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À l’Assemblée, nouvelles propositions de « charte du numérique »

Une question de principes

À l’Assemblée, nouvelles propositions de « charte du numérique »

Le 09 juillet 2018 à 09h47

Alors que les débats sur la réforme constitutionnelle reprendront demain à l’Assemblée nationale, la députée Paula Forteza, rejointe par une trentaine de députés LREM, a revu son projet de « charte du numérique ». Sur les autres bancs, les propositions se multiplient.

Cette seconde tentative sera-t-elle plus fructueuse que la précédente ? Lors des débats en commission, fin juin, les rapporteurs s’étaient assez sèchement opposés à l’introduction d’une charte constitutionnelle dédiée aux « droits et libertés numériques » (neutralité du Net, protection des données personnelles, etc.).

« Il faut être extrêmement rigoureux dans ce que nous inscrivons dans ce texte constitutionnel » avait ainsi objecté Yaël Braun-Pivet (LREM), la majorité ne souhaitant visiblement pas que les députés amendent trop largement le texte présenté par le gouvernement.

La présidente de la commission des lois avait surtout jugé « très aventureux » d’adopter une telle charte, « parce que nous n'en mesurons pas aujourd'hui les conséquences, les implications » (voir notre compte rendu).

Début de mobilisation en faveur d’une « charte du numérique »

À l’approche des débats en séance publique, qui débuteront mardi après-midi, le projet porté par Paula Forteza a reçu le soutien appuyé du président de l’Arcep, Sébastien Soriano.

« Une charte des droits et libertés à l’ère numérique procéderait d’un contrat de résistance face à un ordre numérique susceptible de renverser nos libertés », a ainsi fait savoir le régulateur des télécoms, la semaine dernière au travers d’une tribune. À ses yeux, affirmer certains principes au plus haut niveau de la pyramide des normes « assurerait leur protection non pas seulement à l’intérieur de nos frontières, mais aussi à l’extérieur ». Un message relativement clair à l’heure où les États-Unis viennent de renoncer à la neutralité du Net.

Le président de l’Arcep a enfin fait valoir que l’écriture de cette charte « serait l’occasion d’un exercice collectif d’affirmation et d’appropriation des principes qui la composent ».

Au regard des nombreuses propositions de charte récemment déposées par différents députés, les discussions promettent justement d’être nourries.

« Nous avons abouti à un texte solide techniquement », soutient Paula Forteza

Si certains parlementaires ont repris le texte qu’ils avaient proposé en commission, Paula Forteza a retravaillé son projet de charte. Celui-ci contient désormais huit articles, contre sept auparavant :

« Art. 1er. – Toute personne a le droit d’accéder aux réseaux numériques de manière libre, égale et sans discrimination.

Art. 2. – Les réseaux numériques sont développés dans l’intérêt collectif et respectent le principe de neutralité : le trafic y est libre et nul n’est autorisé à y établir des différences de traitement.

Art. 3. – Le numérique facilite la participation de toute personne à la vie publique et à l’expression des idées et des opinions.

Art. 4. – Toute personne a le droit d’accéder aux informations détenues par les autorités publiques et de les réutiliser.

Art. 5. – Toute personne a le droit à la protection des données à caractère personnel qui la concernent et à la maîtrise des usages qui en sont faits.

Art. 6. – L’éducation et la formation au numérique doivent contribuer à l’exercice des droits et devoirs définis par la présente Charte.

Art. 7. – La loi détermine les conditions et les limites d’exercice des droits et obligations définis par la présente Charte.

Art. 8. – La présente Charte inspire l’action européenne et internationale de la France. »

De fait, les thématiques restent les mêmes. Seule la rédaction évolue, afin de prendre en compte les réserves émises en commission. Paula Forteza nous explique en effet avoir « retravaillé le texte avec des constitutionnalistes, des régulateurs, des administrations pour circonscrire les préoccupations des rapporteurs sur les potentiels impacts non maîtrisables du dispositif ».

La principale nouveauté réside dans l’article 7, qui confie au législateur le soin de fixer les « conditions » et « limites d’exercice » de tous les droits et obligations posés par la charte.

« Nous avons abouti à un texte solide techniquement, qui est mûr au niveau de la rédaction » soutient désormais Paula Forteza.

« La décision sera maintenant politique », poursuit l’élue, qui a réuni une trentaine de cosignataires (parmi lesquels Cédric Villani, Matthieu Orphelin et Éric Bothorel) sur son amendement. « Il devrait y avoir une ouverture des rapporteurs sur le sujet du numérique », espère-t-elle également.

De nombreuses propositions de charte

La majorité se sait attendue au tournant. Mis à part Les Républicains, des amendements seront soutenus sur la plupart des bancs de l’Assemblée nationale, de l’extrême gauche à l’extrême droite.

Les députés PS ont repris le texte issu du groupe de travail Assemblée/Sénat sur les « droits et libertés constitutionnels à l'ère numérique » (voir ici). Celui-ci vise notamment à protéger la neutralité des réseaux, la liberté d’expression, l’accès à Internet et aux informations publiques, ainsi que le droit à l’éducation au numérique.

