Connexion
Abonnez-vous

Implants neuronaux : Neuralink lève 280 millions de dollars

Le Founders Fund de Peter Thiel aux manettes

Implants neuronaux : Neuralink lève 280 millions de dollars

Le 08 août 2023 à 14h40

Deux mois après avoir obtenu le feu vert de la Foods and Drugs Administration (FDA) américaine pour tester ses implants cérébraux sur des sujets humains, Neuralink lève 280 millions de dollars. Une opération qui illustre la vitalité du secteur.

Le 25 mai, la société Neuralink cofondée par Elon Musk déclarait avoir reçu l’accord des autorités sanitaire américaines, la Foods and Drugs Administration (FDA), pour réaliser de premiers tests de ses implants cérébraux sur des sujets humains. L’information était diffusée via Twitter (renommé X), désormais propriété du milliardaire américain. 

Deux mois plus tard, nouveau succès pour l’entreprise spécialisée dans les neurotechnologies : elle annonce avoir sécurisé 280 millions de dollars de financement dans une levée de fonds de série D. L’opération a été menée par Founders Fund, le fonds de capital-risque cofondé en 2005 par l’ancien collègue d’Elon Musk Peter Thiel et d’autres membres de la « mafia Paypal ».

L’opération porte à 643 millions de dollars les sommes levées par Neuralink depuis sa création. Sur le total, environ un quart a été versé par Elon Musk. Aucune information n’a été donnée sur la valorisation de l’entreprise, mais en juin 2023, Reuters rapportait que celle-ci flirtait avec les 5 milliards de dollars. Le Founders Fund avait déjà financé Neuralink en 2021, accompagné à l’époque du fonds Google Ventures et d’une participation du patron d’OpenAI Sam Altman.

Nouvelle phase de développement

En 2019, Musk annonçait compter sur une autorisation des tests sur sujets humains dès l’année 2020. Devant les difficultés qui semblent s’être accumulées pour obtenir le sésame réglementaire, des employés de l’entreprise ont expliqué que les expérimentations se multipliaient sur des moutons, des cochons et des singes. 

Si celles-ci ont permis à Neuralink de produire plusieurs démonstrations impressionnantes des capacités de ses technologies, elles ont aussi soulevé des questions. Des employés de la société et des groupes de défense des droits des animaux se sont ainsi insurgés des décès provoqués dans les laboratoires de Neuralink, menant l’Inspection générale du ministère américain de l’Agriculture à ouvrir une enquête

Début 2023, le ministère américain des Transports ouvrait de son côté une autre enquête, sur ses pratiques en matières d’expédition de matériaux dangereux. Quoi qu'il en soit, après un premier rejet fin 2022, la FDA a fini par accorder à l’entreprise le droit d’avancer dans ses expérimentations, ce qui signifie que celle-ci a réussi à fournir des garanties sur la sécurité physique et les implications éthiques de ses produits. 

De potentielles avancées médicales

De la taille d’une pièce de 2 euros, les implants de Neuralink sont censés être insérés dans le crâne du patient pour en détecter l’activité neuronale, qu’ils interprèteront puis enverront à des appareils électroniques via Blutetooth. Le dispositif devrait par ailleurs pouvoir émettre ses propres signaux électriques, de manière à stimuler les neurones. 

Les premiers usages prévus concernent des personnes atteintes de maladies touchant la moelle épinière ou le cerveau. En juin 2023, à Viva Tech, Elon Musk déclarait que la première implantation de ces dispositifs sur un sujet humain serait réalisé courant 2023. 

Prudence, cela dit : comme le souligne le journaliste Casey Newton au sujet d’autres déclarations de Musk (notamment relative au réseau Twitter / X ou à son éventuel combat de MMA contre le patron de Meta Mark Zuckerberg), nombreuses sont les fois où ce dernier n’a pas tenu parole. Sans parler de celles où il a enjolivé la réalité. Reuters souligne de son côté que Musk a déjà prédit « à quatre reprises » que les tests des implants Neuralink sur des personnes humaines auraient « bientôt lieu ». 

