Lanceurs d’alertes : une association attaquée par le gouvernement US
Plus efficace encore que les analystes de la NSA
Le 11 juin 2014 à 06h20
5 min
Internet
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L’association américaine « Project On Government Oversight » (POGO) est actuellement sous le coup d’une assignation lui réclamant des données qui lui ont été confiées. Elle compte cependant aller si nécessaire devant les tribunaux car elle héberge de nombreuses informations offertes par les lanceurs d’alertes.
L'association qui vérifie la bonne marche des institutions américaines
L’association POGO, créée en 1981, s’est fixée pour mission de recenser les problèmes de fonctionnement des différentes administrations américaines, y compris les cas de corruption. Les agences de sécurité telles que la NSA et la CIA, le Congrès américain et même les prestataires privés travaillant pour le gouvernement font partie des acteurs surveillés. L’association encourage également les lanceurs d’alertes à se confier en garantissant la sécurité des propos ainsi recueillis, notamment via un portail entièrement chiffré.
Il y a bientôt deux semaines, un scandale a éclaté aux États-Unis. On apprenait ainsi que le Department of Veterans Affairs avait manipulé, via les hôpitaux lui étant raccordés, les listes d’attentes des soldats vétérans afin de masquer un important problème de logistique et de retard dans l’attribution des soins. Alors même que le pays tente de faire passer sa demande de budget 2015 pour la Défense, fixé à 495,6 milliards de dollars, l’administration des vétérans est gérée par une informatique datant du début des années 90.
Peu de temps après que ce scandale a éclaté, le portail chiffré de POGO entre en activité. L’association commence alors à recevoir des informations précises sur la manière dont le Department of Veterans Affairs est géré. Car non seulement cette administration est sévèrement critiquée pour son organisation, mais elle se retrouve accusée du même coup d’avoir voulu masquer les faits.
Une procédure administrative pour obtenir les informations
Mais le gouvernement américain a suivi l’épisode de près et est devenu particulièrement sensible depuis les affaires Manning et Snowden sur le sujet des lanceurs d’alertes. Aussi compte-t-il bien récupérer les informations fournies à l’association POGO. Et pour cela, il utilise une voie potentiellement bien plus efficace que les techniques employées par la NSA pour siphonner les conversations téléphoniques ou ouvrir des portes dérobées dans des réseaux stratégiques : l’assignation.
L’association POGO est donc assignée et il lui est réclamé de fournir toutes les informations recueillies jusqu’ici. Ce type de requête échappe aux conditions posées par le Quatrième amendement de la Constitution américaine, qui réclame qu’un mandat délivré par un juge soit utilisé pour obtenir des informations personnelles. Si l’assignation devait fonctionner, l’association serait légalement dans l’obligation de remettre ses données.
Une conséquence d’autant plus problématique que les « boites de dépôt » se multiplient. Il s’agit du nom donné à ces portails chiffrés sur lesquels il est possible de se connecter pour donner des informations. Si possible d’ailleurs en utilisant Tor, comme le recommande POGO. Parmi les boites importantes, on notera en particulier celles ouvertes par The Guardian et The Washington Post le 5 juin, deux journaux connus pour être en possession d’au moins une partie des documents dérobés par Edward Snowden.
L'association prête à aller devant les tribunaux si nécessaire
Mais l’association ne compte pas baisser les bras. Dans sa réponse officielle, elle annonce très clairement la couleur : « Il est dans l’intérêt du public que POGO protège ses sources, ses méthodes, et les informations impliquant tout sujet en relation avec une enquête de l’association ou ses sources, ce qui inclut notre enquête sur le Department of Veterans Affairs. L’assignation administrative envoyée par le gouvernement enfreindrait la liberté d’expression de POGO, la liberté de la presse et la liberté d’association puisqu’elles s’appuient sur tous les lanceurs d’alertes et sources qui sont venus à POGO pour dénoncer la mauvaise administration des polices, programmes, dépenses et contrats fédéraux. De plus, se conformer à cette demande saperait et nuirait à la raison même pour laquelle POGO a été fondée ».
Des propos appuyés par des communications récentes avec plusieurs médias. Le porte-parole de POGO, Joe Newman, n’a pas mâché ses mots sur FoxNews : « Ils se mettent le doigt dans l’œil. Ce n’est pas quelque chose que nous allons faire. Nous n’avons jamais révélé le nom d’un lanceur d’alertes et nous ne le ferons pas davantage cette fois-ci. Nous avons déjà été assignés par le passé ». Chez Ars Technica, il complète : « Nous sommes clairement préparés à aller devant les tribunaux. Nous sommes clairement préparés à aller en prison pour empêcher que la moindre information soit diffusée ».
Lanceurs d’alertes : une association attaquée par le gouvernement US
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L'association qui vérifie la bonne marche des institutions américaines
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Une procédure administrative pour obtenir les informations
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L'association prête à aller devant les tribunaux si nécessaire
Commentaires (17)
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Abonnez-vousLe 11/06/2014 à 06h47
Et on les retrouva suicidés de trois balles dans le dos.
Le 11/06/2014 à 06h56
Le 11/06/2014 à 07h02
Le 11/06/2014 à 07h08
La NSA (ou d’autres hackers / d’autres agences) pourrait très bien s’occuper de récuperer les infos qu’ils veulent, tout en continuant sur le terrain de la justice, histoire de noyer le poisson …" />
Le 11/06/2014 à 07h20
Pas facile un travail pareil dans une oligarchie.
Je leur souhaite beaucoup de courage ainsi qu’à ceux faisant de même dans nos pays ou les choses sont tout autant difficile vu que nous ne sommes nous non plus en démocratie.
Le 11/06/2014 à 07h29
Le 11/06/2014 à 07h34
Le 11/06/2014 à 07h37
Le 11/06/2014 à 07h55
Le 11/06/2014 à 08h00
Le 11/06/2014 à 08h02
Encore des bobos du Tea Party qui veulent créer l’ambiguité sur la probité et l’honnêteté de l’administration Obama " />
Le 11/06/2014 à 08h03
Le 11/06/2014 à 08h11
Le 11/06/2014 à 08h18
Le 11/06/2014 à 10h13
Nous avons déjà été assignés par le passé.
Vous avez gagné ?
Nous sommes clairement préparés à aller en prison pour empêcher que la moindre information soit diffusée.
non ? " />
Le 11/06/2014 à 12h02
Ces démocraties sont en effet plutôt des oligarchies, comme en Russie.
Démocraties corrompues et dominées par l’argent, faisant leurs coups en douce, et promptes à envoyer les soldats de la plèbe se faire tuer sur des plages de débarquement, en Irak, ou ailleurs.
Il est à noter qu’une partie des Américains du Nord ont malgré tout conscience de tout cela.
Et on nous dit que la lutte des classes est morte, que la démocratie capitaliste est la seule démocratie possible, voici la preuve qu’à présent une oligarchie tente par tous les moyens de conserver ses privilèges, y compris en tentant de museler les citoyens prétendus libres.
Le 11/06/2014 à 15h19
Lanceurs d’alertes, lanceurs de chats…
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