Objets connectés : pourquoi Orange pousse LTE-M en complément de LoRa
En attendant la 5G
Le 07 novembre 2017 à 10h20
7 min
Sciences et espace
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L'année prochaine, Orange prévoit de déployer un réseau LTE-M pour les objets connectés, en lieu et place de celui basé sur la technologie LoRa. Dans un entretien, l'opérateur nous détaille les différences de ces deux réseaux « complémentaires », destinés à terme à faire face à la 5G.
Ce n'est pas un secret, le monde des télécoms s'attend à une explosion des objets connectés dans les années qui viennent, le mouvement est d'ailleurs déjà en marche. Il concerne aussi bien les particuliers que les professionnels et les infrastructures. Les questions du respect de la vie privée préoccupent d'ailleurs la CNIL, notamment sur les smart cities.
Après LoRa, encore un réseau bas débit chez Orange
Si la 5G prend en compte ce sujet dès sa conception, elle n'arrivera pas avant 2020, et il ne s'agira certainement que du début du déploiement. En attendant, des alternatives sont d'ores et déjà disponibles, notamment avec les réseaux très bas débit Sigfox et LoRa. Depuis quelques semaines, Orange expérimente également une évolution de la 4G dédiée aux objets connectés baptisée LTE-M, dont le lancement est prévu pour 2018.
Afin de savoir de quoi il en retourne exactement et de comprendre pourquoi l'opérateur se lance dans cette aventure, nous avons pu nous entretenir avec Olivier Ondet, vice-président IoT et analytics chez Orange Business Services.
LTE-M face à LoRa : débits pour l'un, consommation électrique pour l'autre
Retour en arrière. « En 2015, la technologie très basse consommation qui fonctionnait, qui était disponible, c'était LoRa » nous explique-t-il. Orange, comme Bouygues Telecom (via Objenious), se lance alors dans le déploiement d'un réseau bas débit fondé dessus. Pour rappel, Altice (SFR) préfère alors s'associer avec un acteur déjà implanté un peu partout dans le monde : Sigfox.
Notre interlocuteur ne s'en cache pas : LTE-M et LoRa ciblent les mêmes « verticales » : les smart cities et le monde de l'industrie. Pour ces besoins, il ne s'agit pas d'augmenter les débits ou de réduire la latence, mais principalement d'« optimiser la consommation électrique des objets ». Pour autant, LTE-M ne rivalise pas avec LoRa : « LTE-M est environ quatre fois moins énergivore qu'un réseau cellulaire classique » nous affirme Olivier Ondet, tout en précisant que « LoRa est quatre fois moins énergivore qu'un réseau LTE-M ».
LTE-M a néanmoins l'avantage de proposer des débits plus élevés, allant jusqu'à 1 Mb/s, voire 10 Mb/s pour certaines versions, précise Olivier Ondet. De quoi porter de la voix si besoin. À titre de comparaison, LoRa propose jusqu'a quelques dizaines de kb/s.
Quid de la latence et des coûts ?
Du côté de la latence, LTE-M prend aussi le dessus puisqu'elle serait du même ordre de grandeur que celle des réseaux 4G classiques, sans plus de détails. Lors du MWC de Barcelone, l'opérateur affichait une latence minimale 200 ms, ce qui est tout de même plus élevé que la 4G sur nos smartphones. Dans tous les cas, « avec LoRa on est plus lent par conception » nous précise Olivier Ondet.
Côté coûts, Orange estime les modules LTE-M « en gros deux fois moins chers » que ceux de la 4G traditionnelle. Néanmoins, « les modules LoRa sont environ trois fois moins chers que les modules LTE-M ».
Bref, LTE-M a l'avantage sur les débits et la latence, mais pas sur les tarifs et la consommation. Afin de se démarquer vraiment, LTE-M dispose cependant d'un autre atout dans sa manche.
Le principal intérêt de LTE-M : le roaming
Comme son nom l'indique, LTE-M se base sur les réseaux 4G existants, déjà déployés un peu partout dans le monde. À l'instar des smartphones, les objets connectés en LTE-M pourront profiter de l'itinérance (roaming), c'est-à-dire qu'ils seront capables de fonctionner dans d'autres pays, à condition que les opérateurs locaux aient également déployé cette technologie. Comme avec la 4G classique, cela dépendra des accords d'itinérance noués entre les uns et les autres.
