France Télévisions : un sénateur dénonce les pubs sur une chaîne YouTube dédiée aux enfants
Les Zouzous, les sous-sous
Le 29 mars 2018 à 15h48
5 min
Droit
Droit
Le programme pour enfants Les ZouZous de France Télévisions n’a plus de publicités. Sauf sur la chaîne éponyme hébergée par YouTube. Le sénateur André Gattolin dénonce cette situation inéquitable, peu en phase avec sa loi régissant le secteur.
En 2016, le sénateur André Gattolin avait fait adopter une loi pour interdire la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique. Après une menace de report, esquivé à la dernière minute, cette interdiction est désormais effective depuis le 1er janvier 2018.
Depuis, l’article 53 de la loi de 1986 sur la liberté de communication pose que les programmes de France Télévisions « destinés prioritairement aux enfants de moins de douze ans ne comportent pas de messages publicitaires ». Seules exceptions, les messages génériques « pour des biens ou services relatifs à la santé et au développement des enfants » ou les campagnes d'intérêt général.
Cette restriction est vaste. Elle vaut évidemment pendant le programme, mais également quinze minutes avant et après sa diffusion. Surtout, elle concerne également tous les messages diffusés sur les sites de France Télévisions.
Des pubs sur la chaîne les Zouzous mais uniquement sur YouTube
Dans une question écrite adressée à Françoise Nyssen, ministre de la Culture, le sénateur LREM s’agace quelque peu de la présence de publicités dans les programmes des « Zouzous ». Non sur les flux diffusés par les sites zouzous.fr et France.tv, qui en sont tous démunis, mais par la chaîne YouTube du même nom qui compte 108 069 abonnés. Une brique de la « stratégie d’hyperdistribution de programmes » de France Télévisions.
Promotion de film, de matériel informatique, publicités pour des timbres ou des services bancaires, l’élu cite différents exemples, captures à l’appui. Nous y ajoutons de la crème contre les érythèmes fessiers (voir capture).
« Ces programmes comportent en plusieurs endroits des messages publicitaires : sur un navigateur Internet sous forme de bandeaux affichant des publicités ciblées, sur une application mobile-tablette sous forme de coupures publicitaires en plein écran » regrette-t-il, non sans relever que « la monétisation de vidéos publiées sur le site youtube.com n’est en rien obligatoire pour une chaîne et relève d’une démarche volontaire de la part de celle-ci ».
Une réaction attendue de la ministre de la Culture
Alors que le sujet est aussi dans les cordes du CSA, le sénateur a interrogé la ministre pour savoir si ces publicités n’étaient pas contraires à la loi du 20 décembre 2016, « et dans l’affirmative quelles mesures elle compte prendre pour faire cesser la diffusion de ces messages publicitaires ».
Si une France Télévisions cherchent à remplir ses caisses par tous les moyens, les interrogations du père de la loi de 2016 sont légitimes. Le champ d’application du texte a été précisé juridiquement par un décret du 22 décembre 2017 venu modifier le cahier des charges de France Télévisions établi en 2009.
Ces restrictions concernent d’une part les services de médias audiovisuels à la demande qu’édite France Télévisions, directement ou à travers des filiales, ceux « qui permettent une nouvelle mise à disposition auprès du public de ses programmes télévisés » et d'une manière plus générale, proposent une offre de contenus de complément.
D’autre part, cela touche aux offres proposées sur les sites qui prolongent, complètent et enrichissent les programmes du groupe.
« Une guérilla d’interprétation » selon André Gattolin
Toute la question est de savoir si un flux YouTube, édité par France Télévision, relève par exemple des SMàD. La question tend vers l’affirmative lorsqu’on se souvient de la décision du CSA mettant en garde la chaîne Les Recettes Pompettes, sur le même service d’hébergement, qualifiée comme tel dans un bruyant communiqué.
Contacté, André Gattolin avoue qu’il se doutait dès l’origine « qu’il y aurait une guérilla d’interprétation » de la part de France Télévisions. Il se souvient très bien du « lobbying interne contre ma loi, notamment lorsque la directrice générale de France Télévisions Publicité s’est permis de critiquer ce texte. Mais depuis quand une telle personne peut-elle remettre en cause les décisions souveraines du Parlement ? ». Il révèle à cette occasion que ces critiques avaient suscité un courrier de la présidente de la commission de la culture, Catherine Morin-Desailly.
