Depuis l’espace, Cheops détecte « un monde extraterrestre extrême » et inhospitalier
Envie d’un bain de chaleur ?
Le 29 septembre 2020 à 12h00
7 min
Sciences et espace
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Cheops n’est pas un chasseur d’exoplanètes, mais un satellite visant à les caractériser. Il a jeté son dévolu sur WASP-189 b et les résultats sont surprenants, aussi bien pour la planète que son étoile avec des températures de respectivement 3 200 et 7 700 °C.
Le satellite Cheops est dans l’espace depuis fin décembre, lancé à bord d’une fusée Soyouz depuis le centre spatial guyanais. D’une masse au décollage de 273 kg – c’est une mission de classe S ou « Small » du programme scientifique de l’Agence spatiale européenne (ESA) – il est désormais à 700 km d’altitude et étudie les exoplanètes. Les opérations scientifiques ont débuté il y a quelques mois déjà et les premiers résultats viennent de tomber.
Cheops a en effet identifié « dans un système planétaire proche l’une des plus chaudes et des plus extrêmes planètes extrasolaires répertoriées à ce jour : WASP‑189 b ». C’est la « toute première » découverte du satellite européen. Les travaux ont été publiés dans la revue scientifique Astronomy & Astrophysics.
Une planète de type « Jupiter chaud » collée à son étoile
Cette exoplanète – hors de notre Système solaire – est de type « Jupiter chaud ». Elle a donc une taille de l’ordre de grandeur de Jupiter et est également une géante gazeuse, mais bien plus proche de son étoile WASP-189 et donc plus chaude.
Comparée à notre Soleil, cette dernière est plus grande et sa température dépasse les 7 700 °C, soit 1 700 de plus que la surface de notre Soleil (qui est à environ 6 000 °C). Cette étoile semble briller d’un « éclat bleu ». De son côté, WASP‑189 b (on identifie les exoplanètes avec un b, c, d… en s’éloignant de l’étoile) est « vingt fois plus proche de son étoile que la Terre ne l’est du Soleil, et effectue sa révolution en seulement 2,7 jours », contre un peu plus de 365 jours pour la planète bleue.
- Le Soleil : élément central et « catalyseur » de la vie
- Jupiter : planète géante dépourvue de surface solide, protectrice du Système solaire
Cette découverte est intéressante pour les scientifiques : « Nous ne connaissons qu’une poignée de planètes autour d’étoiles aussi chaudes, et ce système est de loin le plus brillant », affirme Monika Lendl de l’Université de Genève et auteure principale de l’étude. Mais WASP-189 b est aussi singulière sur un autre point : c’est « la planète de type Jupiter chaud la plus lumineuse que nous pouvons observer alors qu’elle passe devant ou derrière son étoile, ce qui rend ce système tout entier d’autant plus intriguant ».
Une planète à 3 200 °C, sans équivalent dans le Système solaire
Les exoplanètes se situent par définition dans d’autres systèmes solaires/planétaires et galaxies, elles sont donc très loin de nous : on parle de dizaines, centaines, milliers, millions ou milliards d’années-lumière suivant les cas. Pour les caractériser, les scientifiques peuvent donc principalement réaliser deux types de mesures : par occultation quand la planète passe derrière son étoile, ou par transit dans le cas contraire.
Comme la planète WASP‑189 b est très brillante, pendant la phase d’occultation « il y a une baisse perceptible de la lumière en provenance de ce système ». « Cela nous a permis de mesurer la luminosité de la planète et d’en évaluer la température – torride – à 3 200 °C », explique Monika Lendl.
Deux méthodes différentes ont été utilisées par les chercheurs, avec des résultats relativement proches. Pour comparaison, la planète la plus chaude de notre Système solaire est Vénus, avec une moyenne de 470 °C, contre 169 °C pour Mercure, 15 °C pour la Terre et on passe dans le négatif pour les autres.
Pour se rendre compte des phénomènes qui peuvent se produire sur WASP-189 b, l’Agence spatiale européenne dresse un rapide portrait des phénomènes physiques que l’on pourrait trouver sur place : « À de telles températures, même un métal comme le fer fond et se transforme en gaz, ce qui rend cette planète clairement inhabitable ». L’inhospitalière Vénus semblerait presque paisible…
Pendant le transit, les scientifiques peuvent récupérer « beaucoup d’informations, comme la taille, la forme et les caractéristiques orbitales d’une planète ». Dans le cas de notre exoplanète, ils ont ainsi pu estimer que le rayon était environ 1,6 fois celui de Jupiter, soit près de 115 000 km (et donc 230 000 km de diamètre).