Des débats sur les implications éthiques des implants

Par ailleurs, outre les progrès nets que les produits de Neuralink laissent espérer en médecine, leurs applications « secondaires » suscitent quantité de débats. Elon Musk a déjà laissé entendre que ces implants permettraient à leurs porteurs, à terme, d’obtenir des « capacités cognitives surhumaines », et qu’elles pourraient « résoudre » la schizophrénie ou l’autisme, ce que des experts comme le neuroscientifique Bradley Greger se sont empressés de qualifier de « spéculation de science-fiction ». 

Dans un rapport dédié au principe de précaution dans la recherche scientifique et publié en juin 2021, le Comité d’éthique du CNRS (COMETS) se penchait sur le projet de Neuralink, qu’il décrivait comme proposant d’« augmenter les capacités cognitives humaines et, surtout, de faire intrusion dans notre intériorité, avec des dispositifs électroniques censés accéder directement à nos pensées ». 

S’il y réussit, écrivaient les éthiciens, « les conséquences seraient terrifiantes, car comportant des dangers d’une police de la pensée et de diverses formes de coercition. Il apparaît donc que des projets de cet ordre, même s'ils ont très peu de chance d'aboutir, de même que ceux qui conduiraient au transhumanisme, mériteraient d'être interrogés à l'aune du principe de précaution. »

Une entreprise et un secteur en mouvement 

Quelle que soit l’étendue des débats, l’entreprise comme le secteur dans lequel elle s’insère évoluent rapidement. Neuralink profite de l’annonce de sa levée de fonds pour signaler qu’elle recrute. Selon son site web, outre les stages, l’entreprise a ouvert 39 postes dans des domaines aussi variés que la robotique, le développement logiciel ou la recherche et développement. Un chiffre à rapporter aux trois cents employés qu’elle comptait en 2022.

Cofondée par huit personnes, l’équipe de Neuralink a largement changé en sept ans. En juillet 2022, le départ de Paul Merolla, qui travaillait jusque-là à la fabrication des implants, n’a laissé que deux cofondateurs derrière lui : Elon Musk, le directeur général de la société, et le directeur de l’ingénierie Dongjin « DJ » Seo

Quelques mois plus tôt, Max Hodak, un autre cofondateur et spécialiste de l’ingénierie biomédicale, avait quitté Neuralink pour fonder une nouvelle société mêlant technologie et recherche médicale, Science.

Par ailleurs, les propres financiers de l'entreprise multiplient les prises de participation. Notoirement intéressé par les possibilités d’allonger la vie humaine et de lutter contre les maladies liées au vieillissement, Peter Thiel a par exemple investi dans la société Blackrock Neurotech, qui travaille à une interface cerveau-ordinateur (Brain computer interface, BCI).

Dans le même domaine, Synchron Inc., un concurrent direct de Neuralink, a réalisé sa première implantation d’une technologie similaire sur un sujet atteint de paralysie en juillet 2022. En mars 2023, elle a ouvert le recrutement de patients pour des expérimentations supplémentaires sur son outil Synchron Switch, censé permettre à des personnes à mobilité réduite de manipuler des outils technologiques (comme un smartphone ou un ordinateur) par la pensée.

Commentaires (13)

Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.

Abonnez-vous
votre avatar

Le sujet est extrêmement intéressant et des progrès sont espérés par beaucoup de gens.



Il n’y a personne pour suggérer à Musk de laisser la communication sur ce sujet à des personnes dont c’est le métier ?
Parceque donner de faux espoirs sur des sujets tels que les colonies sur Mars, ce n’est pas grave; par contre sur les domaines touchant à la santé et notamment sur des pathologies lourdes, ce n’est pas pareil.

votre avatar

Suggérer la personne pourra toujours. D’ici à ce qu’il tienne compte de ladite suggestion, c’est une autre paire de manches vu l’ego du monsieur.

