ExoMars 2022 : l’ESA dévoile le nouveau calendrier de la mission et explique ses choix
Rendez-vous le 20 septembre 2022
Le 02 octobre 2020 à 10h34
8 min
Sciences et espace
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La mission ExoMars 2022 décollera – si tout se passe comme prévu – le 20 septembre 2022. Le rover se posera le 10 juin 2023 sur la planète. La route est tracée et l’Agence spatiale européenne explique ses choix. Pendant ce temps, les travaux d’intégration se passent et de nouveaux tests sont prévus.
En mars, l’Agence spatiale européenne (ESA) décalait de deux ans la mission ExoMars qui doit partir à la recherche de traces de vie sur Mars. Elle avait déjà été reportée une première fois de 2018 à 2020. La pandémie liée à la Covid-19 n’était pas la seule fautive. Les soucis avec les parachutes de descente n’étaient toujours pas définitivement réglés.
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Or, ils sont d’une importance capitale puisqu’ils serviront à ralentir la chute de la plateforme d’atterrissage Kazachok et du rover Rosalind Franklin. Pour rappel, le vaisseau spatial de la mission ExoMars 2020 comprend le module de transfert (en voyage dans l’espace), le module de descente (chargé de poser en douceur ses passagers sur le sol martien) et enfin la plateforme d’atterrissage sur laquelle se trouve le fameux rover (ou astromobile) de l’ESA.
L’ESA n’a donc pas le droit à l’erreur, sous peine de voir son travail s’écraser comme une crêpe… ce qui était le cas du rover Schiaparelli de la mission ExoMars 2016. L’Agence a ainsi décidé de jouer la carte de la sécurité plutôt que se précipiter.
Une nouvelle date de lancement implique qu’il faut aussi revoir la trajectoire du vaisseau spatial. L’ESA donne son nouveau calendrier et explique ses choix. Ce n’est pas forcément la « route » la plus rapide qui est utilisée, mais celle jugée la plus « sûre ». De plus, la fenêtre de lancement dépend de plusieurs paramètres, dont le type de lanceur et les lois de la physique.
Décollage à partir du 20 septembre… à bord d’une fusée Proton
Le lancement est donc programmé pour le 20 septembre 2022, avec possibilité de le repousser pendant douze jours si besoin selon les conditions météo ou des surprises de dernières minutes. « Des transferts orbitaux efficaces, de bonnes communications et l'absence de grandes tempêtes de poussière dans l'horizon martien font de cette trajectoire la plus rapide et sûre », explique l’ESA.
Le premier point à prendre en considération est le lanceur : une fusée russe Proton dans le cas présent. Elle avait déjà placé la première partie de la mission ExoMars sur sa trajectoire en 2016… non sans certaines frayeurs puisque le lanceur explosait juste après avoir largué sa charge utile. Cet incident n’avait heureusement eu aucune incidence sur le déroulement de la mission.
Francis Rocard, responsable du programme d'exploration du système solaire au CNES, expliquait lors d’une conférence de presse fin 2016 que « les Russes [s’étaient] bien gardés de nous le dire ». Il ajoutait : « ce qui nous fait un peu peur, c’est la partie russe qui doit poser le rover sur Mars ». Malgré tout, aucun changement n’est donc au programme, Proton sera le taxi d’ExoMars 2022.
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Le délicat choix de la trajectoire et du site d’atterrissage
Dans tous les cas, plusieurs trajectoires de transferts sont possibles, mais un des points cruciaux pour les responsables de la mission était de pouvoir communiquer avec le vaisseau spatial juste après son lancement. « Une des alternatives avait une fenêtre de lancement plus grande, mais une plus mauvaise connexion avec le vaisseau spatial pendant les premiers jours. Ce choix était trop risqué », explique Tiago Loureiro, en charge des opérations.
La trajectoire choisie entraine un voyage un peu plus long d’une semaine environ (pas grand-chose sur presque neuf mois de déplacement) et nécessitera plus de manœuvres. Il durera ainsi 264 jours, avec une arrivée prévue sur le sol de la planète rouge le 10 juin 2023, aux alentours de 17h30, heure française.
La météo aussi joue un rôle important, pas uniquement sur Terre. Déjà que sur notre planète il n’est pas évident de la prévoir sur plusieurs jours, alors trois ans en avance sur Mars… Les scientifiques ont néanmoins mis de côté toutes leurs chances. Tout d’abord en choisissant Oxia Planum comme site d’atterrissage. Il est situé dans l’hémisphère nord, tandis que les tempêtes sont « plus susceptibles de se produire au printemps et en été dans l'hémisphère sud ».
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Le rover résistera à certaines tempêtes de sable, mais pas toutes
Une tempête de sable géante comme celle de 2018 n’arrive que tous les 10 ans en moyenne, ExoMars devrait donc être tranquille pendant quelques années (sauf caprice de dame nature). Il y a deux ans, une tempête de sable privait Opportunity de Soleil – donc d’énergie – et le rover ne s’en est jamais remis.
Afin de limiter les risques d’une telle mésaventure, « Rosalind Franklin peut faire face aux tempêtes de poussière localisées pendant quelques jours et aux fines couches de poussière recouvrant ses panneaux solaires », affirme l’ESA. Par contre, « une tempête de poussière sur toute la planète qui recouvre l'atmosphère pendant plusieurs mois entraînerait très probablement la mort du rover », reconnait le scientifique de l’ESA Jorge Vago.
Il faut donc que la mission ExoMars 2022 remplisse l’ensemble de ses objectifs avant que ne survienne une autre tempête. Reculer la date de lancement de deux ans a donc plus de conséquences qu’on pouvait le penser initialement. Pendant ce temps, Mars 2020 de la NASA est en route vers la planète rouge.
