Candidat à la mairie de Paris, Cédric Villani va désigner 10 % de ses colistiers par tirage au sort
Alter algo
Le 20 décembre 2019 à 10h00
8 min
Internet
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Candidat dissident à la mairie de Paris, le député LREM Cédric Villani s’apprête à choisir près de 10 % de ses colistiers par le biais d’un tirage au sort. Une initiative présentée comme une « première mondiale » à cette échelle, d'autant qu'elle s’appuie sur le logiciel libre Decidim.
Afin de « renouveler les pratiques, les visages et les idées », Cédric Villani a annoncé il y a quelques semaines qu’une « dose de tirage au sort » serait introduite dans la constitution des listes qu’il entend mener lors des municipales de mars prochain.
L’idée n’est pas complètement nouvelle... « Quelle meilleure façon de contribuer à résoudre la crise démocratique que nous traversons actuellement que de revenir aux sources de la démocratie athénienne, où de nombreuses responsabilités politiques étaient attribuées par hasard ? » soulève-t-on d’ailleurs dans l’équipe du mathématicien.
Le 15 janvier prochain, 48 Parisiens et Parisiennes seront ainsi tirés au sort, par le biais du logiciel libre Decidim. Ceci à partir d’une base de candidats répondant malgré tout à certains critères.
Un double tirage au sort
Contrairement au tirage au sort des jurés d’assises, où des citoyens sont désignés aléatoirement à partir des listes électorales, Cédric Villani verra 48 de ses colistiers (sur 503) choisis à partir d’un « vivier » de citoyens s’étant spontanément portés candidats.
Jusqu’au 4 janvier, toute personne majeure, de nationalité européenne et résidant à Paris peut en effet proposer sa candidature sur un site dédié. Autres conditions à remplir : avoir un casier judiciaire vierge, ne pas être « adhérent à un parti ou un mouvement politique » et approuver une « charte de valeurs ».
L’idée, nous explique la députée Paula Forteza, responsable du volet « démocratie locale » de la campagne de Cédric Villani, « c'est d'aller chercher des gens qui sont déçus de politique ou qui pensent que la politique n'est pas pour eux ». Ce processus de tirage au sort devrait ainsi permettre « d’avoir des listes plus représentatives, en donnant la possibilité aux citoyens situés en dehors des réseaux politiques d'intégrer les instances décisionnelles de leur ville ».
Chaque candidature est néanmoins auscultée, pour vérifier les justificatifs d’identité et de domicile des prétendants. Une fois celle-ci validée, le candidat est invité à se présenter sur le site de campagne de Cédric Villani (éventuellement derrière un pseudonyme), notamment pour exposer ses projets pour Paris.
Un premier tirage au sort sera ensuite organisé le 6 janvier, afin de sélectionner un « premier ensemble de candidatures parmi celles déposées sur la plateforme ». S’ouvrira alors une seconde phase de sélection, à partir d’entretiens avec les citoyens retenus.
« Ces entretiens nous permettront de nous rendre compte de l'intention de la personne, de son parcours, etc. » explique Paula Forteza. « L'idée, c'est d'être le plus ouvert possible, insiste-t-elle. Il n'y aura pas de sélection selon les profils ou le mérite. On veut juste s'assurer qu’il n’y ait pas de trolls, et qu’un minimum de valeurs communes soit respecté. » L’élue LREM l’assure : « Les candidats peuvent avoir tout type d'opinions politiques, tant que ça reste dans un cadre républicain. »
Le 15 janvier, à l’issue de ces entretiens, aura lieu le tirage au sort définitif. L’opération permettra de retenir 48 citoyens, qui rejoindront les listes de Cédric Villani en respectant la parité – « et sur des places éligibles », souligne Paula Forteza. « Il y en aura qui rentreront dans leur conseil d'arrondissement, et quelques-uns qui siègeront au Conseil de Paris », ajoute l'élue, ce dernier élisant in fine le maire de Paris.
Decidim, un logiciel libre pas comme les autres
Pour effectuer ces tirages au sort, l’équipe de campagne de Cédric Villani s'est appuyée sur le logiciel libre Decidim (« Nous décidons », en catalan), initialement développé par la ville de Barcelone, en Espagne.
