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Bercy desserre les liens entre contrefaçon et terrorisme

Les suites du rapport de l'Unifab

Bercy desserre les liens entre contrefaçon et terrorisme

Le 08 mars 2017 à 08h10

À l’occasion de l’examen de récents textes, plusieurs élus ont souhaité accentuer la répression de la contrefaçon, accusant celle-ci d’être source de financement du terrorisme. Une réforme jugée très inopportune par l’exécutif.

Dans le cadre du projet de loi sur la justice du XXIe siècle, des députés avaient essayé de faire entrer le délit de contrefaçon en bande organisée « dans la liste des infractions susceptibles d’être commises en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ». Cette inclusion, certes rejetée, aurait eu pour effet de permettre de déployer des moyens nettement plus conséquents pour poursuivre les contrefacteurs.

Un autre amendement avait porté pour projet de punir cette bande organisée d’une peine de 30 ans de prison. Avec le motif suivant claironné par le député Hetzel : « La contrefaçon est utilisée aujourd’hui par les réseaux terroristes. La législation actuelle est peu dissuasive. Quand on regarde de près, les peines qui existent sont rarement appliquées ».

Une source d'inspiration unique

À chaque fois, des liens furent ainsi tissés entre contrefaçon et financement du terrorisme. Pas de surprise, la source d’inspiration de ces poussées parlementaires fut unique : l’Union des fabricants, un organisme où on retrouve Peugeot Citroën, Lacoste, Disney, Microsoft, LVMH, Orange, Nike, Vivendi, l’Association pour la lutte contre la piraterie audiovisuelle, la Société civile des producteurs de phonogrammes, etc.

Dans un rapport remis à Bercy début 2016, l’Unifab avait dénoncé un tel lien incestueux, citant en exemple ces 8 000 euros envoyés par l’un des frères Kouachi en Chine grâce à un commerce de chaussures de contrefaçon. Ou encore le fait qu’« Ibrahim et Salah Abdeslam résidaient dans la commune belge de Molenbeek réputée pour son contexte socio-sécuritaire particulièrement précaire », or, « Molenbeek est (...) le théâtre de nombreuses saisies de contrefaçons depuis quelques années », etc.

En juin 2016, un député était revenu lui aussi à la charge, rapport de l’Unifab sous le bras. Selon Jean-Michel Villaumé (PS), « le groupe État islamique recourt aux divers modes de financement et la contrefaçon notamment de vêtements, est une source de revenus non négligeable. Cette situation a été entre autres largement évoquée par la presse (L'Express, Le Point, Le Figaro, L'Obs) à l'occasion des attentats de 2015 ». Il a donc demandé au ministère du Budget et des comptes publics les mesures qu’il entendait prendre « notamment pour accroître l'arsenal pénal visant la répression de la contrefaçon, afin de lutter contre cette situation ».

Il existe d'autres sources de financement, selon Bercy

La réponse apportée par Bercy est à savourer. Elle réduit en poudre ces affirmations. D’un, avance Christian Eckert, le rapport de l’UNIFAB « est une étude basée sur des sources ouvertes ». Ce qui n’est peut-être pas suffisant pour bétonner une législation pénale.

Celui-ci ne s’arrête pas là : selon lui, « la connaissance du phénomène laisse à penser que les terroristes ont recours à un éventail de sources de financement (prêt à la consommation, revenus de trafics dont la contrefaçon, revente de biens personnels, …) y compris à un financement externe ». Plus globalement, « toutes les activités criminelles et tous les trafics (...) peuvent potentiellement financer le prosélytisme radical voire la mouvance terroriste ». En creux, il est trop simpliste de se focaliser sur la contrefaçon.

Et le dispositif de sanctions aussi complet que sévère

Enfin, le quantum des peines en vigueur est tout sauf neutre. En cas de contrefaçon en bande organisée, « la peine d'emprisonnement prévue par l'article 414 du code des douanes passe de 3 ans à 10 ans [d’emprisonnement] et l'amende (...) de 1 à 2 fois à jusqu'à 10 fois la valeur de l'objet de fraude ». Dans le Code de la propriété intellectuelle, même rigueur : « La loi a porté à 7 ans la peine d'emprisonnement et à 750 000 € l'amende prévue en cas d'atteinte à un droit de propriété intellectuelle » lorsque les faits sont commis là encore en bande organisée.

