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Le gouvernement va réécrire la loi influenceurs

Irréductibles Gaulois vs la Commission de Breton

Le gouvernement va réécrire la loi influenceurs

Le 16 novembre 2023 à 13h42

Le gouvernement a présenté hier un projet de loi d’adaptation au droit de l’Union européenne. Le texte propose de réécrire totalement la loi Influenceurs par ordonnances, cinq mois tout juste après son adoption. Paris s’aperçoit que ses volontés de légiférer sur le numérique sont contraires au droit de l’Union européenne.

Il est peu banal de réécrire totalement une loi quelques mois après son adoption. C’est pourtant ce qui va arriver à la loi influenceurs, promulguée le 9 juin 2023. L’article 3 d’un projet de loi d' « Adaptation au droit de l'Union européenne » déposé hier au Sénat par Bruno Lemaire propose de modifier en profondeur cette loi du 9 juin.

Le gouvernement veut réécrire quatre articles du texte, et en supprimer cinq autres, afin de « prendre en compte les remarques exprimées par la Commission européenne dans le cadre de la procédure de notification de la loi » et de la mise en vigueur du DSA. 

Pire, pour le Parlement : ce travail de réécriture se ferait par ordonnances. Avec cette procédure, le Parlement valide le principe de la modification législative, mais c’est le gouvernement seul qui tient la plume. Et il n’est pas obligé de dire précisément ce qu’il entend modifier. Vraisemblablement parce qu’il ne le sait pas totalement, et qu’il n’a pas encore procédé à toutes les analyses juridiques nécessaires.

Bruxelles et les obligations de résultat pesant sur les plateformes

Pour en savoir plus, il faut lire la contribution de la commission sur cette loi influenceurs. Bruxelles y critiquait les obligations de résultat pesant sur les plateformes en matière de modération (art 12). Les articles 10 et 11 étaient jugés superflus par rapport au DSA.

Enfin, l’article 15 qui prévoyait que les plateformes signent un protocole d'engagements avec l'État sur le sujet des influenceurs, empiète clairement sur les prérogatives de la commission. Or, celle-ci craint plus que tout une fragmentation de son contrôle.

Pour Arthur Delaporte, député socialiste à l’origine de la loi Influenceurs, les premiers articles de la loi, qui constituent le cœur du texte, seront préservés et ne seront que légèrement adaptés : « Nous sommes en lien avec le gouvernement et cela se fait de manière consensuelle, en bonne intelligence. Sur les articles suivants qui anticipaient le DSA, nous avions indiqué dans les débats qu’il s’agissait de modifications temporaires ».

Des mises en conformité de dispositions avec le droit de l'UE

Explication du courroux bruxellois : la France a été motrice pour obtenir un cadre de régulation européen des plateformes, ce qui a abouti aux règlements DMA et DSA. Or, face aux réticences des pays du Nord, des compromis ont dû être trouvés. Bruxelles ne souhaite pas qu’une fois les règlements signés, chaque pays élabore sa législation nationale qui mettrait à mal la position commune.

Le projet de loi, déposé au Sénat, devrait faire l'objet d'une procédure accélérée. Il est très large. Comme l’explique son exposé des motifs, les 33 autres articles portent sur « diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne » en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole : 

« Il procède, par ailleurs, à des mises en conformité de dispositions national [sic] avec le droit de l'Union européenne rendues nécessaires dans le cadre de mises en demeure ou à la suite de décisions contentieuses. »

Sur l’article 3, l'étude d'impact précise cela dit que « concernant l'habilitation donné » (sic) au Gouvernement de prendre par ordonnance les mesures prévues au présent article, « un délai d'habilitation de neuf mois est nécessaire compte tenu de la technicité des dispositions à prendre et des délais de statu quo que la France est tenue de respecter » dans le cadre de certaines procédures de notification prévues par le droit européen.

Plutôt que de procéder par ordonnances, le Parlement pourrait faire le choix d’intégrer directement les modifications à la loi. En espérant qu’il n’y ait pas d’erreur cette fois.

Deux autres textes de loi sont dans le viseur de la Commission

Deux autres textes de loi sont dans le viseur de la Commission : la loi qui visait à mettre en place un contrôle d’âge sur les réseaux sociaux et, surtout, le projet de loi espace numérique (PJLSREN) : Bruxelles a déjà adressé un avis circonstancié contre plusieurs dispositions adoptées par le Sénat. Or, depuis, les députés ont chargé la barque et inséré de nouveaux articles pour contrôler les plateformes sur des motifs divers.

La France a donc dû notifier à nouveau le texte à Bruxelles. Dans l’attente de sa réponse, le processus législatif est gelé et la commission qui devait se tenir en novembre pour trouver un compromis entre députés et sénateurs a été annulée. Il est très peu probable qu’elle se réunisse avant février. Les politiques français s’aperçoivent qu’ils ne peuvent plus commander les réseaux sociaux.