Jusqu’ici, il avait principalement été utilisé pour des budgets participatifs ou des consultations en ligne. Les contributions que les internautes peuvent déposer dans le cadre de la « Convention citoyenne pour le climat » transitent par exemple par une plateforme reposant sur Decidim.
« Il y avait déjà une base, une brique disponible pour effectuer des tirages au sort », raconte Paula Forteza. « Mais on a souhaité redévelopper certaines choses pour coller à la démarche, notamment dans le parcours utilisateur, pour rendre l’inscription plus fluide. Et s'assurer que les critères qu'on avait en tête puissent être intégrés. »
Avec un budget d’environ 10 000 euros, l’équipe de Cédric Villani a donc demandé à la société OpenSource Politics d’améliorer le logiciel libre. « Au moment du tirage au sort, un algorithme s'apparentant à un tirage de dés, effectue le choix », résume-t-on dans l’entourage du candidat. Le code source est accessible à tous, via un dépôt GitHub.
Mais pourquoi recourir à un logiciel libre, alors que les pouvoirs publics optent bien souvent pour des outils propriétaires, comme ce fut dénoncé notamment lors du « grand débat » ? « On ne peut pas faire de la démocratie une priorité de la campagne sans vraiment être cohérent dans les outils qu'on utilise, et assurer la légitimité de la procédure en la rendant transparente », répond Paula Forteza.
La CNIL l’a elle aussi souligné dans son récent cahier relatif aux « civic techs » (PDF, p25-26) : « Rendre visible et compréhensible les choix techniques de la démocratie et de ses procédures est primordial pour légitimer les technologies civiques. La moindre suspicion fragilise la sincérité du dispositif technique et la confiance des participants. »
Decidim y était d’ailleurs spécifiquement mis en avant, car jugé particulièrement respectueux des données personnelles :
« L’infrastructure technique de Decidim limite la collecte et l’usage des données. Les organisateurs de la consultation ne peuvent avoir accès aux adresses emails des participants et ne peuvent que passer par la plateforme pour pouvoir les contacter. Cette contrainte technique vise à empêcher toute utilisation de la liste des emails des participants pour d’autres finalités et protège ainsi les organisateurs de la consultation qui eux-mêmes n’ont pas accès à ces données. »
La gardienne des données personnelles soulignait au passage que Decidim n’était pas un logiciel libre « traditionnel ». Sous licence GNU AGPL 3.0, il permet certes « la réutilisation et l’évolution du programme à condition d’en partager à l’identique les modifications », mais va surtout « plus loin en adjoignant aux clauses de la licence, l’adhésion à un contrat social, fixant les « garanties démocratiques » supplémentaires devant être respectées en cas d’usage de la plateforme ».
Parmi ces grands principes, détaille la CNIL, « on retrouve bien sûr la « confidentialité des données », mais aussi « l’égalité d’opportunité et les indicateurs qualitatifs ». La plateforme doit ainsi offrir des « possibilités égales de participation à tous les processus (propositions, débats, etc.) : toute personne peut les voir, les discuter, les commenter, les évaluer, les traiter, sans discrimination d’aucune sorte ». »
Vers une utilisation plus large ?
Les responsables de la campagne de Cédric Villani espèrent au passage que ces développements autour du tirage au sort pourront servir à d’autres. « On a déjà des contacts de la part de certaines villes » s’enthousiasme d’ailleurs Paula Forteza.
Insistant : « On a vraiment fait le pari, dès le début, de se dire qu’il ne fallait pas rester juste sur la démocratie participative telle qu’on l'entend aujourd'hui. Il ne suffit pas que les gens s'expriment ou soient consultés, sans savoir vraiment quel sera le lien avec la décision politique.... On sent que les gens se frustrent, et que finalement, ça se révèle contre-productif. On veut vraiment mettre les citoyens eux-mêmes en situation de pouvoir. »
L’initiative est pourtant loin d’avoir suscité un engouement massif de la part des Parisiens. À deux semaines du premier tirage au sort, on dénombre un peu plus de 200 candidats. « On assume complètement le caractère expérimental de la démarche », temporise Paula Forteza. « Il n’y a pas d'objectifs ou de référence sur combien de candidatures on peut avoir dans une démarche comme celle-ci, puisque c'est vraiment une première. »
Candidat à la mairie de Paris, Cédric Villani va désigner 10 % de ses colistiers par tirage au sort
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Un double tirage au sort
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Decidim, un logiciel libre pas comme les autres
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Vers une utilisation plus large ?