Une étoile surprenante, un rapprochement qui questionne
L’équipe de Monika Lendl a aussi pu caractériser son étoile : « Nous avons aussi vu que l’étoile en elle-même est intéressante, elle n’est pas parfaitement ronde, mais plus grande et plus froide à l’équateur qu’aux pôles, ce qui fait que les pôles semblent plus lumineux […] Elle tourne si vite qu’elle est poussée vers l’extérieur à son équateur ! Et comme l’orbite de WASP‑189 b est inclinée, elle ne tourne pas autour de l’équateur, mais passe près des pôles de l’étoile, ce qui ajoute encore à cette asymétrie ».
Cette orbite ajoute au « charme » de l’exoplanète. Pour qu’elle soit possible, il faut en effet que WASP-189 b se soit formée plus vers l’extérieur du système avant d’être poussée à l’intérieur. Deux causes sont envisagées : un « bousculement » de planètes dans le système solaire quand elles étaient en train de se positionner, ou une influence extérieure, comme une autre étoile qui aurait poussé la géante gazeuse vers son étoile.
Après ce premier essai, d’autres publications sont attendues
« Ces premiers résultats de Cheops sont très stimulants : c’est la première preuve définitive que la mission tient ses promesses en termes de précision et de performance », se réjouit Kate Isaak, scientifique de l'ESA en charge du projet. D’autres suivront très certainement.
Pour rappel, le satellite n’est pas un chasseur d’exoplanète comme l’était le télescope spatial Kepler : il va rechercher les transits d’exoplanètes déjà identifiées. Sa mission est alors de mesurer le plus précisément la taille des exoplanètes. Cheops permet aussi d’établir « une première caractérisation de leur atmosphère et déterminer la présence de nuages, et le cas échéant, les propriétés de ceux-ci ».
Cheops prépare aussi le terrain entre les exoplanètes afin « d’identifier des cibles clés pour de futures missions qui sonderont l’atmosphère des exoplanètes ou de chercher de nouvelles planètes et exolunes ». Le but est toujours le même : mieux comprendre les exoplanètes, notre Système solaire et finalement une partie de l’univers dans lequel nous évoluons.
Depuis l’espace, Cheops détecte « un monde extraterrestre extrême » et inhospitalier
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Une planète de type « Jupiter chaud » collée à son étoile
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Une planète à 3 200 °C, sans équivalent dans le Système solaire
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Une étoile surprenante, un rapprochement qui questionne
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Après ce premier essai, d’autres publications sont attendues
Commentaires (22)
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Abonnez-vousLe 29/09/2020 à 12h14
J’aime la précision “Not habitable”.
Le 29/09/2020 à 13h48
+1
pourtant avec une bonne crème solaire ça doit être jouable
Le 29/09/2020 à 14h52
Vu la température, c’est plutôt toi qui finis en crème (en vapeur de crème même ).
Bon, je vous laisse, je vais fumer un clou et après j’ai un bain de diamant liquide qui m’attend…
Le 29/09/2020 à 12h30
La terre aussi il me semble, même si ça ne doit pas être du même ordre de grandeur
Le 29/09/2020 à 13h27
Tout a fait, la terre n’est pas une sphère parfaite mais de pas grand chose, les rayons polaire et équatorial doivent avoir une vingtaine de kilométre de différence si mes souvenirs sont bons. D’ailleurs ce phénoméne est vrai pour toutes sphéres en rotation autour d’un axe, même les trous noirs en théorie.
Par contre reprendre le titre “putaclic” de l’ESA, c’était ptêt pas la peine. Le jour où on découvre un monde qui ne serait pas extraterrestre, ça risquerait de poser de gros problème pour notre monde :)
L’univers entier, sauf notre bonne vieille terre, est extraterrestre par définition. Utilisé ce terme n’est pas anodin dans l’esprit collectif, ça rapporte directement aux petits hommes verts.
Le 29/09/2020 à 14h17
Disons que “Depuis l’espace, l’ESA découvre un monde extrême”, on sait pas des masses de quoi on parle
Le 29/09/2020 à 14h47
Remplacer « extraterrestre » par « extrasolaire » aurait été mieux, je pense.