Ceci dit, le ministère considère le dispositif de sanctions de la contrefaçon comme « complet puisqu'il prévoit à la fois des peines d'emprisonnement et des peines d'amende ». Le cas d’une saisie de 6 415 sacs à main de contrefaçon valorisés à 30 millions d’euros est cité en exemple. Dans une telle situation, « la peine encourue pour cette infraction commise en bande organisée serait de 300 millions d'euros ».

Le dispositif n'est donc pas seulement complet, il est aussi « sévère », d’autant que d’autres dispositions permettent aux douanes d’intercepter des marchandises, notamment avec la collaboration contrainte des entreprises de fret. Bref, quoi qu’en disent les parlementaires fans de l’UNIFAB, « l'arsenal réglementaire est donc complet et permet de lutter efficacement contre la contrefaçon ».

Commentaires (30)

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Les mêmes entreprises qui sont les premières à collaborer avec les Nazi ou à vendre n’importe quoi à n’importe quel dictateur comme le montre l’Histoire <img data-src=" />



Quelle crédibilité en matière de trouble à l’ordre public, et quelle cupidité <img data-src=" />





…la commune belge de Molenbeek réputée pour son contexte socio-sécuritaire particulièrement précaire », or, « Molenbeek est (…) le théâtre de nombreuses saisies de contrefaçons depuis quelques années »





Et le principe de cause à effet ça leur parle? C’est la précarité qui oblige à développer le marché parallèle pour survivre… précarité créée par ces mêmes entreprises qui délocalisent les emplois dans le tiers monde et leurs capitaux dans les paradis fiscaux <img data-src=" />


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C’est fini la contrefaçon… Maintenant on bute du rhino pour lui couper sa corne. <img data-src=" />

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il y a manifestement un lien entre le terrorisme et la contrefaçon.

La preuve des contrefaçons ont été retrouvées dans le camion de Nice.



Donc tout individu qui se livre à la contrefaçon est un terroriste en puissance.



Même les chiens peuvent devenir des contrefacteurs : certains mordent les postiers.

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Faire un cours de maths au black finance le terrorisme

Louer son appart sur AirBNB finance le terrorisme

Ne pas déclarer ses 300€ annuels sur eBay finance le terrorisme

Prendre un Uber finance le terrorisme

Être contre le TES finance le terrorisme

Être contre une loi liberticide finance le terrorisme



Nos dirigeants devraient lire les fables d’Ésope, un jour le mot “terrorisme” ne voudra plus rien dire

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picatrix a écrit :



Même les chiens peuvent devenir des contrefacteurs : certains mordent les postiers.





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Le terrorisme a bon dos <img data-src=" />

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est une étude basée sur des sources ouvertes



Ça veut dire quoi ?



(Perso, à lire l’article, j’ai tendance à penser que la contre-façon n’est effectivement pas spécialement une source de financement du terrorisme. Ce qui me dérange un peu, c’est de voir que certains sont immédiatement prêts à dire que ce n’est évidemment pas le cas simplement parce qu’ils s’opposent aux ayants-droits. Je m’oppose également aux ayants-droits, mais pas au point de rejeter des hypothèses plausibles simplement parce que ça m’arrange qu’elles soient mensongères)

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Par contre les sommes dépensées par nos élu à leur seule discrétion ce n’est pas du financement du terrorisme mais la séparation des pouvoirs <img data-src=" />

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&nbsp; 7ième commentaire et voila déjà les nazis <img data-src=" />

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ce qui est dit dans l’article c’est que la contrefaçon au même titre que tout ce qui est illégale (avec une notion de bande organisée donc à grande échelle) peut effectivement être en lien avec le terrorisme.

Après comme le dit Bercy l’arsenal répressif est déjà plutôt conséquent je pense^^

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[mode : alerte de DVD d’il y a 10 ans]

&nbsp;Télécharger une voiture ? JAMAIS !

Télécharger le camion de Nice ? JAMAIS !