Commentaires (38)
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Abonnez-vousLe 20/12/2019 à 10h33
Expérience très intéressante ! J’espère que l’objectif n’est pas que de gagner des points aux élections et qu’un retour d’expérience pourra être partagé.
Le 23/12/2019 à 11h31
Voilà, et utiliser les deux formes quand c’est nécessaire est plus efficace que le point médian car ça permet de faire passer mieux le message qu’une directrice = un directeur et qu’une maîtresse de conférence c’est pareil qu’un maitre de conférence et donc, qu’en définitive, le féminin ne doit pas être dévalorisé. Mais on s’égare.
Le 23/12/2019 à 11h42
Le 23/12/2019 à 12h34
Le 24/12/2019 à 10h31
quelqu’un a réussi à s’inscrire sur le site ? cela ne fonctionne pas " />
Le 24/12/2019 à 14h35
Le 20/12/2019 à 13h14
On a dit ça pour Chirac, et on a eu Sarkozy.
On a dit ça pour Sarkozy, et on a eu Hollande.
On a dit ça pourHollande, et on a eu Macron.
“On peut toujours faire pire”, c’“est la devise de notre Ripoublique " />
Le 20/12/2019 à 13h41
Hé, il y a des chances que la prochaine fois, une femme passe. Ca sera une grande avancée, non ? " />
Le 20/12/2019 à 13h43
“Autres conditions à remplir : avoir un casier judiciaire vierge”
Il me semble que ce n’est pas le cas actuellement pour les politiques ! Pourtant il y en aurait bien besoin…
Le 20/12/2019 à 13h59
Le barrage n’était en fait qu’un miroir " />
Le 20/12/2019 à 14h09
Le 20/12/2019 à 14h13
Juste pour me moquer un peu: tu as mis des . dans le 1° paragraphe, mais dans le dernier, tu es malencontreusement redevenu masculiniste.
Le 20/12/2019 à 14h30
Le 20/12/2019 à 15h23
Joli coup de com’
10% de tirés au sort puis filtrés quand même grâce à des entretiens parce-que faut pas déconner.
“Promis c’est juste pour éviter les trolls, c’est pas pour disqualifier quelqu’un qui est pas de notre bord politique” : mon cul, si un mec t’explique qu’il est pas d’accord avec toi et qu’il va pas lever le bras comme les autres moutons du groupe tu le prendras pas, nous prend pas pour des idiots.
Le tout pas forcément en position éligible (seulement quelques-uns à en croire l’article).
Bref, une bonne grosse mascarade " />
Le 20/12/2019 à 15h26
Ca sonne comme Twitter qui veut révolutionner le monde avec son standard décentralisé pour les réseaux sociaux alors que ça existe déjà…
Le 21/12/2019 à 08h30
Le 21/12/2019 à 10h17
…un minimum de valeurs communes soit respecté…
La soumission aux intérêts des banquiers privés (=héritiers rentiers), et à l’UE autoritaire et antidémocratique des paradis fiscaux et du chômage? " />
Le 21/12/2019 à 10h22
Il ne suffit pas que les gens s’expriment ou soient consultés, sans savoir vraiment quel sera le lien avec la décision politique…. On sent que les gens se frustrent…
NON.
Il y a un programme électoral défini et voté, des referendums définis et votés… puis des TRAHISONS par les politiciens, les gens sont TRAHIS par des représentants MENTEURS et TRAITRES " />
Le 21/12/2019 à 11h39
Pourquoi grosse? Si ça se trouve c’est la nièce qui se présentera 🤣
Le 21/12/2019 à 11h52
C’est peu comme mon végétarisme : en principe je ne mange pas de viande, mais de temps en temps, quand la qualité, la préparation et l’origine sont conformes à mon éthique, je fais une exception :)
Là, j’ai considéré que j’avais inclus tout le monde dans mon intro, et qu’ensuite j’avais moins besoin de le faire.