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Si tout se passe comme prévu – c’est-à-dire une fois que le rover et la plateforme Kazachok se sont posés –, l’Agence spatiale européenne prendra en charge l’ensemble des opérations pendant quelques jours/semaines. Ensuite, lorsqu’elle sera certaine que la plateforme est capable de fonctionner de manière autonome, elle en transférera le contrôle à Roscosmos.
L’intégration avance bien, de nouveaux tests en préparation
Thales revient de son côté sur les opérations d’intégration de ces dernières semaines : « Nous avons pu assister au mating du module de transfert et de la plateforme d’atterrissage Kazachok. Nous avons également eu la joie d’assister, en direct, à l’intégration des panneaux solaires du rover Rosalind Franklin ».
D’eux dépendra pour rappel la durée de vie de la mission. Ils doivent en effet fournir de l’énergie à l’astromobile, « laquelle va sonder le sol martien à deux mètres de profondeur pour tenter d’y extraire des bactéries, preuves irréfutables d’une potentielle trace de vie sur la planète rouge ».
Il y a quelques jours seulement, l’ensemble des composants de la mission ExoMars 2020 ont quitté Turin pour se rendre à Cannes, à l’exception du rover qui reste sur place le temps des dernières activités d’intégration. Il rejoindra ensuite le reste de la mission.
« Ensemble, ils feront l’objet, dans les prochains mois, d’une série de tests et de mesures pour être fins prêts : mesures de propriété de masse, équilibrage dynamique et tests électromagnétiques ». Dans le même temps, la réplique du rover – baptisé « Earth Twin » – sera transférée d'ici la fin de l'année au Centre de contrôle des opérations (ROCC), au laboratoire conjoint entre l’ASI et Thales Alenia Space à Turin (ALTEC).
Un rôle de doublure : les opérations seront d’abord effectuées sur le rover de test sur Terre, avant d’être envoyées à celui sur Mars. Le but étant de lancer une « simulation » grandeur nature afin de vérifier que tout se passe bien, et d’apporter des correctifs si besoin. En cas de soucis, les scientifiques peuvent également s’en servir pour tester différentes solutions afin de trouver la plus efficace.
ExoMars 2022 : l’ESA dévoile le nouveau calendrier de la mission et explique ses choix
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Décollage à partir du 20 septembre… à bord d’une fusée Proton
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Le délicat choix de la trajectoire et du site d’atterrissage
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Le rover résistera à certaines tempêtes de sable, mais pas toutes
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L’intégration avance bien, de nouveaux tests en préparation
Commentaires (10)
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Abonnez-vousLe 02/10/2020 à 10h53
Je n’arrive pas à savoir si la fusée est déjà partie ou non. La première phrase prête à confusion puisque l’on est déjà début octobre : “La mission ExoMars 2022 décollera – si tout se passe comme prévu – le 20 septembre 2022.”
Le 02/10/2020 à 10h55
On est en octobre, mais encore en 2020, pas en 2022
Le 02/10/2020 à 10h57
OUPS !!!! Désolé pour cette boulette !!
Le 03/10/2020 à 10h01
J’ai mis 2min avant de comprendre mon erreur lorsque j’ai lu la news. Merci, je me sens moins seul grâce à toi
Le 02/10/2020 à 11h02
Une question : la 1ère infographie indique qu’ExoMars 2016, arrivée “at Mars” en octobre 2016, a commencé une mission scientifique en avril 2018. Comment s’explique ce décalage ?
Le 02/10/2020 à 11h36
L’orbiteur est arrivé en octobre 2016, il a livré Schiaparelli (avec le résultat qu’on connaît) puis a commencé à faire un freinage atmosphérique pour diminuer son orbite et atteindre l’emplacement visé. Cette manoeuvre a pris 11 mois pour passer de 98 000 km à 1 050 km, et perdre 3 600km/h dans la foulée. Il a ensuite remonté à 400 km pour enfin atteindre sa zone d’opération en avril 2018.
L’article sur wikipedia montre une animation de la manoeuvre orbitale avec la chronologie.
Le 02/10/2020 à 13h27
Pourquoi passer par une fusée russe ? L’ESA n’a pas une fusée européenne qui puisse faire le travail ?
Le 02/10/2020 à 13h42
Un élément de réponse (en gras) : “Les robots doivent être lancés par des fusées Atlas fournies par la NASA […] en 2011, la NASA subit à la fois à des restrictions budgétaires liées à la crise économique en cours et un énorme dépassement de son projet de télescope spatial James Webb. Pour faire face à ses problèmes de financement, l’agence spatiale américaine se dégage d’abord en partie du programme ExoMars avant d’abandonner complètement sa participation. L’ESA ne peut supporter seule le coût du programme et elle fait appel à l’agence spatiale russe Roscosmos qui vient de subir l’échec de sa sonde spatiale martienne Phobos-Grunt. En mars 2012, l’ESA officialise son partenariat avec Roscosmos. Les termes de l’accord prévoient que l’agence spatiale russe fournit des fusées Proton pour les lancements de 2016 et 2018. Les instruments scientifiques russes remplacent les instruments américains à bord de l’orbiteur ExoMars TGO. Enfin, la Russie fournit le véhicule de rentrée et de descente qui doit amener le rover ExoMars sur le sol martien” (Wikipedia)
Le 02/10/2020 à 13h33
Astromobile ca veut dire un astre qui se déplace tout seul ? :xxx
Plus sérieusement, encore un nouveau mot francisé ?
Le 02/10/2020 à 13h49
Le terme a été adopté en 1995 pour désigner un véhicule opérant à la surface d’un astre autre que la Terre.