Télécharger un fusil d’assaut ? JAMAIS !

Télécharger un film ?

&nbsp;

Le téléchargement illégal, c’est du terrorisme. Le terrorisme est puni par la loi.

[/mode : alerte de DVD d’il y a 10 ans]

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A chaque fois que je vois une news là dessus je me dis “*ah ben ce que j’ai lu la dernière fois c’était pas un canular.”



Impossible pour mon cerveau d’imprimer que des élus y croient vraiment et prennent ces élucubrations sérieusement.



Que même l’exécutif trouve que c’est une connerie, je sais pas si il faut le saluer ou s’en inquiéter.



Vivement le prochain article pour la surprise!

&nbsp;

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J’ai compris l’article comme ça également.

Ce qui m’inquiète, c’est que parmi le public, certains partent du principe qu’une telle hypothèse est d’office fausse, non pas sur base de faits, mais simplement parce qu’ils n’aiment pas les ayants-droits.



En d’autres termes:

Dans notre univers, il se fait qu’effectivement, la contre-façon n’est pas spécifiquement importante pour le financement du terrorisme.

Dans un univers parallèle imaginaire, ça peut être le cas.

Dans cet univers parallèle, alors que dans ce cas cette hypothèse est la réalité, certains rejetteront en bloc cette hypothèse simplement parce qu’ils n’ont pas envie de cautionner le fait que les ayants-droits puissent ne pas être des menteurs.

&nbsp;

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Si on commande une figurine Bootleg d’Hatsune Miku on risque d’être considéré comme un terroriste ?

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Le rapport en question

Je te laisse le soin d’en juger les sources apportent peu de crédit au papier (beaucoup d’articles de

presse, et les point saillants manquent souvent du renfort d’une

source).

&nbsp;

Après l’avoir lu en diagonale (je suis maintenant super inquiet parce que la menace de la contrefaçon va tous nous tuer et nous voler nos emplois avant que l’environnement ne le fasse), c’est un peu une arnaque logique.



La réponse de Bercy souligne le défaut du rapport: C’est l’argent sale produit par des activité illicites qui est utilisé dans des comportements illicites. La contrefaçon en elle même ne finance pas la criminalité mais produit de l’argent difficile à blanchir. Rien de bien nouveau sous le soleil, on fait vibrer la corde sensible du moment. (en plus ils font très vite le parallèle criminalité/terrorisme).

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Je ne comprends pas pourquoi tu me réponds ça.



Ma position est que je suis convaincu que l’affirmation que la contrefaçon est spécifiquement un soutien au terrorisme est fausse.



Par contre, ce que je déplore, c’est le fait que certains se comportent d’une manière qui montre que dans un univers parallèle où cette affirmation est correcte, ils soutiendraient le fait que cette affirmation est fausse.

Les comportements qui me font penser ça sont par exemple les exagérations considérées comme des faits ou les incompréhensions (du genre “ils prétendent que les contre-facteurs sont des terroristes”).

&nbsp;

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Je pensais que tu t’interrogeais sur ce qui était une source ouverte, si bien que j’ai été regarder quelles étaient les sources de ce rapport. le travail fait j’ai pensé que ça t’intéresserait.



Pour la suite j’abonde dans ton sens. Le rapport n’explique pas en quoi c’est la contrefaçon finance spécifiquement le terrorisme.



Les personnes que tu cites ne sont pas si éloignées dans leur raisonnement de celles à l’origine de ce rapport.

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over 9000 !&nbsp;<img data-src=" />

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j-c_32 a écrit :



Ça veut dire quoi ?



(Perso, à lire l’article, j’ai tendance à penser que la contre-façon n’est effectivement pas spécialement une source de financement du terrorisme. Ce qui me dérange un peu, c’est de voir que certains sont immédiatement prêts à dire que ce n’est évidemment pas le cas simplement parce qu’ils s’opposent aux ayants-droits. Je m’oppose également aux ayants-droits, mais pas au point de rejeter des hypothèses plausibles simplement parce que ça m’arrange qu’elles soient mensongères)





Eh oh, avec tous les mensonges qu’ils nous jettent à la gueule à longueur d’année, tu va pas chipoter s’il te plaît. <img data-src=" />


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C’est bien possible, ça fait bien plus de dix ans que je les télécharge. <img data-src=" />

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Cette inclusion, certes rejetée, aurait eu pour effet de permettre de déployer des moyens nettement plus conséquents pour poursuivre les contrefacteurs.