Au passage, le même sénateur épingle le CSA. L’article 1er de la loi de 2016 contraint l’autorité indépendante à remettre chaque année au parlement « un rapport évaluant les actions menées par les services de communication audiovisuelle en vue du respect par les émissions publicitaires qui accompagnent les programmes destinés à la jeunesse des objectifs de santé publique et de lutte contre les comportements à risque ».
Le conseil est chargé à cette occasion de formuler « des recommandations pour améliorer l'autorégulation du secteur de la publicité ». Or, le parlementaire n’a jamais eu vent de ce document qui aurait pourtant dû être remis en 2017.
France Télévisions : un sénateur dénonce les pubs sur une chaîne YouTube dédiée aux enfants
-
Des pubs sur la chaîne les Zouzous mais uniquement sur YouTube
-
Une réaction attendue de la ministre de la Culture
-
« Une guérilla d’interprétation » selon André Gattolin
Commentaires (12)
Vous devez être abonné pour pouvoir commenter.
Déjà abonné ? Se connecter
Abonnez-vousLe 29/03/2018 à 17h29
la chaîne YouTube du même nom qui compte 108 069 abonnés
.
Je propose de muter le sieur Gattolin dans la Manche, il pourra y perdre son sang chaud à loisir…
Le 29/03/2018 à 18h57
Les flux en direct commehttps://www.france.tv/france-2/direct.html insèrent une publicité avant le démarrage, et ceci même après 20h.
Donc je ne serais pas surpris que cela soit également le cas pendant la diffusion des programmes destinés aux enfants.
Le 29/03/2018 à 19h10
Le CSA ne sert vraiment à rien décidément. Vivement que l’ARCEP régule les plateformes web. " />
NB: pourtant le CSA avait bien compris ce qu’est youtube.
Le 30/03/2018 à 08h16
108k peut être, mais 10 millions de vue…
Je crois qu’effectivement, il peut etre important de s’y pencher
Le 30/03/2018 à 09h14
Si on considère la pub comme néfaste pour les jeunes enfants (et perso je suis d’accord), alors il faut être cohérent et appliquer l’interdiction partout, même sur internet. Peu importe le nombre de vues.
Le 30/03/2018 à 09h15
France Télévisions a le droit de se financer.
Il faut savoir si on veut de la qualité ou moins de pub.
My 2 cents. " />
Le 30/03/2018 à 09h17
D’accord sur le principe, mais cela a un prix.
Et pour l’instant, les impôts des GAFA sont très en dessous de ce qu’ils devraient être.
Le 30/03/2018 à 09h32
> France Télévisions a le droit de se financer.
France Télévisions n’a aucun “droit”, sauf celui de faire ce qu’on lui demande (= mission de service public).
> Il faut savoir si on veut de la qualité ou moins de pub.
Je veux de la qualité ET moins de pub. Ce ne sont pas des choix antagonistes, ça va même de paire selon moi (cf l’auto-censure vis à vis des annonceurs).
Le financement d’un service public n’est pas simple, je te l’accorde.
Pour tenter une analogie (donc sûrement foireuse), la loi dit que la vente de stupéfiants est interdite en France.
Est-ce que les hôpitaux français pourraient vendre leurs restes d’opiacés sur internet, pour se “financer” ?
Le 30/03/2018 à 10h13
Bravo pour le sous-titre et le choix de capture d’écran :)
Le 30/03/2018 à 10h34
Le 30/03/2018 à 12h57
Je reconnais que ma phrase est un peu excessive. France TV doit appliquer la loi, et respecter sa mission de service publique. Si la loi dit “pas de pub pour les enfants”…
Le 30/03/2018 à 15h06
L’abus d’écrans en général est néfaste pour les jeunes enfants. Je n’ai pas l’impression que combattre les moulins à vents (on parle des publicités sur une chaine Youtube sur des milliers qui ciblent les jeunes enfants) soit une façon pragmatique de s’attaquer au problème. Ça permet à un sénateur de faire le coq devant son électorat, c’est toujours ça de pris.