Responsabilité : les sénateurs transforment les hébergeurs en éditeurs

Responsabilité : les sénateurs transforment les hébergeurs en éditeurs

Responsabilité : les sénateurs transforment les hébergeurs en éditeurs

« Il y avait peu de monde dans l’hémicycle. La gauche et les centristes ont voté pour, quelques républicains aussi. Le vote était à main levée », nous a indiqué samedi le sénateur Pierre Ouzoulias, qui a voté « pour » .

Cet amendement adopté dans le cadre de l’examen sur le Respect des principes de la République (ou « Séparatisme ») revoit considérablement le régime de responsabilité des hébergeurs. 

Aujourd’hui, leur responsabilité est conditionnée à la démonstration de leur passivité alors qu’ils viennent d’avoir connaissance d’un contenu manifestement illicite.

Avec ce texte porté par Claude Malhuret (Indépendants, République et Territoires), les hébergeurs deviennent civilement et pénalement responsables lorsqu’ils effectuent sur les contenus « un traitement par algorithme, modélisation ou tout autre procédé informatique, afin de classer, ordonner, promouvoir, recommander, amplifier, ou modifier de manière similaire la diffusion ou l’affichage de ces informations »

Deux critères donc : un critère matériel (un procédé informatique), un critère de finalité (« afin de… »).

Le texte épargne simplement les classements chronologiques, alphabétiques, aléatoires, ou ceux fondés « sur la quantité ou la qualité des évaluations attribuées par les utilisateurs. »

Le modèle économique des plateformes « les conduit à sélectionner et promouvoir les contenus les plus extrêmes, les plus polémiques, ceux qui génèrent le plus de vues, de messages, donc de fric. Les algorithmes dégradent la visibilité des contenus normaux, mettent en avant les plus dangereux » a commenté le sénateur en séance.  

« Cette sélection est bien un choix de contenus. Je souhaite maintenir l'exonération de responsabilité pour les purs hébergeurs, mais rendre les autres responsables devant le juge pour les contenus qu'elles diffusent ». Message adressé à Facebook, Twitter, YouTube et les autres. 

« Il faut approfondir la régulation » a concédé Cédric O, les yeux tournés sur le Digital Services Act et l’article 19 bis du projet de loi qui veut le prétranscrire.

Toutefois, « il serait abusif de les considérer comme des éditeurs - ce serait tuer le modèle ». Et le secrétaire d’État au numérique d’insister : « Rendre les plateformes responsables de chaque contenu n'est pas une approche juridique sensée ».

L’amendement a donc été adopté, à ceci près que le régime qu’il met en place n’a aucune chance de survivre en commission mixte paritaire, le texte n’étant pas vraiment dans les clous de la directive de 2000 sur le commerce électronique, encore en vigueur. 

Commentaires (8)


Toute considération liée à la directive de 2000 mise à part, M. O nous raconte encore une histoire en disant :
Toutefois, « il serait abusif de les considérer comme des éditeurs - ce serait tuer le modèle ». Et le secrétaire d’État au numérique d’insister : « Rendre les plateformes responsables de chaque contenu n’est pas une approche juridique sensée ».
Ils seraient considérés comme éditeurs uniquement s’ils utilisent des algorithmes favorisant l’émergence de certaines publications. Il suffit qu’ils n’appliquent aucun des algorithmes cités pour qu’ils restent hébergeurs. Et puis, tuer le modèle de Facebook ou Twitter, est-ce vraiment un mal ?
Il mérite simplement :sm:, M. O !


qu’il y ait une différence selon si certains “produit” hébergés sont mis en avant ou non me semble logique.
C’est comme si un libraire mettait en avant un livre très controversé ou d’un auteur plus que polémique ( pognon tout ça tout ça). S’il se fait taper sur les doigts, c’est pas une raison pour taper la BNF qui aurait un exemplaire dans ses coffres, alors qu’elle ne met aucun livre plus en avant qu’un autre.


C’est dommage qu’ils n’aient pas utilisés les propositions faites par Laurent Chemla et repris par la quadrature du net sur un “fournisseur de liberté d’expression”.



Ce qui permet permet de garder le statu actuel d’hébergeur sous condition et crée une nouvelle catégorie d’hébergeur à mi-chemin avec un éditeur.


“Cette sélection est bien un choix de contenus.”
Je suis d’accord…



” Rendre les plateformes responsables de chaque contenu n’est pas une approche juridique sensée”
… je suis d’accord aussi.



dematbreizh a dit:


“Cette sélection est bien un choix de contenus.” Je suis d’accord…



” Rendre les plateformes responsables de chaque contenu n’est pas une approche juridique sensée” … je suis d’accord aussi.




Jusqu’à quel moment c’est un choix éditorial? Si une personne propose pour un utilisateur un choix d’autres postes ok. mais si l’algorithme regarde les champs sémantiques que l’utilisateur poste et va rechercher les postes avec ce même champ peut-on vraiment parler d’un choix éditorial ?


Oui, il s’agit d’un choix éditorial individualisé, mais c’est bien un choix éditorial, c’est-à-dire de mettre en avant des publications suivant leur contenu.


La différence devient ténue dès lors que la plateforme met en avant pendant un temps borné les nouveautés du moment comme le fait par exemple le bon coin. C’est l’exemple que je vais étayer.



S’agit-il d’un choix éditorial de mettre en avant les nouvelles annonces alors que toutes les nouveautés sont traitées de la même manière (sauf option payante) ?



Et si l’utilisateur paye, son annonce peut rester plus longtemps en tête de liste. La responsabilité de la plateforme peut-elle être mise en cause dans ce service rémunéré de publicité alors que le traitement est agnostique ?


Le texte épargne simplement les classements chronologiques



Donc, ce n’est pas un sujet.



De plus, Le bon coin risque peu de chose en tant qu’hébergeur puis qu’il est un site d’annonces de vente. Il n’y a guère que les cas de vente de livres interdits (comme ceux qui sont négationnistes).


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