LTE-M vient donc se positionner comme une évolution de la 2G sur ce terrain, avec une consommation électrique largement revue à la baisse. L'autonomie passerait à « trois ans au lieu de six mois » nous affirme le vice-président d'OBS. Si Orange nous a plusieurs fois par le passé réaffirmé ne pas souhaiter couper la 2G à court ou moyen terme, LTE-M pourrait tout de même pousser certains clients à changer de technologie.
Dans tous les cas, LoRa et LTE-M répondent à des besoins différents. Si l'objet ne quitte pas la France et/ou que l'autonomie est le critère principal, alors LoRa est tout désigné. Si vous avez besoin d'un débit plus soutenu, d'une faible latence et du roaming, alors il faudra partir sur LTE-M. « Il y a complémentarité, car selon les usages l'un ou l'autre va être plus adapté » nous précise Orange. Bien évidemment, l'opérateur reconnait qu'il y a des situations à cheval entre les deux cas.
LTE-M : fréquences, déploiement
Contrairement à LoRa qui nécessite de poser de nouvelles antennes, LTE-M est « une évolution des réseaux mobiles traditionnels ». Cette technologie utilise exactement les mêmes fréquences et donc les mêmes antennes que la 4G classique, facilitant son déploiement qui ne passe que par « une mise à jour logicielle ». Idem pour la sécurité des données : LTE-M utilise les mêmes protocoles que la 4G.
Pour commencer, la France, l'Espagne et la Belgique seront les premiers pays concernés, avant une extension à d'autres : « Tous nos réseaux 4G sont en train de devenir LTE-M ready » nous précise Olivier Ondet. L'activation est menée par plaques et les premiers tests sont déjà en cours. Il faudra certainement attendre une année avant d'avoir du LTE-M sur toute la France.
Quelle que soit la technologie utilisée (2G, 3G, 4G, LoRa, LTE-M, Bluetooth, RFID...), Orange dispose d'une plateforme unique de gestion des données : Datavenue. Pour les entreprises ou les start-ups souhaitant se lancer, l'opérateur a ouvert cet été les portes de son Open IoT Lab avec du matériel à disposition afin de procéder à des tests. Il faut se rendre sur cette page afin d'exposer son projet et proposer sa candidature.
LoRa n'est pas abandonné, quid de la 5G ?
Pour Orange, pas question de laisser tomber son autre réseau bas débit pour le moment : « LoRa a environ deux ans d'avance sur LTE-M, mais on va tout faire pour continuer à développer LoRa, notamment avec tous les avantages qu'il a en qualité énergétique, de souplesse de déploiement ». Il peut également servir pour mettre en place un réseau bas débit dédié sur des sites industriels par exemple, ce qui pourrait rassurer certaines entreprises.
En parallèle, la 5G continue d'avancer et promet beaucoup de changements pour les objets connectés. Sur la consommation tout d'abord, les antennes vont être composées de plusieurs dizaines (voir centaines) d'éléments rayonnants, ce qui permettra aux objets de « chuchoter » leur message et donc de moins consommer. Sur ce point, Orange pense à terme faire encore mieux qu'avec LoRa (et donc LTE-M).
Dans tous les cas, il faudra certainement attendre 2020 pour que les réseaux 5G commencent à se déployer. Comme les précédentes technologies, la mise en place d'une couverture nationale prendra certainement des années. LTE-M et LoRa ont donc encore de beaux jours devant eux en attendant que la 5G prenne la relève.
Nous avons contacté les autres opérateurs nationaux (Bouygues Telecom, Free Mobile et SFR) afin de savoir s'ils comptaient se lancer dans LTE-M, sans réponse pour le moment.
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Après LoRa, encore un réseau bas débit chez Orange
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Commentaires (16)
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Abonnez-vousLe 08/11/2017 à 07h07
Non. Car le Lora propose quelques dizaines de kb/s (au mieux), mais pas de manière continue.
Les communications sur la bande du 868Mhz utilisée par Lora ne permettent à un appareil que d’émettre un certain pourcentage du temps, pour éviter les interférences (comme c’est une bande radio libre et pas réservée au Lora). Ce pourcentage de temps s’appelle le Duty cycle.