Commentaires (8)

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Avec cette procédure, le Parlement valide le principe de la modification législative, mais c’est le gouvernement seul qui tient la plume.


Je me demande bien ce qui laisse penser aux députés que le gouvernement serait moins nul qu’eux pour écrire une loi sur ce sujet. Ils avaient l’air très pressé de faire adopté cette loi bancale et maintenant que c’est adopté et contraire au droit de l’Union, les députés semblent délaisser ce sujet …



Ca me laisse penser à une loi pondu à chaud sans réelle réflexion, soit tout le contraire de ce qu’on est en droit d’attendre d’un travail législatif.

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Au-delà du fait qu’en France, l’exécutif est prédominant dans les institutions (notamment avec l’article 49.3 et la menace d’une dissolution de l’Assemblée nat.), le fonctionnement des ordonnances (art 38 de la Constitution) est plutôt très encadré (Conseil d’État, Conseil Constitutionnel, ratification par le Parlement) et très limité (loi d’habilitation qui précise le champ d’application et la durée des ordonnances rédigées par le Gouvernement).



Dans le cas de cette loi sur les influenceurs, l’étude d’impact du projet de loi (art 3) que mentionne l’article de Next ci-dessus, justifie la procédure des ordonnances du fait qu’une fois modifiée, la loi devra être soumise à la Commission européenne. L’ordonnance ne servira qu’à simplifier les discussions entre le gouvernement français et la commission européenne dans le respect de l’article 88.1 de la Constitution qui définit les relations de la République française avec les institutions européennes (ordonnances contrôlées par le Conseil constitutionnel art 61)

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J’aime bien le tacle lien mis à la fin de l’article :D




Numérique : nos élus sont-ils si nuls ?


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Moi ce que j’aime bien dans l’article c’est autre chose.
Le sujet du moment sur les chaines news est la nullité des élèves de 4è en Français.
Quand on lit les citations publiées dans l’article, on a l’impression que le problème est un poil plus ancien.



Pour en revenir au niveau de compétence de nos élus sur ce qui concerne le numérique, je pense que la question n’a pas besoin d’être connue. Ils sont aux fraises comme à peu près tout le monde dont le métier n’est pas “avocat spécialisé” dans ce domaine.



Là où peut légitimement leur garder des griefs est sur le sujet DMA/DSA.
C’est la France qui poussait pour que ça soit mis en place au niveau Européen, et j’imagine que nos élus etaient, à minima, au courant de ce que le pays qu’ils représentent, demandait.
Comment ont ils, en même temps, pu rédiger, puis voter, une loi qui allait nécessairement entrer en conflit avec la législation européene ?
Mystère.
C’est pourtant la question à laquelle j’imagine qu’il serait intéressant et (très) difficile d’avoir des réponses claires.

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(quote:2165779:NiDé)
J’aime bien le tacle lien mis à la fin de l’article :D


En double, le “s’aperçoivent” envoie au même endroit.

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Vous êtes mauvaise langue, c’est la gestion de projet habituelle.



Le projet fait des trucs à l’arrache en claquant plein de sous tout en disant qu’il n’y a plus de budget pour corriger les vrais problèmes. Puis une fois passé en run, on refait tout car rien ne va après 3 mois de cellule de crise.



asterix-la-routine-habituelle-quoi.gif

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pamputt a dit:


Je me demande bien ce qui laisse penser aux députés que le gouvernement serait moins nul qu’eux pour écrire une loi sur ce sujet. Ils avaient l’air très pressé de faire adopté cette loi bancale et maintenant que c’est adopté et contraire au droit de l’Union, les députés semblent délaisser ce sujet


Pourquoi, au début de chaque législature ne pas demander au parlement d’écrire une loi ainsi rédigée en un article unique :
Article 1 - Le parlement donne tout pouvoir au gouvernement pour légiférer par ordonnance et décret sur les sujets de son choix sans devoir utiliser aucun mécanisme constitutionnel.



Ca réglerait plein de problèmes, comme le 49.3, cette loi, etc. #OhWait

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J’ajouterai au commentaire de consommateurnumérique que l’article 38 de la Constitution dispose que :




Le Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.


Une législature (5 ans) ne correspond pas à “un délai limité”. Par contre, rien n’est dit dans la Constitution sur le champ d’application, même si dans les faits, cela est effectivement précisé.



Remarque : la modification de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés a été elle aussi modifiée par ordonnance pour la mettre en conformité avec le RGPD. Tout ce qui était dans la loi et qui est maintenant dans le RGPD a été supprimé et ce qui touche à la CNIL modifié en conséquence. Pour des modifications techniques de ce type de mise en conformité avec les textes de l’UE, cela me semble une bonne méthode.



Par contre, ça serait bien que les députés tiennent compte des textes de l’UE quand ils créent une nouvelle loi, cela éviterait que l’on se ridiculise comme ici.

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