Le 29/09/2020 à 14h52
Article intéressant. Merci
C’est histoire de dire que l’on peu griller des saucisses sans problème ailleurs et comme on a besoin de place pour les distances barrière on sait ou aller faire le prochain barbecue. :)
Le 29/09/2020 à 19h51
Le décalage vers le vert est un des effets dopant de la recherche. ;-)
Le 30/09/2020 à 22h42
Bon arrêtez avec votre science la. La terre est plate, point barre. On a pas arrêté de le vous le prouver depuis des années.
Le 29/09/2020 à 14h44
Je confirme :
[source]
Par contre, la Terre n’est pas non plus un ellipsoïde, on parle plutôt de géoïde. Entre deux points (pris au pif) de la Terre, le tracé n’est jamais un arc de cercle, il y a des creux et des bosses partout, y compris au niveau des océans (différences de pesanteur).
En général l’image qu’on utilise pour faire comprendre ça aux gens, c’est que la Terre est comme un ballon, à peine plus large que haut, et un peu dégonflé (ce qui induit les creux et les bosses).
Selon l’échelle à laquelle on se place, ça peut être négligeable ou ça peut être déterminant ;)
Le 29/09/2020 à 14h56
« Géoïde », dont le « géo » signifie Terre… On est quand même à la limite de la tautologie, là : « la Terre est en forme de Terre »…
C’est valable pour toutes les planètes rocheuses (et les satellites en équilibre hydrostatique comme la Lune, les satellites galiléens de Jupiter, Titan, Triton, Charon…), ça.
Pour donner une image plus parlante, on parle aussi de forme d’œuf (ovoïde, donc), vu que pour la Terre, l’hémisphère sud est un poil plus aplati que le nord, à cause de la répartition océans-continents.
Le 29/09/2020 à 15h01
C’est une citation
Le 29/09/2020 à 18h41
Ok c’est un gros HS mais je ne sais pas à quoi raccrocher mon commentaire puisque pas un mot sur NXI… Globalement je suis assez déçu par le site alors que j’étais fan. Je trouve qu’il n’y a plus beaucoup d’articles. Rien sur les enchères de la 5G alors que j’attendais au moins une brève compte tenu des enjeux… Personnellement l’espace je m’en fous un peu… Ce sont un peu les raisons pour lesquelles j’ai mis un terme à mon abonnement… À regrets.
Le 29/09/2020 à 18h55
Et ça ?
Personnellement la 5G je m’en fous complètement, alors que l’espace… Ce sont un peu les raisons pour lesquelles je maintiens mon abonnement…
Le 29/09/2020 à 19h23
Je le comprends !
Je préférais PCI, c’est ainsi…
Personnellement je suis plus axé informatique/télécoms, chacun ses goûts 😉
Le 29/09/2020 à 19h44
Informatique, oui, bien sûr, c’est ce qui m’a fait venir ici.
Télécoms, pas trop.
L’astronomie, l’espace, c’est un bonus bien agréable !
Comme quoi NXI est suffisamment varié pour que chacun puisse y trouver son intérêt, non ?
Le 29/09/2020 à 19h56
J’ai pas ma dose
C’est tout ;-)
Le 30/09/2020 à 07h57
Pour la forme de Wasp…b, étant donné la proximité, elle doit être extrêmement étirée avec un gros bourrelet en pointe. Elle doit être synchrone, si elle était solide elle présenterait toujours la même face. Pour une gazeuse, je ne sais pas si cela se passe de la même façon.
Et pour la forme des planètes, elles sont considérées en équilibre hydrostatique dés 500km de diamètres, quand la masse permet la différenciation du noyau et on a la forme (grossière) d’un géoïde, non ?
Ce doit être une étoile jeune pour avoir une teinte encore bleu.
Le 30/09/2020 à 14h37
Pour ma part, c’est plus les articles comme celui-ci qui me permettent de rester sur NXI et de continuer mon abonnement. L’actualité informatique per se ne me passionne plus vraiment.
J’oubliais : il y a aussi les caricatures de Flock le samedi qui valent de payer pour. Avis personnel…
Le 30/09/2020 à 17h56
Moi je trouve ça bien cool les articles sur l’espace. Quant aux enchères 5G, l’article arrivera ptet après, ça ne me dérange pas qu’ils prennent le temps de soigner leur travail.
Le 01/10/2020 à 06h27
Comme je l’ai dit, il y avait un brief le 29 septembre,
puis un nouveau brief le 30 !