La pêche à la grenade est ouverte toute l’année pour les AD. Un skud après l’autre, ils font leur chemin en grappillant des miettes qui, les unes aux bout des autres constituent un gros paquet. <img data-src=" />

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Bloosom,



Merci pour le rapport.

La seule lecture de la première phrase du préambule laisse pantois “Encore trop souvent considérée comme une infraction mineure, la contrefaçon industrielle et commerciale constitue à l’heure actuelle une véritable menace, tant pour l’économie mondiale,que pour les consommateurs,l’environnement ou la stabilité des Etats.”



Voulant en savoir plus sur des Etats qui seraient déstabilisés par la contrefaçon, je n’ai trouvé aucun exemple.&nbsp; On y parle d’Etats (déstabilisés ou non) dans lesquels il y a de la contrefaçon. La belle affaire.



Plus c’est gros plus ça passe, les auteurs de ce rapport n’ont visiblement honte de rien ou alors ils s’amusent.

&nbsp;

a+,=)

-=Finiderire=-



Edit: le trafic de drogue lui est reconnu pour déstabiliser des Etats (cf Amérique du Sud).

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Bof.

Le danger, ce n’est pas tant les gens qui créent les mensonges que les gens qui y croient.

Et c’est justement ce dont je parle: le fait que certains sont prêts à croire des mensonges dès que ça les arrange. Que ces mensonges soient pro-ayants-droits ou anti-ayants-droits, la gravité est la même (à moins qu’on prétendre que c’est moins grave si ça nous profite à nous directement, auquel cas on ne peut rien reprocher aux politiciens pourris)

&nbsp;

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tiret a écrit :



La fraude fiscale souvent dissimulée sous forme de blanchiment d’argent aux îles Caïmans finance bien davantage le terrorisme…







Ah non, elle finance la mafia qui finance la contrefaçon qui finance le terrorisme. Du coup là ça va. Moi je m’inquièterais davantage de ces entreprises qui alimentent les terroristes sans être inquiétées. Alors que sans alimentation, ils mourriraient de faim.


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Christian Eckert a écrit :



Ou encore le fait qu’« Ibrahim et Salah Abdeslam résidaient dans la commune belge de Molenbeek réputée pour son contexte socio-sécuritaire particulièrement précaire », or, « Molenbeek est (…) le théâtre de nombreuses saisies de contrefaçons depuis quelques années »





marrant… j’aurais mis la relation de causalité dans l’autre sens.

Molenbeek est devenue une plateforme de la contrefaçon à cause de son contexte socio-sécuritaire (quoique veuille dire ce mot) précaire. Moins de chance de se prendre un raid de la police si elle ne traine pas trop dans le coin.


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La fraude fiscale souvent dissimulée sous forme de blanchiment d’argent aux îles Caïmans finance bien davantage le terrorisme…

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“on retrouve Peugeot Citroën, Lacoste, Disney, Microsoft, LVMH,&nbsp;Orange, Nike, Vivendi, l’Association pour la lutte contre la piraterie audiovisuelle, la Société civile des producteurs de phonogrammes, etc.”&nbsp;Voila tout est dit…! Apres ça, les plates-formes de téléchargement&nbsp;c’est de la contrefaçon, donc du terrorisme. Bien joué j’avoue&nbsp;!&nbsp;<img data-src=" />

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Pendant ce temps-là, Daesh utilise des vraies Toyota.<img data-src=" />

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Donc mater un Hentai, un anime japonais, ou une série américaine avec des sous-titrage amateurs fait de nous des Terroristes envers les AD.<img data-src=" /><img data-src=" /> De mon point de vue, ils ont pas l’air si apeuré les AD.<img data-src=" />

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A ce niveau là, on est plutôt des “Résistants” contre l’oligarchie en col blanc&nbsp; <img data-src=" />

Bercy desserre les liens entre contrefaçon et terrorisme

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