Du coup, c’est vraiment adapté pour envoyer des tout petits messages de quelques octets sur de très longues distances avec une conso très faible, mais pas plus. Je crois que la limite de taille d’un message est de l’ordre des 20o, mais je ne suis pas sûr.
EDIT : en plus, le débit dépend de la distance à la borne, donc le temp d’envoi d’un message dépend de cette distance. Et comme le temps d’émission autorisé d’un appareil Lora est un pourcentage de temps global, plus ton appareil est loin et moins tu peux envoyer fréquemment des données d’une taille déterminée.
Le 08/11/2017 à 07h09
D’ici à ce que le Lora soit déployé … ben il fonctionnera toujours après la sortie d’une nouvelle techno.
Reste à voir combien de temps les opérateurs le gèreront.
Le plus pérenne pour une entreprise ou une ville qui veut s’équiper reste d’avoir ses propres antennes/gateways Lora et gérer son réseau privé, comme ça ils s’assurent de pouvoir le maintenir les 10⁄15 ans de vie de leurs capteurs.
Le 08/11/2017 à 09h19
oui mais si tu prépares une solution pour récupérer tel ou tel donnée
par ex si la chaleur de l’eau est conforme dans les hotels
et que tu bases ta solution sur l’un ou l’autre, tu travailles en fonction du déploiement actuel mais aussi du déploiement futur car tu ne veux pas intervenir pour le changer vu le prix de revient
c’est juste ça .. et puis déployer un réseau interne ca ne marche par définition que quand c’est interne pas quand tu fais de la presta ..
Le 08/11/2017 à 09h42
Les technos de radio sont “révolutionnées” tous les 10 ans environ de toutes façons donc il ne faut jamais espérer exploiter une techno toute sa durée de vie. Dans 10 ans les réseaux Lora existeront toujours et coûteront probablement bien moins cher que les réseaux nouvelle génération qui sortiront à ce moment là du fait de l’âge et de la rentabilisation du matériel.
Tout comme aujourd’hui il existe encore des projets qui sont lancés avec des puces 2G/3G, car ça ne coûte pas grand chose, ça fonctionne bien, etc.
Le 08/11/2017 à 09h43
Oui et si j’ai bien compris ça a un gros potentiel car ça utilise les appareils “des gens” (comme les smartphones) pour faire passerelle. Du coup, potentiellement beaucoup moins de portée nécessaire vu le maillage des smartphones au moins en grande ville, et du coup, conso très très réduite.
Le 08/11/2017 à 15h09
Pour ce qui est du Romaing d apres une source qui travaille dans une boite faisant du LoRa c est en train d etre mis en place et standardise
Le 10/11/2017 à 08h43
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Effectivement entre le “duty cycle” et les 20 octets de limite, ça n’est pas adapté pour la voix (un peu logique vu le besoin auquel le protocole répond, mais techniquement comme je disais 13 kb/s en continu suffisent pour la voix GSM).
Le 11/11/2017 à 12h15
Le 07/11/2017 à 11h19
Il ne faut pas également oublier le NB-IoT (NarrowBand-IoT)
Le 07/11/2017 à 11h25
Est-ce qu’on pourra utiliser les IOT des autres pour miner des Ethers ? " />
Le 07/11/2017 à 11h40
C’est déjà fait " />
Article intéressant, merci.
Le 07/11/2017 à 12h04
ahahah merci
Le 07/11/2017 à 14h23
L’énorme avantage du LTE-M est justement de se baser sur un réseau existant.
A terme ce sera le successeur des modules 2G qui équipent par exemple les lecteurs de CB.
Et puis surtout sortir un compteur électrique connecté (par exemple) pouvant fonctionner au niveau mondial sera beaucoup plus facile, plutôt que d’adapter pour un pays (en Lora), puis pour un autre (en SigFox) etc.
Aussi il sera possible de dégager définitivement la 2G et de faire du refarming pour avoir plus de fréquence pour la 4G.
Le 07/11/2017 à 14h34
Le 07/11/2017 à 17h29
Intéressant article.
Une remarque sur ce passage :
Le 07/11/2017 à 21h06
je comprends toute la partie marketing, les deux sont complémentaires etc.
mais j’ai quand même peur que d’ici à ce que lora soit déployé sur toute la france, il risque tout de même d’être obsolète
quand on voit que les petits outils de mesure iot sont censés durer des années ..