En 2019, un contrôle fiscal sur cinq des entreprises (un sur dix pour les ménages) était programmé à l'aide d'analyses de données provenant du « ciblage de la fraude et [de la] maximisation de la valeur des demandes » (CFVR), le programme de datamining de l'administration fiscale.
En 2020, ce nombre est passé à un sur trois. D'ici 2023, l'objectif du ministère est d'en atteindre un sur deux, explique AlgorithmWatch, qui s'est entretenu avec plusieurs collecteurs d'impôts. À les en croire, et alors que seulement 10 à 30 % des résultats remontés par la machine sont de bonne qualité, l'objectif serait difficile à atteindre.
« Depuis 2008, 2 000 emplois ont été supprimés dans l'administration fiscale chaque année, en moyenne ». Le ministère des Finances estime que les outils d'apprentissage automatique permettront de supprimer 546 emplois supplémentaires.
L'administration fiscale a déclaré à AlgorithmWatch que l'automatisation apportée par CFVR permettrait en effet aux inspecteurs des impôts de se concentrer sur « la planification locale » et de « travailler avec plus de valeur ajoutée ».
Autrefois décrit comme un moyen d'aider les collecteurs d'impôts dans des « audits mieux ciblés ou à enjeux élevés », le CFVR recherche désormais tout type de fraude. Au lieu de se pencher sur la fraude difficile à identifier pour les humains, les algorithmes cherchent de petites erreurs, incohérences et fraudes évidentes.
Les 785 millions d'euros récupérés par les trente data scientists de CFVR sont négligeables par rapport aux 12 milliards récupérés la même année. Mais l'objectif pourrait être, à terme, « d'automatiser complètement » la plupart des contrôles fiscaux, d'après l'un des percepteurs contactés par Algorithmwatch.
En 2018, une nouvelle loi a en effet instauré un « droit à l'erreur » pour les contribuables.
L'algorithme peut désormais leur envoyer automatiquement un message les avertissant qu'une erreur a été détectée dans leurs déclarations de revenus, supprimant tous les filtres humains.
Le fisc français passe ainsi d'un système où toutes les déclarations fiscales étaient traitées par des humains, à un système où les contribuables doivent corriger les erreurs détectées par les machines.
Et si les machines font des erreurs, c'est aux contribuables de vérifier. Mais pour Algorithmwatch, les machines ont elles aussi droit à l'erreur, même si les contribuables devront faire le travail non rémunéré pour les réparer.
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