Le groupe communiste a quant à lui ajouté un article à ce même texte pour que toute personne ait « le droit à une alternative aux procédures dématérialisées dans ses relations avec le service public » (voir ici).

Philippe Latombe (Modem) a également repris le texte du groupe de travail sur les « droits et libertés constitutionnels à l'ère numérique », tout en y intégrant quelques modifications rédactionnelles (voir ici).

Le groupe La France Insoumise a redéposé le projet de charte qu’il avait préparé pour les débats en commission (voir ici). Comme nous avons déjà eu l’occasion de l’expliquer, celui-ci est beaucoup plus étendu : protection contre la surveillance des communications électroniques, promotion de la « netiquette » et des logiciels libres, reconnaissance d’un « domaine commun informationnel », etc.

Idem pour la députée Delphine Batho (ex-PS), qui continue de défendre un projet de charte alternatif, orienté tout particulièrement autour des questions de souveraineté (voir ici).

Six députés Rassemblement national (ex-FN) ont déposé un amendement favorable à l’introduction d’une charte. Ceux-ci ne détaillent toutefois pas son contenu.

Afin de mettre davantage de pression sur les parlementaires, l’Internet Society France, qui milite pour un Internet « ouvert et neutre », a lancé une pétition en ligne.

Commentaires (13)

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bien vu, l’article 7. À lui seul, il transforme cette “charte” en une espère ce machin qui pourra éventuellement servir de référence, mais n’aura pas plus de valeur que le papier sur lequel il est écrit…



Exemple : l’article 2 pose la neutralité des réseaux comme un principe. Sauf que l’article 7 autorise la loi à y déroger - bien évidemment, ça ne sera que dans les cas prévus par la loi… Hum…

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Il y a du mieux par rapport aux premières version, mais il y a toujours ce jenesaisquoi qui me dérange : les déclarations/chartes/articles de la constitution sont d’ordinaire là pour déclarer des principes et formuler des droits aux individus. Or, ces projets de charte ont l’air de formuler des descriptions de ce que sont les réseaux de communication électroniques publics à l’instar des institutions de l’Etat, en donnant un rôle défini à la loi vis-à-vis du numérique et en donnant aux réseaux publics des modalités de fonctionnement, auxquelles certes on pourra déroger par la loi mais qui ressemblent à des valeurs morales du numérique dont on a l’air d’y trouver des vertus car elles ressemblent grosso modo à la Déclaration des droits de l’Homme (mais des droits appliqués aux réseaux numériques publics).




     Qu'on inscrive carrément un article consacré en 3 ou 4 lignes à des principes généraux de fonctionnement des réseaux numériques et postaux, mais faire semblant de déterminer un fonctionnement pérenne et précis de ces infrastructures me semble voué à devenir obsolète à la moindre instabilité institutionnelle.
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C’est exactement ce que je me suis dit à la lecture de cet article. En gros, la charte pose de jolis principes auxquels tout le monde va adhérer, et au milieu l’article 7 dit “les principes c’est bien joli, mais les parlementaires restent les chefs pour passer outre”. Donc la charte devient sans intérêt, c’est une charte Coluche :





  • Les hommes naissent libres et égaux en droit…

  • … mais certains sont plus égaux que d’autres



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    (qu’il a lui-même emprunté à Orwell)

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La loi sert à limiter les grands principes pour leur permettre d’être appliqués dans la réalité concrète.



&nbsp;D’après la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, “La Loi est l’expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation.” (extrait art. 6).

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Art. 1er. – Le numérique&nbsp; ne peut blesser un être humain ni, par son inaction, permettre qu’un humain soit blessé.

Art. 2. – Le numérique doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres sont en contradiction avec l’Art. 1er.

Art. 3. – Le numérique doit protéger sa propre existence aussi longtemps qu’une telle protection n’est pas en contradiction avec l’Art. 1er. et/ou l’Art. 2.

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En partant sur ce terrain, il manque un élément qui limite la portée “arbitraire” de la loi, comme le fait l’article 5 de la même déclaration (“La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société […]”).

Dans cette jolie charte, on pose effectivement des grands principes, puis on dit : “mais en fait, la loi décide”. Au final, on a de beaux principes bien cosmétiques, certainement pas “opposables” pour utiliser un terme qui a été à la mode. Bref, un texte d’affichage potiticien pur, qui n’engage à rien du tout, pour dire : “vous voyez, on a été courageux, on l’a fait”.

Non, être courageux, c’est poser de vrais principes (comme “tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits”, ou “l’Etat ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte” - dans ces 2 cas tout est dit un une phrase)

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Ben il y a un bel amendement de Ciotti pour renverser la primauté de la loi et de la constitution… vu le contexte&nbsp; et la compréhension des bienfaits de la consitution de la majorité, c’est foutu de passer.



“Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit, dans les limites du cadre imposé par la loi et la jurisprudence”

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anagrys a écrit :



En partant sur ce terrain, il manque un élément qui limite la portée “arbitraire” de la loi, comme le fait l’article 5 de la même déclaration (“La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société […]”) Dans cette jolie charte, on pose effectivement des grands principes, puis on dit : “mais en fait, la loi décide”. …






  1- l'article 7 de ce projet de loi ne rend pas la loi toute puissante  vis-à-vis des principes de fonctionnement édictés précédemment dans ce projet de charte. Cet article ne devrait même pas être écrit parce qu'il ne fait que  redire un principe de droit qui est que la loi précise les principes de  la Constitution. Cet article ne dit aucunement que "la loi décide" peut déroger à cette charte qui se veut constitutionnelle.         






  Les mots ont un sens : "Art. 7. – La loi détermine les conditions et les limites d’exercice des droits et obligations définis par la présente Charte." La loi ne peut aucunement annuler cette charte ou faire comme si elle n'existait pas. La loi précise les modalités d'application des principes édictés. J'insiste, vous faites fausse route.         






  2- cette charte du numérique (pour laquelle, personnellement, j'ai beaucoup de réserve comme dit dans un de mes précédents commentaires) n'annule pas la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen (sauf s'il est prévu de l'enlever de la Constitution?).         

&nbsp;







anagrys a écrit :



… Au final, on a de beaux principes bien cosmétiques, certainement pas “opposables” pour utiliser un terme qui a été à la mode. Bref, un texte d’affichage potiticien pur, qui n’engage à rien du tout, pour dire : “vous voyez, on a été courageux, on l’a fait”.



  ...








  Si vous saviez le nombre de loi et de réglements qui ne sont pas appliqués dans la réalité, vous comprendriez qu'un texte juridique même écrit et publié s'applique uniquement parce qu'il y a des gens qui forcent son application, que ce soit lors de réclamation amiable, d'action judiciaire, d'action policière (pour ce qui est du domaine du pénal), etc. C'est pas parce que c'est écrit que ce sera appliqué. En Grande-Bretagne, le droit repose essentiellement sur les usages et la coutume (les règles de droits qui ne sont pas écrites) et tout se passe aussi bien qu'en France.        

&nbsp;







anagrys a écrit :






    Non, être courageux, c'est poser de vrais principes (comme "tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits", ou "l'Etat ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte" - dans ces 2 cas tout est dit un une phrase)








   Pour ce qui est de la 1ère citation, il s'agit d'un principe qui, comme tout principe, ne s'applique pas sans des lois : les ordres sociaux (noblesse et clergé) ont été annulés par cette phrase, mais vous admettrez facilement qu'il existe des naissances qui valent mieux que d'autres. C'est d'ailleurs pour cette raison que la théorie marxiste a défini les classes sociales et le conflit qui résulte de leurs intérêts divergents.        






  Pour ce qui est de la 2e citation, il s'agit aucunement d'un principe mais d'une règle juridique qui veut seulement dire que l'État ne fait pas de discrimination entre les différentes confessions religieuses et n'en assure pas le financement. C'est la différence entre un principe et une règle, et c'est souvent l'erreur que font ces différents projets de chartes du numérique.

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anagrys a écrit :



Exemple : l’article 2 pose la neutralité des réseaux comme un principe. Sauf que l’article 7 autorise la loi à y déroger - bien évidemment, ça ne sera que dans les cas prévus par la loi… Hum…







Oui. Un truc tout bête mais en l’état, l’article 2 interdit le traitement des pannes (et des congestions qui peuvent en découler) : un tuyau casse, ça commence à déborder et à saturer de partout, le traitement usuel d’un admin c’est de balancer une partie du trafic pour assurer un minimum de service le temps de la panne.


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La charte veut acter qu’en principe, il n’est pas possible de discriminer ce qui passe sur le réseau.

Il s’agit là d’un principe, les pannes ou la QoS pour optimiser les flux, c’est du cas de force majeure.



Les admins réseaux vont pas aller en tôle parce qu’ils ont mis en place une QoS à cause d’un lien SDSL à 1mbps.



Après, comme indiqué, c’est à la Loi de fixer le côté technique. Celle-ci pourra très bien dire que la discrimination de trafic est autorisée pour un cas de force majeure et interdite à des fins purement commerciales (comme l’exemple habituel du “Machin pourrait privilégier les flux de son offre VOD au détriment Truc, Bidule, ou Chose” ou encore du “On bride Trucupload, payez pour avoir le débit complet”).

Et ça se trouve c’est déjà le cas dans le code des télécoms.

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(stp))) donne-nous tes sources !

(c’est extrait d”‘où) ?

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vizir67 a écrit :



(stp))) donne-nous tes sources !

(c’est extrait d”‘où) ?





C’est juste que ça me faisait penser aux Trois lois de la robotiques.

Même si c’est quand même important comme sujet…


votre avatar

ah, ok ! <img data-src=" />

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