Autre chose : inconsciemment, une partie de moi se retient un peu en pensant aux commentaires pas forcément sympathiques lorsque l’on écrit en inclusif.
Pour ma part, j’utilise le point médian lorsque le mot n’est pas trop défiguré, sinon j’explicite sans ordre particulier (ex : les “sénateurs et les sénatrices”).
Le 21/12/2019 à 20h06
Il n’y a pas que l’informatique dans la vie.
Le 22/12/2019 à 15h02
Le 20/12/2019 à 10h50
J’ai presque fait mon vieux con aigri vu le titre en rallant qu’on s’en foutait (ici) mais en lisant le contenu et la vision logicielle/informatique: Merci Xavier " />
Le 20/12/2019 à 11h09
Villani un dissident, lol. Pur produit de l’establishment, parachuté dans le paysage politique par sont poto macron, un parvenu, rien de plus. Par contre il joue bien le jeu politique, arriver à faire croire qu’il est un dissident, je dis chapeau.
Le 20/12/2019 à 11h15
Connaissant Villani (son parcours et sa personnalité, résolument carriériste et opportuniste), je crois que l’objectif est malheureusement purement electoral " />
Puis bon 10% tiré sur une liste de volontaire, en dehors du symbole est-ce que cela changera quelque chose en pratique ?
Le 20/12/2019 à 11h19
Le mouvement citoyen #MAVOIX avait, à l’occasion des législatives 2017, tiré au sort 43 candidat·es et suppléant·es parmi environ 500 volontaires.
Nous avions récolté via une plateforme https://github.com/mavoix/candidature, j’ai participé au développement et hébergé l’outil) les candidatures au tirage au sort, avec pièce d’identité (preuve de nationalité française) et copie d’extrait de casier judiciaire.
Puis le tirage avec eu lieu sur le toit de la cité de la mode à Paris, de la main d’un huissier assermenté.
Donc non, ce n’est pas une première mondiale, puisque nous l’avons fait pour 100 % de nos candidats et à une échelle nationale.
YouTubehttps://www.mavoix.info/tirage-au-sort-inedit-et-fete-demancipation-citoyenne/
https://www.mavoix.info/un-tirage-au-sort-historique-6mai2017/
Le Figaro
Le 20/12/2019 à 11h21
Le 20/12/2019 à 11h28
« Les candidats peuvent avoir tout type d’opinions politiques, tant que ça reste dans un cadre républicain. »
Le Pen c’est dans un cadre républicain ?
Mélenchon c’est dans un cadre républicain ?
Bové, moultes fois condamné, c’est dans un cadre républicain ?
Approuver les “messageries instantanées fortement cryptées”, alors que Macron veut les voir assumer d’être “complices d’attentats”, c’est dans un cadre républicain?
Le 20/12/2019 à 11h30
Le 20/12/2019 à 11h39
Bravo pour cette belle initiative " />
(et merde pour le fait d’être invisibilisés par Villani et ses 10% ridicules…)
Le 20/12/2019 à 12h27
Bha vu la tronche de paris et l’ancien maire ça peut pas être pire.
Le 20/12/2019 à 12h28
Le 20/12/2019 à 12h44
J’espère bien !
En cadeau, la vidéo qui décrit le mieux le projet que portait #MAVOIX : YouTube
Le 20/12/2019 à 12h45
Le 20/12/2019 à 12h46
Oui, ce sont des points médians !
Le 20/12/2019 à 12h46
Ah oui carrément !
Le 20/12/2019 à 12h55
Le mot « républicain » est un très bon indicateur des gens qui utilisent des mots pour « faire bien » sans savoir ce qu’il y a derrière. L’équivalent de « c’est pas faux » de Perceval dans Kaamelott. Une excellente boussole qui indique le sud.
Dans le même ordre d’idée on a aussi « citoyen » (comme adjectif : quel cancer, on dit civique).
J’avais découvert un sketch où l’humoriste case des mots-clés sans aucun sens : YouTube
Le 20/12/2019 à 13h10
Citer la démocratie athénienne puis dire qu’ils seront 48 sur 503 " />