votre avatar

Cela fait déjà des années que différentes sociétés (ou des universitaires) promettent des solutions pour les personnes paralysées ou ne pouvant pas s’exprimer (comme la réparation de la moelle épinières, les exosquelettes, les interfaces neurales, etc. …) et pour le moment il n’y a toujours rien …
Mais que ce soit EM qui fasse la même chose, alors là il devrait s’abstenir car il donne de faux espoirs… La différence entre lui et les autres, c’est que certes cela prends toujours (beaucoup) plus de temps que ce qu’il a indiqué car c’est un grand optimiste, mais jusqu’à présent, il a toujours fini par faire ce qu’il anticipe ….

votre avatar

Le problème est l’aura qu’il y a autour d’Elon.
Dés qu’il annonce quelque chose, ça s’enflamme (il suffit de voir les commentaires ici).
Il y a une différence en promettre des solutions et dire qu’elles arrivent demain.



Dans l’histoire, et même si les autres boites font pareil, le passif de Musk joue clairement pas en sa faveur.

votre avatar

Non: les universites ou chercheurs indiquent qu’ils travaillent sur le sujet.
Quand il y a conférence de presse, c’est pour faire part des avancées mais à AUCUN moment je n’ai lu quelque chose qui ressemble à cela




Musk invested tens of millions of his personal wealth into the company and has said, without evidence, that Neuralink’s devices could enable “superhuman cognition,” enable paralyzed people to operate smartphones or robotic limbs with their minds someday, and “solve” autism and schizophrenia.


“Grand optimiste” ?
Encore une fois quand c’est pour la conquête spatiale ou les voitures ce n’est pas grave, mais la on est dans le domaine de la santé.

votre avatar

Et il est prévu de faire des tests sur des cobayes humains comme avec les fusées de SpaceX ? :transpi:



Au-delà de ça, ça fait peur.
Sans aller dans du Deus Ex avec des lames planquées dans l’épaule ou du piratage distant, la pensée est une chose effrayante. Déjà qu’avec la technologie actuelle, on s’écharpe sur Twitter, alors avec des implants neuronaux …



Mais sur le domaine scientifique, ça peut être intéressant.
Par contre, faut vraiment laisser la comm’ à une personne dont c’est le métier. Vraiment.
Le médical est un métier dont il vaut mieux ne pas vendre du rêve / de l’irréalisable …

votre avatar

VorkoSpigan a dit:



Un peut comme hyperloop?


votre avatar

VorkoSpigan a dit:


Faire ce au’il anticipe… Ça dépend quoi 😂 Hyperloop, un autopilot fiable… Redresser Twitter… Pour ne citer que ça. Ce type est un mythomane. Riche et bien entouré, mais lui, nan, il est aussi fiable et mature qu’un gosse de 6 ans.

votre avatar

Hmm, je me demande combien d’anti vax fans de Musk vont se faire implanter une puce avec gps capable de changer leur comportement ou leur personnalité… :mad2:



Blague à part, pour les implants, n’oubliez pas le cas de l’Argus II avant de vous faire rajouter des composants par curiosité…
https://spectrum.ieee.org/bionic-eye-obsolete

votre avatar

la « mafia Paypal »


M Zuckerberg (de Harvard) me semblerait subitement plus sympathique. (humour)

votre avatar

ragoutoutou a dit:


Blague à part, pour les implants, n’oubliez pas le cas de l’Argus II avant de vous faire rajouter des composants par curiosité… https://spectrum.ieee.org/bionic-eye-obsolete


:keskidit:

votre avatar

VorkoSpigan a dit:


Cela fait déjà des années que différentes sociétés (ou des universitaires) promettent des solutions pour les personnes paralysées ou ne pouvant pas s’exprimer (comme la réparation de la moelle épinières, les exosquelettes, les interfaces neurales, etc. …) et pour le moment il n’y a toujours rien …


Pas tout à fait.



Bon, le gars ne court pas le 100 m, mais bon, c’est déjà un progrès. C’est franco-suisse et c’est en partie sur financement public.

votre avatar

“En plus de l’abonnement Blue, vous devez avoir une puce neuralink pour tweeter” (xer ? )

Implants neuronaux : Neuralink lève 280 millions de dollars

  • Nouvelle phase de développement

  • De potentielles avancées médicales

  • Des débats sur les implications éthiques des implants

  • Une entreprise et un secteur en mouvement 

Fermer