/12/2016 à 17h05
Et c’est bien dommage, il participe à un secteur solide et en pleine croissance. " />